3 – Pourquoi et comment opter pour une banque éthique?

3 – Pourquoi et comment opter pour une banque éthique?

Les investissements écologiquement et socialement irresponsables
de certaines banques et les alternatives possibles

Considérations préalables :

Une banque n’est pas simplement une grosse tirelire qui conserverait votre argent et vous le restituerait quand vous en auriez besoin, en vous fournissant des moyens de payement (chéquier, carte) contre le prélèvement de commissions (plus ou moins élevées). Les profits des banques viennent certes des agios, des commissions perçues sur les services fournis, des intérêts  prélevés sur les prêts ; bref d’ activités financières qui relèvent de ce qu’on peut appeler « la banque de détail ». Celles-ci concernent la clientèle des particuliers  et des petites entreprises. C’est l’activité à laquelle se cantonne la NEF dont nous reparlerons plus loin.
Mais, et certaines banques le font plus que les autres, les profits peuvent venir de financements et d’investissements qui visent de grandes entreprises et de la gestion d’actifs provenant de la clientèle aisée et des investisseurs. « Quand vous déposez votre argent à la banque, il est entreposé avec l’argent de tous les autres clients. Les banques utilisent cet argent en le réinjectant dans l’économie pour faire des prêts, financer les activités des entreprises et des particuliers, etc. Elles sélectionnent les projets qu’elles financent en fonction de leur objectif de rentabilité et de leurs obligations de sécurité. »
Pour plus de précisions : (Environnement : Comment choisir ma banque ? Guide Eco-Citoyen 2008-2009 des Amis de la Terre – www.amisdelaterre.org )

« Les banques sont devenues incontournables dans l’économie française : Plus de 40 millions d’opérations de

paiement par jour en France ! Taux de bancarisation des ménages français : 99%, le plus élevé des grands

pays européens. Une obligation légale : les prestations sociales (allocations familiales, RMI, sécurité sociale, etc.) ne peuvent être perçues que sur un compte bancaire ou un livret A.

Les banques installées en France gèrent un actif total de 5 400 milliards d’euros, soit 3 fois le Produit Intérieur Brut (PIB) de la France. »

« Dans l’activité de banque de financement et d’investissement figurent les grands projets internationaux, souvent très controversés. Trois banques françaises, très puissantes à l’international, sont actives dans ce secteur : BNP Paribas, Société Générale, Crédit Agricole et plus récemment Natixis (filiale de Banque Populaire-Caisse d’Epargne). »

Banque

1) Que font les banques de notre argent?

Un exemple d’investissement catastrophique : Les sables bitumineux

Les Amis de la Terre et cinq autres ONG du réseau « Banktrack » ont mis en ligne fin juin 2009 le site Internet « secretsbancaires.fr ». Objectif : dévoiler au grand public les investissements de 13 grandes banques européennes dans des projets controversés.

Prenons un exemple : L’exploitation des sables bitumineux canadiens pour extraire du  pétrole est une   catastrophe environnementale puisqu’il faut environ quatre tonnes de sables bitumineux pour fabriquer un baril de pétrole de synthèse. Greenpeace demande aux gouvernements et aux compagnies pétrolières de cesser le déploiement du pétrole le plus sale du monde : Lacs toxiques, camions géants énergivores, rivière transformée en égout industriel, forêts rasées … C’est que le bitume, englué dans la glaise et le sable sous les forêts du nord de l’Alberta, ne se donne pas, il faut aller le chercher au prix de techniques coûteuses, dangereuses pour la santé des Premières Nations vivants sur ces territoires. Ce pétrole est bien le plus « sale » au monde.

En outre les sables bitumineux engendrent cinq fois plus de gaz à effet de serre que le pétrole ordinaire parce que les techniques d’extraction employées nécessitent de grandes quantités d’énergie. Une production colossale, rendue possible en partie grâce aux 161 330 000 dollars (environ 114 745 000 euros) émis par les trois banques françaises dont les investissements à l’étranger sont les plus controversés (BNP Paribas, Société Générale, Crédit Agricole),  sous la forme de prêts, d’obligation ou d’actions. (1)

On citer bien d’autres cas de projets catastrophiques pour l’environnement et pour les populations concernées : Les mines Freeport Mac MoRan en Indonésie (or et cuivre) qui rejettent chaque jour 230 000 tonnes de déchets pollués dans la rivière voisine (sans compter la féroce répression des opposants), les mines de Vedanta Ressources en Inde (bauxite) qui rejettent des déchets toxiques  et provoquent le déplacement illégal des populations indigènes ou les mines de charbons des Appalaches (voir film de Hulot), une centrale nucléaire à la technologie obsolète etc. etc.
Pour en savoir plus : http://www.secretsbancaires.fr ou http://www.financeresponsable.org

2) Toutes dans le même sac?


Non. C’est ce que prouve l’analyse des Amis de la Terre qui a porté sur 9 banques françaises : Les sept plus grands réseaux bancaires français plus le Crédit Coopératif, banque de référence de l’économie sociale et la Nef, coopérative de finances solidaires.

Certaines activités, comme la Banque de Financement et d’Investisement (BFI) à l’international, concentrent les impacts environnementaux et sociaux les plus importants. Les Amis de la Terre se sont basés sur l’expertise du réseau international d’ONG BankTrack, dont ils sont membres, pour analyser les différentes activités des grandes banques françaises. Ces analyses ont permis de dégager trois ensembles de banques distincts en fonction des risques sociaux et environnementaux induits par leurs activités : impacts positifs / risques faibles à modérés / risques maximum. Ce qui donne le tableau suivant :

3) Peut-on lutter contre de telles puissances?

Ce n’est pas facile, certes, mais… « 29 janvier 2010 – Les Amis de la Terre se félicitent du retrait complet de BNP Paribas dans le projet controversé de centrale nucléaire de Belene, en Bulgarie, en pleine zone sismique. Après avoir financé les études préliminaires et le début des travaux de la centrale, et avoir tenté de coordonner l’ensemble du financement, c’est la fin d’un combat qui opposait BNP Paribas aux Amis de la Terre depuis 2007. BNP Paribas doit en tirer les conclusions et refuser tout mandat, quel qu’il soit, dans ce type de projet nucléaire controversé. »
« Malgré toutes nos mises en garde, BNP Paribas avait accordé un prêt de 250 millions d’euros à NEK au printemps 2007. Nous avons dû manifester partout en France et en Europe et envoyer plus de 5 000 courriels pour que BNP Paribas daigne nous recevoir. L’affirmation de BNP Paribas, qui prétendait alors que ce prêt ne servirait que pour les études préliminaires et non la construction, s’est en par la suite révélée fausse ! », rappelle Yann Louvel, chargé de campagne Finance privée aux Amis de la Terre.
« Cette tendance de BNP Paribas à se retrouver impliqué plusieurs fois dans le même projet scandaleux, ou à poursuivre le financement de projets notoirement controversés comme le projet pétrolier et gazier de Sakhaline II, en Russie, est proprement sidérante » dénonce Yann Louvel. Il conclut : « BNP Paribas doit tirer toutes les leçons de cette échec et cesser définitivement de s’impliquer dans ce type de projet nucléaire controversé, que ce soit en finançant directement le projet, en le conseillant, ou en investissant dans les entreprises qui le réalisent ».

4) Et moi, qu’y puis-je?

N’oublions pas qu’il s’agit de notre argent : il est légitime de vouloir savoir comment votre banque l’utilise. Les banques sont encore très opaques. Les Amis de le Terre nous invitent à interpeller notre établissement bancaire pour obtenir des informations sur ses pratiques et faire pression pour qu’il évolue. « Plus leurs clients se manifesteront, plus les banques seront contraintes d’améliorer leurs pratiques. Dans ce domaine comme dans les autres, on peut faire jouer la concurrence : toutes les banques n’ont pas les mêmes pratiques et ne financent pas les mêmes projets. Certaines s’impliquent plus que d’autres pour financer les énergies renouvelables ou lutter contre les destructions de l’environnement. » Il convient de faire savoir à la banque que vous la quittez et pourquoi. Ce qui peut ternir l’image de marque de l’établissement ne leur est pas indifférent.

Mais les réponses qui nous seront apportées seront probablement peu satisfaisantes. Une action de BIZI! A entrainé l’envoi d’une note interne au sein du Crédit Agricole pour améliorer la communication en direction de la clientèle. On nous dira par exemple qu’un effort considérable en faveur de l’environnement a été réalisé en diminuant le gaspillage du papier. Mais ces mesures, certes non négligeables, et qui vont dans le sens du « développement durable » (ou de la durabilité du développement), ne répondent pas aux questions fondamentales que nous posons en ce qui concerne les investissements écologiquement et socialement nuisibles.

Les citoyens-consommateurs recherchant notamment la transparence dans l’utilisation de leur épargne voudront. diriger leurs choix d’investissements en fonction de critères éthiques. Les placements solidaires peuvent répondre à ces attentes car, soit une partie de l’épargne est investie dans des activités solidaires, soit une partie des

bénéfices annuels du produit d’épargne est reversée à une association choisie. Un des buts est de financer des projets alternatifs, non finançables dans les systèmes classiques.
La France est aujourd’hui très en retard par rapport à de nombreux pays d’Europe. Aux Pays-Bas (4 fois moins peuplés que la France), la banque éthique Triodos gère vingt fois plus de fonds que la Nef en France.

L’association Finansol est le collectif français qui réunit la plupart des acteurs du secteur. Un label Finansol est attribué aux placements solidaires ayant prouvé leur conformité aux critères de transparence et de solidarité.

5) Une finance éthique, est-ce possible?

OUI. La Nef est une coopérative de finances solidaires. Elle s’est donnée pour mission d’utiliser l’épargne citoyenne qui lui est confiée pour financer exclusivement des projets dans les domaines environnementaux, sociaux et culturels. Ce positionnement en fait donc un acteur financier de choix. Ses activités se déroulent en outre dans la transparence totale : la Nef est en effet le seul acteur financier français à publier chaque année l’intégralité des projets qu’elle finance en incluant le montant du prêt octroyé et la description des activités financées. La Nef

a lancé un projet visant à devenir une banque éthique européenne avec plusieurs partenaires.

Pour changer de banque ce n’est pas si compliqué et le conseiller financier de votre nouvelle banque vous facilitera les démarches. Depuis fin 2009, toutes les banques françaises doivent en effet proposer un service d’aide à la mobilité bancaire à leurs nouveaux clients. Si vous voulez en savoir plus, consultez le « Guide de la mobilité bancaire » édité par la Fédération Bancaire Française. Ce guide est téléchargeable sur : http://www.fbf.fr/
(Aller dans l’onglet « mobilité et transparence », et vous trouverez à la date du 20/11/09 le fameux mini guide de la mobilité mis à jour en novembre 2009).

En gros il convient de :

1 Commencez par ouvrir votre compte dans la banque que vous avez choisie ;

2 Transférez sur votre nouveau compte tous les mouvements automatiques :

Prélèvements, ordres de virements permanents ;

3 Restituez vos chéquier et carte bleue à la banque que vous quittez ;

4 Assurez-vous que tous les chèques que vous avez émis au cours des derniers

mois ont été débités du compte que vous voulez fermer ;

5 Demandez la clôture de l’ancien compte par lettre quand tout est réglé en indiquant

les raisons qui ont motivé votre décision et envoyez-en une copie aux Amis de la

Terre qui la transmettront à la direction de votre ancienne banque.

(1) Source : (http://www.geo.fr/environnement/actualite-durable/banque-enviremment-pollution-projet-45765)