Articles du Vendredi : Sélection du 6 mai 2011

A Usurbil, on promeut le « zéro déchet»

Sophie Chapelle
http://alter-echos.org/sur-le-vif/a-usurbil-on-promeut-le-zero-dechet/ – 03.05.11

A la Défense, une fausse manifestation anti-écolo comme outil de propagande

Jacques-Alexandre Brun
Le Monde du 06.05.11

Hervé Kempf : « Fukushima est moins un accident que l’aboutissement d’une série annonciatrice »

Par Linda Maziz
http://www.bastamag.net/article1537.html – 03.05.11

Massiah: “Ezingo gara krisitik atera soilik sistema birmoldatuz”

Jenofa Berhokoirigoin
Berria 2011/05/01

Le consomm’acteur d’hier à aujourd’hui

Sophie Dubuisson-Quellier Sociologue de la consommation, chercheuse au Centre de sociologie des organisations de l’IEP-Paris, elle a publié La Consommation engagée, Presse de Sciences Po, 2009.
www.scienceshumaines.com/le-consomm-acteur-d-hier-a-aujourd-hui_fr_26919.html

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A Usurbil, on promeut le « zéro déchet»

Sophie Chapelle
http://alter-echos.org/sur-le-vif/a-usurbil-on-promeut-le-zero-dechet/ – 03.05.11

La construction de l’incinérateur à Zubieta au Nord de l’Espagne ne fait pas que des heureux. Evalué à 400 millions d’euros, il brûlerait 215 000 tonnes de déchets par an, soit plus de 83 % des déchets générés en Gipuzkoa, province de la Communauté autonome basque. Face aux risques sanitaires encourus par les populations qui habiteraient à proximité du futur incinérateur, la commune d’Usurbil promeut le « Zéro Déchet ». Depuis mars 2009, cette municipalité de 6 000 habitants pratique la collecte sélective par le porte à porte. Et les résultats sont probants : près de 82 % des déchets seraient recyclés ! De quoi questionner l’utilité de la construction d’un incinérateur puisque seuls « 18 % de ce que les habitants génèrent finit dans les décharges » assure le maire d’Usurbil.

Concrètement, ça se passe comment ?

« Pour réussir le porte à porte, il faut d’abord commencer par enlever les conteneurs dans les rues », explique Imanol Azpiroz Artano, adjoint au maire en charge de l’environnement de la commune d’Usurbil. A la place, la commune a installé des caissettes placées à l’extérieur des bâtiments où chaque famille a son espace avec un numéro qui l’identifie. Chaque jour, la commune récupère un type différent d’ordures ménagères. « Par exemple, nous ramassons trois fois par semaine les déchets organiques », précise l’adjoint au maire. Les déchets légers sont ramassés deux fois par semaine, le papier une fois et les éléments non recyclables sont sortis le dimanche. « Par le porte à porte, le déchet cesse d’être anonyme, explique Imanol. Les habitants prennent conscience de leur gaspillage accumulé pendant des années et ils se responsabilisent ».

Composter, une clé essentielle

« L’essentiel est de ne pas tout mélanger » poursuit Imanol. Et les déchets organiques – provenant de matières d’origine animale ou végétale – jouent un rôle clé. « Parvenir au zéro déchet, c’est évidemment commencer par réduire nos déchets mais c’est aussi avoir un compost personnalisé lorsque c’est possible ». La commune entreprend alors un travail de sensibilisation auprès des 600 familles – sur les 6 000 habitants au total – qui disposent d’un bout de terre. 520 familles décident de se lancer dans le compost. De 175 tonnes d’aliments envoyés aux déchetteries un an plus tôt, on passe à 25 tonnes d’aliments après le lancement du porte à porte. « On est ainsi passés d’un modèle linéaire où l’on envoie tout aux déchetteries sans traitement, à un modèle circulaire où l’on enlève nos déchets organiques du système pour les recycler et les faire retourner à la terre », s’enthousiasme Imanol.

Le mouvement « zéro déchet » fait tâche d’huile

La collecte sélective fait tâche d’huile. En 2010, les mairies d’Hernani et d’Oiartzun se joignent à Usurbil pour créer une société publique de traitement de déchets appelée « Garbitania Zéro Déchet ». Une démarche qui fait grincer des dents l’opposition municipale. Après avoir contesté les chiffres donnés par la municipalité d’Usurbil, elle lance un référendum en février 2010 pour réclamer l’instauration d’un système de conteneur et refuser la collecte sélective par le porte à porte. La population garde le cap et choisit la poursuite du porte à porte.

« Nous voulons aller plus loin désormais car il y a beaucoup de zones d’améliorations possibles», explique Imanol. Depuis mars 2010, la commune récupère les déchets – environ 88 % – liés aux zones industrielles et aux centres commerciaux. Partie de Catalogne, la collecte sélective par le porte à porte aurait gagné 18 millions d’habitants en Italie, et n’échapperait pas à San Francisco. Un autre modèle possible face au tout consommation.

Pour aller plus loin, vous pouvez contacter gipuzkoazz(a)gmail.com

A la Défense, une fausse manifestation anti-écolo comme outil de propagande

Jacques-Alexandre Brun
Le Monde du 06.05.11

De jeunes écologistes ont tenté de tordre le cou aux clichés en organisant, mercredi soir, une manifestation sur le parvis de la Défense. “Nous sommes là pour soutenir les groupes industriels victimes des normes vertes liberticides !” Mégaphone à la main, Camille Marguin s’en donne à cœur joie. “Pas d’essence, pas d’croissance !”, s’époumone la jeune militante, avant d’enchaîner : “Le durable c’est pas rentable !”

Sans se faire prier, sa cinquantaine de comparses reprend en cœur les slogans. Ils viennent d’universités et d’écoles parisiennes pour la plupart, n’ont pas plus de 25 ans de moyenne, et campent fièrement au pied de la Grande Arche de la Défense en cette fin d’après-midi du 5 mai. Sous l’œil circonspect des cadres en costumes – nombreux à cette heure de la journée – et des badauds, la troupe entame sa bruyante et joyeuse migration.

Objectif : les tours de Total et Areva. Chaque manifestant tient en main une pancarte outrancièrement anti-écologiste. “Les éoliennes c’est du vent !” voit-on ici. Là on réclame “Plus d’UV, pour mieux bronzer”, “Le nucléaire, c’est de la bombe”, annonce-t-on ailleurs, quand ce n’est pas carrément “L’o-vert-dose” qui est dénoncée.

SENSIBILISER LES JEUNES

Mais en réalité, ces jeunes gens ne sont pas là pour clamer leur mépris de l’écologie. Il s’agit ici d’une fausse manifestation orchestrée par le Réseau français des étudiants pour le développement durable (Refedd). Déjà auteur d’un évènement semblable à Marseille, l’association a décidé de remettre le couvert dans un lieu hautement symbolique de ce qu’elle dénonce comme “l’anti-écologisme”.

Gauthier Rousseau, relais local du Refedd, espère par ce biais “sensibiliser et susciter l’interrogation du grand public, et notamment les jeunes”. Il estime que pour sortir des clichés d’une écologie militante, moralisatrice et culpabilisante : “l’autodérision est un excellent moyen”.

Cependant manier l’humour sur un sujet sensible peut s’avérer dangereux. Si la plupart des passants s’amusent de ces gais lurons un peu provocateurs, quelques écologistes dans l’âme, outrés, font entendre leur point de vue sans y mettre les formes. L’un des organisateurs se charge alors d’expliquer le second degré, pas toujours évident au premier coup d’œil.

“TOTAL C’EST DE LA BALLE !”

Venu en voisin, Olivier Kalousdian, responsable d’Europe Ecologie-Les Verts à Puteaux, salue l’initiative apolitique de l’association. “C’est joyeux, bon enfant et c’est une façon amusante de dénoncer le dédain actuel de l’écologie par le gouvernement”, estime-t-il, tandis que les manifestants s’agenouillent au pied du siège du premier groupe pétrolier français. “Total c’est de la balle !”, scande à l’unisson le petit groupe, avant de se prosterner devant le totem de verre de 48 étages.

“Nous sommes confrontés tous les jours à des personnes qui ne sont pas sensibilisés aux questions environnementales, avec une action comme celle-ci nous espérons les toucher”, explique Camille Marguin, bénévole du Refedd. “Nous voulons qu’ils soient choqués par nos slogans, qu’ils réagissent. Et ça marche !”

Mais avec une cinquantaine de participants, l’impact est tout de même limité. A défaut de convertir massivement à l’écologie, la manifestation aura au moins eu le mérite d’avoir fait sourire bon nombre d’observateurs. Après tout, “On s’en fout des pandas, sauf avec une sauce soja”.

Hervé Kempf : « Fukushima est moins un accident que l’aboutissement d’une série annonciatrice »

Par Linda Maziz
http://www.bastamag.net/article1537.html – 03.05.11

Quels enseignements la France doit-elle tirer de la situation japonaise ? Pour Hervé Kempf, journaliste et essayiste, la situation actuelle met en évidence l’incompétence des experts et des dirigeants français. Le nucléaire fait partie des tabous et idées reçues que l’oligarchie capitaliste ne veut pas remettre en cause. Pour lui, l’enjeu aujourd’hui est d’apporter aux contre-experts un vrai soutien populaire : un engagement conscient des citoyens pour manifester qu’une autre voie est possible. Entretien.

Que représente pour vous la catastrophe de Fukushima ?

Hervé Kempf : C’est un tournant, aussi important que Tchernobyl en 1986, et qui va durablement affecter l’industrie nucléaire et la façon dont on la perçoit. C’est aussi un rappel extrêmement violent de ce que beaucoup d’écologistes disent depuis longtemps, à savoir que le nucléaire n’est pas une réponse satisfaisante au problème du changement climatique. Même si l’énergie nucléaire émet peu de gaz à effet de serre, elle présente d’autres inconvénients insupportables. Notamment, cette possibilité d’un accident nucléaire qui va empoisonner au minimum des centaines de km2 pour des dizaines ou des centaines d’années.

Et encore, on ne mesure pas toutes les conséquences…

Pour l’instant, ce qu’on peut dire de manière quasiment certaine, c’est qu’il y a au moins trois, voire quatre réacteurs de la centrale qui sont irrécupérables. L’enjeu maintenant est de les boucher, pour empêcher les fuites, sachant qu’aujourd’hui, même à petite dose, elles sont manifestes et permanentes. Une fois bouchés, les réacteurs restent extrêmement radioactifs et dangereux. Comme à Tchernobyl, on les recouvrira d’un sarcophage, qui sera une sorte de mausolée supplémentaire de déchets nucléaires.

La France a-t-elle des enseignements à tirer de la situation japonaise ?

La France se trouve dans une situation très comparable. Avec Tchernobyl, c’était différent. Pour faire simple, on n’avait pas à en tirer de conclusions, parce que c’était des Russes et que c’était l’Union soviétique – sous-entendu : un régime irresponsable avec des gens qui maîtrisaient mal la technologie. Avec le Japon, on ne peut pas avoir cette attitude méprisante. C’est quasiment le pays le plus en pointe, avec un niveau technologique incontestable. Indépendamment des événements extérieurs que sont le séisme et le tsunami, on constate que même dans un pays techniquement sophistiqué, il peut y avoir une perte de contrôle et une incapacité à gérer une situation désastreuse qui conduit à une catastrophe écologique.

L’autre rapprochement à faire, c’est qu’au Japon comme en France, le nucléaire a été introduit de manière opaque et antidémocratique, ou plus exactement dans un déni de démocratie. Dans les deux cas, on peut parler d’oligarchie « nucléariste » et d’une connivence entre les responsables politiques et l’industrie, qui a permis d’imposer le nucléaire sans le mettre en débat. Sauf qu’aujourd’hui, les « nucléaristes » ne peuvent plus nier qu’un accident est entré dans le domaine des probabilités. Logiquement, cela doit pousser la société française à interroger sérieusement le nucléaire et au minimum à délibérer ouvertement des questions des déchets, de la sécurité, du coût de cette énergie. Ouvertement, c’est-à-dire avec des informations complètes et exactes, communicables à tous les citoyens. Il s’agit de rompre avec cette impossibilité actuelle de discuter sérieusement du nucléaire.

À entendre les autorités, un accident nucléaire en France est impossible…

Bien sûr que c’est possible. On est passé, le 27 décembre 1999, à deux doigts d’un très grave accident à la centrale française du Blayais, lorsqu’une inondation a mis hors service des pompes essentielles à sa sécurité. Il y a eu des incidents graves ces dix dernières années dans trois pays réputés pour leur sûreté nucléaire. Après la France au Blayais, le 25 juillet 2006 la centrale suédoise de Forsmark a dû être stoppée d’urgence et de même le 16 juillet 2007 pour la centrale japonaise de Kashiwazaki-Kariwa, qui à la suite d’un séisme violent a subi une fuite d’eau radioactive. Au regard de ces précédents, Fukushima est moins un accident que l’aboutissement d’une série annonciatrice. Ce n’est pas une météorite tombée du ciel. Il y a eu des alertes, un accident était prévisible, mais les oligarques n’ont pas tenu compte de ces avertissements.

Chez les observateurs critiques du nucléaires, l’inquiétude se réveille depuis plusieurs années. On constate la montée d’une pression financière, dans une logique de course au profit, de privatisation, qui fait que les soi-disant responsables, tablant sur la renaissance du nucléaire et rivalisant de manière acharnée pour vendre des centrales, poussent à relâcher l’attention sur la sécurité.

Comment interprétez-vous le refus immédiat des autorités françaises d’engager un débat sur l’avenir du nucléaire en France ?

Il est dans la logique de leur mutisme et de leur « aveuglement ». Le nucléaire fait partie des tabous et des idées reçues que l’oligarchie capitaliste ne veut pas remettre en cause. Dans sa logique de pensée figée, la croissance économique, c’est bien, l’augmentation de la consommation d’électricité, c’est inévitable, le nucléaire, c’est bien. Donc, on n’en discute pas, puisque c’est bien ! Leur première réaction a été de dire, sans même avoir réfléchi ni étudié la question, que cet accident ne nous concernait pas, puisque c’était au Japon et à cause d’un tsunami. J’ai fait récemment une enquête sur la sortie du nucléaire qui m’a amené à contacter le cabinet d’Éric Besson. J’ai appris que le ministère de l’Énergie n’a élaboré aucun scénario de sortie du nucléaire, même pas à titre d’étude ou d’exercice d’imagination. Alors que le principal partenaire de la France, l’Allemagne, se prépare sérieusement à cette évolution depuis dix ans !

Cela vous effraie ?

Oui. L’incapacité de ce système, et de ces gens qui se croient les meilleurs, à se remettre en question est effrayante. Et le nucléaire n’en est qu’un exemple parmi d’autres. Pour la crise financière, c’est pareil. On est passé en 2008 juste à côté d’un effondrement économique. Deux ans après, rien n’a changé. Les banques ont repris le haut du pavé, avec les mêmes comportements spéculatifs, le même refus des régulations, les mêmes rémunérations extravagantes. Je suis frappé par leur absence totale d’imagination, par leur incapacité à envisager un autre monde. « There is no alternative » disait Margaret Thatcher et cette pensée unique reste la règle d’or de la classe dirigeante. Le nucléaire en fait partie. Ce que montre Fukushima, c’est l’incompétence des experts et des dirigeants quand ils ne sont pas sous le regard des citoyens : il y a eu un accident gravissime, alors qu’ils juraient que c’était impossible.

Une réponse démocratique est-elle possible face au lobby du nucléaire en France ?

La bataille s’annonce particulièrement difficile parce que l’appareil de pouvoir est totalement gangrené par l’idéologie « nucléariste », qui bénéficie – comme c’est la règle en régime oligarchique – d’un soutien institutionnel et médiatique sans faille. On ne pourra vaincre cette résistance que si, comme dans le cas des OGM ou du gaz de schiste, les gens soutiennent de manière claire et visible ceux qui tiendront le discours de contre-expertise. C’est absolument nécessaire. Face à des gens qui vont s’appuyer sur tout l’appareil du pouvoir économique et institutionnel, les contre-experts ont besoin d’un vrai soutien populaire. La démocratie n’est pas seulement une question d’ouverture du débat, ou de reconnaissance de la légitimité de la contre-expertise : elle suppose un engagement conscient des citoyens pour manifester qu’une autre voie est possible.

Est-ce que la récente victoire des Verts aux élections régionales en Allemagne est une réponse démocratique, et peut en augurer d’autres ?

Oui. Mais en entrant dans un processus de débat démocratique, on va voir que sortir du nucléaire tout en évitant un changement climatique implique des choix qui ne sont pas seulement techniques. Ça inclut aussi une remise en question profonde de l’ordre social, de notre façon de vivre, de l’organisation collective, de la répartition des richesses… Derrière le nucléaire se pose un enjeu d’organisation de la société : sortir du nucléaire suppose avant tout de réduire fortement la consommation d’énergie, et donc de remettre en question les valeurs de surconsommation et de productivisme, qui forment la référence de l’actuel système économique. Alors oui, les Allemands vont se trouver confrontés à ce défi et devront y répondre sans louvoyer.

La catastrophe de Fukushima et l’offensive en Libye sont arrivées presque en même temps. Pour vous, catastrophe nucléaire et guerre pétrolière vont de pair, parce qu’elles sont deux conséquences de la façon dont l’oligarchie impose sa vision au reste du monde ?

Plutôt que d’accepter le changement qu’impose la crise écologique et l’injustice qui déchire nos sociétés, le capitalisme est arrivé à un point de son histoire où il ne trouve plus comme issue que la catastrophe et la guerre. La « protection des populations civiles » de Libye, qui justifie l’entrée en guerre de la France – sans vote au Parlement, ce qui est inconstitutionnel – a bon dos. L’Occident ne dit rien en ce qui concerne la zone d’influence de l’Arabie saoudite, parce qu’elle détient les clés du pétrole.

Nous sommes dirigés par des gens qui en 2007 étaient prêts à vendre des réacteurs nucléaires au gouvernement de Kadhafi, et qui quatre ans plus tard, le découvrent insupportable. Cette intervention en Libye vise le pétrole, point. Elle témoigne aussi qu’après l’Afghanistan, après l’Irak, la tentation de résoudre les problèmes par la violence reste toujours aussi vivace chez l’oligarchie.

Propos recueillis par Linda Maziz /Interview publiée initialement dans la revue Zelium, n°3, 16 avril 2011. À lire aux éditions du Seuil : Hervé Kempf, L’oligarchie ça suffit, vive la démocratie, 2011. Pour sauver la planète, sortez du capitaliste, 2009. Comment les riches détruisent la planète, 2007. Le site d’Hervé Kempf : www.reporterre.net

Massiah: “Ezingo gara krisitik atera soilik sistema birmoldatuz”

Jenofa Berhokoirigoin
Berria 2011/05/01

Mugimendu altermundialistan ezaguna da Gustave Massia (1938, Kairo, Egipto). Gaur egun MGF Munduko Gizarte Foroko Kontseiluko kide da eta Frantziako Attac-eko talde zientifikoan da. Une stratégie altermondialiste liburua atera berri du. 2008ko krisiaren testuinguruan kokatuz, mugimendu altermundialistak dituen galdera, helburu eta norabide estrategikoak aipatzen ditu lan horretan. Bizi! Taldeak Baionan hitzaldi bat ematera gomitatu zuen ostegunean.

Mugimendu altermundialistak bi etapa dituela diozu: berehalakoan liberalismotik ateratzea eta luzera begira kapitalismoa bukatzea. 2008Ko krisiarekin pentsatzen ahal genuen neoliberalismoaren bukaera genuela, baina jarraitzen du.

Bai, sistemak jarraitzen du, baina krisian da. Bi etapa baino gehiago bi apustu ditugula diot. Ez dira bat bestearen ondotik hartu behar; oraindik bi erronkei lotu behar gatzaizkio. Denborari dagokionez, ez dute ber ezaugarria, neoliberalismoaren krisia epe laburrean delako eta kapitalismoarena epe luzeagoan, bien arteko loturaz gogoetatu beharra dugu. Neoliberalismoaren krisia orain duela urte zenbait hasi da eta ez da egunetik biharamunera konponduko. 2008tik geroztik, krisian da, bai ideologiaren alorrean, haien diskurtsoa ez delako gehigo sinesgarria, bai alor sozialean eta politikoan Kapitalismotik atera gabe, neoliberalismotik ateratzeko diren proposamenak, green new deal gisakoak, ezin dira gauzatu, kapitalismo finantzarioak duelako oraindik boterea eta erreformak oztopatzen dituelako. Ber denboran, krisi ekologikoak erakusten digu ez dela bakarrik  neoliberalismoa errudun, baina bai, ordea, kapitalismo osoa. Ez dugu orain arte bezala hazkundearen eta produktibismoaren azkartzearekin aterabiderik atzematen ahal. Sistemaren birmoldatzeekin soilik ezingo gara krisi honetarik atera.

Krisi honetarik ateratzeko bi bide ikusten dituzu: edo sistemaren birmoldaketa, baina beti kapitalismoan geldituz, edo sistema alternatibo bat proposatuz.

Bi aterabide horiez gain, beste bat ere bada, maleruski: gaur egun dugu; boteredunek moldaketa guztiak errefusatzen dituzte. Haien iduriko, krisia pobreei pagaraziz gara krisitik ateratzen, eta pobreek ez badute pagatu nahi, orduan erregimen autoritarioak proposatzen dira. Eskubideen murrizketari esker pagarazten zaie krisia pobreei. Herrien artean desberdintasunak badira, baina hau da nagusitzen gaur egun. Beste bi aukera ere badira: kapitalismoko zati bat ohartzen da horrela ez dela posible, eta birmoldaketa proposamenak egiten dituzte. Baina, ikusiz neoliberalismoaren eta kapitalismoaren krisiaren inportantzia, hori ez da nahikoa; kapitalismoa gainditzeko aukerak bilatzen dabiltza hainbat mugimendu, jabego, ekoizpen, kontsumo molde berri batzuen proposamenak eginez. Helburu hori epe luzeagokoa da, baina gaurdanik hasi behar gara. Estrategia baten beharra dugu Premiazko aterabideak behar ditugu, kontserbadurismoaren eta askatasunen urraketen aurka eta herri xehearen bizi-baldintzak hobetzeko. Ez bada kapitalismotik ateratzea ere, egin daitezke, baina beti urrunago joateko ideiarekin, benetako galderei eta arazoei erantzuteko. Adibidez, ekonomia berdea egin daiteke, baina kapitalismo berdean bagara, gauzak ez dira aldatzen. Ekoizpen eta kontsumo mota berriei buruz gogoetatu beharra dugu. Galdera bakoitzarentzat berehalako formak posible dira, baina haustura proposamenak ere egin behar dira, logika berri bat planteatzeko.

Nola planteatzen da sistema alternatibo bat?

Lau bide dira. Borroka eta erresistentziak sostengatuz, logika nagusiaren errefusa horietan delako egiten eta, batez ere, harreman sozial berrien eraikitzea hor hasten delako. Bigarrenik, lan teorikoak eginez, ez bakarrik  unibertsitarioa, laborariena, langileena edota herri mugimenduena. Hirugarrenik, eskubideen errespetua guztiontzat planteatzen dituzten politika publikoen alde borrokatuz. Eta, laugarrenik gaurdanik gizarte baten eraikitzen hasiz. Iraultza giza harremanen aldaketa delako; ez da baitezpada boterearen hartzea. Kapitalismoa feudalismoaren garaian hasi zen, baina harreman horiek menekoak ziren, ez ziren arras osatuak eta poliki-poliki gauzatu ziren. Beraz, kapitalismoa gainditzen duten giza harremanak zein diren ikusi behar dugu guk ere, nahiz arras osatuak ez izan, badirelako jada. Eta horien garatzeko eta sortzeko gara borrokatu behar gaurdanik. Mugimendu altermundialista horretan dabil.

Munduko Gizarte Foroa irudikatzen dugu, baina hori baino gehiago da zuen mugimendua.

Hori da. Mugimendua ez da MFS bakarrik Mugimenduen bateratzea gara, beti bakoitzaren
berezitasunak kontuan hartuz. Neoliberalismoaren hasieran hasi zen mugimendua. 80Ko hamarkadan gosearen, herrien zorren, Munduko Bankuaren edo NDFren aurkako mezuekin hasi zen. 90Eko hamarkada erdian, prekarietatearen gaiarekin garatu ze, baita populuen eskubideen aldarrikapenekin, eta 2000tik goiti dute MSFk forma berri bat erakutsi. Aitzineko burujabetza borroken jarraipenean kokatzen gara.

Guztientzako eskubideen errespetua aldarrikatzen duzuen. Mundu mailan, nola ikusten duzu hori egingarri eta batez ere errespetatua?

Maila anitz badira. Eskubideen adierazpena bada, beharrezkoa dena. XVIII. Mendean eskubide zibil eta politikoak aldarrikatu ditugunean, hauen adierazpenarekin hasi gara. Gaur egun, eskubide berri batzuk hein horretan dira: eskubide ekologikoak eta zirkulazio eskubidea. Mugimenduak eskubide zaharrak berriz hartzen ditu, eta eskubide berrial aldarrikatzen  ere bai. Ondotik, hauek ezagutuak eta ziurtatuak izan behar dira. Nola? Proposamen politikoen bidez. Oso zaila da, gizartean kontraerranak badirelako; badira borroka sozialak, klase borrokak, eta gizartearen  zati batek, boterea duenak gehienetan, eskubideak denentzat izan daitezen. Asmakuntza politikoa galdatzen duen borroka luzea da. Gaur egun, adibidez, nazioarteko eskubideen garapenean gara. Baina adierazpenean gara soilik, ez dugulako oligarkiaren boterearen zalantzan ezartzeko aukerarik.

Le consomm’acteur d’hier à aujourd’hui

Sophie Dubuisson-Quellier Sociologue de la consommation, chercheuse au Centre de sociologie des organisations de l’IEP-Paris, elle a publié La Consommation engagée, Presse de Sciences Po, 2009.
www.scienceshumaines.com/le-consomm-acteur-d-hier-a-aujourd-hui_fr_26919.html

Des premières ligues du XIXe siècle aux acteurs du commerce équitable d’aujourd’hui, les consommateurs ont toujours été appelés à se mobiliser, avec pour ligne d’horizon la figure du consommateur citoyen.

«Devenez consomm’acteurs!», «La consomm’action a le vent en poupe!», titrent actuellement magazines, sites Internet et guides d’achat. À en croire ces publications, deux figures que l’on oppose souvent seraient sur le point de se réconcilier: le consommateur et le citoyen. Le premier, individualiste, égoïste et matérialiste, se parerait des vertus altruistes du second. Mieux, le consommateur pourrait enfin s’émanciper des produits et des modes de vie que le marché conçoit pour lui. Il deviendrait non seulement autonome dans ses choix mais contribuerait même à la régulation de la société de consommation.

L’essor contemporain du consommateur-citoyen est-il à ce point nouveau ? La dialectique entre «bonheur privé et action publique», pour reprendre le titre d’un célèbre essai d’Albert Hirschman (1), n’est-elle pas au contraire au cœur des sociétés de consommation depuis que celles-ci se sont développées dès la fin du XVIIIe siècle ? On se doit en effet de rappeler que la première mobilisation politique à avoir tenté d’influer sur le cours des choses en prenant pour cible la consommation est déjà vieille de plus de deux cents ans. Mieux, dès lors que l’on déroule les généalogies de la consommation engagée d’aujourd’hui, on s’aperçoit que les objectifs, les méthodes et les difficultés ont peu varié depuis les origines.

La Tea Party ou le début des boycotts

Première généalogie, celle de toutes les initiatives qui tentent de faire du consommateur un agent du changement économique et social. Défense de l’environnement ou des droits salariaux, lutte contre la pauvreté, autant de causes dont tout un chacun pourrait s’emparer à travers ses comportements d’achat. Ainsi, depuis une quinzaine d’années, les associations de commerce équitable invitent les consommateurs des pays du Nord à aider, grâce à leurs achats, les petits producteurs du Sud à sortir des situations de précarité dans lesquelles ils se trouvent.

Aussi innovatrice qu’elle puisse paraître, cette idée n’a rien de neuf. On la retrouve notamment au cœur des boycotts révolutionnaires qui ont précédé la guerre d’Indépendance américaine. Après le vote par le Parlement de Grande-Bretagne à la fin des années 1760 des lois qui instaurent des taxations sur les produits importés, la résistance des colons américains s’organise contre les produits de l’Empire. L’action la plus célèbre demeure la campagne contre le thé anglais qui culmina avec la fameuse Tea Party de 1773, lorsque les colons jettent massivement le thé dans la baie de Boston. Ce qui ne s’appelle pas encore un boycott (le mot n’est inventé qu’en 1880) traduit bien l’idée d’un ostracisme politique et social à l’endroit de ceux avec qui l’on ne veut plus commercer.

À cette époque, les relations économiques apparaissent comme un terrain propice pour faire ou défaire des solidarités et les identités citoyennes en devenir s’articulent assez naturellement avec des actions autour de la consommation. Dès lors, le boycott de masse peut jouer un rôle important dans la construction de l’identité nationale américaine. La Tea Party demeurera l’événement de référence pour beaucoup de mouvements de consommateurs qui s’en réclameront par la suite, probablement parce qu’il symbolise la possibilité d’une articulation entre l’action individuelle et collective, entre le geste de consommation et l’engagement citoyen.

Une telle filiation est explicitement revendiquée par le mouvement du Free Produce qui apparaît dans les années 1820 aux États-Unis. À cette époque, une partie –minoritaire– du mouvement abolitionniste décide d’encourager les consommateurs à ne pas acheter de produits fabriqués par les esclaves et reprend à cet effet la stratégie du boycott. Mais ils mettent aussi en œuvre ce que l’on appellerait aujourd’hui des actions de «buycott» (de l’anglais buy, acheter) : ils promeuvent l’achat de produits conformes à la cause qu’ils défendent, en l’occurrence des sucres et du coton issus du travail libre. Le premier magasin de «produits libres» est inauguré à Boston en 1826.

Préfigurant les difficultés que les mouvements contemporains ont pu rencontrer eux aussi dans l’organisation de telles actions, ces démarches vont se heurter à des problèmes d’approvisionnement et de qualité difficiles à résoudre, puisqu’il leur faut monter de toutes pièces des filières alternatives. Il reste que ce mouvement Free Produce constituera une expérience pionnière dans la construction d’une solidarité entre consommateurs et producteurs. Une solidarité que l’on retrouvera dans nombre d’initiatives par la suite, qu’il s’agisse des appels aux boycotts lancés par l’American Federation of Labor au début du XXe siècle aux États-Unis pour défendre les droits des travailleurs, ou du commerce équitable de nos jours.

La citoyenneté économique

Deuxième généalogie, celles des initiatives s’attachant à promouvoir l’idée d’une consommation responsable. Une responsabilité qui tiendrait à la capacité des consommateurs à ne pas se préoccuper seulement de la satisfaction de leurs désirs, mais à prendre en compte les effets néfastes de leur consommation sur la collectivité, et particulièrement les impacts environnementaux de leurs modes de vie. Diverses associations mais également les pouvoirs publics s’attachent à promouvoir de tels comportements lorsqu’ils tentent d’inciter le public à acheter des produits de saison, à limiter les déplacements en véhicule individuel, à isoler sa maison ou encore à éviter les produits suremballés.

Un tel déplacement des comportements de consommation est au cœur de la notion de citoyenneté économique qui traverse tout le XXe siècle. Cette idée a d’abord été défendue par des mouvements comme la Women’s Cooperative Guild en Angleterre (2) qui, au début du XXe siècle, considérait que les consommateurs et, plus largement, la société civile pouvaient contribuer à la régulation des marchés. Ce principe a également été fortement mis en avant aux États-Unis à la même période, lors de très nombreuses manifestations, piquets et boycotts organisés par des associations féminines, qui entendaient lutter contre les hausses de prix des denrées de base (lait, pain ou viande), dues à la formation de grands cartels d’industriels. La National Consumer League est probablement le mouvement le plus emblématique de cette démarche. Fondée en 1891 à New York (3) mais fédérant de très nombreuses ligues locales, cette association entendait contribuer à l’éducation morale des consommateurs en leur fournissant des «listes blanches» d’ateliers qui n’employaient pas d’enfants et ne faisaient pas travailler les femmes de nuit. La «White Label Campaign» créa ainsi un «label blanc» afin d’aider les consommateurs à repérer les produits issus de ces ateliers. Depuis leur origine, de telles démarches entendent placer les consommateurs au cœur de la régulation économique, mais se doublent également d’une importante action de lobbying auprès des pouvoirs publics dans le but d’amender les conduites des entreprises ou des banques, notamment par l’adoption de régulations plus strictes.

Ne souhaitant pas laisser aux seuls mouvements sociaux la gouvernance politique des problématiques de consommation, les pouvoirs publics favoriseront alors l’institutionnalisation du mouvement consumériste. Celui-ci commence à se consolider après 1945 aux États-Unis et en Angleterre et à la fin des années 1960 en France. Il prend la forme d’associations œuvrant à la protection des droits des consommateurs et portant leur parole aussi bien dans les instances publiques qu’au sein des entreprises. Un nouveau contrat social se noue alors –ce que l’historienne Lizabeth Cohen a appelé la «république des consommateurs» – qui associe les organisations de consommateurs à la bonne marche d’un modèle de croissance qui repose sur la consommation de masse. La poursuite des intérêts individuels des consommateurs doit s’articuler harmonieusement avec les objectifs citoyens, selon l’idée qu’en consommant chacun assure aussi bien son bien-être que celui de la collectivité.

À partir des années 1990, lorsque les revendications environnementalistes et altermondialistes montent en puissance, cette harmonie se fracture. Alors que les nouveaux réseaux militants s’attachent à reposer la question de la responsabilité environnementale et sociale des consommateurs, ils sont conduits à renouer avec les formes originelles de la citoyenneté économique, celles qui s’étaient exprimées à la fin du XVIIIe siècle.

Amap et grande distribution ?

Troisième généalogie, celle des relations ambiguës que les organisations contemporaines entretiennent avec la société de consommation. De nombreux débats agitent aujourd’hui les réseaux associatifs qui cherchent à mobiliser les consommateurs. Au tournant des années 2000, les différents acteurs du commerce équitable ont ainsi vivement débattu sur l’opportunité de coopérer avec la grande distribution, laquelle souhaitait se doter de labels «équitables». Le mouvement des amap (associations pour le maintien d’une agriculture paysanne), qui organise des contrats entre des producteurs agricoles locaux et des consommateurs pour la livraison de paniers de fruits et légumes bio, se divise régulièrement au sujet des liens qu’il doit entretenir –ou non– avec des formes marchandes plus conventionnelles. Les producteurs doivent-ils nécessairement être certifiés en agriculture biologique? Doivent-ils offrir des gammes larges ou restreintes de produits ? Doivent-ils définir leurs prix en fonction du marché ? Doivent-ils coopérer avec la grande distribution ?

Un tel questionnement n’est pas nouveau. En France, mais également dans d’autres pays, l’histoire du mouvement coopératif a été marquée par les tensions qu’il a connues au tournant du XXe siècle pour savoir si son modèle devait ou non s’adapter aux innovations commerciales alors en plein essor. Le cas déjà cité du mouvement Free Produce montre que les mouvements de mobilisation de consommateurs ne se sont jamais interdits de s’inspirer très fortement des modèles commerciaux disponibles, ni même de s’appuyer sur les dynamiques de la société de consommation.

On sait que les mouvements pour les droits civiques des Noirs ont très fréquemment mobilisé les consommateurs pour soutenir leur cause, notamment à travers les actions de boycott, non seulement des bus mais aussi des espaces publics et marchands, comme le suggérait la campagne des années 1930 «Don’t buy where you can’t work». On sait moins en revanche que ce mouvement a aussi créé des magasins. Les coopératives gérées et fréquentées par les Noirs posaient alors explicitement le principe d’une revendication de plein droit à la citoyenneté par la maîtrise des moyens d’accès à la consommation. De même, le boycott du raisin de table organisé par Cesar Chavez dans les années 1970 aux États-Unis et qui visait à défendre les droits syndicaux des ouvriers agricoles, allait de pair avec la création d’un label, inspiré de la tactique de la National Consumer’s League, qui permettait aux consommateurs d’identifier le raisin issu des exploitations syndiquées. Bref, on ne peut donc qu’être frappé de l’abondant usage que les mobilisations de consommateurs ont toujours fait des techniques de la société marchande : label, publicité, innovations commerciales.

Frugalité, simplicité, décroissance

Ces nombreux exemples soulignent à quel point les mouvements de consommateurs entretiennent des relations nombreuses et ambiguës avec la société de consommation. Mais l’inverse est aussi vrai, le marché et la société de consommation se sont toujours beaucoup nourris de ces critiques. De même que les mouvements noirs américains ont été réinterprétés comme des aspirations culturelles auxquelles les firmes ont répondu par des offres ciblées, le commerce équitable et l’agriculture biologique trouvent aujourd’hui leur place sur les étalages des grandes surfaces. Il conviendrait aussi de regarder plus précisément la manière dont la société de consommation a repris les critiques que lui ont opposées les mouvements ascétiques dès le XVIIIe siècle, pour réinterpréter les trajectoires possibles des discours contemporains sur la frugalité, la simplicité ou la décroissance. Les mouvements de consommateurs ont régulièrement aiguillonné le développement de la société de consommation.

Il serait cependant erroné de réduire ces démarches critiques à leur seule portée marketing. Les mouvements mobilisant des consommateurs ont aussi fréquemment permis de redéfinir les termes de la société de consommation autour d’objectifs collectifs, qu’il s’agisse de la santé publique et de la sécurité ou aujourd’hui de l’environnement et de la justice économique et sociale.

NOTES

(1) A.O. Hirschman, Bonheur privé, action publique, 1983, rééd. Fayard, 2006.
(2) F.Trentmann, «Bread, milk and democracy. Consumption and citizenship in twentieth century Britain», in M. Daunton et M.Hilton (dir.), The Politics of Consumption. Material culture and citizenship in Europe and America, Berg, 2001.
(3) K.Kish Sklar, «The consumers’ White Label of the National Consumers’ League, 1898-1918 », in S.Strasser, C.McGovern et M.Judt (dir.), Getting and Spending. American and European consumption in the twentieth century, Cambridge University Press, 1998.