Articles du Vendredi : Sélection du 5 avril 2013

En Antarctique, le réchauffement provoque une extension de la banquise

AFP
www.lemonde.fr/planete/article/2013/03/31/en-antarctique-le-rechauffement-provoque-une-extension-de-la-banquise_3151102_3244.html

Nos hivers seront-ils plus froids dans un monde plus chaud ?

Stéphane Foucart
www.lemonde.fr/planete/article/2013/03/28/nos-hivers-seront-ils-plus-froids-dans-un-monde-plus-chaud_3149280_3244.html

Le climatologue franc-tireur James Hansen quitte la NASA

EAudrey Garric
www.lemonde.fr/planete/article/2013/04/03/james-hansen-climatologue-franc-tireur-quitte-la-nasa_3152722_3244.html

La France esquisse ses premières pistes pour une fiscalité écologique

Rémi Barroux
www.lemonde.fr/planete/article/2013/04/02/la-france-mauvaise-eleve-de-l-europe-esquisse-ses-premieres-pistes-pour-une-fiscalite-plus-verte_3151800_3244.html

Les collectivités, chevilles ouvrières des circuits courts

Michel Tendil
www.localtis.info/cs/ContentServer?pagename=Localtis/LOCActu/ArticleActualite&cid=1250265008689 – Développement territorialPublié le vendredi 22 mars 2013

FSM : un Espace climat hors des enceintes confinées des Nations-Unies

Maxime Combes, membre d’Attac France et de l’Aitec, engagé dans le projet Echo des Alternatives (www.alter-echos.org)
http://blogs.mediapart.fr/edition/forum-social-mondial-2013/article/030413/fsm-un-espace-climat-hors-des-enceintes-confinees-des-nations-unies

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En Antarctique, le réchauffement provoque une extension de la banquise

AFP
www.lemonde.fr/planete/article/2013/03/31/en-antarctique-le-rechauffement-provoque-une-extension-de-la-banquise_3151102_3244.html

Alors que la banquise arctique fond à vue d’œil, le réchauffement de la planète se traduit actuellement par une extension de la banquise autour de l’Antarctique, une conséquence possible de la fonte accélérée des glaces qui recouvrent le continent, selon une étude néerlandaise publiée dimanche 31 mars.

D’après l’étude, publiée dans la revue Nature Geoscience, l’eau douce issue de la fonte des « langues de glace », qui prolongent la calotte continentale dans l’océan, s’accumule en une couche plus froide en surface des eaux. Cela favorise la formation de glace de mer (ou banquise). L’accélération de la fonte des « langues de glace » avec le réchauffement expliquerait donc ainsi l’extension de la banquise autour du continent.

RECORD EN 2010

« En contraste avec la glace de mer en Arctique, la glace de mer entourant l’Antarctique s’est étendue, avec un record en 2010 », écrivent les chercheurs de l’Institut royal de météorologie des Pays-Bas. Ce phénomène, qu’une étude parue en 2012 attribuait aux courants atmosphériques, constitue une « puissante rétroaction négative » au réchauffement atmosphérique de l’hémisphère sud, selon eux.

« C’est un travail important et nouveau, il propose une nouvelle explication de l’extension de glace de mer qui a augmenté récemment dans certains secteurs autour de l’Antarctique », a indiqué à l’AFP la paléoclimatologue française Valérie Masson-Delmotte, du Laboratoire des sciences du climat et de l’environnement (LSCE).

Cette étude « a des implications importantes pour l’évolution du bilan de masse de l’Antarctique au cours des prochaines décennies », a-t-elle estimé, rappelant que la fonte des calottes du Groenland et de l’Antarctique contribue pour un tiers à la hausse du niveau de la mer (un tiers étant dû à la dilatation thermique des océans et le dernier tiers à la fonte des glaciers de montagnes).

RÔLE POSSIBLE DES VENTS

Pour Paul Holland, océanographe polaire au British Antarctic Survey, le centre de recherche britannique, l’étude ne démontre toutefois pas formellement le lien entre la fonte des langues de glace de la calotte antarctique et l’extension de la banquise.

« Il y a d’autres explications plausibles à l’augmentation de la banquise en Antarctique », écrit dans un commentaire ce chercheur, coauteur en 2012 d’une étude sur le rôle possible des vents pour expliquer ce phénomène. « Les changements dans les vents modifient la couverture de glace à la fois en dispersant directement la glace ou en apportant des masses d’air plus chaudes ou plus froides au-dessus de l’océan, conduisant à plus ou moins de gel », estime-t-il.

Nos hivers seront-ils plus froids dans un monde plus chaud ?

Stéphane Foucart
www.lemonde.fr/planete/article/2013/03/28/nos-hivers-seront-ils-plus-froids-dans-un-monde-plus-chaud_3149280_3244.html

Importantes chutes de neige sur les îles britanniques, coupures d’électricité en cascade sur l’ensemble du Royaume-Uni, aéroports paralysés à New York, Philadelphie ou Washington… La vague de froid qui, depuis mi-mars, touche l’Europe et l’Amérique du Nord est « tout à fait exceptionnelle, par sa durée et son étendue », assure Patrick Galois, prévisionniste à Météo-France.

Elle s’inscrit dans la foulée d’un hiver 2012-2013 plutôt froid, s’inscrivant lui-même dans une suite de plusieurs hivers assez rigoureux. « En France, depuis 2008, les hivers sont soit franchement, soit légèrement en dessous de la moyenne des trente dernières années », résume M. Galois.

Sur les deux à trois dernières décennies, ajoute le climatologue Christophe Cassou, chercheur (CNRS) au Centre européen de recherche et de formation avancées en calcul scientifique (Cerfacs), « on ne constate pas en Europe de tendance significative au réchauffement en hiver, au contraire des autres saisons ». Selon M. Cassou, cette singularité tient surtout à « la grande variabilité naturelle de la saison hivernale ».

De récents travaux vont plus loin et suggèrent que la réduction de la banquise arctique, particulièrement marquée depuis 2007, facilite la formation de hautes pressions atmosphériques dans l’Arctique. Or cette configuration favorise la phase négative d’une oscillation de l’atmosphère appelée Oscillation nord-atlantique (NAO) – on parle d’une NAO négative – fréquemment associée à des descentes d’air polaire sur l’Europe et l’Amérique du Nord.

UN LIEN AVEC LA BANQUISE

La vague de froid actuelle est précisément attribuée à ce phénomène. Avec le réchauffement en cours, le déclin de la banquise arctique, déjà très engagé, semble inéluctable. En septembre 2012, un nouveau record a été battu. Est-ce à dire que les hivers européens et américains sont condamnés à être plus froids dans un monde plus chaud ?

Une étude conduite par Vladimir Pethoukov (Potsdam Institute for Climate Impact Research) et publiée voilà près de trois ans dans Journal of Geophysical Research le soutient. Daté de l’automne 2010, le communiqué annonçant sa publication a même été triomphalement réexpédié tel quel à la presse, lundi 25 mars – manière pour l’institut de recherche allemand de mettre en avant le succès prédictif au moins apparent des travaux de son chercheur.

« Depuis, plusieurs études suggérant un lien entre la récurrence récente de NAO négatives et l’englacement réduit de l’océan Arctique ont été récemment publiées, dit David Salas y Mélia, chercheur au Centre national de recherches météorologiques (Météo-France, CNRS). Mais il n’y a aujourd’hui aucun consensus dans la communauté scientifique. »

Ainsi, pour Christophe Cassou, « un effet de la banquise arctique sur les hivers européens a plus de chances d’être sensible au début de l’hiver qu’au mois de mars« .

Le climatologue franc-tireur James Hansen quitte la NASA

EAudrey Garric
www.lemonde.fr/planete/article/2013/04/03/james-hansen-climatologue-franc-tireur-quitte-la-nasa_3152722_3244.html

Il est célèbre pour avoir le premier alerté le public sur l’influence des activités humaines sur le changement climatique. Le climatologue engagé James Hansen a quitté la NASA, où il dirigeait le principal laboratoire de science climatique, l’Institut Goddard des études spatiales (GISS), mardi 2 avril, après quarante-six ans de carrière et la publication de moultes études sur le réchauffement de la planète.

A 72 ans, le scientifique aspire à une plus grande liberté pour mener son action militante en faveur du climat, un engagement qu’il qualifie « d’obligation morale ». Dans un e-mail au New York Times, il indique quitter l’agence spatiale pour « pouvoir se consacrer entièrement à la recherche scientifique, mobiliser l’attention des jeunes sur les implications du réchauffement et expliquer ce que la science recommande ».

Selon le quotidien américain, James Hansen envisage ainsi de jouer un rôle plus actif dans les actions en justice menées au nom de l’écologie, comme pour reprocher au gouvernement son incapacité à limiter les émissions de dioxyde de carbone. Il prévoit en outre de faire du lobbying auprès des décideurs politiques européens – parmi les plus sensibles au changement climatique – et espère parvenir à taxer le pétrole extrait des sables bitumineux au Canada, une énergie fossile particulièrement polluante et largement consommée aux Etats-Unis. « En tant qu’employé du gouvernement, vous ne pouvez témoigner contre le gouvernement », justifie-t-il.

TENSIONS AVEC SA HIÉRARCHIE

Ces dernières années, James Hansen était pourtant déjà devenu un militant. Il s’était ainsi mis à plusieurs reprises en congé de la NASA pour participer à des manifestations pour le climat. Il avait par ailleurs été arrêté et cité à comparaître une demi-douzaine de fois, comme en automne 2009, après avoir passé la nuit dans un parc à Boston avec des étudiants tentant de faire pression sur l’Etat du Massachusetts pour qu’il adopte une loi sur le climat.

Un engagement personnel qui lui a valu des tensions avec sa hiérarchie et le gouvernement fédéral, particulièrement sous l’administration du président George W. Bush. Il s’est ainsi vu un moment interdit de parler à la presse, avant de révéler au New York Times que son travail était soumis à une censure politique visant à ne pas fragiliser les positions de la Maison Blanche.

Au-delà des pressions politiques, certains de ses collègues ont eux aussi vertement critiqué son action militante et son manque de retenue, estimant qu’il prêtait le flanc aux attaques des climatosceptiques et desservait au final la lutte contre le changement climatique.

Exemples de ces dérapages : fin 2007, témoignant devant une commission chargée de statuer sur la construction d’une centrale à charbon dans l’Iowa, il avait comparé les convois de houille aux « trains de la mort » sillonnant l’Europe à destination des camps d’extermination nazis pendant la seconde guerre mondiale. Il accusait en outre régulièrement ses adversaires climatosceptiques de perpétrer des « crimes contre l’humanité ». Franc-tireur, il a aussi déçu jusqu’aux rangs écolos, notamment en promouvant activement l’énergie nucléaire.

À L’AVANT-GARDE DE LA SCIENCE DU CLIMAT

Malgré tout, une partie de la communauté scientifique lui a témoigné un soutien indéfectible,  admirant sa volonté de risquer sa carrière pour ses convictions. « Ces dernières années, il était allé au bout de ses idées. Il est parfois allé trop loin, mais c’est une bonne chose que de grands scientifiques comme lui s’engagent pour défendre une telle cause. Il a énormément apporté à la compréhension du climat », juge le climatologue français Jean Jouzel, lui aussi passé par le GISS.

« James Hansen a été à l’avant-garde de quasiment toutes les avancées conceptuelles dans la science du climat depuis quarante ans, confirme le directeur adjoint du GISS, Gavin Schmidt, dans un courrier au New York Times. Ce que Jim a écrit il y a vingt ans a donné le ton à tout ce champ de recherche et ses prédictions se sont généralement concrétisées, malheureusement pour la planète. »

SENSATION DEVANT LE CONGRÈS

Quand James Hansen, originaire d’une petite ville de l’Iowa, commence sa carrière au GISS en 1967, comme chercheur post-doctorant, c’est pour étudier Vénus, jumelle de la Terre devenue fournaise. Mais au cours des années 1970, la préoccupation grandit quant au réchauffement de la Planète bleue. Hansen change de téléobjectif et commence à publier des articles scientifiques démontrant les effets majeurs de la hausse des températures sur la planète, tels que la hausse du niveau des mers.

En 1988, par un été caniculaire, ses recherches sur le changement climatique sortent des laboratoires pour entrer dans le débat public. Auditionné par une commission du Sénat, celui qui est alors directeur du GISS depuis sept ans fait sensation en annonçant être certain à « 99 % » que le climat terrestre était entré dans une période de réchauffement provoqué par les activités humaines et non la variabilité naturelle du climat.

Devenu une figure publique, il s’emploie, à l’aide de modèles climatiques et relevés satellites, à confirmer le changement climatique en cours, parfois avec un certain manque de réserves. Mais les événements ultérieurs n’ont cessé de confirmer ses dires. Les dix-neuf années les plus chaudes depuis le début des relevés de température en 1880 se sont toutes produites depuis son premier discours devant le Congrès. Et une température mensuelle mondiale inférieure à la moyenne du XXe siècle n’a plus été observée sur Terre depuis le mois de février 1985.

La France esquisse ses premières pistes pour une fiscalité écologique

Rémi Barroux
www.lemonde.fr/planete/article/2013/04/02/la-france-mauvaise-eleve-de-l-europe-esquisse-ses-premieres-pistes-pour-une-fiscalite-plus-verte_3151800_3244.html

Aligner les taxes du diesel sur celles de l’essence. Introduire une fiscalité du carbone. Instaurer un seuil minimal de densité dans certaines zones pour lutter contre l’étalement urbain… Telles sont quelques-unes des pistes présentées, mardi 2 avril, par l’économiste Christian de Perthuis, président du Comité pour la fiscalité écologique (CFE).

Deux avis, sur « l’introduction d’une assiette carbone dans la fiscalité française » et « la fiscalité et l’artificialisation des sols », ont été adoptés le 28 mars lors d’une séance plénière du comité installé par les ministères de l’écologie et de l’économie à la mi-décembre 2012, et composé de représentants du patronat, des syndicats, d’associations de défense de l’environnement, des collectivités territoriales ou encore de parlementaires. Deux autres projets d’avis, non encore votés, ont aussi été présentés : l’un sur « l’écart de taxation entre le gazole et l’essence », l’autre, assez technique, sur la création d’une taxe sur les liquides frigorigènes utilisés dans les systèmes de refroidissement.

Sans appeler explicitement au retour d’une taxe carbone – un dispositif prévu dans la loi de finances 2010 et censuré par le Conseil constitutionnel – notamment pour « rupture du principe d’égalité devant les charges publiques » –, le CFE entend poursuivre les actions de réduction des émissions de CO2. Il souhaite « qu’un instrument fiscal lié au carbone vise à modifier les comportements liés à la production et à la consommation« , en ligne avec les propositions de la Commission de Bruxelles, dans le cadre de la révision de la directive européenne sur l’énergie.

RÉDUIRE L’ÉCART DE TAXATION ENTRE LE GAZOLE ET L’ESSENCE

Cette « assiette carbone » doit encore être étudiée, pour évaluer son incidence sur la compétitivité des entreprises, l’emploi et le pouvoir d’achat des ménages. « Le gouvernement doit travailler sur ce scénario pour nous fournir, d’ici juin, une réelle étude d’impact », commente Lorelei Limousin, du Réseau Action Climat.

S’agissant de la fiscalité du diesel, un dossier surveillé de près par les constructeurs automobiles français, le projet d’avis mentionne explicitement la nécessité de réduire « progressivement » l’écart de taxation entre le gazole et l’essence. Les avantages fiscaux concédés au diesel ont représenté quelque 3 milliards d’euros en 2011. Une source d’économie dont l’affectation reste à discuter. « Cet argent doit servir à financer la transition énergétique, pas le déficit public ou le crédit d’impôt compétitivité emploi », préviennent les ONG.

Alors que la France se situe en queue de peloton des pays européens pour la part de fiscalité environnementale dans la fiscalité globale – 4,2 % des prélèvements obligatoires contre 6,2 % en moyenne européenne –, et que la Cour des comptes a rappelé au gouvernement, dans un référé du 9 janvier, la nécessité de « mettre en œuvre rapidement les taxes prévues par le Grenelle et de procéder à la mise en cohérence de la fiscalité des carburants (…) pour modifier les comportements », le comité avance prudemment.

« DÉBOUCHER SUR DES PROPOSITIONS CONSENSUELLES »

Invité à rendre « un premier train de propositions opérationnelles au printemps 2013, en vue de leur inscription au projet de loi de finances pour 2014 », selon la lettre de mission signée par les deux ministres, Pierre Moscovici et Delphine Batho, le CFE ne devrait finaliser ses recommandations qu’à la mi-juin. « Ces questions complexes visent le moyen terme mais impactent aussi le court terme, explique M. de Perthuis. Il faut réaliser un diagnostic partagé par toutes les composantes, aux sensibilités très différentes, et déboucher sur des propositions consensuelles. »

La crise est toujours là et, proclame le Medef, il s’agit de ne pas nuire aux entreprises. « Il faut trouver la voie étroite pour que le verdissement de la fiscalité soit un facteur de compétitivité « , analyse encore M. de Perthuis. Si le comité avance trop lentement pour certaines ONG, pas question de tirer à boulets rouges sur lui. « Compte tenu de notre retard, nous avons besoin qu’il fonctionne et fasse des propositions pour le prochain budget, prévient Céline Mesquida, de France Nature Environnement. Pour le diesel, par exemple, le diagnostic dit enfin clairement les choses, c’est quand même très engageant. »

Les collectivités, chevilles ouvrières des circuits courts

Michel Tendil
www.localtis.info/cs/ContentServer?pagename=Localtis/LOCActu/ArticleActualite&cid=1250265008689 – Développement territorialPublié le vendredi 22 mars 2013

Recyclage des déchets, développement des éco-filières, écologie industrielle, transition énergétique : les circuits courts ne se limitent pas à l’agro-alimentaire et concernent tout le champ de « l’économie verte ». Un rapport de l’Institut CDC pour la recherche en partenariat avec le programme Leed de l’OCDE souligne le rôle moteur des collectivités pour changer de vitesse.

Le bon sens près de chez vous contre la mondialisation anonyme ? Le scandale de la viande de cheval a remis au goût du jour les « circuits courts » alimentaires. Rien de très nouveau en apparence, plutôt un retour au vieux mode de production-consommation d’avant-guerre… Après avoir disparu pendant les Trente Glorieuses et les expériences communautaires des années 70 mises à part, les circuits courts sont réapparus par le biais des Amap (associations pour le maintien d’une agriculture paysanne), essentiellement dans le Sud-Est, région pionnière, le Nord et l’Alsace… L’Ile-de-France n’est pas en reste. A la frontière entre l’agglomération de Cergy-Pontoise et le parc naturel régional du Vexin, par exemple, la Bergerie de Villarceaux, spécialisée en agriculture biologique, tente de redonner vie aux échanges entre la ville et la campagne…

Mais les circuits courts ne se limitent pas à l’agro-alimentaire. Tous les secteurs dits de « l’économie verte » font aujourd’hui l’objet d’expérimentations. L’agglomération de Plaine Commune, en Ile-de-France, a par exemple engagé une démarche d’agenda 21 et réfléchit à la promotion d’éco-industries sur le territoire. La commune de Peyrelevade, en Corrèze, s’est fixé un objectif d’autonomie énergétique, tout en relançant la filière bois. Ville moyenne durement touchée par la désindustrialisation, Saint-Dié-des-Vosges mise pour sa part sur la reconstruction d’une chaîne de valeur qui va de l’enseignement supérieur à la production industrielle. Parallèlement, la ville poursuit une politique énergétique fondée sur les énergies renouvelables et la ressource locale…
Mais c’est peut-être la ville de Genève qui offre l’exemple le plus abouti. Elle a développé de nouveaux circuits innovants en matière d’énergie, de recyclage ou de financement de projets…

Ces cinq territoires ont été passés au crible dans un rapport intitulé « Politiques de développement territorial intégré : les circuits courts », fruit d’un partenariat entre l’Institut CDC pour la recherche et le programme de l’OCDE, Leed (développement économique et créations d’emplois sociaux). Le rapport montre que les circuits courts en sont encore aux balbutiements. Mais ils peuvent constituer une véritable alternative au mode de développement actuel, avec de vrais enjeux d’aménagement du territoire, à condition de se placer dans une stratégie locale de long terme.

Commande publique

Les collectivités locales ont un rôle de premier plan pour passer à ce changement de vitesse. « Tous les domaines d’intervention d’une collectivité peuvent constituer le point d’amorçage d’une politique de ‘circuits courts’ : développement durable, recyclage des déchets, développement des éco-filières, emploi local, écologie industrielle, développement solidaire, transition énergétique, etc. », insiste le rapport.

« A Saint-Dié, c’est l’investissement public dans la chaufferie biomasse qui a créé l’effet d’entraînement et assuré la taille critique de départ pour la mise en oeuvre d’un modèle énergétique de proximité », relèvent les auteurs. Mais ils constatent que l’arme de la commande se heurte aux règles du Code des marchés publics interdisant de privilégier les acteurs locaux…

Les collectivités ont toutefois d’autres cordes à leur arc : l’utilisation du levier foncier pour favoriser les filières courtes (soit dans les schémas d’aménagement, soit par la préemption), les actions de formation et de sensibilisation, l’animation de projets structurés (filières, logistique, infrastructures…), les outils de financement (fonds de prêts d’honneur, fonds de garantie)…

Le rapport plaide pour de nouveaux mode de gouvernance qui permettent de mettre en cohérence les différentes stratégies locales entre elles. « Les collectivités publiques se trouvent plus en position de facilitateur, de ‘faire faire’, que de conduite directe des projets. Elles doivent développer les modes de concertation avec les milieux économiques, les opérateurs, la société civile », recommande le rapport qui pose aussi la question de l’accompagnement des circuits une fois lancés.

Les auteurs reconnaissent que tous ses efforts sont aussi tributaires des choix nationaux et européens : « La relocalisation des ‘externalités’ sociales et environnementales mériterait d’être mieux pris en compte dans le système mondialisé qui est le nôtre. »

FSM : un Espace climat hors des enceintes confinées des Nations-Unies

Maxime Combes, membre d’Attac France et de l’Aitec, engagé dans le projet Echo des Alternatives (www.alter-echos.org)
http://blogs.mediapart.fr/edition/forum-social-mondial-2013/article/030413/fsm-un-espace-climat-hors-des-enceintes-confinees-des-nations-unies

(L’édition 2013 du Forum social mondial (FSM) se tient pour la première fois au Maghreb : à Tunis, du 26 au 30 mars 2013. Deux ans après la « révolution du jasmin », ce forum sera un moment fort de soutien au processus démocratique en Tunisie, comme l’a expliqué Chico Whitaker, l’un des fondateurs du FSM. Deux ans après l’émergence des mouvements des indignés, la société civile sera au cœur des discussions pour dire qu’«un autre monde est possible», pour rassembler idées et expériences afin de le construire.)

Jamais les défis climatiques n’avaient été aussi visibles et discutés au sein d’un Forum Social Mondial qu’à Tunis, occasion de montrer que le climat ne doit plus être seulement l’affaire des négociations de l’ONU.

En plus d’avoir été un succès, tant en terme de participation que de son organisation, le Forum Social Mondial de Tunis a été l’objet d’une première. Jamais un FSM n’avait hébergé d’espace permanent dédié au climat et à toutes les problématiques que les défis climatiques soulèvent. Visant à « échanger sur les causes, les impacts, les luttes, les alternatives et les stratégies pour faire face au changement climatique »1, l’Espace climat, porté et soutenu par près d’une quarantaine d’organisations internationales2 parmi lesquelles Attac France, visait à regrouper les syndicats, paysans, femmes, indiens, migrants, organisations communautaires, indignés, mouvements Occupy, pour redéfinir une stratégie collective capable de renverser le cours des choses.

Avec un programme de 14 activités portant sur les énergies fossiles et la transition énergétique, la financiarisation de la nature et les biens communs, la souveraineté alimentaire et l’agroécologie, les migrations climatiques, les dispositifs REDD et la géoingéniérie, les « climate jobs » et la transition socio-écologique, l’eau et le rôle des multinationales, le bien-vivre et la décroissance, l’Espace climat a contribué à rendre visibles des thématiques et des enjeux jusqu’ici peu mis en évidence dans le processus des Forums sociaux mondiaux. Si le Forum social mondial de Belem avait permis de caractériser la crise économique et financière comme une crise civilisationnelle, tout en adoptant un manifeste pour la récupération des biens communs, jamais les défis climatiques n’avaient eu une telle résonance dans un FSM.

Des délégations associatives ou syndicales ont dépêché des militants suivre la quasi-totalité des activités, tandis que des participants occasionnels ont contribué à ce que l’Espace Climat soit bien plus suivi que ne l’attendaient les organisateurs. De nombreux Tunisien-ne-s, jeunes notamment, qu’ils soient chercheurs ou tout récemment impliqués dans des combats écologiques, sont venus prendre contact, exiger des précisions et des références, échanger des informations, et contribuer aux débats. Preuve que les pollutions marines ou terrestres, l’accès et la gestion de l’eau, les alternatives énergétiques, et bien entendu la mobilisation contre les gaz de schiste sont loin d’être perçus comme des enjeux secondaires et pourraient engendrer autant de de futures collaborations autour de la Méditerranée, prémices d’actions conjointes concernant les défis climatiques.

Pourtant, à l’échelon international, il n’est habituellement question de climat que lors des seules conférences annuelles de l’ONU. Ces conférences sont bien souvent l’unique occasion de l’année pour que les ONG, syndicats, réseaux internationaux et expert-e-s débattent et se confrontent publiquement au niveau international, que ce soit dans l’enceinte de l’ONU, ou dans des forums alternatifs. Dominent alors l’agenda des négociations officielles et la technicité des débats portant sur la réduction des émissions, l’adaptation, la déforestation ou les technologies. Il est difficile d’y faire entendre un autre son de cloche.

Les négociations officielles et débats de la société civile apparaissent de plus en plus déconnectés de ce que vivent les populations touchées par les conséquences des dérèglements climatiques.

Le sommet des peuples de Cochabamba, organisée en avril 2010 juste après la conférence de Copenhague, était y compris en grande partie structuré en fonction des négociations de l’ONU. L’objectif était clair : construire un rapport de force international de nature à modifier profondément les négociations officielles. Une telle stratégie, souvent dénommée « inside – outside » a aujourd’hui trouvé ses limites. La tenue et la réussite de l’Espace climat au sein du FSM de Tunis démontre que le climat ne doit plus être seulement l’affaire des négociations de l’ONU. A Tunis, les GCF, MRV, CDM et autres acronymes et technicités incompréhensibles sont restés au placard pour laisser place à l’essentiel : revoir de fond en comble nos modèles de production et de consommation en laissant l’essentiel des réserves prouvées d’énergies fossiles dans le sol. Comme cela a été dit lors de l’Assemblée de convergence : « la bataille principale se situe en dehors des négociations internationales sur le climat, et elle est plutôt ancrée dans les lieux où se déroulent les luttes contre l’exploitation de pétrole, de gaz, de minerais, contre l’agriculture industrielle, la déforestation, la pollution industrielle, la compensation carbone et les projets REDD, l’accaparement des terres et les déplacements de population ».

Bien-entendu, cet Espace climat n’est pas exempt de reproches. Les moments d’approfondissement et de travail collaboratif ont manqué. Le lourd programme et le nombre conséquent d’intervenants, qui reflètent par ailleurs la forte implication, auraient sans doute mérité d’être réduits. Prétendre que le foisonnement et la multiplicité des actions et des campagnes existantes ont été dépassés serait sans doute exagéré. Il a été néanmoins clairement annoncé que les défis du climat sont tels qu’ils ne peuvent se résumer à une campagne spécifique, une seule action ou proposition.

Au contraire, c’est dans la multiplicité des actions, dans notre capacité à renforcer toutes les luttes existantes sur le terrain mais aussi à irriguer tous les secteurs militants et campagnes en cours – contre les multinationales et les accords commerciaux par exemple – que nous serons en mesure de mobiliser de larges secteurs de la société pour faire face aux défis climatiques. A cette aune, la proposition visant à décliner la campagne « One million climate jobs » dans tous les pays, y compris en Europe, pourrait être une piste à creuser, notamment dans la perspective de l’Alter-Summit en juin à Athènes.

Il ressort de cet Espace climat qu’il n’est pas possible d’attendre « un nouveau sommet de la dernière chance » ou de placer ses espoirs dans un quelconque sauveur de l’humanité. Les luttes contre le réchauffement climatique sont celles du quotidien, que ce soit contre les gaz et pétrole de schiste, conte les grands projets d’infrastructure, ou pour la souveraineté alimentaire et la transition écologique, etc.

« Nous ne restons pas les bras croisés. Nous nous attaquons aux causes profondes du changement climatique en oeuvrant pour changer de système. Il est temps d’agir, pas de parler. »

 

Twitter : @MaximCombes

1http://climatespace2013.wordpress.com/2013/02/06/appel-a-rejoindre-lespace-climat-au-fsm-de-tunis-du-26-au-30-mars-2013/

2http://climatespace2013.wordpress.com/about/ et http://climatespace2013.wordpress.com/supporters/