Articles du Vendredi : Sélection du 18 octobre

« L’artificialisation des sols détruit les moyens d’agir sur le climat »
Collectif
www.lemonde.fr/idees/article/2024/10/17/l-artificialisation-des-sols-detruit-les-moyens-d-agir-sur-le-climat_6354034_3232.html

Les universitaires Alain Brauman et Marc-André Selosse, la sénatrice Nicole Bonnefoy et le député Richard Ramos appellent, dans une tribune au « Monde », à soutenir l’effort de l’objectif zéro artificialisation net prévu dans la loi Climat de 2021 après les reculades de Michel Barnier.

L’artificialisation, c’est-à-dire des aménagements qui couvrent le sol et annihilent ses fonctions, va galopant en France : cinq terrains de foot par heure (même la nuit) ; 10 % de la surface agricole couverte durant les cinquante dernières années ; une tendance 3,7 fois plus rapide que l’augmentation de la population, qui fait de nous le plus mauvais élève européen, d’après France Stratégie. L’habitat utilise 63 % des sols artificialisés, suivi par les zones d’activité (23 %) et les infrastructures (7 %).

Un espoir était venu du législateur, inspiré par la convention citoyenne pour le climat, au sein de la loi Climat et résilience de 2021. Elle portait un objectif zéro artificialisation nette (ZAN) visant à réduire celle-ci par deux – en tenant compte des sols réhabilités – en 2031 [par rapport à la décennie 2010], puis à la neutraliser en 2050. C’était peu ambitieux : le ZAN demandait à nos enfants ce que nous ne pouvons réaliser d’emblée.

Le ZAN a été assoupli par une loi en 2023 destinée à accompagner les élus, dont les difficultés sont réelles, car le développement économique passe souvent par l’artificialisation. Le 9 octobre, le Sénat proposait de réviser encore la méthode. Et Michel Barnier a annoncé une nette régression dans son discours de politique générale : « Pour construire, il faut du foncier. » Certes, il y a des impératifs économiques liés à notre dette nationale… Mais cette vision purement foncière des sols cache l’émergence d’une autre dette, abyssale aussi, qui va nous étouffer très vite.

Le défi d’une agriculture nouvelle

Les sols captent l’eau : ils la conservent et, dans les périodes sèches, la restituent aux végétaux qui nous nourrissent ou rafraîchissent nos villes, et aux rivières. Dans un pays où les précipitations estivales pourraient baisser jusqu’à 40 % d’ici à 2080, qui payera le manque à gagner des agriculteurs, la perte des îlots de fraîcheur et le renchérissement des aliments ? Affaiblir le ZAN est incompatible avec l’annonce par le gouvernement d’une grande conférence nationale sur l’eau ! De plus, les précipitations automnales augmentent avec le changement climatique et l’artificialisation diminue le stockage par les sols : cela accroît les inondations, on l’a vu à Nice et ailleurs. Qui payera les dégâts ?

Les sols captent du carbone : la matière organique morte qui y stationne pour des décennies ou des siècles, c’est autant de CO2 en moins dans l’air. L’artificialisation détruit des moyens d’agir sur le climat, alors qu’on ne sait, ni ne provisionne, ce qu’il faudra payer pour les dégâts climatiques…

Parmi ceux-ci, la baisse de productivité agricole posera problème. Certes, la France produit deux fois plus de calories alimentaires qu’elle n’en consomme : mais ce chiffre est déjà en baisse et nous sommes dépendants de l’étranger pour certaines ressources (dont 71 % de nos fruits). La souveraineté alimentaire vient des sols. Les plus beaux sont aux alentours des villes, historiquement installées près des ressources alimentaires : la croissance urbaine, autour de Paris par exemple, enfouit nos sols les plus nourrissants. Oublions les chiffrages en hectares : notre artificialisation détruit chaque année la surface qui nourrit la ville du Havre (Seine-Maritime) pendant un an. Qui payera nos achats alimentaires sur un marché international qui se renchérit ?

Les cancers et les maladies neurologiques liés aux pesticides défraient l’actualité, comme récemment à La Rochelle. Le défi d’une agriculture nouvelle, plus biologique et réduisant les pesticides, demande dans un premier temps de légères baisses de rendement. Même si, dans le futur, des méthodes nouvelles pourront remonter la production, il faut provisoirement accepter ces baisses. Il nous faut donc de l’espace pour développer une nouvelle agriculture, sinon ce sera un coût en santé publique demain. Et qui payera pour les malades ?

Enfin, les surfaces agricoles sont devenues sources d’énergie, soit en produisant la matière organique qui sert à la méthanisation, soit en abritant des panneaux photovoltaïques au-dessus de cultures. Si nous manquons de surface pour produire cette énergie, alors qui payera et à quel prix, les ressources énergétiques alternatives ?

 

 

Une densité intermédiaire

Bien sûr, le ZAN n’est pas exercice facile : des pistes cyclables au logement social, il nous faut de l’espace. Mais identifions bien les marges d’adaptation. Certains sols pollués, par exemple par des industries, méritent d’être décaissés et offrent des zones à construire. On peut également nuancer le poids de l’artificialisation de sols qui remplissent peu de fonctions écologiques vitales : dans le bilan entre surfaces réhabilitées et surfaces artificialisées, il faut calculer le ZAN non sur le seul équilibre des surfaces, mais aussi sur le maintien des fonctions écologiques remplies. Notre urbanisme doit privilégier une densité intermédiaire, avec des sols ouverts et de la végétation, rejetant un idéal pavillonnaire très artificialisant (et coûteux en énergie pour le chauffage et le transport). Enfin, revitalisons l’existant : le taux de logements vacants atteint 8,5 % du parc immobilier (+ 3,4 % par an depuis 2010) contre 3 % au Royaume-Uni ou 1,7 % en Suisse ; plus de 10 % des baux commerciaux de centre-ville sont inoccupés en France !

Une autre dette se profile donc : celle qu’entraînera la perte des sols dont la surface fait notre eau, notre climat, notre alimentation, notre énergie et notre santé. Ne perdons pas de vue l’essentiel pour notre vieillesse et nos enfants : les solutions aux difficultés d’aujourd’hui ne doivent en aucun cas hypothéquer l’avenir, ni en matière de sol, ni en matière de dette. Mettons-nous autour d’une table et améliorons ensemble la loi. Mais ne laissons pas des visions partielles accaparer l’avenir de tous : investissons dans les sols.

Signataires : Nicole Bonnefoy, sénatrice (Parti socialiste) de la Charente, vice-présidente de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable du Sénat ; Alain Brauman, directeur de recherche à l’Institut de recherche pour le développement et président de l’Association française pour l’étude du sol ; Richard Ramos, député (MoDem) du Loiret ; Marc-André Selosse, professeur au Muséum national d’histoire naturelle et à l’Institut universitaire de France.

Comment construire 35 logements en secteur agricole ?
Martine Bouchet
www.enbata.info/articles/comment-construire-35-logements-en-secteur-agricole

A Mouguerre, un imbroglio d’acteurs et de règlements d’urbanisme a abouti à autoriser la construction de logements sur des terrains agricoles. Un mécanisme pervers, à décrypter pour éviter qu’il ne se reproduise.

Difficile de savoir entre la Commune, la CAPB, l’Etat, les promoteurs, le propriétaire du foncier, qui a œuvré pour que l’opération soit réglementairement possible mais les faits sont là : le maire de Mouguerre a délivré en août 2024 un permis de construire à Alday et à Habitat Sud Atlantic pour un programme de 35 logements – dont la moitié en logement social – sur un hectare de parcelles classées « agricoles » dans le PLU[1], et donc inconstructibles. Cette situation vaut la peine d’être décortiquée pour qu’elle ne se reproduise pas à l’avenir sur d’autres communes du territoire car si le mécanisme est compris, il deviendra possible de l’empêcher. Que s’est-il donc passé ?

Des outils d’urbanisme échelonnés…

Mouguerre a engagé une révision de son PLU, révision qui aura duré plusieurs années pour finalement aboutir en 2023. Les plannings se sont donc chevauchés entre les différents règlements adoptés ou en cours de validation : PLU, PLH[2], SCoT[3], ZAN[4], loi SRU[5] et autres acronymes familiers pour ceux qui naviguent dans l’urbanisme (et repoussoirs ou source de complexité pour les autres). L’adoption successive – et non pas simultanée – de ces outils ouvre un champ de possibles pour contourner la philosophie globale de maîtrise de la consommation des espaces naturels et agricoles.

Le mal initial, c’est le retard considérable de la commune pour atteindre 25% de logements sociaux et se mettre ainsi en conformité avec la loi SRU. Rappelons que 70% de la population est éligible aux logements sociaux. Si on ne construit que 50% de social, il faut donc construire globalement beaucoup plus de logements que nécessaire pour atteindre les 25% du SRU. Le parc privé « libre » continue de prospérer à des prix souvent inadaptés sauf pour une clientèle très aisée.

…Et des votes non respectés

On a pu penser que le PLH voté en 2021 par la CAPB nous protégerait de la surproduction en fixant un nombre maximum de logements par commune. Mais il faut bien constater que ce n’est pas le cas. Dans le cas de Mouguerre, lors de la révision du PLU, l’État a regretté que la commune le dépasse et a imposé un phasage pour repousser à après 2026 la construction de trois des six nouveaux quartiers annoncés, afin de vérifier à cette échéance leur compatibilité avec le futur SCoT et avec le « droit à artificialiser » qui sera attribué à Mouguerre par l’application du ZAN. Mais quid alors de l’opération des 35 logements ?

Une manœuvre en deux temps

C’est là qu’intervient la première étape permettant de faire passer le permis sous les radars lors de la révision du PLU : il n’est tout simplement pas annoncé, mais surtout les parcelles qui le concernent passent de UD (constructibles) en agricoles. Elles n’attirent donc pas l’attention. Car si ces parcelles étaient restées constructibles, l’État aurait pu y mettre son veto, d’autant qu’il avait explicitement demandé à ce qu’il n’y ait aucune extension urbaine dans le secteur concerné par ce permis, car éloigné de toute centralité. Mais comment alors demander le permis de construire ?

« Il existe une procédure dite de ‘division parcellaire en vue de construire’
qui, déposée par le propriétaire du foncier avant l’adoption du PLU,
lui conserve son droit à construire pendant plusieurs années,
même en cas de modification du zonage du PLU. »

C’est là que les non-initiés découvrent qu’il existe une procédure dite de « division parcellaire en vue de construire » qui, déposée par le propriétaire du foncier avant l’adoption du PLU, lui conserve son droit à construire pendant plusieurs années, même en cas de modification du zonage du PLU. C’est la deuxième étape.

La légalité de cette procédure est contestable dans la mesure où les orientations du futur PLU sont déjà votées et que ses enjeux sont bafoués, en l’occurrence la protection des terres agricoles. Mais plusieurs mois plus tard, quand le permis de construire est déposé, il est juridiquement trop tard pour contester la division parcellaire car les délais sont dépassés. Le permis est donc juridiquement valable.

Dans les communes qui connaîtront des révisions de PLU, c’est-à-dire tout le Pays Basque dans un avenir très proche, il faudrait mettre en place une surveillance de ces divisions parcellaires : soit pour les contester, soit pour s’assurer que les maires ne les accordent pas, ce qu’ils ont le pouvoir de faire par l’intermédiaire de « sursis à statuer« .

Ce travail peut être citoyen, mais il devrait surtout être fait par les services de la CAPB. Tout l’enjeu pour la Collectivité est de se donner les moyens de faire respecter les votes et la vision politique d’un territoire qui s’engage réellement vers la maîtrise de son foncier et la protection des terres agricoles.

[1] PLU : Plan Local d’Urbanisme

[2] PLH : Programme Local de l’Habitat

[3] SCoT : Schéma de Cohérence Territoriale

[4] ZAN : Zéro Artificialisation Nette

[5] Loi SRU : loi Solidarité et Renouvellement Urbain. Elle impose aux communes de plus de 3 500 habitants un quota de 25 % de logements sociaux dans leur parc de résidences principales.



Aéronautique : faut-il arrêter de prendre l’avion ?
Pauline Gallard
www.sudouest.fr/economie/aeronautique/aeronautique-faut-il-arreter-de-prendre-l-avion-21722135.php

L’avion est un sujet clivant, au risque de se brûler les ailes. Pros et antis ne cessent de s’opposer des arguments qui peinent à trouver un écho raisonnable dans le débat public

Dans la mouvance suédoise du « flygskam », la honte de voler, qui a fait des petits principalement en Europe, les utilisateurs aériens ont fait part de leur inquiétude, réduisant leurs usages pour certains, quand d’autres se sont radicalisés en scandant : « Bali, c’est fini ! » Jean-Marc Jancovici s’impose en chef de file très médiatique de ces discours décroissants, et n’hésite pas à avoir recours aux formules chocs qui font mouche : pas plus de quatre vols dans une vie.

À rebours de nombreux discours qui condamnent l’avion dans un contexte d’urgence écologique, Damien Ernst, professeur d’électromécanique, défend l’innovation technologique pour concilier transition environnementale et aviation civile

Derrière ces discours se trouve la volonté de sensibiliser le grand public aux enjeux climatiques, en modifiant ses mobilités. Pas question pour autant de se restreindre et de rester chez soi, l’idée est de repenser le voyage. S’il préconise deux vols pour que les jeunes découvrent le monde, et encourage la démocratisation de déplacements exclusivement en train, c’est aussi en prévision, selon lui, de la fin de l’énergie fossile. « Une fois qu’il n’y aura plus de pétrole, il n’y aura pas de quoi assurer quatre vols dans une vie par terrien », expliquait-il ainsi sur les ondes de France Inter.

« Les carburants durables sont un leurre »

Pour certains, l’engagement est total, comme Charlène Fleury, coordinatrice du réseau Rester sur terre, qui milite pour la modération du trafic aérien. Selon elle, les carburants durables dans le secteur aéronautique sont un leurre, expliquant que les technologies sont bien matures, mais impossibles à mettre en place puisque les filières n’existent pas. Et si de telles solutions étaient mises en pratique, elles ne pourraient l’être que sur des vols courts, donc des trajets déjà réalisables en train.

Préconisant la modération du trafic aérien, elle s’appuie sur un rapport de l’Ademe (Agence de la transition écologique) publié en 2022, qui consiste à plafonner le trafic aérien dans les aéroports, taxer le kérosène, les voyageurs fréquents ou encore le billet. En Europe, la France a fait office de précurseur sur le sujet, en supprimant les vols de moins de deux heures. Rester sur terre espère des mobilisations fortes en ce sens à un niveau européen.

Si les échanges entre pro-technologie et militants pour le climat sont houleux, ont-ils un impact sur les citoyens ? En 2024, le secteur aéronautique connaîtra un record de sa fréquentation avec près de 5 milliards de passagers, selon les dernières estimations de l’Association du transport aérien international, dépassant le trafic atteint avant la crise du Covid de plus de 400 millions de passagers.

Energies fossiles : la baisse de la demande est-elle vraiment en vue ?
Perrine Mouterde
www.lemonde.fr/planete/article/2024/10/14/la-baisse-de-la-demande-en-energies-fossiles-est-elle-en-vue_6351364_3244.html

Alors que l’Agence internationale de l’énergie s’apprête à publier son rapport annuel, mercredi, les pays producteurs qualifient de « fantasme » ses prévisions qui annoncent une diminution de la consommation de charbon, de pétrole et de gaz d’ici à 2030.

« Nous sommes sur la bonne voie pour atteindre le pic de toutes les énergies fossiles avant 2030. » A l’automne 2023, l’Agence internationale de l’énergie (AIE) annonce que la consommation de charbon, de gaz et de pétrole pourrait cesser de croître dans les prochaines années, sans engagements supplémentaires des Etats en faveur du climat. Cette projection, inédite, figure dans le « World Energy Outlook » (WEO), le rapport annuel de l’organisation, considéré comme la bible du secteur de l’énergie.

« Il existe un tabou dans le secteur énergétique traditionnel qui interdit de suggérer que la demande pour les trois combustibles fossiles – pétrole, gaz et charbon – pourrait connaître un déclin permanent, explique Fatih Birol, le directeur exécutif de l’AIE. Mais, selon de nouvelles projections, cette ère de croissance apparemment incessante devrait prendre fin cette décennie. » Il signale, aussitôt, que la baisse anticipée reste largement en deçà des efforts nécessaires pour limiter le réchauffement sous 1,5 °C, objectif le plus ambitieux de l’accord de Paris.

Un an plus tard, alors que l’organisation s’apprête à publier l’édition 2024 du WEO mercredi 16 octobre, cette annonce continue de susciter le débat. Elle alimente notamment les critiques formulées par une partie du secteur depuis la publication par l’AIE, en 2021, de sa première feuille de route vers la neutralité carbone, un marqueur de sa volonté de prendre à bras-le-corps l’enjeu climatique et la nécessaire décarbonation du secteur.

« Analyse des tendances actuelles »

Fin septembre, l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) – pour laquelle Fatih Birol a travaillé plusieurs années – a répété que la sortie des énergies fossiles était un « fantasme ». Sans surprise, des dirigeants d’entreprises pétrogazières sont sur la même ligne. « Dans le monde réel, la transition actuelle est visiblement en train d’échouer », a déclaré en mars Amin Nasser, le PDG de Saudi Aramco, devant un parterre de représentants de l’industrie réunis au Texas (Etats-Unis). Le solaire et l’éolien ne fournissent encore qu’une fraction de l’énergie mondiale malgré des investissements considérables, a-t-il rappelé, et les besoins des pays du Sud vont fortement augmenter.

Aux Etats-Unis, premier producteur de pétrole et de gaz, des représentants républicains ont décrit l’AIE comme « la pom-pom girl de la transition ». Des experts tel que Robert McNally, qui a conseillé des élus républicains, considèrent que l’organisation « induit le monde en erreur en lui faisant croire » que la demande de pétrole et de gaz atteindra bientôt un pic, et dénoncent « la distorsion et la politisation de prévisions autrefois respectées ».

L’AIE, qui dépend de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), conteste ces accusations et répète fonder ses analyses sur des chiffres et des données. « L’AIE n’a pas de boule de cristal et ne prédit pas le futur, mais elle analyse les tendances actuelles pour dire ce qui devrait survenir, précise Ines Bouacida, chercheuse climat et énergie à l’Institut du développement durable et des relations internationales. Elle a longtemps été très conservatrice dans ses estimations. »

« Développement du solaire en Chine »

Sur le fond, le déclin prochain du charbon semble faire largement consensus. Un premier pic avait été annoncé en 2014, avant que la consommation mondiale ne reparte à la hausse. Si elle atteint toujours des niveaux records en 2024, des signaux encourageants sont observés en Chine, premier consommateur de ce combustible fossile. Au premier semestre par exemple, le rythme d’approbation de nouveaux projets de centrales a fortement ralenti. « Les nouvelles capacités ne sont tout simplement plus justifiées économiquement par rapport aux nouvelles capacités renouvelables », explique Maria Pastukhova, spécialiste de la transition énergique pour le cercle de réflexion E3G.

« Le développement du solaire en Chine, qui va manger une bonne part de la demande de charbon, est peut-être la seule bonne nouvelle globale majeure côté climat », estime aussi Matthieu Auzanneau, directeur du laboratoire d’idées The Shift Project. Pour ce spécialiste du pétrole, quand l’AIE annonce un pic de la demande de fossiles, elle parle en réalité d’un pic du charbon. « Sur le gaz et le pétrole, il n’y a qu’un pic cosmétique, on est plutôt sur un plateau indéfini, explique-t-il.

Il y a une forte dose de storytelling dans l’annonce de l’AIE qui est problématique : elle donne l’illusion que la tendance au déclin du gaz et du pétrole est enclenchée, alors que pour l’instant elle est essentiellement virtuelle. » Le scénario qui s’appuie sur les politiques actuelles prévoit, en effet, une globale stagnation des demandes de pétrole et de gaz jusqu’en 2050.

La question d’un pic gazier est controversée

Alors que les projections de l’AIE et de l’OPEP concernant l’avenir de l’or noir ont, par le passé, souvent été alignées, elles diffèrent désormais fortement, comme le confirment leurs derniers rapports. L’AIE observe que la demande continue de ralentir et anticipe un excédent « stupéfiant » de production à la fin de la décennie, alors que les pays producteurs voient la demande mondiale croître de 17 % d’ici à 2050.

De nombreux autres scénarios, dont ceux de compagnies pétrolières, estiment toutefois qu’un pic est en vue. Pour BP par exemple, les trajectoires actuelles conduisent à un déclin de la demande mondiale avant 2030, puis à une baisse liée à l’essor des voitures électriques. « L’utilisation accrue de véhicules électriques en Chine a réduit pour la première fois la croissance de la demande de pétrole dans le pays », pointe aussi Sven Teske, chercheur à l’Institute for Sustainable Futures à Sydney, en Australie.

Vendredi 11 octobre, le PDG du groupe français TotalEnergies, Patrick Pouyanné, a lui estimé dans un entretien aux Echos que le pic pétrolier arriverait « sans doute quelque part entre 2030 et 2040 ». Il estime en revanche que le gaz sera, au côté de l’électricité décarbonée, « au cœur du système énergétique de demain ».

La question d’un pic gazier est sans doute la plus controversée. Selon l’AIE, la demande mondiale devrait atteindre de nouveaux sommets historiques en 2024 et 2025. « Contrairement au charbon et au pétrole, qui atteignent un pic dans la plupart des scénarios examinés, la demande de gaz naturel augmente dans environ la moitié d’entre eux. L’avenir de la demande mondiale de gaz naturel est très incertain », écrit l’institut de recherche Resources for the Future dans son Global Energy Outlook 2024.

Tournant majeur

Le « début de la fin » des combustibles fossiles est-il donc réellement en vue ? Parmi les tendances de fond qui soutiennent cette projection figure le développement des énergies renouvelables, encore plus rapide qu’anticipé. Entre 2024 et 2030, le monde devrait ainsi déployer 5 500 gigawatts de nouvelles capacités, soit près de trois fois plus qu’entre 2017 et 2023. La transformation économique de la Chine devrait également jouer un rôle central. « Il ne s’agit pas seulement du rythme stupéfiant auquel le pays installe des renouvelables, mais aussi du fait que l’économie a atteint un certain stade de maturité, note Maria Pastukhova. Elle ne connaîtra plus une croissance similaire à celle qu’elle a connue au cours des deux dernières décennies. »

En parallèle, la demande dans les principaux pays industrialisés a d’ores et déjà commencé à décliner. Dans les économies de l’OCDE, celle de charbon diminue depuis 1990 et celle de pétrole a culminé en 2007. La consommation de gaz naturel de l’Union européenne a aussi baissé ces dernières années. Une tendance qui pourrait contrebalancer l’augmentation attendue dans les pays émergents et en développement.

« En dehors de l’Europe, le sujet est la hausse très forte de la demande d’électricité et d’énergie, met en garde Marc-Antoine Eyl-Mazzega, directeur du centre énergie et climat de l’Institut français des relations internationales. En Inde, 900 millions de personnes sont en train de sortir de l’extrême pauvreté. » D’autres obstacles considérables pourraient entraver la transition : l’adaptation des réseaux, le développement des capacités de stockage, la hausse nécessaire des investissements…

Si le pic anticipé par l’AIE se confirme, la part des fossiles dans l’approvisionnement énergétique mondial passera d’environ 80 % à 73 % d’ici à 2030 et les émissions de CO2 liées à l’énergie culmineront d’ici à 2025. Un tournant à la fois majeur, après des décennies de hausse, et pourtant encore largement insuffisant : pour espérer respecter l’accord de Paris sur le climat, les émissions doivent diminuer d’environ 25 % d’ici à la fin de la décennie.



Desazkundeari buruzko jardunaldiak antolatu dituzte Iruñean urriaren 21etik 24ra
ARGIA
www.argia.eus/albistea/desazkundeari-buruzko-jardunaldiak-antolatu-dituzte-irunean-urriaren-21etik-24ra

Nafarroako Energia Eraldatzen poligono berriztagarri handien aurkako koordinadorak trantsizio energetikoa birpentsatzeko hirugarren jardunaldien deialdia da. Topaketa horietan, energiaren arazoa eta gizarte egituraren desazkundearen beharrari buruz hausnartuko dute.

Erregai fosilak ordezkatzeko premia larria dago jardunaldien antolatzaileen esanetan, baina energia berriztagarrien ezarpena motelegi doa, eta gainera, ingurumen eta gizarte inpaktu handiak eragiten ditu. Oraingo ordezkatze moldeak gabezia nabarmenak ditu, eta zalantzan jartzen dute beronen eraginkortasuna.

Diotenez, beharrezkoa da gizartearen energia kontsumoa eta materialen murrizketa martxan jartzea. Jardunaldietan kontsumo hauek murrizteko dauden “benetako aukerez” jardungo dute, eta horretarako ezar daitezkeen estrategiez ere bai. Beraz, desazkundearen teoriak egungo sistema ekonomikoa hobetzeko eskaintzen dituen aukerak aztertuko dituzte.

Jardunaldietan lau hitzaldi, tailer bat eta erakusketa bat ikusteko aukera izanen da. Urriaren 21etik 24ra bitartean egingo dira Iruñeko Kondestable-n (Alde Zaharrea, kale Nagusia 2) eta Plazara! (Kale Nagusia 31) aretoetan. Hemen egitarau zehatza:

Urriak 21, astelehena, 18:00etan Kondestablen:: Zer jango dugu gaur? Elikadura arazo gisa, eta elikadura etorkizun desiragarri baterako gako gisa. Hizlaria: Ivanka Puigdueta, Valentziako Univesitat Politeknikoko Nekazaritzako Elikagaien Zientzietan doktorea. Ondoren, Klima-aldaketa kontsumoaren ondorio gisa. Hizlaria: Julen Rekondo. Ingurumen dibulgatzailea eta Ingurumeneko Espainiako Sari Nazionala.

Urriak 22, asteartea, 18:00etatik aurrera, Kondestablen. Liburu aurkezpena: Decrecimiento: del qué al cómo. Propuestas para el Estado español. Egilea: Luis González Reyes. Zientzia Kimikoetan doktorea eta, besteak beste, Ekologistak Martxan taldeko kidea da. Ondoren, Desazkunderako proposamentak premiazko baikortasun batetik. Hizlaria: June San Millán García, zuzenbidean lizentziaduna eta REAS Nafarroako langilea.

Urriak 24, osteguna, 18:00etatik aurrera Plazara!-n Nafarroan dauden Desazkunderako aukerak aztertzeko tailerra, Sustrai Erakuntza fundazioko kideen eskutik. “Zer egin Desazkundearen aurrean? Datozen hamarkadetako Nafarroako gizartearentzako proposamen koadernoa” eztabaida-dokumentuan egindako proposamenetan sakonduko dute.

Halaber, Hamaika erakusketa urriaren 21etik 31ra izango da ikusgai, Plazara!-ko sarreran. Azaldu dutenez, “lur honetan bizi den edertasun infinituaren inbentarioa da eta diziplina anitzeko proiektu artistikoa”.

Sustrai Erakuntzaren webgunean ikus daiteke jardunaldiei buruzko informazio gehiago.