Articles du Vendredi : Sélection du 8 avril 2022

Trois ans pour garder une planète « vivable » : les enseignements alarmants du dernier rapport du GIEC
Adrien Toffolet
www.franceinter.fr/environnement/trois-ans-pour-garder-une-planete-vivable-les-enseignements-alarmants-du-dernier-rapport-du-giec

Après deux semaines de discussions, le GIEC publie ce lundi son nouveau rapport de préconisations, sous forme de scénarios, pour lutter contre le réchauffement de la planète.

Comment limiter le réchauffement climatique ? C’est une brûlante question pour le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat, après deux semaines de discussions entre les 195 États membres, et 48 heures de retard dans la publication par les délégués du GIEC du très politique « résumé à l’intention des décideurs » qui nécessite de peser chaque mot.

Dans ce nouveau volet du sixième rapport publié finalement lundi après-midi, les experts détaillent, sur 17 chapitres et des milliers de pages, un éventail de scénarios et de solutions pour diminuer les émissions de gaz à effet de serre et ne pas dire adieu aux objectifs de limitation du réchauffement à +1,5 degrés ou 2 degrés par rapport à l’ère pré-industrielle. Dans son premier volet publié au août dernier, le GIEC estimait déjà que l’accélération du réchauffement conduisait à ce que ce seuil des +1,5 degrés puisse être atteint vers 2030. Aujourd’hui, la situation est plus grave qu’estimée auparavant.

Seulement 3 ans pour tout changer

Malgré les efforts, le monde n’est pas sur la bonne voie pour atteindre les objectifs connus : seules des mesures rapides, immédiates et ambitieuses pourront permettre de contenir l’augmentation de la température globale sous les 2 degrés, et encore plus sous les 1,5 degrés. Très concrètement, il faut réussir à inverser la courbe des émissions de gaz à effet de serre d’ici 2025 si l’humanité peut espérer garder une planète « vivable« . Cela permettrait d’atteindre l’objectif de 2 degrés de réchauffement seulement, car celui (trop ambitieux) de l’Accord de Paris qui consister à limiter l’augmentation des températures d’1,5 degrés est de toute façon jugé « hors de portée« . Pour cela, il faut des transformations majeures dans tous les secteurs. En 2019, nous dit le rapport, environ 34% des émissions de gaz à effet de serre liées à l’activité proviennent du secteur de l’approvisionnement en énergie (dont une partie sert à fournir de de l’électricité aux industries et à chauffer les bâtiments), 24% de l’industrie, 22% de l’agriculture, forêt et utilisation des terres, mais seulement 15% des transports. Pour arriver à 1,5 degrés, il faudrait notamment diminuer drastiquement notre utilisation des énergies fossiles d’ici à 2050 : -60% à -70% des usages du pétrole et du gaz, une production mondiale d’électricité qui provient de sources bas-carbone ou totalement propres. Pour ce qui est du charbon, il est tout simplement exclu, faute de pouvoir pour l’instant bénéficier d’une technologie de capture du carbone.

Des émissions de CO2 au plus haut depuis 2010

En 2019, les émissions totales de dioxyde de carbone liées aux activité humaines ont atteint un niveau record de 59 gigatonnes (59 milliards de tonnes), soit une augmentation de 12% par rapport à 2010, et même 54% par rapport à 1990. Les chiffres donnés dans le rapport sont éloquents : sur la période 2010-2019, les émissions de gaz à effet de serre (le CO2 issus des énergies fossiles et de l’industrie, le méthane (CH4), le protoxyde d’azote, les gaz fluorés) ont atteint des niveaux jamais enregistrés dans l’histoire de l’humanité. Depuis la révolution industrielle, au milieu du XIXème siècle, les activités humaines ont rejeté dans l’atmosphère l’équivalent de 2400 gigatonnes de CO2. 58% de cette somme globale a été produite sur une période de 140 ans, entre 1850 et 1989. Les données suivantes donnent le vertige et montrent l’aggravation de la situation : 25% entre 1990 et 2009, ce qui signifie que la seule décennie 2010-2019 représente à elle seule 17% de toutes ces émissions de gaz à effet de serre depuis 1850.

Toutefois, sur cette même période, la croissance annuelle moyenne des émissions a été d’1,3% par an, alors qu’elle était de 2,1% entre 2000 et 2009, ce qui signifie que le rythme d’augmentation a diminué. Ces dernières années, la prise de conscience générale, à travers les différentes COP notamment, a permis de mettre en œuvre des mesures d’atténuation du changement climatique. Des politiques prises autant au niveau national qu’à un niveau local. Mais selon le rapport, en imaginant que les engagements des gouvernements pris lors de la Cop26 soient tenus et même qu’ils renforcent leurs politiques actuelles, la planète devrait se réchauffer de +3,2 degrés d’ici 2100, avec des conséquences catastrophiques pour l’humanité.

 

« Nous avons les outils pour limiter le réchauffement » climatique : ce qu’il faut retenir du nouveau rapport du Giec sur les solutions pour endiguer la crise
Camille Adaoust & Thomas Baïetto
www.francetvinfo.fr/monde/environnement/crise-climatique/rechauffement-climatique-ce-qu-il-faut-retenir-du-nouveau-rapport-du-giec-sur-les-solutions-pour-limiter-la-crise_5060818.html

Ce dernier volet du sixième rapport du Giec, publié lundi, s’intéresse aux moyens de limiter nos émissions de gaz à effet de serre et le réchauffement climatique.

Après les faits et les effets, les solutions. Le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec) a publié, lundi 4 avril, le troisième et dernier volet de son sixième rapport sur le changement climatique. Cette fois-ci, les scientifiques, qui avaient déjà rendu leur copie sur l’évolution physique du climat et sur ses effets sur les sociétés humaines et la biodiversité, ont évalué comment réduire les émissions de gaz à effet de serre – « l’atténuation », dans le jargon du Giec.

Sur la période 2010-2019, ces émissions de gaz à effet de serre, produites par nos activités quotidiennes, ont continué à augmenter. Cette croissance a légèrement ralenti, passant de +2,3% à +1,3% par an. Pour contenir le réchauffement climatique nettement en dessous de 2 °C, ces émissions doivent avoir diminué de 27 à 43% en 2030 et de 63 à 84% en 2050. Concrètement, elles doivent plafonner dans trois ans. « Les décisions que nous prenons aujourd’hui peuvent nous assurer un futur vivable », a commenté Hoesung Lee, le président de l’instance onusienne. « Nous avons les outils et le savoir-faire pour limiter le réchauffement », selon lui.

Franceinfo a pu consulter le « résumé pour décideur » de ce rapport et vous en présente les principaux enseignements.

L’inaction plus coûteuse que les investissements nécessaires

Les experts du Giec soulignent d’abord que « les avantages des scénarios permettant de limiter le réchauffement à 2 °C dépassent les coûts des mesures d’atténuation [des émissions] ». Concrètement, les investissements nécessaires coûteraient moins cher que les dommages économiques provoqués par la crise climatique. « C’est une conclusion extrêmement robuste. La réduction de nos émissions est un investissement qui, à long terme, vaut le coup », avance auprès de franceinfo Céline Guivarch, directrice de recherche au Centre international de recherche sur l’environnement et le développement (Cired) et coautrice du groupe 3 du Giec.

Le Giec ajoute que « le coût de plusieurs technologies bas-carbone a chuté continuellement depuis 2010 ». Les experts citent l’énergie solaire, dont le coût a baissé de 85% entre 2010 et 2019, l’éolien (–55%) ou encore les batteries lithium-ion (–85%).

Une boîte à outils, secteur par secteur

Le rapport est très clair : tous les scénarios limitant le réchauffement à 1,5 °C ou 2 °C « impliquent de rapides, profondes et la plupart du temps immédiates réductions de gaz à effet de serre dans tous les secteurs ». Si les scientifiques du Giec relèvent quelques progrès, les politiques actuelles des Etats, qui ne respectent parfois pas les engagements pris, conduisent le réchauffement bien au-delà des 1,5 °C au cours de ce siècle (+3,2 °C). Pour le vice-président du groupe 3 du Giec, Priyadarshi Shukla, « les bonnes mesures, infrastructures et technologies » peuvent « permettre de réduire de 40 à 70% les émissions de gaz à effet de serre d’ici 2050 ». Voici les solutions évaluées, secteur par secteur, pour corriger le tir.

Production d’énergie (environ 34% des émissions mondiales). Dans ce secteur, qui correspond principalement à la production d’électricité, la consommation de charbon, pétrole et gaz doit diminuer respectivement de 95%, de 60% et de 45% en 2050 par rapport à 2019. Cela demande une « transition majeure » avec « le déploiement de sources d’énergie peu émettrices » comme l’éolien, le solaire, l’hydraulique ou le nucléaire. Sur ce point, le Giec note que de nombreuses technologies peu carbonées « ont montré de nombreux progrès depuis le précédent rapport, en termes de coût, de performance et de déploiement ».

Coauteur du rapport et directeur du Cired, Franck Lecocq insiste aussi sur le fait que les infrastructures fossiles actuellement construites produiront plus de gaz à effet de serre que ce qu’il faudrait pour limiter le réchauffement : « Tenir ces objectifs suppose donc de fermer de façon prématurée ces centrales, c’est un message extrêmement fort. A fortiori, toute construction nouvelle rend encore plus difficile l’atteinte de cette objectif. » Cela suppose également de ne pas exploiter toutes les réserves de charbon ou de pétrole connues.

Industrie (environ 24%). Parvenir à zéro émission nette dans ce secteur est un « défi », mais c’est « faisable », estime le Giec. Les scientifiques évoquent des actions coordonnées « tout au long de la chaîne de valeur », pour « utiliser plus efficacement les matériaux, les réutiliser et les recycler, diminuer les déchets ». « Ces options ont le potentiel d’être plus utilisée dans les pratiques industrielles et requièrent une plus grande attention de la part des politiques industrielles », notent les auteurs du texte.

Agriculture, forêt et usage des terres (environ 22%). Ce secteur est crucial, parce qu’il peut participer, au-delà de ses réductions d’émissions propres, à la captation de carbone émise par d’autres. Il y a en outre « plein d’opportunités spécifiques à chaque pays d’apporter des cobénéfices (comme la préservation de la biodiversité, des services écosystémiques et du mode de vie) et d’éviter les risques (par exemple, en s’adaptant au changement climatique) ».

Cela passe par la « préservation, une meilleure gestion et une restauration des forêts et autres écosystèmes, comme les marais côtiers, les tourbières, les savanes et prairies », une gestion durable des cultures et des élevages. Les consommateurs ne sont pas oubliés, puisque la transition vers des régimes alimentaires plus riches en végétaux et avec peu de viande est listée comme une solution pour réduire les émissions du secteur.

Transports (environ 15%). Dans ce secteur, le premier émetteur en France, le Giec liste plusieurs options : réduction de la demande de transports (télétravail, moins d’étalement urbain), report sur des modes moins polluants (transports en commun), des modes actifs (vélo, marche) avec des investissements (pistes cyclables, trottoir), électrification des véhicules (moins polluants que les thermiques sur l’ensemble de leur cycle de vie) et biocarburants (même si ces derniers présentent des risques de conflit sur l’usage des sols avec l’alimentation). Ces mesures d’atténuation présenteraient en outre d’autres bénéfices variés, dont « l’amélioration de la qualité de l’air, de la santé, l’accès équitable aux transports, la réduction des bouchons et de la demande de matériaux », constatent-ils.

Bâtiments (environ 6%). Les villes et les aires urbaines offrent des « opportunités significatives » pour réduire les émissions de gaz à effet de serre. Cela doit inclure « la réduction ou le changement de la consommation énergétique et de matériaux », « l’électrification » et l’augmentation de la capacité de la ville à capter et stocker du carbone (avec des espaces verts, par exemple).

La capture de carbone, indispensable mais loin d’être suffisante

Pour limiter le réchauffement à 1,5 °C par rapport à l’ère préindustrielle, le monde doit atteindre la neutralité carbone d’ici 2050 (2070 pour une limitation du réchauffement à 2 °C), rappelle le Giec. Pour ce faire, en plus d’une réduction de nos émissions, « le déploiement de dispositifs de captation du dioxyde de carbone, pour contrebalancer les émissions résiduelles, est inévitable », écrivent-ils. Ces émissions résiduelles, difficiles à supprimer, proviennent de secteurs comme l’agriculture (le méthane émis par les ruminants par exemple) ou l’aviation.

Le Giec envisage comme solutions le développement de puits naturels de carbone, grâce à la reforestation et au changement de pratiques des sols, ainsi que des solutions artificielles (pas encore arrivées à maturité) de capture et stockage du CO2. « Il ne s’agit toutefois pas de dire qu’on peut continuer d’émettre des gaz à effet de serre. Plus les émissions résiduelles sont faibles, moins on a besoin d’émissions négatives pour les compenser », souligne Céline Guivarch.

Les émissions (et les solutions) inégalement réparties

« Les émissions ont augmenté dans la plupart des régions du monde, mais sont distribuées de manière inégale », rappelle le Giec dans ce troisième volet. Les experts appuient leurs dires par cette infographie sur les émissions cumulées depuis 1850. Aujourd’hui encore, les pays les moins développés totalisent des émissions par habitant « bien plus basses » (1,7 tonne de CO2 par an) que la moyenne mondiale (6,9 tonnes). « Dans le monde, les 10% de ménages les plus riches représentent entre 36 et 45% des émissions », ajoutent les auteurs.

Face à ce constat, les experts du Giec soulignent que les solutions à apporter à la crise climatique ne sont pas les mêmes. « Les individus au statut socio-économique élevé contribuent de manière disproportionnée aux émissions et ont un plus grand potentiel de réduction », soulignent les experts. De manière globale, ils établissent qu’un « soutien financier accéléré des pays développés aux pays en développement constitue un facilitateur essentiel pour renforcer les mesures d’atténuation et remédier aux inégalités » et faire face « à sa vulnérabilité économique au changement climatique pour les pays en développement ».

Des financements trop faibles

Pour mener à bien cette transition, d’importants financements sont nécessaires. Aujourd’hui, constate le Giec, « les flux financiers privés et publics vers les énergies fossiles sont toujours plus importants que ceux pour l’adaptation et l’atténuation du changement climatique ». Selon les calculs des scientifiques, les financements annuels, pour la décennie 2020, devraient être « trois à six fois plus importants que les niveaux actuels » pour respecter les objectifs de l’accord de Paris. « Malgré une impulsion et des engagements, les progrès réels ont été lents », constate Raphaël Jachnik, co-auteur du rapport et analyste politique à l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques).

Les partisans de la non-violence et du désarmement inquiets d’une re-militarisation des sociétés
Rachel Knaebel
https://basta.media/Guerre-Ukraine-activistes-de-la-paix-et-du-desarmement-nucleaire-inquiets-d-une-escalade-de-la-militarisation

Face à la guerre en Ukraine, les mouvements non violents prônent des actions de désobéissance civile, proposent d’accorder l’asile aux déserteurs de l’armée russe et appellent à s’engager en faveur des traités d’interdiction de l’arme nucléaire.

L’ombre de la menace nucléaire est de retour en Europe. Le 22 février, Vladimir Poutine menaçait ceux qui tenteraient « de se mettre en travers » du chemin de la Russie : les « conséquences seront telles que vous n’en avez jamais vues dans toute votre histoire ». Une référence à peine masquée à l’arme atomique. Le 24 février, l’armée russe se lançait à l’assaut de l’Ukraine. En réponse à l’attaque et aux bombardements, qui ont tué des civils, l’Union européenne a pris de nouvelles sanctions contre la Russie, promis plusieurs centaines de millions d’euros pour aider l’Ukraine, notamment à s’équiper militairement. Plusieurs pays européens, dont la France, l’Allemagne, la Belgique, ont commencé des livraisons de matériel militaires, principalement des missiles antichars et anti-aériens, aux forces ukrainiennes.

Le 28 février, Poutine a de nouveau agité la menace nucléaire, déclarant que les forces de dissuasion nucléaires russes avaient été placées en « régime spécial d’alerte ». La veille en Biélorussie, d’où est partie l’offensive russe vers Kiev, un référendum sur la constitution a donné encore plus de pouvoir à l’autocrate Loukachenko. Et entériné la possibilité de stationnement d’armes nucléaires russes sur le territoire de ce pays voisin de la Pologne. « Le 19 février dernier, la Russie a réalisé des exercices de démonstration de sa capacité nucléaire sur différentes bases russes, ajoute Jean-Marie Collin, porte-parole de la branche française de la Campagne internationale pour abolir les armes nucléaires (ICAN, lauréate du prix Nobel de la paix 2017). Ce sont des exercices classiques, réalisés avant l’invasion, mais déjà dans un contexte de tension extrême. En quinze jours, Poutine a accéléré ce qu’on appelle la grammaire nucléaire. »

Face au risque d’aggravation et d’extension du conflit, des voix tentent d’appeler à la désescalade. « Nous nous inquiétons d’une militarisation accrue, qui renforcerait le risque d’un conflit long », dit Serge Perrin, porte-parole du Mouvement pour une alternative non violente (MAN). Dans une démarche non violente, la priorité, pour nous, c’est la société. Toute guerre est destructrice pour la société civile, et c’est la population la première victime. » Le MAN se positionne contre les livraisons d’armes à l’Ukraine, tout en préconisant davantage de sanctions financières et économiques contre les dirigeants et milliardaires russes, et une « une véritable politique d’accueil des réfugiés ».

« Rare qu’à la sortie d’un conflit violent, on ait plus de démocratie »

L’organisation demande aussi que l’Union européenne reconnaisse la désertion comme motif d’asile politique, pour les soldats russes et ukrainiens. Mais que répondre, alors, aux Ukrainiens – et à sa société civile – qui demandent un soutien militaire ? « Culturellement, nous sommes imprégnés de culture militaire. Tant qu’on ne développe pas plus en amont les stratégies de résistances, quand on pense à un conflit, on va parler d’avions, de chars de canons, d’armes antichar. Mais pour nous, la non-violence est une méthode de résolution des conflits. Si nous n’arrivons pas à résoudre les conflits en dehors de l’élimination de l’autre, nous restons dans un cycle de violences perpétuelles », défend Serge Perrin.

Pour illustrer ces possibles actions de résistance civile, l’organisation prend les exemples de blocage économique ou les nombreuses scènes d’interpellation et d’entraves par la population ukrainienne des soldats russes et de leurs convois. « Presque tout conflit violent aboutit à un renforcement de l’autoritarisme. C’est extrêmement rare qu’à la sortie d’un conflit violent, on ait plus de démocratie, insiste le porte-parole du mouvement. L’Europe, l’Allemagne et même la France risquent de sortir de ce conflit, quelle qu’en soit l’issue, plus militarisées », déplore-t-il aussi.

Le 27 février, le nouveau chancelier allemand Olaf Scholz (social-démocrate) a surpris son pays en annonçant un renforcement exceptionnel du budget allemand de la Défense : un fonds spécial de 100 milliards d’euros et une augmentation du budget annuel de la défense à 2 % du PIB. « Je crois que personne dans mon pays ne s’attendait à cette annonce, nous dit Alexander Lurz, chargé des question de désarmement à Greenpeace Allemagne. L’ONG environnementale s’oppose à ces projets du gouvernement allemand d’augmenter considérablement les moyens de l’armée. « Nous sommes contre ce fonds de 100 milliards. La phase dans laquelle nous sommes, au début d’une guerre, n’est pas le moment approprié pour prendre une décision d’une telle portée. Cela a été décidé dans la précipitation, sans analyse, sans garder la tête froide », dit le responsable de Greenpeace.

« Le principe de non-prolifération se fragilise de partout »

« Nous comprenons les raisons morales du gouvernement pour livrer des armement, compte tenu de la situation en Ukraine, précise Alexander Lurz. Mais nous pensons aussi que le potentiel des mesures stratégiques n’a pas été épuisé, par exemple l’arrêt d’importation de gaz et pétrole russe », ajoute l’expert en désarmement. Le ministre vert de l’Économie et du Climat a rejeté le 3 mars l’interdiction des importations de gaz russe.

« On se retrouve avec une volonté de course aux armements, alors que dans le même temps, deux événements extrêmement importants arrivent sur les questions de désarmement nucléaire », rappelle Jean-Marie Collin. D’ici juillet doit se tenir la première réunion des États membres du Traité sur l’interdiction des armes nucléaire, entré en vigueur l’an dernier. La France, comme les autres États détenteurs de l’arme nucléaire, ne l’a pas signé. « Nous appelons les États qui refusent de se joindre à ce traité, comme la France, à venir y participer en tant qu’État d’observateur. C’est la moindre des choses qu’un pays comme la France aille au moins écouter ce qu’ont à dire les autres États sur ce traité. » (voir cet appel)

La prochaine conférence du Traité de non prolifération des armes nucléaires doit également avoir lieu cet été. « Alors que le principe de non-prolifération se fragilise de partout, notamment par le fait que les cinq puissances nucléaires continuent de moderniser et renouveller massivement leur arsenaux, pointe Jean-Marie Collin. La France a même des plans pour conserver des systèmes d’armes nucléaires jusqu’en 2090, c’est l’une des rares politiques publiques qui va aussi loin », dit-il. « Le seul moyen d’éliminer tous les risques nucléaires est d’éliminer toutes les armes nucléaires », a encore souligné le secrétaire général des Nations unies en janvier dernier. « On comprend bien que le désarmement ne peut pas se faire en quelques semaines, mais il y a des pas qui peuvent être réalisés », insiste Jean-Marie Collin.

Desazkunde itsusi hori!
Xabier Letona Biteri
www.argia.eus/albistea/desazkunde-itsusi-hori

Epe laburrera humanitateak bi arazo existentzial erraldoi bederen baditu, gerra atomikoa –erdi ahaztua genuen, baina…– eta aldaketa klimatikoa. Lehena azkarra litzateke eta bestea geldoagoa gure bizitzei begira, baina oso azkarra gizateriaren historia aintzat hartuta.

Ezin uka biek kezkatzen dutela herritarra, gutxienez Mendebaldean, garapenean diren herritarren sentipena beste upeleko kontua delako: larri denarentzat etorkizuna gaur da. Gas, elektrizitate edo erregaien igoerak hartzen du agenda, instituzioetan eta tabernetan. Herri xeheak gorriak bizi ditu ostera ere, eta agintariek behar dena esango dute hura kontentu izan… edo engainatzeko, bata eta bestearen artean sarri ez baitago desberdintasun handirik.

Energia, energia eta energia, ez dugu besterik azken urteetan eta, zer esanik ez, azken egunetan. Lehengaien agortze doinuak aspaldikoak dira. Atzo, globalizazioaren eta garraioaren mugak agerian geratu ziren COVID-19arekin; gaur, Ukrainako gerrak prezioak eztandarazi ditu. Dena da hidrogeno berde, energia berriztagarri, haize, eguzki… eta teknologia. Saudi Arabiak esaten du 2040rako aurkituko duela CO2a xurgatzeko teknologia egokia, bitartean ikertu eta probatu egin behar dela. Eta bati gogora ekarri dio Don’t look up (Ez begiratu gora) filma, non aberatsik aberatsenak teknologiaren miraria eskaintzen dion AEBetako lehendakariari, Lurrera zuzen datorren meteoritoa geldiarazteko, baina azkenean dena alferrik.

Aurten bete da mende erdia Erromako Klubak Hazkundearen mugak lan erraldoia kaleratu zuenetik. Zentzunak argi zioena zientziaz jantzi zuten txukun eta eder 1972ko hartan: “Industrializazioa, elikagaien produkzioa eta baliabideen agortzea egungo joeran mantentzen badira, ehun urtetan gure mugara iritsiko gara”. Azti begiekin, gainbehera 2020tik aurrera hasiko zela iragarri zuten. Epelak entzun behar izan zituzten.

Kolapsorako bidea, jakina, ez da zerutik erori, sistema kapitalistaren fruitu ankerra da, bizitza beharrean aberastasuna eta zapalkuntza erdian jartzearen ondorio. Engainurik eta iruzurrik handiena zen –eta da– ez dela beste alternatibarik egon, Margaret Tatcherrek zioen moduan. Baina kapitalistek, gogorrek eta bigunek, ez dute halakorik onartzen. Ezta gure agintariek ere, izan Urkullu edo Chivite, Tapia edo Irujo. Hazkunde ekonomiko beti-jasangarriaren jauregietan ez aipa desazkunde itsusi hori. Ezta legebiltzarretan edo bestelako erakunde eta alderdietan ere. Ixo! Horrek ez du botorik ematen.

Baina eskasiak energia nola, denborak desazkundea ere agendan jarri du. Begiratu bestela datozen urteetan nola doazen behera Nazioarteko Diru Funtsaren edo Mundu Bankuaren herrialde garatuenen hazkunde aurreikuspenak. Hori badator, kontua da ea egungo aberastasunaren metaketa-hondamendi hau bezainbeste planifikatuko den, herritarren gehiengoari aukera gogor baina duin bat emanez, edo faxismoaren desazkundea gailenduko den.