(Intervention de Txetx Etcheverry, représentant de Bizi à la soirée organisée par le Pacte Finance Climat à Jussieu, ce mardi 19 février)
Je viens de Bayonne en Pays Basque et parle ici au nom de Bizi, l’association qui a lancé la dynamique citoyenne Alternatiba.
Greta Thumberg, cette lycéenne dont l’engagement vient d’être salué ici même par Alain Juppé et dont l’action fait tâche d’huile à travers le monde -le vendredi 15 mars, il y aura une grève lycéenne et étudiante pour le climat dans de multiples pays du monde, dont la France et le Pays Basque- s’est rendue à Davos. Elle y est allé, en train, notamment dans l’intention d’interpeller les dirigeants des compagnies pétrolières et gazières, et leur dire qu’ils sont en train de commettre un véritable crime contre l’Humanité.
Car c’est bien de cela qu’il s’agit, et ce n’est rien de moins -un crime contre l’Humanité- que nous reprocheront les générations de 2050, quand il sera désormais trop tard pour éviter le pire.
Ce ne sont pas seulement les climato-sceptiques qui seront ainsi jugés. Il y aura également tous ceux qui savaient, qui disaient agir, mais qui se seront contentés de mesurettes, de changements marginaux, de politiques sans ambition et sans moyens face au péril climatique.
Le Pacte Finance Climat s’inscrit lui dans une logique de responsabilité face à l’ampleur et à l’urgence du défi, et veut trouver les moyens de financer massivement, dès maintenant, la grande bifurcation indispensable.
L’objectif de ce Pacte est de mettre la création monétaire de la BCE au service de la transition énergétique et d’instaurer un impôt européen sur les bénéfices, de l’ordre de 5 % et hors PME et artisans, pour dégager un vrai budget pour la lutte contre le dérèglement climatique en Europe, en Afrique et sur tout le pourtour Méditerranéen.
Bien sûr, le Pacte Finance Climat n’a pas la prétention de régler à lui seul tout le problème.
Par exemple, il ne suffit pas aujourd’hui de trouver les financements pour les investissements verts. Encore faut-il stopper et ré-orienter ceux qui continuent de financer les énergies fossiles, qui continuent de financer le réchauffement climatique.
Et nous savons bien également que pour arriver ne serait-ce qu’à respecter les objectifs de l’Accord de Paris, à savoir contenir le réchauffement climatique en dessous de +2°C, voire +1,5°C par rapport à l’ère pré-industrielle, il faudra d’autres décisions que celles permettant de financer la transition. Je vous renvoie ici à l’étude récemment publiée par le cabinet B&L évolution qui décrit une trajectoire française compatible avec les 1,5°C et qui montre de manière particulièrement saisissante l’ampleur et la rapidité des mesures à prendre.
Mais au moins, avec le Pacte Finance Climat, on commence à prendre la mesure, la dimension de ce qu’il y a à faire. On commence à parler publiquement des bons ordres de grandeur.
Un projet de Traité européen devant permettre l’application du Pacte Finance Climat doit nous être proposé ce soir même.
Au moment où une importante fronde sociale a été provoquée par un détournement de la taxe carbone, appliquée sans mécanismes de solidarité ou de compensation pour les moins riches, et dont les recettes ne finançaient pas, pour leur plus grande partie, la transition écologique ; je voudrais attirer ici l’attention de toutes et de tous sur la nécessité d’inscrire clairement dans ce projet de Traité deux choses essentielles :
1) Une liste précise des investissements à exclure des financements possibles, concernant notamment les énergies fossiles, le nucléaire, bref les énergies non renouvelables et dangereuses ; et bien évidemment la géo-ingénierie qui viendrait rajouter des problèmes et des risques à une situation déjà presque hors de contrôle ;
2) Un fléchage rigoureux et hiérarchisé des recettes vers un triptyque Sobriété-Efficience-Renouvelables amplement documenté par des scénarios tels celui de NégaWatt, avec en priorité absolue tous les investissements permettant de réduire drastiquement les consommations d’énergie. Pour ne prendre qu’un seul exemple, nous ne réglerons absolument pas le dérèglement climatique et l’extinction de la bio-diversité en mettant 34 millions de voitures électriques en lieu et place du parc automobile français actuel. Ce sont le système et les besoins mêmes des transports et de la mobilité qu’il faut aujourd’hui revoir, réorganiser et réduire.
Bref, nous avons encore du travail devant nous, mais il ne pouvait en être autrement au vu du caractère historique du défi, des risques et des opportunités auxquelles nous sommes confrontés. L’optimisme de la volonté guide nos pas, sachant que là où croît le péril croît également ce qui sauve.