Articles du Vendredi : Sélection du 7 décembre 2012 !

Nous ne sommes pas tous égaux face aux changements climatiques

Seyni Nafo, porte-parole du Groupe Afrique dans les négociations internationales sur le changement climatique
www.lemonde.fr/idees/article/2012/12/04/nous-ne-sommes-pas-tous-egaux-face-aux-changements-climatiques_1799488_3232.html

Temps écologique et temps social

Dominique Méda, Sociologue, titulaire de la chaire Reconversion écologique, travail, emploi, politiques sociales du Collège d’études mondiales
Le Monde du 29.11.2012

Pic pétrolier : l’alerte d’un expert du FMI [interview]


http://petrole.blog.lemonde.fr/2012/12/05/pic-petrolier-lalerte-dun-expert-du-fmi-interview/

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Nous ne sommes pas tous égaux face aux changements climatiques

Seyni Nafo, porte-parole du Groupe Afrique dans les négociations internationales sur le changement climatique
www.lemonde.fr/idees/article/2012/12/04/nous-ne-sommes-pas-tous-egaux-face-aux-changements-climatiques_1799488_3232.html

La planète ne cesse de nous montrer à quoi peut ressembler un changement climatique dangereux et pour tous les pays du monde. Les impacts de ce changement climatique, nous les vivons quotidiennement au Mali depuis longtemps déjà : sur notre sécurité alimentaire, notre accès à l’eau, et sur la paix entre nos communautés.

Mais désormais, le changement climatique n’épargne plus personne. Cet été, les Etats-Unis subissaient des sécheresses sans précédent et perdaient une large partie de leurs stocks de graines, avec des répercussions sur la sécurité alimentaire dans les pays les plus vulnérables. Il y a quelques semaines, à quelques heures des élections américaines, le pays affrontait l’ouragan Sandy d’une force décuplée par les changements climatiques. Du Mali aux Etats-Unis, les populations souffrent des conséquences des évènements climatiques extrêmes.

Mais les récentes catastrophes ont aussi démontrées qu’une fois de plus, nous ne sommes pas tous égaux face aux changements climatiques. Un pays comme les Etats-Unis, par la puissance de son économie et de ses systèmes d’assurance, et la résilience de ses infrastructures, ne souffrira pas longtemps des ravages de l’ouragan Sandy ou de la sécheresse de l’été dernier. A la différence d’un pays comme le Mali dont une large partie de la population vit sous le seuil de la pauvreté et sans alternatives: quand un éleveur perd des têtes de son cheptel de chèvres par manque d’eau et de pâturage, il n’a pas les moyens de racheter des bêtes. Parce qu’avant d’être frappé par le changement climatique, il était déjà frappé par la pauvreté.

C’est justement pour renforcer la capacité des plus vulnérables à faire face aux impacts du changement climatique qu’en 2009, au Sommet de Copenhague, les pays développés s’étaient engagés à verser 30 milliards de dollars entre 2010 et 2012 pour le climat. Nos pays ont avant tout salué ce premier engagement financier chiffré parce qu’il devait poser les jalons vers un deuxième engagement plus significatif encore: celui de mobiliser 100 milliards de dollars par an d’ici, en vue d’abonder le Fonds vert des Nations unies pour le climat.

Mais depuis, c’est le silence-radio. Alors que le 18e sommet des Nations Unies sur les changements climatiques au Qatar sonnera le glas des 30 milliards, nos gouvernements n’ont obtenu aucun nouvel engagement financer à partir de janvier 2013 pour abonder le Fonds vert ou le Fonds pour l’adaptation, et aucune visibilité sur la trajectoire vers les 100 milliards d’ici à 2020. Notre inquiétude est croissante : les engagements financiers pour le climat sont de plus en plus flous et l’aide publique au développement ne cesse de baisser. Résultat : les plus pauvres doivent choisir entre construire une digue et une école. C’est inacceptable.

Ne vous méprenez pas, nous sommes pleinement conscients de la crise économique qui frappe les pays développés et qui amaigrit les budgets publics. Mais nous sommes aussi conscients que la crise climatique est systémique et qu’elle a des répercussions sur la stabilité mondiale. Qu’en aggravant les crises alimentaires et en modifiant les dynamiques migratoires, elle augmente les risques de tension entre les populations et qu’elle coûte de plus en plus cher en aide humanitaire d’urgence. Accroître les budgets publics et additionnels dès aujourd’hui pour augmenter la résilience des populations face à la crise climatique, c’est aussi diminuer les dépenses pour les crises alimentaires et humanitaires de plus en plus extrêmes.

Nous sommes convaincus que ce ne sont pas tant les financements publics qui font défaut que le courage et la volonté politique pour les mobiliser et les affecter. Pourquoi les 11 Etats en voie de créer leur taxe sur les transactions financières n’ont-ils pas encore prévu d’affecter une partie des recettes au climat? Ou encore, pourquoi les 27 Etats membres ne redirigent-ils pas déjà une partie des recettes issues de la mise aux enchères des quotas C02 sur le marché européen vers la lutte internationale contre les changements climatiques ? C’est exactement ce type d’engagement prévisible et transparent que nous attendons à Doha.

Temps écologique et temps social

Dominique Méda, Sociologue, titulaire de la chaire Reconversion écologique, travail, emploi, politiques sociales du Collège d’études mondiales
Le Monde du 29.11.2012

Difficile de concilier les efforts à mener à long terme – préserver la planète – et le besoin immédiat de juguler la crise
A l’été 2012, Mitt Romney, le candidat républicain à la présidence des Etats-Unis, choisissait de mettre au coeur de sa campagne la contradiction, selon lui manifeste, entre le soin à apporter à la planète et celui apporté aux humains, et plus clairement encore entre traitement de la crise écologique et traitement de la crise sociale.

Il déclarait :  » Obama avait promis de ralentir la montée des océans et de soigner la planète. Ma promesse, c’est de vous aider vous et votre famille. Je créerai 12 millions d’emplois.  »

Au même moment, la revue Nature publiait un article, cosigné par vingt-deux scientifiques appartenant à plusieurs disciplines, intitulé  » Approaching a state shift in Earth’s biosphere  » (« On approche d’un changement d’état de la biosphère « ). Les auteurs y indiquaient : » Désormais, les humains dominent la Terre et la modifient selon des modalités qui menacent sa capacité à nous supporter, nous et les autres espèces.  » Ils soulignaient que les transitions critiques causées par des effets de seuil peuvent conduire à des changements d’état. Si des transitions critiques ont déjà eu lieu dans le passé, ajoutaient-ils, les humains sont en train de forcer une telle transition, avec la possibilité de transformer la Terre de manière rapide et irréversible en un état que l’humanité n’a encore jamais expérimenté.

Y a-t-il contradiction entre la prise en compte de l’état de notre planète et donc du temps long – celui de la préservation des conditions de vie dignes sur la Terre notamment pour les humains des générations futures -, et le temps court du traitement de la question sociale, qui prend actuellement la forme de l’extension de la pauvreté, d’un chômage galopant et de la précarisation accrue des populations frappées par la crise ?

Le temps presse dans les deux cas, faisant supporter au présent une double responsabilité : empêcher que la crise sociale ne progresse, qui pourrait conduire à la balkanisation des sociétés ; éviter l’avènement d’une crise écologique majeure, qui se traduirait par un réchauffement climatique de plusieurs degrés, la désertification de grandes parties de la Terre, des pertes de la biodiversité, la raréfaction des quantités d’eau potable disponibles et la dégradation plus ou moins grave des conditions de vie de centaines de millions de personnes.

La résolution des deux crises nécessiterait d’énormes moyens financiers : politiques publiques de soutien à ceux qui sont actuellement privés d’emploi et d’aide à la création d’emplois, d’une part ; investissements dans les énergies renouvelables, dans la recherche-développement et dans la reconversion de pans entiers de nos économies, d’autre part.

En réalité, les ressources financières sont rares et, tandis que les pauvres de tous les pays tentent de survivre, les riches déplacent leurs capitaux dans des temps record et contribuent plus que les autres à la dégradation de la planète. La formation d’alliances en faveur du temps long se heurte à la fragmentation des intérêts, mais aussi à la coalition de fait de tous ceux qui donnent la préférence au présent par incapacité de se projeter dans le futur ou par soif du profit immédiat.

La plupart des experts (le plus souvent économistes) et des gouvernements considèrent qu’un unique remède permettra de résoudre les deux crises : le retour de la croissance (et de la compétitivité…).

A les écouter, sans croissance, pas de création d’emplois, pas d’augmentation du pouvoir d’achat, pas d’investissement dans les énergies du futur.

Rien n’est moins sûr. On peut même se demander si la croissance, loin de constituer le remède, n’augmenterait pas le mal à moyen et à long terme ?

Si, pour atteindre les objectifs de réduction des gaz à effet de serre fixés par le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), il ne faudrait pas, au contraire, comme le mettent en évidence certains auteurs, une très significative diminution du produit intérieur brut (PIB) annuel mondial jusqu’en 2050 ?

Si, verte ou brune, durable ou traditionnelle, la croissance du PIB ne constituerait plus la solution, non seulement parce que le PIB par habitant constitue un instrument de mesure inadapté des  » performances  » des nations, mais aussi parce que l’adoption par tous les pays du monde des standards de vie occidentaux est physiquement impossible – avec ou sans gaz de schiste… ?

Il nous faudrait alors (enfin) remettre la question de la détermination collective des besoins essentiels au coeur du processus de développement, redéfinir le progrès et la richesse et faire en sorte que les plus riches, au Nord et au Sud, comprennent qu’ils partagent avec tous les autres un destin commun, un temps commun.

Pic pétrolier : l’alerte d’un expert du FMI [interview]


http://petrole.blog.lemonde.fr/2012/12/05/pic-petrolier-lalerte-dun-expert-du-fmi-interview/

Michael Kumhof est co-responsable de la modélisation au sein du Fonds monétaire international (FMI). Avec d’autres chercheurs du FMI, il a publié plusieurs études sur le « pic pétrolier« . Ces études recèlent des mises en garde concernant un possible déclin prochain de la production mondiale de pétrole. 

L’inquiétude de M. Kumhof ne trouve aucun écho dans la ligne politique du FMI. Cet économiste allemand de 50 ans n’a pas été appelé à présenter ses travaux devant Christine Lagarde et le reste de la direction du bailleur international. Son travail n’en mérite pas moins l’attention…

Ignorer le pic pétrolier serait « hautement anti-scientifique et même irresponsable », estime Michael Kumhof, co-responsable de la modélisation au FMI. (DR Anna Simonsson)

Pourquoi vous êtes-vous penché sur la question du pic pétrolier ?

Michael Kumhof – Cela fait presque dix ans que je suis préoccupé par cette question. Je ne suis pas certain de quand le déclin de la production mondiale de pétrole risque de commencer. Mais lorsque j’observe l’économie mondiale, je sais que les implications d’un tel déclin seraient si graves qu’en tant que chercheur, je ne peux qu’examiner ce problème avec le plus grand sérieux.

Combien de temps avons-nous encore avant que le déclin commence ?

C’est l’une des choses que nous essayons de déterminer. Un fait est certain : depuis la fin de l’année 2005, la croissance de la production mondiale de pétrole brut est proche de zéro. Si vous ajoutez à cette production le gaz naturel liquide et les formes non-conventionnelles de pétrole, alors la tendance récente devient un tout petit peu plus positive. Mais, si vous regardez seulement le pétrole brut [qui constitue environ 80 % de la production de carburant liquide], alors on pourrait dire que nous avons déjà atteint la production historique maximale.

Si vous prenez en compte la production de carburant liquide dans son ensemble, il est trop tôt pour dire quand le pic de production total interviendra. Des travaux de recherche crédibles suggèrent qu’un tel pic pourrait apparaître très bientôt. Au FMI, dans notre dernière étude, nous avons seulement simulé ce qu’il pourrait se passer lorsque le déclin s’amorcera, quelle que soit la date du pic.

Pouvez-vous décrire le degré de gravité des conséquences d’un possible déclin de la production mondiale de pétrole ?

Supposons qu’à partir d’un certain point dans le futur, la production mondiale de pétrole déclinera de 2 % par an chaque année durant un certain nombre d’années. Notre simulation indique qu’il y aurait alors des effets très importants. Selon notre modèle, le taux de croissance économique serait réduit chaque année de presque 1 % aux Etats-Unis et dans la zone Euro.

 

Cela ne semble pas si catastrophique. 

1 % par an, c’est en soi énorme. Au bout de 20 ans, cela voudrait dire que le PIB serait d’environ 20 % inférieur à la tendance antérieure. C’est tout sauf négligeable.

Mais il faut aussi regarder l’impact sur les prix du pétrole : dans notre simulation, avec un déclin de 2 % par an des extractions, le prix du brut grimperait énormément, de presque 800 % au bout de 20 ans ! Je ne suis pas sûr que l’économie mondiale serait capable de faire face à quelque chose comme ça. En conclusion de notre dernière étude, nous nous demandons si notre modèle ne passe pas à côté de quelque chose : une fois que les prix du baril dépassent un certain niveau, l’impact sur le PIB pourrait être beaucoup plus grand.

Que voulez-vous dire ?

L’effet des prix du pétrole sur le PIB peut être non-linéaire. Cela signifie qu’au-delà de, mettons, 200 dollars le baril, beaucoup de secteurs pourraient être incapables de faire face. On peut penser aux transports : le fret routier, les compagnies aériennes et toute l’industrie automobile souffriraient très gravement d’un prix aussi élevé. Et puis il y aurait un effet domino sur d’autres secteurs de l’économie.

Notre modèle envisage une adaptation relativement douce, dans laquelle les industries parviennent à ré-allouer leurs investissements en direction d’autres sources d’énergie. Il n’est pas évident à mes yeux qu’il s’agit là d’un scénario correct dans le contexte de prix du brut extrêmement élevés. Je ne peux que m’interroger.

Vous reconnaissez que votre modèle connaît des limites lorsqu’il s’agit de simuler l’impact d’un futur déclin de la production mondiale de pétrole. Quelle est l’origine de ce modèle ? 

Il s’agit d’un modèle théorique que nous utilisons depuis longtemps pour simuler l’évolution de l’économie mondiale, notamment dans le cadre des politiques de relance fiscale et face à bien d’autres choses qui vous le savez, occupent les unes des journaux depuis quelques années. Il s’agissait toujours jusqu’ici de simuler des phénomènes purement économiques : bien que très graves, aucun n’a abouti à des résultats hors-norme.

Mais avec [la simulation d’]un prix du baril supérieur à 200 dollars, on entre dans un monde inconnu, en particulier si des prix aussi hauts se maintenaient non seulement pendant quelques mois, mais en quelque sorte pour toujours. C’est tout simplement un monde que l’on ne connaît pas.

Vous soulignez que nous ne sommes pas encore entrés dans ce monde du pic pétrolier. Pourtant, vous insistez sur le fait que la production de brut n’augmente quasiment plus depuis maintenant sept ans, et ce malgré l’envolée des cours du brut. 

Pour l’instant, il est assez dur de démêler ce qui, dans ce « plateau » de la production de brut, est la conséquence de limites géologiques, et ce qui est dû à d’autres facteurs, et en particulier à la crise financière.

Jusqu’ici, la géologie pourrait ne pas être la seule raison pour laquelle la production de pétrole n’augmente pas. Toutefois dans notre étude parue en mai, intitulée « L’avenir du pétrole : géologie contre technologie« , nous montrons que, même si la croissance économique réclamait une croissance de la production pétrolière d’environ 0,8 % par an (ce qui correspond à ce que l’Agence internationale de l’énergie a annoncé), les prix du brut devraient dans ce cas augmenter terriblement, de presque 100 % d’ici à la fin de la décennie !

Notre modèle aboutit à cette conclusion pour plusieurs raisons. La géologie commence indubitablement à limiter notre capacité à accroître la production, tandis que nous savons qu’au contraire des prix du brut élevés n’ont statistiquement qu’un très faible impact sur cette capacité à augmenter les extractions, et qu’ils réduisent peu la demande de pétrole.

Je dois reconnaître toutefois que de nombreuses incertitudes entourent nos prévisions. Il y a par exemple le boom des huiles de schistes aux Etats-Unis, je crois que cela va aider un peu, mais pas tant que ça.

Que pouvez-vous affirmer concernant l’imminence d’un déclin de la production mondiale de pétrole ?

Dans notre dernier article, nous faisons référence à une étude très approfondie publiée en 2008 par le centre britannique de recherche sur l’énergie [pdf], qui constitue à notre avis de loin la meilleure étude publiée jusqu’ici sur le pic pétrolier. Les auteurs de cette étude concluent qu’il est trop tôt pour être tout à fait certain de la date à laquelle le déclin débutera. Mais ils disent également qu’il est quasiment impossible que ce déclin puisse intervenir après 2030. Selon eux, ce déclin commencera plus tôt, avec une forte probabilité qu’il se produise un bon nombre d’années avant 2030.

Une autre étude solide [dirigée par Robert Hirsch, déjà interrogé sur ‘oil man’], qui a été publiée par le ministère de l’énergie américain en 2005 [pdf], montrait que faire face au pic pétrolier nécessiterait un effort d’investissement gigantesque, sans précédent dans l’histoire, afin d’adapter l’infrastructure industrielle. Ce rapport montrait que 10 années, au strict minimum, seraient nécessaires afin de accomplir une telle adaptation sans trop de dégats.

Jugez-vous ces études convaincantes ?

Je ne saurais juger de leur valeur avec une certitude absolue, mais leurs résultats me semblent plausibles.

Vous avez développé ce que vous appelez un « scénario de frontière entropique ». L’entropie n’est pas un concept économique, et l’on ne s’attend pas à le croiser dans une étude du FMI…

Non, malheureusement, ce n’est toujours pas un concept économique. Le concept d’entropie vient de la physique et de la thermodynamique. En gros, ce concept dit que tout système fait face à une dissipation de son énergie. L’énergie ira toujours d’un état de basse entropie à un état de haute entropie, ce qui veut dire que l’énergie tend à se dissiper, allant d’un état concentré à un état diffus, c’est-à-dire techniquement inutilisable. Bien des structures que nous utilisons ont été construites en ayant recours à des quantités énormes d’énergie concentrée, principalement sous forme de carburants fossiles.

Si vous ne touchez pas à ces structures, si vous n’ajoutez pas constamment de l’énergie au système, alors au bout de quelques décennies, ces structures s’effondreront.

Les économistes ont négligé l’entropie, je pense que c’est une erreur. Il y a eu une analyse publiée en 1971 [pdf] par Nicholas Georgescu-Roegen. Avant ça, la toute première personne qui a essayé d’intégrer le concept d’entropie en économie a été Frederick Soddy, prix Nobel de chimie en 1921. Leurs travaux ont eu un certain écho au moment de leur publication, mais ensuite ils ont été à peu près ignorés. Je crois que dans le futur, les économistes devront réfléchir beaucoup plus à l’entropie.

Que diriez-vous du degré de prise de conscience du FMI à propos du pic pétrolier ?

Plusieurs personnes du département de recherche du FMI ont participé à des travaux sur l’avenir du pétrole. Mais nous autres chercheurs ne produisons pas la ligne politique officielle du FMI.

Diriez-vous que la direction politique du FMI ignore le problème ?

Pour le moment, le Fonds monétaire international encourage activement une recherche scientifique impartiale sur la question. Mais jusqu’ici, le FMI n’a pas adopté de position officielle. Nous avons présenté nos travaux en interne, mais uniquement au sein du département de recherche.

Pour ma part, lorsque je regarde les faits, je ne peux tout bonnement plus écarter la perspective géologique [la perspective d’une limite absolue des capacités d’extraction mondiales]. Ecarter cette perspective serait hautement anti-scientifique, et même irresponsable.