Lettre ouverte aux élu·es des 9 communes titulaires de contrat de mobilier urbain, envoyée lundi 17 février 2025 par le collectif Stop pub Pays basque Adour. Nous vous encourageons à nous aider en interpellant le maire de votre commune pour lui demander de se positionner sur ce règlement qui nous impactera de nombreuses années.
Mmes et MM les élu·es d’Anglet, Bayonne, Biarritz, Cambo-les-bains, Ciboure, Hendaye, St-Jean-de-Luz, St-Pée-sur-Nivelle et Urrugne,
Le règlement local de publicité intercommunal Pays Basque (RLPi) est actuellement en cours d’élaboration. Il va définir les zones et règles d’autorisation et d’interdiction qui s’appliqueront pour la publicité extérieure dans les 158 communes de la communauté d’agglomération (CAPB). Le RLPi sera arrêté par un vote de la CAPB au Conseil communautaire du 21 juin 2025.
Il y a débat entre les communes du territoire sur le niveau de protection que doit revêtir le règlement. Alors qu’a été plusieurs fois affirmée politiquement la volonté de porter un règlement fort et ambitieux, nous avons appris lors des temps de concertation avec la CAPB que votre commune faisait partie des 9 villes titulaires de contrats de mobilier urbain qui défendraient une version du règlement plus permissif.
Concernant la zone “Patrimoine naturel/architectural”, zone la plus protectrice1 du règlement constituée de secteurs normalement protégés de la publicité par le Code de l’environnement2, vous pousseriez pour réintroduire par dérogation de la publicité sur mobilier urbain, y compris de la publicité numérique ! Cette option serait en totale contradiction avec l’objectif du RLPi d’ “identifier les espaces à valeur paysagère afin de les préserver des logiques d’implantation publicitaire”.
Vous soutiendriez également l’existence d’une zone “Axes structurants” très peu protectrice le long des voies très fréquentées. Si nous voyons bien l’intérêt qu’une telle zone pourrait représenter pour les afficheurs, elle ne répond à aucune logique paysagère. Plus grave encore, elle surexposerait les nombreuses personnes habitant le long de ces axes, bafouant un autre objectif du RLPi de “garantir une égalité de traitement de tous les habitants du territoire”.
Ce même principe d‘égalité entre habitants se verrait également piétiné par votre support à une règle autorisant des panneaux de publicité murale de plus de 10 m² dans les zones “Habitat” des 27 communes de la côte de l’aire urbaine de Bayonne alors que seules des publicités murales de 4,50 m² maximum seraient permises pour les zones “Habitat” des autres communes du territoire.
De façon générale, votre commune souhaiterait qu’aucune zone ne soit préservée de la publicité lumineuse, ni même de la publicité numérique ! Et vous soutiendriez une extinction des enseignes extérieures ainsi que des publicités et enseignes numériques derrière vitrine sur des plages plus restreintes qu’une extinction dès la fermeture des établissements.
On peine à comprendre comment de telles règles serviraient d’exemple à la population et contribueraient à prendre part à la réalisation du Plan Climat qui vise à faire du Pays Basque un territoire sobre énergétiquement (réduction de la consommation énergétique de 16 % à l’horizon 2030 et de 49 % à l’horizon 2050). Objectif pourtant réaffirmé lors de la délibération des orientations générales du RLPi…
Les messages véhiculés par la publicité vont le plus souvent à l’encontre des politiques publiques de la CAPB. L’atteinte des objectifs de baisse de consommation d’énergie, d’émission de gaz à effet de serre et de polluants de l’air du Plan Climat est très largement conditionnée à des changements de comportements qui sont au contraire largement entretenus et encouragés par la publicité.
En matière de mobilités, les publicités de SUV ou de week-end en avion ne contribuent pas vraiment à l’objectif commun avec le Plan de mobilité de “Sensibiliser les usagers aux enjeux de la mobilité, à la nécessité de changer de modèle de mobilité”. L’explosion de l’usage de la voiture sur le territoire ces dernières années alors qu’une baisse importante est visée est illustrative des effets contraires de ces messages.
Les fréquentes incitations publicitaires à consommer de la malbouffe des fast foods ou des produits ultra transformés s’accommodent mal avec l’objectif d’Agir sur les comportements alimentaires du Projet alimentaire territorial et pour cela d’ “Informer, sensibiliser, former”. Engendrant des troubles de l’alimentation (anorexie, boulimie), différentes maladies et problèmes de santé publique (obésité, diabète, etc.), elles ne s’accordent pas plus avec l’axe 1 du Contrat Local de Santé Agir pour des comportements favorables à la santé.
La publicité pousse à produire plus, consommer plus et jeter plus, quand Bil Ta Garbi s’engage pour le zéro déchet et l’économie circulaire. L’agglomération doit porter un projet cohérent et au service du territoire.
Si le RLPi ne peut pas intervenir sur le contenu des publicités, il peut, en choisissant des zones vraiment protectrices et des règles réellement ambitieuses, limiter fortement le nombre et le type de publicités. Il protégerait ainsi de fait la population de l’exposition à des messages nocifs. Or, si le diagnostic du RLPi signale 380 publicités sur domaine privé, il y a a minima 1211 publicités sur mobilier urbain3, soit plus de trois fois plus !
Un règlement protecteur de la population n’est donc pas compatible avec une autorisation systématique et dérogatoire de la publicité sur mobilier urbain, telle que portée par votre commune. Le fait que les communes aient le contrôle du mobilier urbain n’est pas plus une garantie comme le montre le contre-exemple de la commune de Saint-Pée-sur-Nivelle, signant un nouveau contrat de 12 ans en pleine concertation du RLPi et passant de 22 mobiliers urbains avec publicité (dans l’ancien contrat) à 284.
Nous avons conscience des implications et des engagements financiers qui vous lient contractuellement. Pour autant, il ne nous paraîtrait pas acceptable que ces contrats soient pris comme références pour fixer un cadre laxiste des règles et zones pour l’ensemble du territoire. C’est pourquoi, afin de vous positionner en cohérence avec les objectifs du RLPi et en concordance avec les politiques publiques d’intérêt général, nous vous proposons d‘inverser la logique en faisant de la protection la règle et de la dérogation l’exception.
Suite à notre demande et conformément à la loi, vous nous avez communiqué les principales pièces de votre contrat que nous avons transmis à la CAPB, à l’exception de Cambo-les-bains, et ce en dépit d’un avis favorable de la CADA5. L’analyse des contrats permettra de déterminer concrètement les options qui vous sont offertes. Pour les situations où les clauses contractuelles seront trop pénalisantes, la CAPB nous a confirmé qu’il était possible de maintenir la règle donnée tout en introduisant nommément comme exception la commune concernée jusqu’à l’expiration de son contrat (à l’instar des articles P3.8.1 et P3.8.2 du RLP de Paris).
Les communes ont une place importante prévue dans le processus de concertation du RLPi Pays Basque et nous ne savons pas quel a été le niveau de discussion au sein de votre équipe municipale. C’est pourquoi, à la lumière des éléments présentés, nous vous invitons à prendre un temps d’échange au sein de votre Conseil municipal pour définir votre positionnement au regard :
- d’une zone “Patrimoine naturel/architectural” intégralement protectrice contre la publicité (y compris celle sur mobilier urbain) et d’un règlement qui ne soit pas moins protecteur que le Code de l’environnement,
- de la garantie d’une égalité de traitement de tou·te·s les habitant·es du territoire, c’est à dire pour un Règlement sans zone “Axes structurants” et une même limitation des publicités murales à 4,5 m² dans les zones “Habitat”,
- de l’interdiction de la publicité numérique dans toutes les zones et de la publicité lumineuse dans les zones “Habitat”,
- d’une extinction des enseignes et publicités numériques derrière vitrine dès la fermeture des établissements.
Nous saluons les communes et élu·es qui ont déjà porté ces mesures protectrices du cadre de vie de leurs concitoyen·nes et appelons les communes qui ne l’ont pas encore fait à prendre part à la concertation et à transmettre leur position au comité de pilotage.
Nous nous tenons à disposition pour échanger sur les problématiques ou réflexions en cours dans votre commune.
Confiant·es dans votre cohérence, nous vous prions d’agréer nos sincères salutations.
Le collectif Stop pub Pays Basque Adour
- Elise Ayrault, Résistance à l’Agression Publicitaire
- Gérard Campagne, Paysages de France
- Lilas Dinclaux, Bizi!
- Victor Pachon, Collectif des Associations de Défense de l’Environnement
- L’agglomération propose un découpage simple en quatre zones correspondant à des ambiances paysagères spécifiques en agglomération. Des règles sont attribuées à chaque zone. De la plus protectrice à la plus permissive : zone “Patrimoine naturel/architectural” ; zone “Habitat” ; zone “Axes structurants” ; zone “commerciale et d’activité”. ↩︎
- Périmètres délimités des abords d’un monument historique (PDA), sites patrimoniaux remarquables (SPR), sites inscrits, zones Natura 2000 ↩︎
- Les abris voyageurs comptant généralement 2 publicités ; nous n’avons pas le décompte précis des abris voyageurs du Tram’ Bus qui contiennent 3 ou 4 publicités, nous avons donc compté a minima 2 publicités ↩︎
- Voir notre article à ce sujet : https://bizimugi.eu/bizi-condamne-un-panneau-publicitaire-illegal-et-denonce-le-nouveau-contrat-publicitaire-de-saint-pee-sur-nivelle ↩︎
- Commission d’accès aux documents administratifs ↩︎