2012, l’année des extrêmes climatiques, selon l’ONU
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www.lemonde.fr/planete/article/2012/11/28/2012-l-annee-des-extremes-climatiques-selon-l-onu_1797101_3244.html
Qu’attendre de Doha?
Valéry Laramée de Tannenberg
www.journaldelenvironnement.net/article/qu-attendre-de-doha,31846
Climat : la solution passe par un partage mondial
Jean Sireyjol (Taca) – 27 novembre 2012
www.reporterre.net/spip.php?article3537
Fin du pétrole : quand l’industrie automobile prépare sa reconversion
Valéry Rachel Knaebel
www.bastamag.net/article2216.html – 03-04-2012
2012, l’année des extrêmes climatiques, selon l’ONU
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www.lemonde.fr/planete/article/2012/11/28/2012-l-annee-des-extremes-climatiques-selon-l-onu_1797101_3244.html
Des phénomènes extrêmes sont survenus partout dans le monde en 2012, en particulier dans l’hémisphère nord, entraînant de très nombreux records de chaleur, une fonte record de la banquise arctique et des périodes de froid extrême, a indiqué l’Organisation météorologique mondiale (OMM), mercredi 28 novembre.
Si l’année 2012 a débuté par un épisode la Niña d’intensité faible à modérée, qui a pour conséquence de refroidir le climat, avec des températures allant jusqu’à -50 °C en Russie, depuis avril « la température moyenne à la surface des terres et des océans a continué d’augmenter mois après mois », soulignent ainsi les experts de l’agence spécialisée de l’ONU dans leur déclaration annuelle sur le climat.
UNE « CONTRADICTION DRAMATIQUE »
Il y a une « contradiction dramatique » entre la réalité du changement climatique, « qui s’aggrave », et « la disponibilité extrêmement faible » d’un « certain nombres de grands pays » à agir, a déclaré mercredi le ministre des affaires étrangères français, Laurent Fabius. Le rôle de la France, a ajouté M. Fabius, est « d’essayer de réduire ce fossé ». Le ministre se rendra à la conférence annuelle de l’ONU sur le changement climatique la semaine prochaine.
Plus de cent quatre-vingt-dix pays sont réunis du 26 novembre au 7 décembre à Doha dans le cadre de la 18e Conference of the Parties (COP 18) sur le changement climatique, notamment pour trouver un accord sur une seconde période du protocole de Kyoto, après la première, qui expire à la fin de décembre. Paris est candidat pour accueillir la conférence de l’ONU sur le climat en 2015, date à laquelle doit être conclu le futur accord global, embarquant cette fois les grands pollueurs que sont les Etats-Unis et la Chine, pour tenter de contenir à +2 °C le réchauffement global de la planète.
Qu’attendre de Doha?
Valéry Laramée de Tannenberg
www.journaldelenvironnement.net/article/qu-attendre-de-doha,31846
La 18e conférence des parties à la convention de l’ONU sur les changements climatiques ne changera pas la donne. Mais elle pourrait faire avancer quelques petits dossiers qui ne sont pas sans importance. Revue de détail.
Le 18e sommet climatique de l’ONU, qui s’est ouvert aujourd’hui à Doha, est celui de tous les paradoxes.
C’est dans le pays où les émissions de CO2 par habitant sont les plus importantes du monde (49 tonnes/an, soit 8 fois celles des Français) que l’on va parler des meilleurs moyens d’alléger notre bilan carbone. Bien vu, l’ONU.
C’est aussi au moment où l’organisation météorologique mondiale relève les plus fortes concentrations de gaz à effet de serre dans l’atmosphère que piétinent comme jamais les tractations portant sur un futur accord international. Alors que les mécanismes économiques de lutte contre le changement climatique se délitent les uns après les autres, les climatologues nous donnent à peine 5 ans pour infléchir durablement nos rejets carbonés. Faut-il en rajouter? Sans doute pas, la liste serait trop longue.
Dès lors, qu’attendre de cette quinzaine de négociations? Peu de choses, même si le programme est lourdement chargé.
Sachant que la première période d’engagement du protocole de Kyoto (2008-2012) prend fin le 31 décembre, la première des urgences est de se mettre d’accord sur un texte qui ouvrira une seconde période. Ce texte est essentiel. Sans lui, les objectifs de réduction infligés aux pays développés et les mécanismes de flexibilité (mise en œuvre conjointe, mécanisme de développement propre, échange de quotas d’émission), déjà anémiques, n’auront plus de base légale.
Un accord pourrait être trouvé à l’issue de la quinzaine. Mais, préviennent les diplomates français, il n’entrera pas en vigueur au 1er janvier 2013. D’une part, parce que le Canada, le Japon, la Nouvelle-Zélande et la Russie ont déjà fait savoir qu’ils ne voulaient pas d’un «Kyoto II». Il faudra user de trésor de diplomatie pour les convaincre, au moins, de ne pas s’opposer au processus en cours. D’autre part, il faudra aussi que les pays favorables à ce nouveau dispositif le fassent ratifier par leur parlement respectif. Ce qui ne prendra pas moins de deux à trois ans. Les Etats-Unis n’étant toujours pas dans la boucle, cet accord transitoire (qui couvrira probablement la période 2013-2020) n’impliquera concrètement que les pays de l’Union européenne et l’Australie, soit 35% des émissions des pays initialement soumis au protocole de Kyoto.
Diplomates et experts devront commencer d’esquisser (surtout ne précipitons pas les choses) l’accord international qui, normalement, doit être conclu d’ici à 2015, pour une entrée en vigueur en 2020. Ceci implique quelques dépoussiérages. A commencer par une refonte du processus de… négociations. La demi-douzaine de comités ad hoc devraient être fondus en une seule instance de discussion. Fort utile pour discuter efficacement des choses qui fâchent.
A commencer par les financements. Aux termes des accords passés ces dernières années, les pays les plus industrialisés ont dû mobiliser 30 milliards de dollars (23 milliards d’euros), entre 2010 et 2012, pour financer atténuation et adaptation des pays les plus vulnérables. Objectif atteint.
A partir de 2020, ce montant doit, contractuellement, passer à 100 Md$ (77 Md€) par an. Cette manne devra être gérée par le Fonds vert. Or, pour le moment, nul ne sait d’où viendra cet argent. Personne n’est en mesure non plus de dire combien d’argent sera consacré au climat entre 2013 et 2020. «Le contexte économique et la dégradation des ambitions climatiques de la plupart des pays rendent les choses difficiles», reconnaît un négociateur français. Une seule chose est sûre: l’essentiel des financements viendra du secteur privé.
Autre sujet de friction annoncé: le niveau des engagements qui devront figurer dans le futur accord international. L’Union européenne mise à part (qui rappelle les objectifs de son paquet Energie-climat, soit -20% de GES entre 1990 et 2020), aucun pays ne s’est fixé, pour le moment, d’objectifs contraignants de réduction de ses émissions.
Petit sujet «touchy»: le devenir de l’«air chaud». Les pays à économie en transition (comprendre ceux de l’ancien bloc soviétique) détiennent environ 13 milliards de crédits carbone qu’ils entendent utiliser dans les prochaines années. Un tel afflux de monnaie carbone est susceptible de perturber tout système économique basé sur l’échange de ces quotas nationaux. Comme c’est actuellement le cas dans l’ETS (Système d’échange de quotas d’émission) européen, il faudra trouver un moyen de réduire ce surplus considérable d’allocation d’émission. Ce qui ne se produira sans doute pas à Doha.
Tout n’est pourtant pas sombre au pays de l’or noir. Doha pourrait accoucher de quelques décisions utiles. Comme la confirmation du siège du Fonds vert, à Songdo, en Corée du Sud. Il n’est pas impossible non plus que la conférence des parties valide son mode de gouvernance, ainsi que son processus d’abondement. Et en toute logique, le pilotage du réseau de centres des technologies climatiques devrait échoir au Programme des Nations unies pour l’environnement (Pnue). Pas si mal pour une conférence de transition.
Climat : la solution passe par un partage mondial
Jean Sireyjol (Taca) – 27 novembre 2012
www.reporterre.net/spip.php?article3537
Alors que s’ouvre à Doha (Qatar) une nouvelle conférence sur le changement climatique, l’analyse du problème conduit à la nécessité d’un partage mondial des émissions de gaz à effet de serre.
Qu’est-ce que cette conférence de DOHA ? Du 26 novembre au 7 décembre c’est la suite des conférences annuelles pour trouver un accord mondial sur le climat, après Copenhague en 2009, puis Cancun et Durban l’an dernier. A part le protocole de Kyoto, très insuffisant, il n’est pratiquement jamais rien ressorti de concret de ces conférences, sinon des vœux pieux.
Le réchauffement climatique, mais ça existe encore ? C’est même en voie d’accélération. Cet été la banquise du Pôle Nord a battu un nouveau record de fonte, il ne reste que la moitié de ce qu’il y avait dans les années 80. Une fonte complète pourrait arriver dans les prochaines années (avant 2020), un évènement qui précédemment n’était pas prévu avant 2100.
L’objectif de limiter le réchauffement à +2°C est-il maintenu ? Oui, mais c’est vraiment un vœu pieu. On en est aujourd’hui déjà à +0,8°C et on voit la multiplication des phénomènes climatiques extrêmes à travers le monde.
La Banque Mondiale vient de lancer une alarme car si on continue comme aujourd’hui on sera à +4°C en 2060, et là ce sera « une cascade de cataclysmes climatiques » qui risquent de détruire des grands pans de notre société et plusieurs centaines de millions de vies humaines.
Pourtant, passer de +2°C à + 4°C, ce n’est pas la fin du monde ? L’évolution d’une température moyenne parait anodine, mais c’est trompeur. En fait, on pourrait traduire ce que nous dit la Banque Mondiale [1] de la façon suivante avec notre propre température. Avec + 2°C, vous avez tous les jours 39° de fièvre, ce n’est pas agréable, mais on survit et on peut encore essayer de faire baisser la température. Avec +4°C on atteint 41°C, et c’est rapidement mortel.
Mais alors, quoi faire ? On sait très bien ce qu’il faut faire. Le CO2 est un gaz à effet de serre, qui est la cause du réchauffement en cours ; il faut rapidement arrêter nos émissions de CO2. Pour le monde entier, il faut commencer par les diviser par 2, ce qui pour nous français correspond à les diviser par 4.
Comment diminuer ces émissions de CO2 ? Diviser par 2, par 4, ce n’est pas rien, c’est un changement profond. Le principe pollueur payeur est l’outil indispensable pour réduire cette pollution. Il faut mettre un prix sur le carbone.
Aujourd’hui il coûte moins cher de prendre un avion low cost qu’un train, alors que l’avion est 10 fois plus polluant pour le climat. Il faut que ça change ! Le prix carbone incite chacun à moins consommer de carbone et fait payer les pollueurs.
Que faire de l’argent ainsi récolté auprès des pollueurs ? Cet argent représente l’utilisation d’une ressource commune, d’un bien commun, l’atmosphère, et donc chaque être humain a droit exactement à la même part de ce bien commun. C’est la suite logique du principe pollueur payeur. Donc le principe juste c’est de partager également les revenus entre chaque citoyen du monde.
Que donnerait au niveau mondial l’application de ces 2 principes ? A partir des données mondiales de consommation de carburants publiées par l’AIE [2] pour 2010, et en appliquant le prix de 32€ par tonne de CO2 (soit 8 centimes par litre de carburant) proposé par la commission Rocard, on obtient les chiffres annuels suivants :
Dépense individuelle carbone moyenne par habitant et par an selon les pays :
Américain du Nord : 600€,
Européen de l’Ouest : 300€,
Chinois : 130€,
Indien : 50€,
Sénégalais : 15€.
Redistribution annuelle individuelle : 142€
Ce sont des chiffres moyens, chaque individu payant exactement selon sa quantité consommée de carbone, puisqu’il paie le prix du carbone à l’achat du carburant ou des produits en contenant, tandis que la redistribution, 142€, est la même pour tout le monde.
Que disent ces chiffres ? Ceux qui vont payer ce sont ceux qui polluent le plus, ça tombe bien, ce sont les habitants des pays riches (et aussi les riches des pays pauvres).
Par contre les pauvres, des pays riches et des pays pauvres, utilisent beaucoup moins de carbone, et la redistribution est bien supérieure à ce nouveau coût et pour une fois, ils seront favorisés.
Ces chiffres disent aussi qu’avec un prix carbone modeste (8 centimes par litre de carburant) on arriverait à dégager des sommes gigantesques pour la redistribution : 300 millions d’américains vont contribuer en moyenne à hauteur de 458€ (600-142) ce qui représente plus de 130 milliards € par an. De même l’Europe de l’Ouest contribuerait à hauteur de 80 milliards €, des chiffres impressionnants et à la hauteur de l’enjeu.
Va-t-on en parler à DOHA ? Probablement pas. Ceux qui négocient à DOHA font partie des classes dirigeantes, directement touchées par une telle mesure, c’est la seule explication pour laquelle le principe de prix carbone avec redistribution n’est pas immédiatement exigé par la majorité des pays pauvres, mais ils n’auront pas ce discours !
Ce que propose taca. C’est à nous citoyens de pays riches, et parait-il démocratiques, d’avoir le courage de regarder cette vérité qui nous dérange : au prix de quelques efforts financiers, nous pouvons mettre en mouvement l’ensemble des pays pour dé-carboniser l’économie mondiale et protéger notre atmosphère et l’avenir de nos enfants.
Arrêtons d’agiter la responsabilité des charbons indiens et chinois qui en matière de pollution carbone sont des petits joueurs à coté de nous. Ces chiffres ne sont que le résultat de l’application basique du principe pollueur payeur et du principe que chaque être humain a droit à la même part !
Sommes-nous prêts à payer pour la pollution que nous émettons ? Sommes-nous prêts à payer notre part pour protéger le climat ?
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Notes
[1] Rapport Banque Mondiale, 18 novembre 2012 sur l’urgence d’agir pour éviter un monde à 4°C.
[2] AIE : Agence Internationale de l’Energie
Fin du pétrole : quand l’industrie automobile prépare sa reconversion
Valéry Rachel Knaebel
www.bastamag.net/article2216.html – 03-04-2012
La fin annoncée du pétrole et l’envolée des prix de l’essence compromettent l’avenir de l’industrie automobile. Au royaume du moteur à combustion, élus, syndicats et entreprises anticipent cette nécessaire transition. Le Bade-Wurtemberg, État-région le plus riche d’Allemagne et capitale européenne de l’automobile, prépare sa mue industrielle. L’enjeu : préserver les emplois et des conditions de travail correctes tout en développant de nouvelles activités. Enquête au pays de Porsche, Audi et Daimler.
C’est la patrie de l’automobile et la première région industrielle allemande. En Bade-Wurtemberg, dans le sud de l’Allemagne, aux frontières française et suisse, près d’un salarié sur dix [1] travaille dans l’industrie automobile. Ils sont 188 000 rien que pour la production. Porsche, Audi et Daimler (Mercedes-Benz) y produisent des véhicules. La région abrite aussi le siège du plus important équipementier automobile du monde, Bosch. S’y ajoutent des centaines de fournisseurs du « Mittelstand » – les PME allemandes. Le taux de chômage de la région, le plus bas du pays, fait rêver plus d’un Européen : 4 %. Le salaire moyen y dépasse les 3 400 euros brut.
Alors, quand un écologiste, Winfried Kretschmann, est arrivé à la tête du gouvernement du Land en 2011, après soixante ans de règne ininterrompu des conservateurs, les dents ont évidemment grincé. À peine élu, il a déclaré qu’il valait « mieux moins de voitures que plus ». « Cela a provoqué une certaine irritation ici, chez Daimler », sourit Silke Ernst, syndicaliste et membre du comité central d’entreprise. « Nous voulons que le Bade-Wurtemberg reste la région numéro un de l’automobile en Allemagne », a pourtant répété l’écologiste. Avec l’ère du tout pétrole qui se termine, le défi est de préparer la transition vers de nouvelles technologies plus écologiques, notamment le développement des véhicules électriques.
Comment prôner la transition au pays du moteur à combustion ?
Une certaine anxiété a envahi les ateliers. « Toute la vallée autour de Stuttgart vit du moteur à combustion. Or, la technologie électrique est complètement différente. Nous avons une fonderie, par exemple. Nous n’en aurons plus besoin pour fabriquer des moteurs électriques », s’inquiète Silke Ernst. Conscients des préoccupations des salariés, le syndicat IG Metall et le comité d’entreprise de Daimler ont lancé une étude d’impact sur « l’électromobilité ». En clair : examiner les conséquences sociales du passage aux véhicules électriques. « L’enjeu est que nous soyons, en tant que représentants des salariés, préparés à la transition. Nous voulons mesurer quels seront les effets sur l’emploi, quelles seront les nouvelles exigences en matière de sécurité au travail, ou ce que devraient mettre en œuvre les pouvoirs locaux pour préserver le site industriel. » L’étude doit aussi définir les futures qualifications nécessaires pour former les salariés. Un chantier d’ampleur.
« Les technologies utilisées dans la fabrication des voitures électriques sont courantes dans d’autres branches industrielles, explique Lutz Engel, de l’agence publique régionale pour l’électromobilité, e-mobil. L’enjeu est de transférer ces compétences à l’automobile. » L’agence réalise un inventaire des formations existantes dans les universités et sonde les entreprises sur leurs besoins. Voilà pour les ingénieurs. Les ouvriers qualifiés sont, eux, formés par les chambres de commerce et d’industrie. De grandes entreprises, comme Bosch, s’y sont mises. Les choses traînent en revanche dans les PME, qui attendent souvent de ressentir concrètement le besoin pour envoyer leurs salariés en formation.
Moins d’ouvriers pour fabriquer les véhicules électriques ?
Le Land subventionne certaines formations. Mais le nombre d’emplois à créer suivra-t-il ? La fabrication de véhicules électriques devrait en créer 30 000 d’ici à 2020. Mais ces postes pourraient d’abord se trouver « dans la recherche et le développement ou dans d’autres branches, comme la chimie pour les batteries, ou encore chez les fournisseurs, pas chez nous à la production », pointe Silke Ernst, chez Daimler. Quid des ouvriers ?
Les moteurs électriques sont plus simples que ceux à explosion. Une première analyse [2] le souligne : un moteur à combustion comprend environ 1 400 pièces, contre seulement 200 pour un électrique. Le volume de travail dans les ateliers baisserait ainsi de 50 à 70 %. Ce qui représentent des milliers d’emplois (27 000 personnes travaillent en Allemagne dans les ateliers de fabrication et de montage des moteurs Daimler). Mais d’autres tâches pourraient apparaître ailleurs. « La fabrication de carrosseries plus légères demandera, par exemple, de la main-d’œuvre supplémentaire », indique Jürgen Dispan, chercheur à l’institut indépendant IMU de Stuttgart, qui participe à l’étude.
Une transition plus difficile pour les PME
Pour les syndicats, l’enjeu est avant tout de conserver la production sur le site. Les travailleurs allemands ont déjà perdu la bataille de la Classe C (Mercedes-Benz), qui sera fabriquée aux États-Unis, en Alabama, à partir de 2014. « L’entreprise a naturellement tendance à grandir là où sont les marchés, en Chine et aux États-Unis. C’est là que Daimler investit aujourd’hui », explique Silke Ernst. Daimler a déjà conclu un accord avec Renault : le Français livrera le moteur électrique pour la Smart de l’Allemand, qui fournira, lui, la batterie de la Twingo électrique ZE. Les premiers bébés de cette alliance sortiront des usines en 2014. Autre partenariat scellé l’année dernière : avec l’équipementier Bosch pour développer et produire en commun des moteurs électriques. « La production restera certes dans la région, mais ne se fera plus en interne », déplore la représentante des salariés.
Bosch fait partie des équipementiers automobiles en pointe dans le domaine. L’entreprise investit 400 millions d’euros par an pour passer au moteur électrique. Et dispose aujourd’hui de l’ensemble des compétences de la chaîne : batterie, moteur et électronique.« Il y a aussi beaucoup de petits équipementiers dans la région, près d’un millier. Eux ne sont pas bien préparés. Ces PME n’ont pas les mêmes capacités de recherche et de développement que les grandes entreprises, ni leurs possibilités d’investissement », avertit Jürgen Dispan, qui a aussi examiné le secteur pour la chambre de commerce et d’industrie de Stuttgart.
Des pompes à injection aux panneaux solaires
Avec la crise de 2008, qui a touché le secteur de plein fouet, certains fournisseurs se sont déjà détournés de l’automobile pour explorer, entre autres, les énergies renouvelables. Bosch investit, par exemple, dans le solaire. C’est d’ailleurs le photovoltaïque qui a sauvé son usine française de Vénissieux, près de Lyon. Elle produisait auparavant des pompes à injection. Le cinquième fournisseur automobile allemand, le Badois ZF Friedrichshafen, s’est, lui, dirigé vers les éoliennes. Il en conçoit les engrenages et s’est déjà hissé en haut du marché européen. Un autre grand équipementier de la région, ElringKlinger, qui ne travaillait presque que pour l’automobile à combustion, s’essaie maintenant aux batteries pour véhicules électriques et même à l’industrie médicale.
Certaines tentatives restent toutefois sans lendemain. Le fabricant de presses (pour les carrosseries, mais aussi à monnaie) Schuler a pris le parti, il y a trois ans, de se rendre moins dépendant du secteur automobile. L’entreprise a construit une première éolienne, mais l’ancien gouvernement conservateur de Bade-Wurtemberg ne voulait pas voir les turbines à vent s’élever dans le paysage. Schuler n’a jamais obtenu d’autorisation pour installer son prototype, et a abandonné. Avec la nouvelle équipe écologiste et social-démocrate aux manettes dans la région, le secteur des énergies renouvelables devrait pouvoir s’y développer. Le gouvernement de Winfried Kretschmann souhaite 38 % d’énergie verte dans la production électrique du Land d’ici à 2020 [3]. Il a doublé les aides au secteur dans le budget 2012 et vient d’adopter une loi pour faciliter l’implantation d’éoliennes.
Des entreprises engagées dans la transition écologique
Un changement de cap qui n’effraie pas les entreprises de Bade, surtout pas les constructeurs de machines, autre grand producteur de richesses de la région. « Elles perçoivent très bien le potentiel de la transition, estime Jürgen Dispan [4]. En France, l’industrie automobile est entrée en déclin : le secteur a perdu 20 000 emplois en dix ans et souffre commercialement.
En 2010, le patron d’EBM Papst, un fabricant de ventilateurs industriels, avait salué Winfried Kretschmann en visite sur son usine d’un « les Verts sont nos amis ». Le fabricant développe depuis des années des produits de plus en plus économes en énergie. « Les constructeurs savent que des machines plus efficientes leur apporteront des parts de marché. Le monde entier fait aujourd’hui attention à émettre moins de CO2, la Chine aussi. Et ces entreprises disent : « Si vous voulez moins de CO2, très bien, alors l’Union européenne doit adopter des normes et nous ferons des machines en fonction. » » Il est rare que des entreprises réclament des normes plus strictes…
Notes
[1] 374 900 sur 3,9 millions, selon les estimations de l’institut IMU de Stuttgart. Plus d’un quart des salariés allemands du secteur se trouvent ici.
[2] Réalisée par la section badoise d’IG Metall.
[3] Soit au-dessus de l’objectif fédéral de 35 %.
[4] Le chercheur a réalisé une étude, commandée par les Verts européens, sur le développement de la technologie verte chez les constructeurs de machines de Bade.