Articles du Vendredi : Sélection du 30 juillet 2021


Catastrophes climatiques :
«Nous entamons un voyage sans retour»

Pia de Quatrebarbes
www.humanite.fr/catastrophes-climatiques-nous-entamons-un-voyage-sans-retour-715670

Alors que dômes de chaleur, pluies diluviennes et incendies dévastent la planète, depuis le 26 juillet, les représentants des 195 États et des scientifiques travaillent sur le 6e rapport du Giec, rendu public le 9 août. Entretien avec le climatologue Christophe Cassou, directeur de recherche au CNRS.

Entre deux sessions d’approbation du 6e rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec), le climatologue Christophe Cassou a pris le temps de nous répondre. Depuis lundi 26 juillet et pour deux semaines, les délégations de 195 États et des scientifiques sont réunis pour approuver ligne par ligne le « résumé pour les décideurs ». La première partie du rapport, consacrée aux sciences du climat, sera rendue public le 9 août

En quoi les événements climatiques auxquels nous assistons sont-ils liés au réchauffement climatique. Y a-t-il une accélération?

Christophe Cassou : Depuis trente ans, les climatologues expliquent que, sous l’effet du réchauffement, la plupart des événements extrêmes allaient devenir plus fréquents, plus intenses et plus longs. Ça y est, nous y sommes. Et leur évolution suit très bien les trajectoires évaluées par le Giec. En ce sens, il n’y a pas d’accélération, et le rythme des changements ne va pas plus vite que prévu. Dans notre jargon, nous parlons d’« émergence » : ce que nous observons émerge des fluctuations naturelles du climat ou, dit autrement, ne peut pas s’expliquer sans facteur extérieur.

Il y a toujours eu des événements extrêmes, des canicules et des pluies diluviennes : nos parents, grands et arrière-grands-parents en ont connu. Mais l’intensité de ceux que nous vivons maintenant et leur récurrence ne correspondent plus à la mémoire générationnelle des événements extrêmes qui permet de s’adapter et d’anticiper. Car ce que nous vivons est inédit. Nous sommes désormais entrés en territoire inconnu, et nous entamons un voyage sans retour. Il faut comprendre qu’on ne reviendra pas, à l’échelle de plusieurs générations, au climat de nos parents ou de nos grands-parents.

Nous ne sommes pas surpris en tant que scientifiques. Les changements dans les événements extrêmes s’expliquent par des processus physiques bien connus du système climatique. Et on ne négocie pas avec les lois de la physique : la relation de Clausius-Clapeyron établit que, pour 1 degré de réchauffement, il a 7 % d’augmentation de vapeur d’eau dans l’atmosphère. Or, cette dernière s’est réchauffée de + 1,1 °C depuis le début de l’ère préindustrielle à la fin du XIX e siècle, il y a donc plus de vapeur d’eau, et potentiellement plus de précipitations.

Est-ce qu’il est encore possible de limiter le réchauffement global à + 1,5 °C d’ici à la fin du siècle, comme le prévoit l’accord de Paris?

Christophe Cassou : Selon la littérature scientifique, ce seuil de 1,5 °C sera très probablement franchi dans la prochaine décennie. Une fois ce seuil dépassé, tout l’enjeu est de limiter le réchauffement au plus bas. Cela ne signifie pas que tout est perdu. Mais pour limiter le réchauffement il n’y a qu’une seule solution : la neutralité carbone. Il ne faut pas émettre plus de CO 2 que ce qui peut être absorbé. Toute molécule additionnelle de CO 2 dans l’atmosphère conduit à un réchauffement. De nouveau, c’est la physique qui parle.

Nous avons besoin de transformations radicales à la fois dans leur durée et dans leur ampleur, en agissant sur tous les secteurs. Les leviers d’action sont différents selon les pays. Une réflexion générale sur nos modes de vie et de production s’impose.

L’autre question qui se pose, c’est la manière dont nos sociétés peuvent et doivent s’adapter à ces événements extrêmes. Aujourd’hui, nous ne sommes clairement pas préparés, les impacts sont très forts car nous les anticipons très mal au regard des changements en cours et à venir.

Vous êtes en plein processus d’approbation du 6e rapport du Giec, quel est l’enjeu?

Christophe Cassou : Les 195 États membres de l’ONU sont en train d’approuver ligne par ligne ce que l’on appelle le résumé aux décideurs, soit une quinzaine de pages qui synthétisent plus de 1 000 du rapport. Le résumé, qui est d’abord écrit par les scientifiques, est au final co-construit entre États et scientifiques. Il ne sera dévoilé que le 9 août.

À partir de là, le rapport du Giec ne sera plus un rapport uniquement scientifique, mais un rapport commun science-société, approuvé par les États au nom des citoyens. Il constituera le principal apport scientifique aux négociations internationales sur le climat, qui vont se dérouler à la COP26, en novembre. C’est le premier rapport général du Giec depuis l’accord de Paris, en 2015

Cela fait trente ans que les scientifiques alertent, n’y a-t-il pas une forme de lassitude?

Christophe Cassou : Le Giec a commencé par alerter, puis il a souligné et martelé l’urgence sur la base d’éléments scientifiques très solides. Chaque scientifique vit ce moment différemment. Pour ma part, je ressens du désarroi mais pas de désespoir. Car, depuis cinq ans, on voit une vraie prise de conscience. La société civile s’est approprié les rapports du Giec. Des batailles juridiques s’ouvrent : des procès climatiques se tiennent. Ils nourrissent l’action des militants du climat, mais aussi de toute la société civile. La combinaison de tout cela va dans le bon sens. Les rapports du Giec sont absolument nécessaires mais pas suffisants. Ils nourrissent l’action des militants du climat, mais aussi de toute la société civile, incluant tous les acteurs. Comme la société civile s’empare de ces rapports, elle peut dès lors mettre la pression sur les gouvernants. En approuvant les rapports du Giec, les États ont un devoir moral d’engager des politiques qui vont dans le sens de ses conclusions.


Le littoral français en première ligne face au dérèglement climatique
Muryel Jacque

Les Echos

Avec l’élévation de la mer et l’érosion des côtes qui risquent de s’aggraver au cours des prochaines années, la gestion des littoraux doit absolument s’adapter, prévient, dans une note, le « think tank » La Fabrique écologique. Et une attention particulière doit être donnée à la question des inégalités.

Le phénomène est déjà bien visible sur le littoral et les projections récentes encore plus inquiétantes. Avec le dérèglement climatique, plusieurs dizaines de milliers de Français seront concernés par l’érosion des côtes ou l’élévation du niveau des mers dans les années à venir. Pourtant, les actions entreprises jusqu’à présent en France restent « très insuffisantes », juge Géraud Guibert, le président du think tank La Fabrique écologique. « L’élévation du niveau des mers va mettre sous l’eau une partie du littoral alors que l’urbanisation y est toujours plus forte », prévient-il. Il faut redouter « une crise de submersion marine sur les côtes françaises » à laquelle le pays est mal préparé. Le recul du trait de côte pourrait, lui, toucher entre 5.000 et 50.000 logements d’ici à 2100, selon les estimations du Cerema (Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement), qui évalue les coûts potentiels entre 1 et 8 milliards d’euros. Limiter les conflits Ces deux phénomènes doivent être « pensés conjointement » , estime le think tank dans une note publiée cette semaine. Aujourd’hui, les dispositifs de prévention, de financement de l’adaptation ou d’indemnisation des victimes ne sont en effet pas les mêmes. Ainsi, les victimes d’érosion brutale ne sont pas indemnisées car celle-ci ne fait pas partie du fonds Barnier, le fonds de prévention des risques naturels majeurs. Les études et les initiatives, que le groupe de travail a passées au peigne fin, ont certes été nombreuses ces dernières années, mais « le manque d’ambition » persiste, déplore La Fabrique écologique pour qui les projets ou propositions de loi en cours doivent être l’occasion de prendre des mesures « conséquentes ». « Depuis 2010 et la tempête Xynthia, de nombreuses tentatives visant à accélérer l’adaptation des territoires littoraux ont échoué ou ont montré des limites » , est- il ainsi souligné dans la note. Le groupe de réflexion plaide donc pour une gestion du littoral « adaptative » . En clair, beaucoup plus souple. Il rappelle qu’actuellement, « les outils de planification territoriale privilégient des plans d’action sur des périodes prédéterminées en fonction de diagnostics préalables ». A l’avenir, ces outils doivent s’adapter pour mieux prendre en compte de l’incertitude. Pour La Fabrique écologique, cette adaptation écologique doit être faite d’abord par les territoires, mais l’Etat doit continuer de s’impliquer dans la réglementation de l’urbanisme littoral. Le think tank suggère d’élaborer collectivement une charte à des échelles locales ou régionales qui « permettrait de s’entendre en amont sur une vision commune de l’aménagement littoral » . A l’image des chartes des Parcs naturels régionaux, révisables dans le temps. Avec l’idée de limiter les conflits a posteriori entre les collectivités et l’Etat. Des garde-fous nécessaires Autre gros mouvement qu’il va falloir mieux préparer : la relocalisation – qui consiste à déplacer ou reculer des activités ou des biens. Car il est amené à s’amplifier, et « ça va coûter très cher », alerte Géraud Guibert. Pour pouvoir réaliser correctement ce genre de projets, il faudrait développer l’expérimentation, un droit créé en 2003 et inscrit dans la Constitution, mais avec des garde-fous « absolument nécessaires » pour éviter des « malfaçons ». Comment financer cette adaptation coûteuse du littoral au changement climatique ?

Le think tank juge pertinente l’idée, notamment, de créer un fonds d’aide ad hoc, comme le FARL (Fonds d’aide à la recomposition du littoral) qui serait financé par les intercommunalités littorales. Mais il pointe le risque d’un certain nombre d’inégalités car le niveau de vie des habitants de ces communes est souvent différent de ceux du bord de mer. Pour La Fabrique écologique, il faut dès lors prendre en compte des critères socio-économiques lors des indemnisations. A commencer par savoir s’il s’agit d’une résidence principale ou secondaire.

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Les zones habitées du littoral prennent de plus en plus des airs de banlieue :

https://www.lesechos.fr/2017/05/les- zones-habitees-du-littoral-prennent-de- plus-en-plus-des-airs-de-ban- lieues-168907

La France est mal outillée pour faire face à l’érosion de ses côtes :

https://www.lesechos.fr/politique-soci- ete/societe/la-france-est-mal-outillee- pour-faire-face-a-lerosion-de-ses- cotes-1073047

Aménagement du littoral : le marché de l’adaptation au changement climatique émerge :

https://www.lesechos.fr/2018/06/amenagement-du-littoral-le-marche-de-ladaptation-au-changement-clima- tique-emerge-974033


L’art de vendre des promesses
La revue Terrestre
www.politis.fr/articles/2021/07/lart-de-vendre-des-promesses-43410/

Alors que des alertes documentées sur le réchauffement climatique ont été lancées dès les années 1970, les classes dirigeantes en ont organisé le déni afin de maintenir leurs pouvoirs et leurs profits.

Le désastre écologique est-il le résultat d’une série de conjonctions malheureuses ou l’effet de choix politiques ? Faut-il mettre cette destruction des conditions de vie sur Terre sur le compte de l’incertitude scientifique, de l’indifférence de l’opinion publique, de l’inertie du monde économique ou de la médiocrité du personnel politique ? Depuis vingt ans, des enquêtes minutieuses ont réuni une impressionnante documentation sur l’histoire longue de nos savoirs environnementaux (1).

Elles révèlent que l’actuelle trajectoire climatique avait été anticipée et modélisée avec un niveau de preuve raisonnable dès les années 1970.

Certes, depuis 1950, des controverses ont animé les communautés scientifiques. Mais les relevés, observations et modélisations démontraient une tendance nette, générale et continue à l’augmentation du taux atmosphérique de CO2 depuis la fin du XIXe siècle. La période 1965-1975 ouvre le bal d’une série – ininterrompue jusqu’à aujourd’hui – de publications alertant sur ces enjeux : rapports remis à la Maison Blanche (1965), dossier commandé par les Nations unies pour la conférence de Stockholm et rapport du Club de Rome (1972), mais aussi des articles scientifiques ainsi que des études publiées par plusieurs compagnies pétrolières…

Au cours de la même séquence, les principaux pays riches sont traversés par d’intenses vagues de politisation. En réaction, une partie des classes dirigeantes opte pour de multiples stratégies afin de déminer, par la disqualification et la neutralisation, la charge explosive de ces mobilisations scientifique et politique (2). Depuis cinquante ans sur la question du réchauffement climatique, et depuis au moins le XVIIIe siècle pour les enjeux écologiques, les principales institutions et puissances économiques ont mené, directement ou indirectement, une politique de guerre anti-écologique (3). Par l’organisation du déni, la domestication des critiques et l’avalanche de promesses illusoires (autorégulation du marché, innovations, marché carbone, etc.), elles ont acheté du temps pour maintenir leur domination.

Gagner du temps, obtenir un délai, procrastiner pour continuer à accomplir méfaits et forfaits. Gagner des profits, conserver les pouvoirs, se maintenir en tant que puissances économiques et géopolitiques : les raisons sont plurielles, mais toutes conduisent, dans les faits, à chercher à différer le moment d’une réappropriation politique et égalitaire de nos vies.

À travers leur matrice chrétienne, l’Occident, le capitalisme et l’idéologie du progrès sont liés à une conception optimiste du temps et de l’histoire qui a posé l’avenir comme rédempteur. Au lieu de faire du politique le lieu d’expression des antagonismes et des conflits, les modernisateurs prêtent au futur la capacité de réguler et de corriger les contradictions du capitalisme industriel – foi dans la science, solutionnisme technologique, gouvernement des experts et des normes. Les discours sur l’avenir ont pour fonction centrale de pacifier le présent en étouffant nos désirs de nouveaux départs.

Ce consensus industriel, productiviste et progressiste est alors hégémonique et largement transpartisan. Pourtant, dès 1970, le dossier était suffisamment instruit pour tout arrêter, réfléchir et agir. En 2000, la morphologie de la catastrophe écologique était assez nette pour harceler les pouvoirs et faire dérailler la locomotive industrielle. En 2020, le ravage écologique perle sur nos fronts et prépare les morts de masse de demain. Et nous devrions encore attendre 2030-2050 et un énième rapport d’experts censé permettre d’atténuer le désastre – c’est-à-dire de nous adapter à lui. Véritables hochets du pouvoir, la neutralité carbone et la transition écologique constituent une des principales digues idéologiques contre une réappropriation dès maintenant de notre temps politique (4).

Les pensées du progrès, de Voltaire à Hegel en passant par divers marxismes, ont fait de l’avenir un horizon de consolation et d’acceptation des souffrances présentes.

Ce régime de promesses tend à abolir le temps et l’action proprement politique. Se réapproprier le présent devient alors un geste révolutionnaire. Refuser d’être consolé implique de récuser le rapport politique d’autorité qu’instaurent doublement le temps du progrès et le temps de la catastrophe. C’est ainsi qu’on peut comprendre et soutenir le geste de celles et ceux qui cimentent des machines pour endiguer le flot du désastre et du fascisme (5).

Par La revue Terrestres (www.terrestres.org)

(1) Les Marchands de doute__, Naomi Oreskes et Erik M. Conway, Le Pommier, 2012 (réédition 2021).

(2) La Société ingouvernable. Une généalogie du libéralisme autoritaire__, Grégoire Chamayou, La Fabrique, 2018.

(3) Les Révoltes du ciel. Une histoire du changement climatique
(XVe-XXe siècle)
, Jean-Baptiste Fressoz et Fabien Locher, Seuil, 2020.

(4) Écologie sans transition, Désobéissance Écolo Paris, Divergences, 2020.

(5) « “Désarmons le béton” : 400 activistes bloquent des sites de Lafarge contre le Grand Paris », Reporterre__, 30 juin 2021.


Cédric Herrou : « Il y a un problème de prise de conscience de ce qui se passe dans le monde et d’empathie »
Julien Leprovost
www.goodplanet.info/2021/07/21/cedric-herrou-il-y-a-un-probleme-de-prise-de-conscience-de-ce-qui-se-passe-dans-le-monde-et-dempathie

De la vallée de la Roya, en France, où il a commencé son combat en faveur des migrants jusqu’à la Belgique, Cédric Herrou poursuit son engagement pour défendre celles et ceux qui sont contraints de fuir leur pays pour trouver refuge ailleurs. En 2016, ce paysan vient en aide à des migrants traversant la frontière entre l’Italie et la France, ce qui le conduit devant les tribunaux pour « délit de solidarité ». En 2021, il est finalement relaxé par la Cour de Cassation. À Bruxelles, l’agriculteur humaniste est venu soutenir plusieurs centaines de sans-papiers en grève de la faim depuis des semaines dans une église afin de demander leur régularisation et d’alerter l’opinion publique. Dans cet entretien, Cédric Herrou explique les liens entre la crise climatique et sa lutte pour celles et ceux pour qui l’exil forcé est la dernière alternative.

La vallée de la Roya a été aussi victime de terribles inondations fin 2020, quel regard portez-vous sur ce qui se passe ces derniers jours dans le nord-ouest de l’Europe ?

La crise climatique est une réalité qui arrive plus vite que prévu. Jusqu’alors, on pensait qu’elle ne concernait que les pays éloignés ou l’Afrique. Maintenant, c’est une urgence. On a besoin que les politiques actent des décisions franches et directes pour lutter contre le réchauffement.

La crise climatique rend invivable de nombreux endroits sur terre, ce qui entrainera des déplacements de populations, que faire pour les réfugiés climatiques présents et futurs ?

Il faut réaliser que cela nous concerne aussi. Les bouleversements entrainés par le changement climatique vont nous arriver dessus aussi, ce n’est pas un problème lointain. On a vu les pics de températures au Canada. On voit qu’il y a des répercussions sur le continent européen, la crise climatique n’est pas forcement extérieure. Il y a eu une tempête dans la vallée de la Roya l’an dernier. Là, je suis à Liège où les inondations ont été dévastatrices comme en Allemagne.

Faut-il créer un statut de réfugié climatique ?

Il faudrait peut-être le créer. Reconnaitre les causes du changement climatique et les combattre me semble avant tout une priorité. Il faut déjà revoir notre manière de gérer le monde et d’écouter les alertes sur les grands sujets sur lesquels il y a urgence à agir. Plutôt que de mettre des pansements sur les blessures, il faut traiter les causes du problème au lieu de se contenter de s’occuper de ses symptômes. Après tout, des réfugiés climatiques, il y en a toujours eu. En Afrique, ce sont en général des gens qui ne voyagent pas très loin puisqu’ils migrent dans le pays d’à côté. Ce qui conduit les gens à partir loin, ce sont les crises économiques, les guerres ou les dictatures.

Comment créer de la solidarité envers les victimes du réchauffement ?

Inventer un autre modèle économique serait la meilleure marque de solidarité envers les victimes du réchauffement

N’existe-il pas un risque que l’afflux de réfugiés climatiques ou de migrants donne l’impression aux opinions publiques des pays développés de se sentir « victimes » du réchauffement alors qu’elles en sont en partie responsables et d’oublier ainsi que les vraies victimes sont les personnes obligées de quitter leur pays ?

Il y a un problème de prise de conscience de ce qui se passe dans le monde et d’empathie. Il est vrai qu’il est difficile d’avoir de l’empathie pour des gens qu’on ne considère pas comme nos égaux. Ce problème ne concerne non seulement les opinons publiques mais aussi les politiques. Je suis à Bruxelles dans les églises et les facs qui soutiennent les sans-papiers et demandent leur régularisation en faisant la grève de la faim. Or, les politiques semblent hors-sol face à ces problèmes. Déjà en 2018, quand l’Italie refusait de laisser débarquer ou partir les navires venants en aide aux migrants, cela a abouti à de nombreuses noyades en Méditerranée dans l’indifférence.

Le sujet de l’empathie envers les migrants amène une autre question. Quelle place pour les réfugiés ou les migrants dans nos sociétés ?

Le problème est qu’on conserve une lecture souverainiste, voire un peu nationaliste, dans un monde globalisé. Or, il faudrait également mondialiser les belles choses comme la fraternité, l’entraide et la solidarité. Après, ce n’est pas facile, il faut donc gérer les choses de manière pragmatique afin que les déplacements de populations et les migrations se passent bien. Les élus et les représentants du peuple doivent garder une certaine forme de morale et de décence, il n’est pas concevable de mener des politiques qui maltraitent les gens. Dire ceci relève peut-être d’une vision utopiste, mais la politique a besoin d’utopie et de poésie pour oser. Ceux qui n’osent pas risquent de tomber rapidement dans la stigmatisation de l’autre et le racisme.

La première maison d’écologie populaire de France est à Bagnolet
Amina Lahmar
www.bondyblog.fr/societe/la-premiere-maison-decologie-populaire-de-france-est-a-bagnolet

Le mouvement citoyen pour le climat Alternatiba et l’organisation Front de Mères inaugurent un lieu inédit à Bagnolet : Verdragon, la première maison d’écologie populaire de France. Situés dans le quartier populaire de la Noue, les locaux abriteront un projet d’écologie populaire, avec l’ambition d’un fort ancrage politique et citoyen accessible aux enfants et aux familles. Reportage.

Pratique et conscience. Le 14 de la rue de l’épine prolongée à Bagnolet en Seine-Saint-Denis abrite un projet inouï. Verdragon sera la première maison d’écologie populaire de France. Le bail de Verdragon, lieu pensé par le mouvement écologiste Alternatiba et le collectif syndicaliste Front de Mères, a été signé il y a deux semaines. Des bénévoles s’activent pour donner aux locaux de l’ancien centre social Toffoletti, une nouvelle vie avant son ouverture au public.

Sur deux étages et 963m2, Verdragon – la maison de l’écologie, se veut être la concrétisation d’une pensée écologique, politique et citoyenne. L’équipe organisatrice souhaite aborder la cause du climat grave et urgente, par une pédagogie active, ludique et bienveillante. « A Alternatiba, on aime dire que la pratique crée la conscience », illustre Gabriel Mazzolini.

Un lieu commun pour deux entités différentes

Un lieu partagé entre deux entités différentes. Fondé en 2013, Alternatiba est un mouvement citoyen, créé autour de réseaux locaux, pour le climat, qui encadre notamment la Marche pour le Climat (et fait de l’accompagnement d’autres organisations écologistes). Le syndicat de parents d’élèves Front de Mères, créé en 2016 se définit comme un réseau chargé de donner une résonance nationale aux combats menés par les collectifs de parents au niveau local, et notamment dans les quartiers populaires.

À Bagnolet, chacun des deux mouvements pourra exercer ses activités en plus du projet commun. Les engagés voient les choses en grand: décloisonner, décorer, aménager de nouveaux espaces. À Verdragon on imagine déjà des conférences, des ateliers, des débats, une bibliothèque, des temps calmes. La salle de danse restera.

Front De Mères dévoile ses projets d’ateliers danse, « pour permettre aux mères de famille d’avoir un autre regard sur l’activité physique et sur leurs corps. » L’inauguration, prévue le 15 mai prochain, promet d’être rythmée et festive. « On va organiser un braquage », lance Fatima Ouassak, porte-parole de Front de Mères.

« Soyez l’étincelle » : Alternatiba allié au front de mères va tenter de raviver un lieu de débats, de création et de proposition politique.

Le nom du site a été source de longues réflexions. « On voulait un nom qui parle aux quartiers populaires. Le dragon est présent dans les mangas, que consomment les jeunes des quartiers populaires. » relate Fatima Ouassak. La cofondatrice de Front de Mères dévoile que l’enjeu symbolique du nom est fort. « Le dragon n’est pas genré. Il n’existe pas, ça ouvre le champ des possibles. C’est un symbole de la puissance politique, mais aussi une figure fantastique puissante. » Gabriel Mazzolini met en lumière une roche appelée verredragon de la série Game Of Thrones. Il s’agirait du seul matériau pouvant permettre aux empires de vaincre leurs ennemis (les marcheurs blancs), dans un contexte faisant référence aux changements climatiques selon certaines théories.

L’alimentation au coeur des préoccupations politiques

La nourriture sera une thématique principale de ce projet d’écologie populaire. La cantine et les ateliers cuisine représenteront donc des enjeux centraux à Verdragon. Les objectifs sont multiples : créer du partage à travers des recettes, se rapprocher de la nature, transmettre un héritage culinaire, créer un point de ralliement, mais surtout conscientiser les habitants autour des enjeux alimentaires et environnementaux. Le front de mères s’était mobilisé en 2017 pour que les enfants des écoles de Bagnolet aient accès à des repas végétariens dans les cantines.

Dans les quartiers populaires, nous sommes entravés dès lors que nous souhaitons nous mobiliser politiquement.

« Concernant la conscientisation autour de la nourriture, il y a déjà un travail mené avec les enfants par Front de Mères. Seulement, nous n’avions pas de lieu. Dans les quartiers populaires, nous sommes entravés dès lors que nous souhaitons nous mobiliser politiquement. » dénonce Fatima Ouassak.

Par ailleurs, Front de Mères et Alternatiba ont créé l’AMAP (Association pour le maintien d’une agriculture paysanne) de Verdragon, en partenariat avec une maraîchère. Ce mode de consommation, selon Fatima Ouassak, reste souvent éloigné des quartiers populaires. La militante souhaite que les quartiers puissent se les approprier, manger mieux, moins cher et local.

En bref, pour l’activiste, l’AMAP est un dispositif qui peut participer à montrer qu’un autre système est possible. Car Verdragon, à travers sa mission sociale dans la continuité du centre Toffoletti, se veut profondément politique. Le mouvement Alternatiba qui souhaite sensibiliser le maximum de personnes à l’écologie, pense trouver résonance au sein des quartiers populaires, directement impactés par les problématiques environnementales. Pour autant Verdragon n’a pas la prétention de « vouloir civiliser les gens des quartiers populaires » sur ces questions environnementales, éclaire Fatima Ouassak. Pour la militante, les luttes y sont déjà présentes.

Convergence des luttes dans une ville de résistance

L’emplacement de Verdragon rend d’autant plus fort son message politique. Situé au sein du quartier de la Noue, à la lisière de Montreuil, en face d’un lycée et d’un parc, le Verdragon semble baigner dans des symboles qui renforcent sa stature. « C’est aussi l’aboutissement d’un travail militant de 30 ou 40 ans de lutte à Bagnolet. Mais aussi les luttes CGT, et communistes. Le 93 de manière générale est un lieu de résistance car il y a plus d’inégalités », relate Fatima Ouassak.

La militante se réjouit de l’emplacement du lieu, elle qui porte Front de Mères à Bagnolet. Elle dénonce régulièrement l’entrave à l’accès à des locaux pour pouvoir s’organiser. Cette alliance avec Alternatiba représente une « opportunité en or », d’autant plus que les deux entités se retrouvent dans des combats de justice et de dignité. « Front de Mères est né sur la question de la cantine, pas sur l’écologie mais on y est arrivés très vite. On est partis d’une question quotidienne d’inégalité et de justice. »

C’est sur ces termes d’égalité et de justice que les causes environnementales et sociales se rejoignent. L’équipe partage une vision commune. « On remarque que l’écologie est l’une des principales préoccupations des Français mais les catégories sociales mobilisées sont limitées aux classes moyennes des grandes villes. La cause écologique concerne tout le monde. Nous ne sommes pas tous égaux. Les quartiers populaires sont les premiers concernés, ils sont ceux les plus touchés par la pollution » affirme Gabriel Mazzolini.

Elodie Nace, porte-parole d’Alternatiba explique que « la cause écologiste a connu un tournant en 2018 avec la marche pour le climat. On l’a pris à bras le corps pour que ce ne soit pas que l’illusion d’un grand rassemblement spontané. On souhaite une vraie politisation du sujet. » « Il y a quelque chose à faire vis-à-vis de la justice et de la jeunesse », complète Fatima Ouassak.

L’équipe explique qu’une réflexion a été faite autour de la mobilisation de génération Adama, et de génération climat. « Nous avons dû reporter nos actions avec le comité Justice pour Adama à cause du Covid. On ne se laisse pas enfermer dans des cultures politiques. Ici c’est vraiment un lieu d’expérimentation », affirme Fatima Ouassak.

Des ambitions scientifiques et internationales

« On voudrait inviter des philosophes, des scientifiques, des experts et les confronter », explique Elodie Nace, porte-parole d’Alternatiba. « Nous avons également une prétention scientifique. Nous voulons produire de la matière sur l’écologie populaire. On va tester, voir ce qui fonctionne ou pas et pourquoi », complète Fatima Ouassak.

“Naturaren aurkako ekintza oro giza eskubideen urraketekin dago lotuta”
Irantzu Pastor
www.argia.eus/argia-astekaria/2743/mugarik-gabeko-kideak

Mugarik Gabek, elkartasunerako eta nazioarteko lankidetzarako erakundeak, argi du transnazionalak hainbat herrialde ustiatzen ari diren bitartean, baliabide naturalen defentsarako protesta sozialen kriminalizazioa eta eskubideen urraketak gero eta larriagoak direla. Nazioarteko lankidetzatik eta elkartasunetik abiatuta, kanpaina berri batean ari dira lanean, Maite Ezquerro Saenz eta Jesús González Pazosek kontatu digutenez.

Zeintzuk dira Mugarik Gabe erakundeak dituen erronka eta proiektuak hurrengo hilabeteetarako?

Jesús González: Normalean naturaren aurkako erasoak eta gizakien kontrakoak elkarren artean harremanik ez duten gauzak bailiran aurkezten dira; alde batetik klima aldaketa eragiten ari den hondamendia, natura eta animaliei eragiten diena batez ere, eta bertzetik giza eskubideen kontrako gehiegikeriak. Ongi diseinatutako diskurtso honek ez duena kontatzen da naturaren kontra egiten diren ekintza guztiek berehalako ondorioak dituztela gizakiongan eta giza eskubideen urraketak sistematikoak direla horrelako kasuetan; kriminalizazioa, hilketak, kartzelaratzeak edo jende multzo handien desplazamendua, adibidez. Batzuetan badirudi klima aldaketaz hitz egiten denean “zerutik eroritako” zerbait dela eta etorkizunean sufrituko dugula horren guztiaren eragina, baina ez da horrela, oraintxe gertatzen ari da eta hori ikusarazi behar da. Horregatik, “Bizitza jokoan. Lurra, bizitzak eta eskubideak” kanpainan ari gara lanean, ingurumen eskubideen urraketak eta giza eskubideenak hagitz lotuta daudela ulertaraztea helburu.

Zein ekimen aurreikusten dituzue kanpainaren baitan?

Maite Ezquerro: Enpresa transnazional bat herrialde batera sartu eta mega-proiektu bat eraikitzen hasten denean, ingurumena hondatu eta kutsatzeaz gain, lehen erran bezala, bertan bizi direnen giza eskubideak urratzen dituela ulertarazi behar zaio gizarteari. Hori lantzeko, lau lan ardatz nagusi ditugu.

González: Lehena formakuntza litzateke, 2021 eta 2022an Euskal Herriko unibertsitateetan gaiaren inguruko mintegiak antolatuko ditugu. Bigarrena, kongresu nagusi bat antolatzea izanen da, hurrengo urte hasiera aldera. Hirugarrena, Latinoamerikako hainbat herrialdetan emandako kasu konkretuen inguruko ikerketa da eta horri lotuta, argitalpen bat ere bai. Azkenik, politikoki eragiteko kanpaina ere aurreikusten dugu, gai hauen inguruan jarrera eta konpromiso politiko zehatzak har ditzaten lanketa sakona egitea, bai instituzioekin baita Euskal Herriko erakunde sozialekin ere.

Larrialdi klimatikoak gero eta kezkagarriagoa dirudi. Gure esku dago gelditzea?

Ezquerro: Bizitza jokoan dagoela ulertzen dugu Mugarik Gaben, krisi klimatikoak bizitza bera mehatxatzen duela, gizakion eta inguratzen gaituen guztiaren bizitza. Gaur egun, inork ez du klima-krisia ukatzen, baina gizarteari ulertarazten zaio bere gain dagoela erantzukizun nagusia. Egia da denon esku dagoela neurriak hartzea, baina benetan aldatu behar dena ekoizpen eredua da, enpresa kutsakorrek eta estatuek dute arazo honen giltza nagusia eta beraiek dira krisi honen erantzule zuzenak. Hor jarri behar da fokua eta hori da gure helburuetako bat.

González: Erantzukizun maila ezberdinak daude, gutariko bakoitzak etxetik zerbait egin genezake eta egin behar dugu noski, baina arazoa sistema neoliberala da, estatuek enpresa eta erauzketa-proiektuei ematen dieten babesa.

Transnazionalek hainbat herrialdetan egiten dutena ez al da kolonizatzeko modu eguneratu bat?

González: Kapitalismo basatiaren maila gorena da, bai. Ez da ahantzi behar, egungo eredu neoliberalak bilatzen duen bakarra gehienezko irabazia lortzea dela, edozein modutan gainera, eta hori lortzeko erremintak enpresa transnazionalak dira.

Azken urteetan, enpresa anitzek diskurtso eta irudia moldatu dute “berdeagoak” izateko gizartearen begietara.

González: Euren irudia garbitu nahi dute horrelako aldaketekin, baina negozioa eta dirua ez galtzea da azken helburua. Iraultza berdearen bandera hartzen dute, baina aldi berean kutsatzen eta ustiatzen jarraitzen dute, inoiz baino bortitzago.

Ezquerro: Salaketak egiten ari gara, energia berriztagarria produzitzen duten enpresa batzuk giza eskubideak urratzen ari baitira. Gainera, eredu zentralizatua eta enpresa gutxi batzuen monopolioa dago, kutsatu egiten dute… Beraz, enpresa batek energia berriztagarria produzitzeak ez du ezer bermatzen. Aurpegia garbitu dute eredu berarekin jarraitzeko.

Latinoamerikan enpresa hidroelektriko pila bat dago eta gas isurketa ikaragarria da askotan, metanoa batez ere, ia erreaktore kimiko batek bezainbertze gas isuri dezakete.

González: Latinoamerikan erauzketa-proiektu bortitzak dituzte martxan: zeru zabaleko meategiak, soja edo palma landaketa erraldoiak… Natura eta basoak suntsitzen ari dira, baina “proiektu berde” gisa saltzen dituzten hidroelektriko eta parke eolikoen eraikuntza masiboak ere hagitz deigarriak dira. Herri indigenak beraien lurretatik botatzen dituzte proiektu hauek eraikitzeko, eta Latinoamerikan ez dira bat edo bi, ehunka hidroelektriko eraikitzen dituzte lur eremu hagitz txikian, baita parke eoliko erraldoiak ere. Bitartean, hemen erakusten digute energia berriztagarria sortzeko proiektu eder eta jasangarriak direla.

Norentzat da sortutako energia hori?

González: Enpresa hauetan sortutako energia ez da inoiz bertako biztanleentzat, produzitutako ia energia guztia meategientzat eta nekazaritza edo industriako proiektu erraldoientzat dira; energia eta ur pila bat behar izaten dute. Guatemalan esaterako, produzitzen den energia guztia esportatzeko da, eta ondoan bertako herritarrak daude etxean argirik eta urik ez dutela, pobrezian bizirauten.

Gure inguruko enpresak ere egonen dira atzean, ezta?

González: Iberdrola adibidez Mexikoko parke eoliko handien atzean dago, baita Brasileko enpresa hidroelektriko anitzen eraikuntzan ere. ACS enpresa espainiarrak Guatemalan hidroelektriko asko eraiki ditu, eta Europako enpresa mordoa dago antzera jokatzen. Eskubide urraketa kasuak ematen direnean eta enpresa hauei erantzukizunak eskatzen zaizkienean, erraten dute herrialde horietako bertze enpresak subkontratatutako enpresak direla, beraiek ez dutela zerikusirik gauza horiekin. Euren izena garbi mantentzen saiatzen dira eta enpresa eredugarri bezala saltzen dute beraien burua nazioartean. Gainera Espainiako Gobernuak babesa ematen die, hainbat programa eta dirulaguntzaren bidez.

Ekintzaile, lider sozial eta indigenen kontrako mehatxu eta are gehiago hilketak ezagunak zaizkigu, esaterako Hondurasen hil zuten Berta Cáceresen kasua.

González: Kriminalizazio prozesuak hasten dira herritarrak megaproiektuei aurre egiteko antolatzen direnean. Lider komunitarioen atxiloketa prebentiboak adibidez hagitz ohikoak dira, horrela enpresa hauek herritarrak geldiarazten dituzte eta denbora irabazten dute eraikuntza obrekin aurrera egiteko. Guatemalan, Hondurasen, Kolonbian, Mexikon… ingurumenaren, lurren eta giza eskubideen defendatzaileen kontrako eraso eta erailketa kasuak hagitz kezkagarriak dira. Berta Cáceresen kasua nazioartean ezagun bihurtu zen, bai, baina beste hilketa guztiez ez dakigu deus ere.

Ezquerro: Komunitate indigenak, nekazariak eta afroondorengoak dira kriminalizazio eta jazarpen gehien jasaten dutenak. Beraiengandik anitz ikasteko dugula uste dugu, Mendebaldeko gizarteetan ama lurrarekin konexioa galdu dugula baitirudi, ez gaude lurrari beraiek bezain lotuta eta ahaztu dugu denok ekosistema beraren zati garela. Eurek argiago dute naturaren kontrako edozein eraso gizakiaren kontrako eraso zuzena dela eta horregatik dela hain beharrezkoa ama lurraren defentsa egitea.

Krisi klimatikoak berdin eragiten digu guztioi?

Ezquerro: Ez, noski ez digula berdin eragiten pertsona eta gizarte-klase guztiei. Emakumeei bereziki eragiten dio klima-krisiak, batez ere etxeko lanez arduratzen direnak direlako; ura, argia, janaria, sua… bizirauteko beharrezkoak diren lan horiek guztiak emakumeek egiten dituzte herrialde gehienetan, eta horien falta dagoenean, emakumeak lan gehiago egin behar izaten du ura edo janaria lortzeko. Pobrezia tasek, energia-pobreziak adibidez, gehiago eragiten die emakumeei.

Krisi klimatikoaren ondorioz, milioika desplazatu daude urtero munduan. 2020an, 30,7 milioiek beraien etxea utzi behar izan zuten (Internal Displacement Monitoring Centre).

González: Uraren kontrolagatik ari dira ematen gatazka eta gerrak gaur egun eta horrek milaka eta milaka herritarren desplazamendua eragiten du. Idorteak, suteak, uholdeak… Gero eta gehiago ikusten ari garen fenomenoak dira; azken hilabeteotan Kanadan ikusi ditugun tenperatura altuak eta suteak aurretik ikusi gabeko gertakariak dira. Sistema honek behin eta berriz errepikatzen digu gauza anekdotikoak direla, guri ez digula guztiz eragiten, gure etxeetan ez dela ezer gertatuko, baina hori gezurra da. Horrelako hondamendiak milaka eta milaka herritarren desplazamendua eragiten ari dira momentu honetan berean Afrikan, Asian… eta hori, hein handi batean, hartzen ari diren erabaki politikoen ondorioa da. Kontua da, herrialde horietan pasatzen dena ez dela telebistan agertzen, Kanadarekin bezala.

Nola ikusarazten da hau guztia eta nola lantzen da elkartasuna Euskal Herritik?

Ezquerro: Alternatibak bilatu behar dira, indibidualki eta kolektiboki. Antolatzea, mobilizatzea eta gertatzen dena ikusaraztea ezinbertzekoa da. Borrokak elkarrekin lotu behar ditugu eta sektoreen arteko elkarlana bultzatu, maila globalean. Alternatibak, gainera, anitza izan behar du, leku bakoitzera egokitua, bertzela ez du funtzionatzen, ez dagoelako egiteko modu hegemoniko eta bakarra.

Horregatik zuen kanpaina…

González: Kanpaina honek ez du erreforma txikiak egitea bilatzen, sistema guztia errotik aldatzea baizik. Gure sistemak ez du balio, ikusi dugu ez duela funtzionatzen, beraz, transformazioak erradikala izan behar du, sistemaren errora joan eta dena aldatu. Kanpaina gure ekarpena da presio sozial hori handitzeko eta nolabait aldaketa eragiteko ekonomikoki, sozialki eta politikoki. Egungo sistemak natura gero eta bortitzago hondatzen du eta herri eta gizakion eskubideak urratzen ditu.