Articles du Vendredi : Sélection du 16 février 2018

La fonte du pergisol arctique libère du mercure

Claude-Marie Vadrot
www.politis.fr/articles/2018/02/la-fonte-du-pergisol-arctique-libere-du-mercure-38355

La Désoxygénation de l’océan menace la vie marine


https://cop23.unfccc.int/fr/news/la-desoxygenation-de-l-ocean-menace-la-vie-marine

Rénovation énergétique : « L’enjeu climatique impose des mesures plus ambitieuses »

Claire Legros
www.lemonde.fr/smart-cities/article/2018/02/09/renovation-energetique-l-enjeu-climatique-impose-des-mesures-plus-ambitieuses_5254436_4811534.html

David Wahl : « Les déchets trahissent notre refus de la mort »

Maxime Lerolle
https://reporterre.net/David-Wahl-Les-dechets-trahissent-notre-refus-de-la-mort

Société civile, dernier rempart face aux multinationales?

Sandra Cossart (directrice de Sherpa)- Susan George (présidente d’honneur d’Attac France) – Jean-François Julliard (directeur général de Greenpeace France) – Birthe Pedersen (présidente d’Action Aid France – Peuples Solidaires)
https://blogs.mediapart.fr/les-invites-de-mediapart/blog/110218/societe-civile-dernier-rempart-face-aux-multinationales

Ez dute baimenik eman Senpere eta Kanbo artean urre ustiaketak egiteko

Eneko Etxegarai/
http://iparraldekohitza.eus/2018/02/15/urrea-ustiaketarik-ez-da-izango-lapurdin/

La fonte du pergisol arctique libère du mercure

Claude-Marie Vadrot
www.politis.fr/articles/2018/02/la-fonte-du-pergisol-arctique-libere-du-mercure-38355

Un rapport souligne le risque d’un empoisonnement progressif de la planète.

Les scientifiques américains, canadiens et russes (avec plus de réticences) ont déjà alerté les décideurs de la planète que la fonte de plus en plus rapide du pergisol, la couche de sol gelée depuis des millénaires, relâchait plusieurs gaz à effet de serre, dont du méthane, contribuant à son tour au réchauffement de l’atmosphère. Cette fonte remet aussi en cause la stabilité des immeubles et des maisons dont les fondations sont appuyées depuis longtemps sur le sol gelé, au point de faire pencher ou écrouler des constructions ou, comme à Irkoutsk en Sibérie, de provoquer l’enfoncement des isbas dont les fenêtres de rez-de-chaussée se retrouvent souvent désormais au niveau du bitume. Mais les spécialistes constatent désormais que la fonte en cours entraîne la dispersion dans les écosystèmes des produits toxiques emprisonnés depuis le début de l’ère industrielle.

Une étude publiée il y a quelques jours par la Geophysical Research Letters met l’accent sur un autre risque actuel : le relâchement progressif dans notre environnement, qu’il s’agisse des sols, des mers et de l’atmosphère des millions de litres de mercure actuellement emprisonnés dans les sols gelés.

120 millions de litres actuellement captifs

D’après les estimations des chercheurs répartis dans une quinzaine d’universités américaines, 120 millions de litres de mercure sont actuellement captifs du pergisol. Cette réserve commence à se libérer et une partie, expliquent Kevin Schaefer et Paul Schuster, les deux scientifiques qui ont coordonné et rédigé l’étude à partir des mesures faites sur le comportement des sols gelés de l’Alaska, va peu à peu empoisonner la planète. Ils ajoutent que la situation est la même dans de vastes territoires du Canada, de la Russie et de nombreux espaces de territoires des pays nordiques.

L’une des explications fournies par les scientifiques est la suivante : alors que, dans les espaces tempérés, le mercure habituellement absorbée par les plantes subit une décomposition au moins partielle, dans les zones arctiques, les racines sont gelées et le mercure imprégnant les végétaux se retrouve piégé dans les sols. Avant de retourner à l’atmosphère et aux cours d’eau à la moindre de fonte ou moindre dégel.

Car le problème, expliquent les auteurs de l’étude, c’est que nous ne savons pas où le mercure va se répandre. Soit il va se diffuser dans les océans à partir des rivières, soit il va se diffuser dans l’air, transporté par les pluies. Mais le risque immédiat c’est qu’il contamine de plus en plus les poissons, ce qui représentera un danger pour ceux qui les consomment, entraînant des empoisonnements d’abord pour les populations arctiques indigènes, puis pour tous les habitants de la planète qui en mangent régulièrement.

La Désoxygénation de l’océan menace la vie marine


https://cop23.unfccc.int/fr/news/la-desoxygenation-de-l-ocean-menace-la-vie-marine

Un nouvel article publié dans le magazine Science montre que les concentrations d’oxygène dans l’eau de mer sont en baisse, notamment en raison du changement climatique. Cette désoxygénation constitue une grave menace pour la vie marine et pour tous les bénéfices que l’homme tire des écosystèmes marins.

L’étude, rédigée par un réseau de scientifiques à l’initiative des Nations Unies, met également en lumière l’importance de lutter à la fois contre le changement climatique et contre la pollution par les nutriments pour stopper l’expansion des zones à faible teneur en oxygène qui se répandent dans le monde entier.

« L’oxygène est essentiel à la vie dans les océans », a déclaré Denise Breitburg, auteure principale et écologiste marine au Smithsonian Environmental Research Center. « Le déclin de l’oxygène océanique est l’un des effets les plus graves des activités humaines sur l’environnement. »

L’étude indique que la teneur en oxygène des eaux de haute mer et des eaux côtières diminue depuis au moins 50 ans, en grande partie à cause des activités humaines qui ont augmenté les températures mondiales et les quantités de nutriments rejetés dans les eaux côtières.

 

Par exemple, la proportion de zones de haute mer dépourvues de tout oxygène a plus que quadruplé au cours des 50 dernières années tandis que les sites à faible teneur en oxygène situés près des côtes, y compris les estuaires et les mers, ont été multipliés par 10 depuis 1950. Avec la hausse des températures, la teneur en oxygène de l’océan devrait encore diminuer, ce qui menacerait la biodiversité et entraînerait un retard de croissance, des maladies, l’asphyxie et la mort de nombreux animaux.

L’étude – menée par une équipe de scientifiques du Global Ocean Oxygen Network (GO2NE), un nouveau groupe de travail créé en 2016 par la Commission océanographique intergouvernementale de l’UNESCO – met en lumière les plus grands dangers menaçant l’océan et les communautés côtières, et les actions à mettre en œuvre pour préserver la santé et la productivité des eaux de la Terre.

Il est impératif de s’attaquer aux causes multiples de la disparition de l’oxygène dans les océans du monde entier

Le changement climatique est le principal responsable. En raison de la hausse des températures, le réchauffement des eaux de surface empêche l’oxygène d’atteindre les profondeurs de l’océan. Au fur et à mesure que l’océan se réchauffe, il retient moins d’oxygène. Dans les eaux côtières, la pollution par les nutriments provenant des terres crée des proliférations d’algues qui consomment une grande quantité d’oxygène lorsqu’elles meurent et se décomposent.  Mais d’autres causes doivent être traitées en même temps que la réduction des émissions de gaz à effet de serre.

Pour faire face aux faibles teneurs en oxygène, les scientifiques estiment que le monde doit adopter une approche tenant en trois points:

  • S’attaquer aux causes: la pollution par les nutriments et le changement climatique. Bien qu’aucune des deux questions ne soit simple ou facile, les mesures nécessaires pour s’attaquer au problème peuvent être bénéfiques pour les populations comme pour l’environnement. De meilleurs systèmes septiques et d’assainissement peuvent protéger la santé humaine et éviter la pollution de l’eau. Diminuer les émissions de combustibles fossiles réduit non seulement les gaz à effet de serre et lutte contre le changement climatique, mais atténue aussi les polluants atmosphériques dangereux comme le mercure.
  • Protéger la vie marine vulnérable. Bien que l’augmentation du nombre de zones à faible teneur en oxygène semble inévitable dans certaines régions, il est crucial de protéger les pêcheries à risque de facteurs de stress supplémentaires. Selon l’équipe de GO2NE, cela pourrait se traduire par la création d’aires marines protégées ou de zones de pêche interdite précisément là où la faune se réfugie pour échapper à la baisse d’oxygène de son habitat d’origine, ou bien pêcher des espèces qui ne sont pas menacées par la désoxygénation.
  • Améliorer la surveillance des teneurs en oxygène à travers le monde. Les scientifiques savent à peu près quelle quantité d’oxygène l’océan pourrait perdre à l’avenir, mais pas où ces zones de désoxygénation se situeront exactement. Une surveillance accrue, en particulier dans les pays en développement, et le développement de modèles numériques, aideront à déterminer les points géographiques les plus à risque, et à identifier les solutions les plus efficaces.

Ce que l’ONU fait pour faire face au problème

L’objectif 14 des Nations Unies pour le développement durable vise à « conserver et utiliser de manière durable les océans, les mers et les ressources marines pour le développement durable. »

Grâce à un large éventail d’initiatives, l’Organisation des Nations Unies dirige les efforts déployés à l’échelle mondiale pour intensifier la coopération en vue de sauvegarder les océans du monde. Fin 2017, l’Assemblée générale des Nations Unies a adopté une résolution visant à convoquer des négociations en vue de conclure un traité international qui protégerait les milieux marins en haute mer.

Lors de l’Assemblée des Nations Unies sur l’Environnement à Nairobi (Kenya), en décembre 2017, les délégués de l’ONU ont approuvé une résolution visant à éliminer la pollution engendrée par le plastique dans les océans. Entre autres mesures, l’accord prévoit également la création d’un groupe de travail international qui conseillera les pays sur les moyens de lutter contre la pollution marine.

La présidence fidjienne de la COP23 a également lancé une initiative océanique intitulée « The Ocean Pathway » afin d’améliorer la santé des océans et de protéger les écosystèmes océaniques essentiels menacés par le dérèglement climatique, lors de la Conférence annuelle des Nations Unies sur le changement climatique qui s’est tenue à Bonn (Allemagne) en novembre 2017.

Et l’ONU a accueilli la Conférence de haut niveau sur les Océans en juin 2017 afin de mobiliser les efforts pour inverser le déclin de la santé de notre océan pour les populations, la planète et leur bien-être.

Pour en savoir plus, lisez le communiqué de presse du Smithsonian Environmental Research Center en cliquant ici ou du CNRS en français.

Rénovation énergétique : « L’enjeu climatique impose des mesures plus ambitieuses »

Claire Legros
www.lemonde.fr/smart-cities/article/2018/02/09/renovation-energetique-l-enjeu-climatique-impose-des-mesures-plus-ambitieuses_5254436_4811534.html

Le gouvernement a lancé une consultation sur son plan de rénovation énergétique. Pour Marc Jedliczka, vice-président du CLER, un réseau d’acteurs engagés dans la transition énergétique, seules des mesures « plus ambitieuses » pourront répondre au double défi écologique et économique. C’est l’une des priorités pour réduire la facture énergétique des villes et lutter contre la précarité. Comment accélérer la rénovation énergétique des logements anciens ? Alors que selon la Fondation Abbé Pierre, un ménage sur cinq (soit 12,2 millions d’individus) est dans une situation de précarité énergétique, le gouvernement a annoncé un plan de 14 milliards d’euros sur cinq ans et lancé une consultation publique sur ce sujet, avant de rendre sa feuille de route définitive.


Pour Marc Jedliczka, vice-président du CLER, réseau d’acteurs engagés dans la transition énergétique et l’un des porte-parole de l’association NégaWatt, des mesures plus ambitieuses sont indispensables pour répondre aux défis climatique et économique.

Le plan présenté par le gouvernement en novembre vous paraît-il adapté aux enjeux ?

Pour le moment, la première version de ce plan affiche une volonté politique, mais sans y associer les mesures concrètes indispensables à sa réalisation. On évoque 500 000 rénovations par an, contre 130 000 actuellement, mais à fonds constants voire plus faibles qu’aujourd’hui. Avec quels moyens ? Quels artisans ? Nous sommes aussi inquiets de constater le flou qui règne sur le financement du repérage et de l’accompagnement des ménages les plus fragiles. Une version définitive du plan est en chantier, dont nous espérons qu’elle tiendra compte des propositions faites dans le cadre de la consultation qui s’achève, et sera plus ambitieuse si nous voulons répondre au défi colossal qui nous attend dans les prochaines années.

La loi de transition énergétique prévoit de diviser la consommation d’énergie par deux en France avant 2050. Comment faire pour accélérer la rénovation des bâtiments anciens ?

Nous sommes à un tournant. L’enjeu climatique impose des mesures ambitieuses. Pour tenir le délai inscrit dans la loi, il est indispensable de rénover 650 000 logements par an. Mais pas dans n’importe quelles conditions. Accélérer ne sert à rien si les rénovations ne sont pas complètes, du sol au plafond. On sait aujourd’hui que rénover par morceaux, les fenêtres d’un côté, l’isolation de la toiture de l’autre, cela revient plus cher au final, et c’est inefficace du point de vue écologique. Pour réduire notre consommation d’énergie, une rénovation globale, permettant d’atteindre le niveau BBC qui s’applique au neuf, est indispensable. Ce sont de nouvelles techniques, de nouveaux métiers qui représentent un vivier d’emplois mais nécessitent un apprentissage et de la collégialité. On ne peut pas se passer d’une montée en formation des professionnels du bâtiment.

Les ménages les plus fragiles sont aussi ceux qui souffrent le plus de précarité énergétique. Comment les aider ?

Nicolas Hulot a annoncé vouloir éradiquer les logements les moins isolés, c’est une avancée. Ces passoires thermiques sont souvent habitées par les plus pauvres, locataires ou propriétaires. Nous demandons que ces rénovations soient globales là aussi. Aujourd’hui le chèque énergie, dont le montant moyen (150 euros/an) est très largement insuffisant par rapport aux besoins, estimés à 1 800 euros/an, permet d’aider ces ménages à payer leur chauffage. Mais une telle mesure n’est pas durable, il faut recommencer chaque mois. Pour financer des travaux à long terme, des mécanismes de financement ont été créés, mais aujourd’hui ils ne sont pas déployés.

 

 

 

L’UFC-Que choisir dénonce une recrudescence des arnaques à la rénovation énergétique. Cette enquête vous surprend-elle ?

La multiplication de ces escroqueries n’est pas étonnante. Il existe en France un déficit d’accompagnement des ménages qui entreprennent l’isolation de leur logement. Depuis le début des années 2000, le dispositif de conseil « Info Energie » a été créé en ce sens et il fonctionne dans de nombreuses régions. Mais il compte 500 salariés pour l’ensemble du territoire, quand il en faudrait le triple. Il manque aussi un dispositif d’évaluation du résultat final, comme il en existe en Allemagne : des experts techniques en bâtiment viennent chez les particuliers établir un diagnostic, ils font des préconisations et surtout ils reviennent après les travaux pour vérifier que le travail a été réalisé correctement. Ces méthodes d’accompagnement ont prouvé leur efficacité. Elles relèvent du service public, comme le prévoit la loi de transition énergétique, et pourraient être financées en France par une partie de la contribution énergie, la taxe carbone prélevée sur la consommation d’énergie fossile.

Vous proposez de simplifier les dispositifs d’aides à la rénovation. Comment ?

Il existe aujourd’hui jusqu’à une quinzaine de dispositifs de financement pour une seule opération, un mille-feuille administratif, souvent modifié, où même les professionnels ont du mal à se retrouver. Les ménages doivent remplir une multitude de paperasse pour demander ces aides, cela décourage les meilleures volontés et coûte cher en frais d’administration. Dans une logique de service public, il serait souhaitable de créer une offre unique de financement qui s’adapterait à la situation de chaque foyer. Nous insistons pour que ces aides ne concernent sauf exception que la rénovation complète.

Vous préconisez aussi un système non plus d’incitation, mais d’obligation. Une telle mesure est-elle réaliste compte tenu du coût pour les ménages ?

Notre proposition est double : d’un côté, rendre les travaux de rénovation énergétique obligatoires lors de la vente d’un bâtiment. De l’autre, rattacher le prêt consenti non plus au propriétaire mais à « la pierre », c’est-à-dire au logement lui-même. En cas de changement de propriétaire, le nouvel arrivant achète l’emprunt en même temps que le logement. Ce système a été mis en place en Grande-Bretagne pour les ménages à faibles revenus. Il permet d’étaler les prêts sur une longue durée et de rembourser l’emprunt avec l’argent économisé chaque mois sur la consommation d’énergie.

David Wahl : « Les déchets trahissent notre refus de la mort »

Maxime Lerolle
https://reporterre.net/David-Wahl-Les-dechets-trahissent-notre-refus-de-la-mort

Qu’est-ce qui est sale ? Qu’est-ce qui est propre ? Dans son dernier ouvrage, « Le Sale discours », l’essayiste et comédien David Wahl s’amuse de cette fausse opposition et met en récit les « grands problèmes environnementaux ». David Wahl est dramaturge, écrivain et interprète. Il tisse des liens entre différents domaines : recherches savantes et récits populaires, savoirs et curiosités, scène et science. Le Sale discours est le quatrième épisode de la série Causeries, après Traité de la boule de cristal, La Visite curieuse et secrète et Histoire spirituelle de la danse.

Reporterre — Comment est né le projet du « Sale discours » ?

David Wahl — Je m’étais déjà penché sur les questions environnementales, un sujet qui me préoccupe grandement, avec La Visite curieuse et secrète, qui questionne notre rapport ambivalent à la mer. Au fur et à mesure de mes ouvrages, les scientifiques s’intéressent de plus en plus à mes méthodes de travail et, d’eux-mêmes, me proposent des sujets de réflexion.

Ça a été le cas de l’Andra [l’Agence nationale pour les déchets radioactifs], qui m’a proposé il y a deux ans de parler de son projet Cigéo à Bure [l’Andra projette d’y construire un centre de stockage des déchets radioactifs de haute activité à vie longue]. À l’époque, ce n’était pas encore très connu. Mais quand j’ai appris l’existence de ces trois cents kilomètres de galeries souterraines destinées à accueillir des déchets nucléaires pendant 300.000 ans, j’ai trouvé dingue le potentiel narratif de cette installation !

C’est la question nucléaire qui a déclenché mon envie de parler des déchets. Je me suis alors lancé dans une série d’immersions, comme à Cigéo, et au bout de toutes ces expériences, m’est venue la question qui guide le livre : pourquoi, si l’homme est de plus en plus propre, le monde est-il de plus en plus sale ?

Au bout de votre enquête, qu’avez-vous appris des déchets ?

On apprend beaucoup des poubelles ! C’est par exemple grâce à ses déchets qu’on connaît mieux la société romaine, industrielle, que la société gauloise, moins pollueuse.

Avec Le Sale discours, j’ai voulu raconter une facette de l’homme. C’est le récit de l’homme qui envisage sa survie au prix de l’environnement. Je pense profondément que les déchets disent quelque chose de notre rapport au monde. Ils trahissent notre refus de la mort — plus que de sa peur.

C’est plus que jamais le cas, notamment avec l’émergence du transhumanisme. Nos sociétés ne peuvent se rêver immortelles qu’en tyrannisant l’environnement, via la pollution. Nos déchets signifient que nous reportons le problème à plus tard. « Après moi le déluge ! » pourrait être l’adage de notre temps.

Polluer l’environnement, est-ce commun à toute civilisation ?

Je ne sais pas trop ce qu’il en est des autres sociétés, mais en Occident, il y a une rupture très nette à partir des XVIe-XVIIe siècles, avec l’émergence de l’humanisme et du cartésianisme. À compter de ce moment, on essaye de comprendre la nature, et non plus de la considérer comme un donné. Donc, l’observateur scientifique se met à distance des choses. Oubliant qu’il est lui aussi observé, il oublie qu’il appartient au monde. Et alors la nature, séparée des hommes, devient exploitable.

La rupture nature/culture n’était pas du tout présente auparavant. Au Moyen-Âge, il n’y avait pas de séparation entre microcosme et macrocosme. Vous aviez par exemple des procès d’animaux, notamment celui du cochon qui a tué accidentellement le prince Philippe de France en 1131. Le cochon avait droit à un avocat, c’est dire ce qu’on lui reconnaissait de personnalité juridique !

« Au Moyen-Âge, le cochon avait droit à un avocat, c’est dire ce qu’on lui reconnaissait de personnalité juridique. »

 

 

 

 

 

Vous considérez-vous comme un historien ?

Pas du tout. Même si les faits que je rapporte sont rigoureusement vrais, je ne prétends pas transmettre de savoir, car je les enrobe toujours de chair, de sentiment, au sein d’une œuvre de fiction. Je ne fais que leur donner un sens, une interprétation purement personnelle.

En revanche, je pense écrire une construction émotionnelle du savoir. C’est-à-dire rendre cohérent un ensemble de faits en vue d’amorcer un dialogue avec mes lecteurs. C’est pourquoi je monte des spectacles à partir de mes textes. Non seulement parce que je prends du plaisir à raconter des histoires, mais aussi parce que ces créations transmettent un souci, qui nourrit beaucoup de débats.

Les récits sont-ils importants pour l’écologie ?

Je ne dirais pas « écologie », un peu trop fourre-tout, mais « grands problèmes environnementaux ». Et je pense que oui, nous avons besoin de mettre en récit ces grands problèmes. Car les histoires sont le seul moyen de nous relier les uns aux autres.

Attention cependant à ne pas verser dans le catastrophisme ! Un discours qui fait peur a plus tendance à rendre impuissant qu’à pousser à l’action. Il faut donc trouver un juste équilibre entre sensibiliser les gens et leur donner envie de faire des choses.

Vous définiriez-vous comme un auteur engagé ?

Oui et non. Le Sale discours n’est pas un livre à thèse, mais il engage le lecteur à aller voir ailleurs. Pour qualifier mes ouvrages, je dirais qu’ils amènent à réfléchir autrement. À ne plus penser dans une logique binaire, qui efface la complexité du monde. Par exemple, pour reprendre le nucléaire, c’est une énergie à la fois propre et sale. Propre, parce qu’un minimum d’installation au sol dégage une énorme quantité d’énergie. Et sale, parce que les déchets qu’elle produit rentrent en absolue contradiction avec l’économie circulaire. Or, à notre époque, l’acte de jeter est invraisemblable, criminel même, encore plus lorsqu’il s’agit de déchets qui pollueront pendant trois cent mille ans !

C’est pour ça qu’il ne faut plus penser en termes de « ou/ou », mais avec des « et/et », deux mots autrement plus fertiles pour la réflexion.

Société civile, dernier rempart face aux multinationales?

Sandra Cossart (directrice de Sherpa)- Susan George (présidente d’honneur d’Attac France) – Jean-François Julliard (directeur général de Greenpeace France) – Birthe Pedersen (présidente d’Action Aid France – Peuples Solidaires)
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Face à des gouvernements qui donnent la priorité aux “investisseurs” sur les droits humains et de la planète, il appartient à chacun.e d’entre nous de renforcer les mouvements citoyens et autres formes de “contre-pouvoirs”.   

Ce lundi 12 février Attac est assigné en référé par Apple. La marque à la pomme menace Attac d’une astreinte bâillon de 150 000 € pour toute future action ciblant un Apple Store. Ce procès n’est que le dernier épisode d’une longue série d’affrontements judiciaires opposant des multinationales à des lanceurs d’alerte, des journalistes ou des associations.

Que ce soit en matière de droits sociaux et humains, de préservation des écosystèmes ou d’évasion fiscale, les multinationales semblent avoir gagné la bataille face à des États complaisants ou trop faibles pour s’opposer à leur pouvoir et leurs armées de lobbyistes. Ces entreprises ont l’oreille de la plupart des chefs d’États et disposent de capitalisations boursières dépassant le PIB de nombreux pays. Elles se retrouvent en situation de force pour influencer la fabrique des lois ou pour trouver des failles afin de contourner les dispositions qui leur déplaisent, comme l’ont montré les scandales fiscaux tels que les LuxLeaks ou les Paradise Papers. Elles sont les grandes gagnantes du libre-échange qui leur permet de mettre les pays en concurrence pour peser lourdement sur les normes sociales, fiscales et environnementales.

Leurs agissements sont rarement signalés par les services d’enquête et de répression étatiques. À chaque fois, les scandales fiscaux ou sanitaires sont révélés par des journalistes et des lanceurs d’alerte ; les failles en matière de protection des données sont dénoncées par des hackers, les défaillances de sécurité dans des centrales nucléaires sont démontrées par des activistes environnementaux… Alors que les États se concurrencent férocement pour attirer à tout prix les multinationales sur leur territoire, la société civile internationale, dans sa grande diversité, apparaît de plus en plus comme le dernier rempart capable de leur faire contrepoids.

Les ONG et les citoyen.ne.s subissent des pressions, font l’objet de représailles et se retrouvent entraînés dans de longues et coûteuses batailles judiciaires. Les plaintes à répétition de Vincent Bolloré contre des journalistes et des associations, les poursuites engagées par BNP Paribas contre les faucheurs de chaises ou par Apple contre Attac en sont autant d’illustrations.

Les acteurs de la société civile savent aussi passer à l’offensive comme le montrent l’assignation en référé déposée par le journaliste Edouard Perrin et le lanceur d’alerte Raphaël Halet contre Price Waterhouse Cooper, la plainte pour obsolescence programmée déposée par l’association HOP contre Apple ou celle déposée par les associations Sherpa et ActionAid France – Peuples solidaires pour pratiques commerciales trompeuses qui révélerait des violations des droits fondamentaux des travailleurs dans les usines de Samsung. Toutefois la disproportion des ressources est criante entre ces empires milliardaires et les défenseurs et défenseuses des droits.

Si ces personnes, ces associations, se retrouvent devant la justice, c’est parce qu’elles ont fait le choix d’agir face à des situations d’injustice graves et de passivité des pouvoirs publics. Ces batailles judiciaires inégales révèlent un besoin de reconnaissance et de protection bien plus importants de leur travail. Cela passe notamment par la création d’un véritable statut protecteur des lanceurs d’alerte – au-delà de la très insuffisante loi Sapin – ou par des mécanismes de protection beaucoup plus efficaces et dissuasifs face aux poursuites bâillons. Nos associations, membres du collectif « On ne se taira pas ! » se mobilisent justement pour ces réformes, au nom de l’intérêt général. La protection passe aussi par une sanctuarisation des moyens d’action de ces associations.

C’est malheureusement un mouvement inverse qui est à l’œuvre avec la baisse des financements publics et la suppression des emplois aidés qui mettent en péril la survie de nombreuses associations. Face à des gouvernements qui donnent la priorité aux « investisseurs » sur les droits humains et de la planète, il appartient à chacun.e d’entre nous de renforcer les mouvements citoyens et autres formes de “contre-pouvoirs”. Au-delà de l’actuelle conjoncture politique, favorable aux oligarchies, la nécessaire transition vers un autre modèle de société plus juste et plus soutenable ne se fera pas sans une société civile forte et indépendante capable de porter et de renforcer les attentes de la majorité.

Ez dute baimenik eman Senpere eta Kanbo artean urre ustiaketak egiteko

Eneko Etxegarai/
http://iparraldekohitza.eus/2018/02/15/urrea-ustiaketarik-ez-da-izango-lapurdin/

Frantziako Ekonomia Ministerioak ezerezean utzi du Sudmine enpresaren eskaria, ‘Mediabask’-ek jakinarazi duenez. Gobernuak erabakitzeko epea pasatzen utzi du proiektuari baimenik ez emateko.

Sudmine enpresak Lapurdin egin nahi zituen urre ustiaketak ez dira eginen. Hala eman du jakiterat Mediabask hedabideak atzo. Bruno Lemaire Frantziako Ekonomia ministroaren kabinetetik eskuratu du informazioa. Estatuak burokraziaz jokatu du, eta, erabakitzeko epea trenkatu gabe pasatzen utzi duenez, adierazi gabeko ezezkotzat jotzen du legeak. Sudmine enpresak ez du beste bide legalik eskaerari segidarik emateko, eta behin betiko lurperatua da urre ustiaketak egiteko asmoa.

Hainbat elkartek mobilizazioak egin dituzte proiektu horren aurka. «Biziki kontent gara. Izaniko mobilizazioari esker utzi dituzte epeak pasatzen; hori segur. Bestela, aspaldi emango zieten baimena», azaldu du Martine Bouchetek, CADE ingurumenaren aldeko elkarteko kideak. Gizarte eragile ugari mobilizatu ziren proiektuaren kontra: besteak beste, Euskal Elkargoa. «Mobilizazio transbertsala izan da. Parisek ez du erantzun, baina inporta zaiguna emaitza da», esan du Bouchetek.

Enpresak Kanbotik Senpere artean eta inguruetako beste hamar herritan hasi nahi zuen urre bila, eta Frantziako Gobernuari horretarako baimena eskatu zion 2014ko azaroaren 28an. Estatuak 2017ko apirilera arte zuen erabakitzeko epea; legeak aurreikusten du erantzunik ez ematea estatuaren adierazi gabeko ezezkoa dela. Hipotesi hori benetakoa izaten ahal zelakoan, Sudminek berraztertze errekurtsoa jarri zuen martxoaren 4an. Sudmine enpresako buru Michael Lalouaren adierazpenak ere jaso zituen Mediabask-ek atzoko alean. Azaldu duenez, erantzun bat espero zuten 2018. urtea baino lehen.

Lemaire ministroaren kabineteko komunikazio arduradunak deuseztatu egin ditu Lalouaren erranak; baieztatu du martxoaren 4an helegitea jarri zutela, baina ohartarazi du erantzun zietela. 2017ko apirilaren 4an, eskuratze agiria duen gutun artamendu bitartez, jakinarazi zieten gobernuak ezetz esan ziola berraztertze helegiteari. Sudminek bazuen, ordea, beste bide legal bat, estatuak erabakitzeko epea pasatuko ez zuela segurtatzeko: auzietako helegitea. Baldin eta helegitea jartzeko epea errespetatu bazuten, hots, 2017ko ekain bukaera baino lehen. Ez zuten halakorik egin, eta, beraz, urre ustiaketari ekiteko bide administratibo guziak itxi zaizkie. Ondorioz, Frantziako Estatuak behin betiko artxibatu du ustiaketa proiektua, eta ez da atzera egiteko aukerarik.

Bide legalak

Frantziako legediak hiru bide administratibo ditu administrazioaren erabaki bat edo isiltasun bat galdezkatzeko. Sudminek jarritako berraztertze errekurtsoa da bat, erabakitzeko ahalmena duenari bideratzen zaiona. Auzietako helegitea da bigarren aukera, Sudmineri jartzeko epea pasatu zaiona. Aukera horretan, auzitegi administratiboak izaten du eskaera ebazteko ardura. Azken bide legala helegite hierarkikoa da: erabakia hartu duen arduradun hierarkikoari zuzentzen zaio, eta azpikoak hartu erabakia aztertzea eskatzen zaio orduan.