Ethique de conviction et éthique de responsabilité
Max Weber (1864-1920), sociologue et économiste allemand
Article paru dans l’édition d’Alda ! du 17.01.08
La biodiversité n’est pas une marchandise
Communiqué de Presse de Philippe Collin Porte-parole de la Confédération paysanne
Article paru dans l’édition de Laborari (Hebdomadaire d’information des Paysans du Pays Basque), 896 zenbakia, maiatzaren 27koa
Financement des retraites : un algorithme
Michel Husson
Nouveaux Regards (revue de l’Institut de recherches de la FSU)
La PAC, nouvelles orientations 2014 – 2020.
Groupe de réflexion pour la proposition de nouvelles orientations pour la nouvelle Politique Agricole Commune 2014 – 2020. – Le Groupe PAC 2013 regroupe les organisations : FNAB, réseau Cohérence, CCFD, GRET, CIVAM, CFSI, Solidarité, 4D, CMR, Réseau Action Climat, WWF, Réseau Agriculture Durable, Les amis de la Terre, Fondation Nicolas Hulot.
Article paru dans Passerelle Eco (Pratiques et Contacts pour Vivre Ensemble sur une Même Planète) le mercredi 26 mai 2010 – Par le groupe PAC 2013
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Ethique de conviction et éthique de responsabilité
Max Weber (1864-1920), sociologue et économiste allemand
Article paru dans l’édition d’Alda ! du 17.01.08
Alda publie ici un des nombreux textes qui servent de supports à Philippe Corcuff pour le stage de formation du vendredi 18 et samedi 19 juin «Approche radicale et pragmatique de l’action militante». Plus d’informations : https://bizimugi.eu/?p=1835
« Il est une chose incontestable, et c’est même un fait fondamental de l’histoire, mais auquel nous ne rendrons pas justice aujourd’hui : le résultat final de l’activité politique répond rarement à l’intention primitive de l’acteur.
On peut même affirmer qu’en règle générale il n’y répond jamais et que très souvent le rapport entre le résultat final et l’intention originelle est tout simplement paradoxal.(…)
A moins de n’y voir qu’un recueil de trivialités, l’éthique de l’Évangile est une morale du « tout ou rien ».(…) A vrai dire, s’il existe un problème dont l’éthique absolue ne s’occupe pas, c’est bien celui qui concerne les conséquences !(…)
Nous en arrivons ainsi au problème décisif.
Il est indispensable que nous nous rendions compte du fait suivant : toute activité orientée selon l’éthique peut être subordonnée à deux maximes totalement différentes.
Elle peut s’orienter selon l’éthique de la responsabilité ou selon l’éthique de la conviction.
Cela ne veut pas dire que l’éthique de conviction est identique à l’absence de responsabilité et l’éthique de responsabilité à l’absence de conviction.
Il n’en est évidemment pas question.
Toutefois il y a une opposition abyssale entre l’attitude de celui qui agit selon les maximes de l’éthique de conviction – dans un langage religieux nous dirions : « Le chrétien fait son devoir et en ce qui concerne le résultat de l’action il s’en remet à Dieu » -, et l’attitude de celui qui agit selon l’éthique de responsabilité qui dit : « Nous devons répondre des conséquences prévisibles de nos actes ».(…)
Lorsque les conséquences d’un acte fait par pure conviction sont fâcheuses, le partisan de cette éthique n’attribuera pas la responsabilité à l’agent, mais au monde, à la sottise des hommes ou encore à la volonté de Dieu qui a créé les hommes ainsi.
Au contraire le partisan de l’éthique de responsabilité comptera justement avec les défaillances communes des hommes (…) et il estimera ne pas pouvoir se décharger sur les autres des conséquences de sa propre action pour autant qu’il aura pu les prévoir.(…)
Mais cette analyse n’épuise pas encore le sujet.
Il n’existe aucune éthique au monde qui puisse négliger ceci : pour atteindre des fins « bonnes », nous sommes la plupart du temps obligés de compter avec, d’une part, des moyens moralement malhonnêtes ou pour le moins dangereux, et d’autre part la possibilité ou encore l’éventualité de conséquences fâcheuses.
Aucune éthique au monde ne peut nous dire non plus à quel moment et dans quelle mesure une fin moralement bonne justifie les moyens et les conséquences moralement dangereuses. (…)
On le voit maintenant : l’éthique de la conviction et l’éthique de la responsabilité ne sont pas contradictoires, mais elles se complètent l’une l’autre et constituent ensemble l’homme authentique, c’est-à-dire un homme qui peut prétendre à la « vocation politique ». (…)
Il est parfaitement exact de dire, et toute l’expérience historique le confirme, que l’on n’aurait jamais pu atteindre le possible si dans le monde on ne s’était pas toujours et sans cesse attaqué à l’impossible. »
La biodiversité n’est pas une marchandise
Communiqué de Presse de Philippe Collin Porte-parole de la Confédération paysanne
Article paru dans l’édition de Laborari (Hebdomadaire d’information des Paysans du Pays Basque), 896 zenbakia, maiatzaren 27koa .
La biodiversité, c’est la diversité de la vie. Vendre la vie, c’est la détruire.
La Confédération Paysanne se réjouit de la mise à l’honneur de la biodiversité agricole à l’occasion de la journée mondiale de la biodiversité. La biodiversité ne se limite pas à quelques espèces sauvages emblématiques menacées, elle se cultive et s’élève aussi tous les jours dans les fermes, elle est la base de notre nourriture. C’est en conservant leurs droits de ressemer une partie du grain récolté l’année précédente et d’échanger leurs semences que les paysans augmentent la biodiversité cultivée, c’est en renouvelant la diversité des races animales rustiques adaptées à chaque terroir qu’ils peuvent s’adapter aux changements climatiques et aux nouvelles menaces sanitaires.
La Confédération Paysanne est outrée par l’orgie financière destinée à mettre en spectacle l’agriculture industrielle pour vendre aux parisiens des petits morceaux de biodiversité en conserve. Cet étalage de moyens ne peut être compris au moment où les paysans traversent une situation économique aussi catastrophique. S’il faut remettre la campagne à la ville, ce n’est pas un jour tous les dix ans : c’est tous les jours en combattant la spéculation immobilière pour reconstruire les ceintures vertes, favoriser les jardins urbains, le commerce alimentaire de proximité et les AMAP…
L’agriculture industrielle est la première responsable de la disparition de la biodiversité dans les campagnes :
-une poignée de variétés industrielles a remplacé les centaines de milliers de variétés locales patiemment entretenues par des générations de paysans,
-l’agrandissement sans fin des champs, la généralisation des monocultures et l’homogénéisation des paysages agricoles sont les premières causes de l’érosion de la biodiversité en France,
– les semences disponibles sur le marché ne sont plus reproductibles, ou sont protégées par des droits de propriété industrielle qui contraignent les paysans à payer des royalties lorsqu’ils veulent ressemer leur récolte, demain on nous promet qu’elles seront toutes OGM,
– ces semences ne peuvent pas pousser sans engrais et pesticides chimiques qui détruisent la vie des sols, les abeilles, les insectes, les oiseaux et empoisonnent l’eau.
Sans une politique agricole garantissant la souveraineté alimentaire, la protection de l’emploi agricole et de l’environnement, les lois du marché ont imposé la standardisation et la destruction de la biodiversité agricole. Donner une valeur marchande à la biodiversité sauvage pour la vendre sur le marché la détruira de la même manière. Les firmes agrochimiques « compensent » ainsi le coût de la destruction des abeilles par leurs pesticides en finançant quelques hectares de « jachères fleuries » : elles ont pourtant oublié d’installer les panneaux de signalisation indiquant aux abeilles les champs où elles ne doivent pas butiner ! De même, le « marché du carbone » encourage la destruction des forêts primaires et l’expulsion des peuples qui y vivent pour les remplacer par des monocultures d’arbres destinées à produire des carburants…
Sauvage ou agricole, la biodiversité n’a qu’une seule valeur : celle d’un patrimoine inaliénable hérité de nos parents et que nous empruntons à nos enfants. Nos seuls droits sont d’en user avec précaution en la renouvelant pour les générations futures.
Repoussons le marché et les droits de propriété industrielle hors de la biodiversité !
Financement des retraites : un algorithme
Michel Husson
Nouveaux Regards (revue de l’Institut de recherches de la FSU)
Une pension, c’est un virement sur le compte d’un retraité. Comment mieux souligner que la question des retraites porte directement sur la répartition des revenus ? Dans le cas de la santé, par exemple, se posent d’autres questions, comme celle de la légitimité des dépenses. Dans le cas des retraites il s’agit d’un transfert d’argent que le bénéficiaire est libre d’utiliser comme il veut. C’est pourquoi la question des retraites pose, en amont de toute considération, un problème de financement. Le véritable défi, c’est d’en parler sans citer trop de chiffres, et de détailler avec précision les questions successives qu’il faut se poser.
Le point de départ des « réformes » successives est que les dépenses des régimes (les pensions versées) augmentent plus vite que leurs ressources. Apparaît alors un déficit tendanciel qu’il faut distinguer du déficit provoqué par la crise. A long terme, c’est la croissance plus rapide du nombre de retraités, par rapport au nombre de cotisants, qui est source de déséquilibre. Ces deux effets peuvent se combiner : si les effets de la crise sont durables, il y aura moins d’emplois et donc encore moins de cotisants.
Un choix de société
Personne ne conteste que le nombre de retraités augmentera plus vite que celui des cotisants, même si on peut discuter l’ampleur du phénomène. Face à un déficit prévisible, le choix est alors arithmétique : soit on augmente les recettes des régimes de retraites, soit on baisse les pensions, ces deux solutions pouvant évidemment se combiner. C’est un choix de société fondamental. La société peut en effet tenir un premier raisonnement : puisque la proportion de retraités va augmenter dans la population, il faut prévoir des mesures permettant d’accompagner cette évolution, en augmentant aussi la part du revenu national qui leur revient. C’est d’ailleurs de cette manière que le système par répartition a
fonctionné jusqu’aux premières « réformes » : on calculait les recettes nécessaires pour financer les retraites, et on en déduisait le taux de cotisation correspondant.
Si l’on choisit cette option, il faut alors se demander s’il est possible d’augmenter les recettes à due proportion, et quel est le moyen le plus raisonnable de le faire. Mais ce débat n’aura pas lieu, en tout cas dans les instances officielles, parce qu’il est d’emblée interdit. Le gouvernement campe sur la position du Medef qui consiste à refuser absolument tout « prélèvement » supplémentaire. Dans ces conditions, le second terme de l’alternative consiste à attribuer aux retraités une part constante du revenu national, alors même que leur nombre augmente, bref à baisser les pensions. C’est arithmétique : il est impossible de dire à la fois qu’on n’augmentera pas les ressources et qu’on préservera le montant des pensions. Si c’était vrai, où serait d’ailleurs le problème de financement ? Il ne reste plus qu’à choisir la méthode pour baisser les pensions.
Le premier paramètre sur lequel on peut jouer est le taux de remplacement : il suffit de décréter que la pension ne représentera plus 75 % du dernier traitement, mais par exemple 70 ou 65 %. L’idéal serait un mécanisme d’ajustement automatique qui calculerait le taux de remplacement en fonction du nombre de retraités, compte tenu du budget disponible.
C’est à peu de choses près ce qui se passe déjà dans les régimes à points (par exemple les régimes complémentaires AGIRC et ARRCO en France). C’est aussi l’idée qu’il y a derrière les projets de « comptes notionnels » examinés dans l’avant-dernier rapport du COR (Conseil d’orientation des retraites). La répartition serait conservée formellement mais sa logique serait dénaturée puisqu’on passerait à des retraites « à cotisations définies » : on sait ce
qu’on cotise, mais on ne sait pas ce qu’on touchera. Dans certains pays, cette incertitude est étendue aux retraités : non seulement le montant de la pension n’est pas garanti au moment de faire valoir ses droits à la retraite, mais il ne l’est pas non plus une fois que l’on est parti à la retraite.
Pour appliquer une telle solution, qui a au moins le mérite de la franchise, il faut un bon rapport de forces, et des syndicats pas trop rétifs. Ce n’est pas exactement le cas en France, et les projets du gouvernement vont chercher à jouer sur un second paramètre, à savoir l’âge de la retraite. C’est la solution hypocrite et cynique du «travailler plus longtemps».
Vivre et travailler plus longtemps ?
C’est apparemment du bon sens. Le stock de retraités (à notre tour d’être cynique) est un problème de robinet : leur nombre augmente d’un côté, avec le départ à la retraite des baby boomers, et diminue moins vite, de l’autre côté, en raison de l’allongement de l’espérance de vie. Puisqu’on vit plus longtemps, il suffit de travailler plus longtemps, et le tour est joué : plus de cotisants, moins de retraités. Mais, petit détail, ce raisonnement suppose que l’offre de travail crée automatiquement les emplois correspondants. Autrement dit, il suffirait que le nombre de candidats à un emploi augmente pour que le nombre d’emplois augmente. Cela suppose qu’on soit au plein emploi, ce qui n’est pas exactement la situation actuelle. C’est pourquoi cette solution ne méritera d’être envisagée et discutée que le jour où nous serons revenus au plein emploi. Tant que cette condition n’est pas réalisée, on baigne dans l’hypocrisie et le déni.
L’âge moyen auquel les salariés font valoir leur droit à la retraite est de 61 ans et demi. Mais l’âge moyen de cessation d’activité est de 58 ans et demi. Les trois ans de différence représentent une « zone grise » où les ex-salariés attendent la retraite dans des statuts précaires : inactivité, longue maladie, invalidité, allocations diverses. Supposons que l’on repousse l’âge de la retraite de deux ans.
Deux cas de figure sont possibles. Si les salariés peuvent effectivement occuper un emploi plus longtemps, ces deux bornes pourraient se déplacer : l’âge de cessation d’emploi passerait à 60 ans et demi, celui du départ à la retraite à 63 ans et demi et la « zone grise » resterait de trois ans. Mais si les seniors ne trouvent pas plus d’emplois qu’aujourd’hui, ils perdront leur emploi à 58 ans et demi et devront attendre cinq ans avant de faire valoir leurs droits à la retraite.
Quel est le cas de figure le plus vraisemblable ? Le bon sens, l’expérience passée et celle des pays voisins1, ainsi que la pratique des entreprises, conduisent à conclure qu’on se trouve pour longtemps dans le second cas de figure : les seniors perdront leur emploi au même âge et devront attendre plus longtemps pour une retraite à taux plein. Dans ce cas, on « finance » les régimes en allongeant la période de précarité précédant la retraite, et c’est la pire des solutions, car elle frappe les catégories les plus défavorisées. Elle a déjà été adoptée par la réforme Fillon, qui programme un allongement de la durée de cotisation. D’ores et déjà, il faut le savoir, les « réformes » introduites en France depuis Balladur en 1993, ont conduit et conduiront à une dégradation de la situation des retraités. Le taux de remplacement (pour un homme ayant travaillé à temps plein et cotisé quarante ans au moment de son départ en retraite) reculerait de 16,5 points (de 79 % en 2006 à 63 % en 2046), soit une chute 16,5 points. Ce serait l’une des baisses les plus marquées en Europe2.
Le gouvernement semble envisager une manoeuvre plus « subtile » qui consisterait à reporter l’âge légal de la retraite à 61 ans en 2015, 62 ans en 2020 et 63 ans en 2030 (Le Monde du 4 mai 2010), en instituant une décote importante. Cela veut dire qu’un salarié disposant du nombre d’annuités suffisant à 60 ans devrait malgré tout attendre 1, 2 ou 3 ans avant d’accéder à une retraite à taux plein. Ce serait une mesure particulièrement injuste, puisqu’elle frapperait les carrières longues, qui sont souvent aussi les plus pénibles.
De toute manière, cette solution n’est pas à la hauteur des enjeux. Imaginons qu’on porte la durée de cotisation nécessaire pour bénéficier d’une retraite à taux plein à 43,5 ans en 2050 et qu’on augmente l’âge d’ouverture des droits de 60 à 63 ans et de l’âge du taux plein de 65 à 68 ans. C’est la variante la plus « dure » que le COR vient d’examiner, parmi d’autres3. Or elle ne suffit pas : le déficit prévu serait couvert à 48 % en 2030 et 36 % en 2050. De plus, cet exercice manque de cohérence.
On ne peut extrapoler les comportements et surtout les possibilités d’emploi à un horizon aussi éloigné et pour des variations aussi importantes. Rien n’est dit sur le nombre de retraités et de cotisants correspondant à ces variantes ni sur leur compatibilité avec la croissance et la productivité. Et si la zone grise des salariés sans emploi mais pas encore retraités augmente, où est l’évaluation du coût qu’ils représenteraient pour d’autres branches de la protection sociale ? Enfin les effets de cette mesure seraient étalés dans le temps alors que le déficit de crise est déjà là.
Le refus obstiné de toute nouvelle ressource conduit le gouvernement à faire les fonds de tiroir. Nicolas Sarkozy a évoqué un « effort financier supplémentaire des hauts revenus et des revenus du capital » mais il s’agira d’un prélèvement temporaire (sur les stock options qui ne sont pas comptées dans le bouclier fiscal ?) mis en avant pour faire passer des pilules amères. L’idée circule, grâce aux chiffres inventés par la Fondation Terra Nova, de faire payer les retraités4 ce qui est à la fois injuste et confusionniste. Reste l’alignement des modalités du calcul des retraites des fonctionnaires sur le privé (25 meilleures années au lieu des six derniers mois). Elle conduirait à une perte significative mais impliquerait l’intégration des primes pour que l’argument « d’équité » fonctionne, ce qui réduirait à peu de chose les économies réalisées, sans parler de l’incapacité de l’administration à reconstituer l’historique des traitements.
Un débat pipé
La « réforme », telle qu’elle est conçue, n’a pas pour objet d’équilibrer les retraites à l’horizon 2050, ni même 2020. Elle ne sera qu’un nouvel épisode du processus de réforme permanente enclenché en 1993 qui en appellera d’autres si ce processus n’est pas stoppé. Dans l’immédiat, il s’agit, pour reprendre les termes d’Alain Minc, d’un « signe envoyé aux marchés financiers » et François Fillon n’a pas hésité à agiter les menaces qui pèseraient sur «notre monnaie commune». Le projet n’est donc pas de traiter le déficit de 2050 mais de faire immédiatement payer aux régimes de retraite une partie de la facture de la crise.
Il faut donc distinguer deux choses : les modalités de la « sortie de crise » et de la résorption des déficits, et l’équilibrage à plus long terme. Mais, dans les deux cas, le préalable est de faire sauter le tabou des ressources. Si l’on veut préserver un système de retraites solidaire, il faut lui assurer un supplément de ressources proportionné à l’augmentation du nombre d’ayants droit. On peut alors construire des scénarios, plus ou moins radicaux, qui montrent qu’il est possible de dégager les ressources nécessaires5. La question des retraites ne se réduit pas au financement mais, s’agissant de répartition, elle est en grande partie indépendante du débat sur la croissance et son contenu. Il faudrait aussi anticiper les bombes à retardement que représentent les carrières écourtées et heurtées des plus jeunes6 et prendre en compte les inégalités et la pénibilité. Mais le dégagement de recettes supplémentaires est le préalable absolu à ces améliorations nécessaires, et c’est ce tabou qu’il faut faire sauter.
1 voir Odile Chagny, « Comment l’Allemagne appauvrit ses retraités », Mediapart, 23 avril 2010,
2 voir Guillaume Duval, « La baisse des pensions est déjà programmée », Alternatives économiques, avril 2010,
3 http://www.cor-retraites.fr/article370.html
4 voir les propositions d’Olivier Ferrand dans Le Monde du 9 mai 2010, http://gesd.free.fr/onova.pdf et la
réponse roborative d’Henri Sterdyniak, http://gesd.free.fr/sterra.pdf
5 voir Michel Husson, « Comment financer les retraites: le débat interdit », février 2010,
6 voir la remarquable étude d’ Agathe et Julia Cagé pour la Fondation Jean Jaurès : « Retraites : les vrais termes du débat », http://gesd.free.fr/fjj50.pdf
La PAC, nouvelles orientations 2014 – 2020.
Article paru dans Passerelle Eco (Pratiques et Contacts pour Vivre Ensemble sur une Même Planète) le mercredi 26 mai 2010 – Par le groupe PAC 2013 (*)
Deuxième partie la semaine prochaine
La politique agricole commune (PAC) traverse à nouveau une période de mutation. Elle va connaître une nouvelle transformation dans la période 2014-2020 avec une nouvelle réforme, mais également avec la redéfinition de son budget.
La prochaine réforme est à haut risque pour la PAC. En effet les négociations seront étroitement liées à celles sur la révision des perspectives financières de l’Union européenne, et nombre de voix s’élèvent déjà pour mettre en cause la légitimité de la PAC et demander l’affectation de tout ou partie de son budget, qui représente plus de 40% du budget européen, vers d’autres politiques (climat, énergie, recherche…).
Relégitimer la PAC
Les organisations françaises signataires de ce texte sont profondément convaincues de la nécessité de mobiliser la PAC pour participer aux réponses à apporter aux enjeux européens et mondiaux du début du XXIè siècle. Ces enjeux concernent simultanément la sécurité alimentaire, la protection des ressources naturelles, la lutte contre le changement climatique, le développement rural et l’emploi, tout en étant solidaire avec les pays du Sud. L’avenir de la PAC concerne donc tous les Européens.
Nos organisations estiment que si la PAC n’est pas relégitimée et donc profondément refondée, elle risque d’être considérablement affaiblie, voire mise en cause, dans les prochains mois. Ainsi elles apportent leur contribution avec des arguments qui plaident en faveur d’une nouvelle politique qui soit ambitieuse, rénovée et européenne.
Ce document contribue au débat sur la PAC pour la période 2014-2020 en dressant des constats, en apportant des propositions et des leviers d’action. Partant de la situation actuelle de la PAC dans l’Union européenne, nos propositions s’inscrivent dans une période de transition nécessaire pour accompagner les changements en faveur d’agricultures durables et solidaires d’ici à 2020 en Europe.
Six axes de refondation
Il en découle de nouveaux objectifs et une nouvelle légitimité, une refondation de ses dispositifs et une architecture renouvelée au-delà de ses « piliers » actuels. Nos organisations ont identifié six axes de refondation qui sont détaillés ci-après :
1. Mieux organiser les marchés agricoles pour réguler les prix à un niveau rémunérateur, incitatif et stable
2. Définir une PAC réellement cohérente qui ne soit pas préjudiciable à la sécurité alimentaire des pays du Sud
3. Refonder les paiements directs sur la base de la rémunération des services environnementaux pondérés par l’emploi
4. Promouvoir une agriculture durable qui contribue efficacement à la lutte contre le changement climatique et qui réponde aux autres défis environnementaux
5. Soutenir une agriculture durable créatrice d’emplois et garantir la cohésion territoriale afin de favoriser le développement rural
6. Intégrer la consommation et l’alimentation au cœur d’une PAC renouvelée.
Ces propositions visent à rétablir des liens entre les dimensions trop souvent séparées de l’agriculture, de l’alimentation, de l’environnement et du développement rural. C’est dans cet esprit que nos organisations apportent leur contribution au débat sur l’avenir de la PAC à l’horizon de 2013.
Ce document concerne l’avenir de la politique agricole commune en particulier, et non celui de l’agriculture en général. Il ne prétend pas répondre à tous les enjeux et à toutes les questions.
(*)Groupe de réflexion pour la proposition de nouvelles orientations pour la nouvelle Politique Agricole Commune 2014 – 2020.
Regroupe les organisations : FNAB, réseau Cohérence, CCFD, GRET, CIVAM, CFSI, Solidarité, 4D, CMR, Réseau Action Climat, WWF, Réseau Agriculture Durable, Les amis de la Terre, Fondation Nicolas Hulot.