Articles du Vendredi : Sélection du 15 septembre 2023

Climat : un week-end de mobilisations pour sortir de l’ère des énergies fossiles
Coralie Schaub
www.liberation.fr/environnement/climat/climat-un-week-end-de-mobilisations-pour-sortir-de-lere-des-energies-fossiles-20230915_ELKXLYAW4FGIFFMGJIMZ2FLUBY/

Des «millions» de manifestants sont attendus samedi et dimanche à travers le monde pour demander la fin des énergies fossiles. Point d’orgue : la grande marche prévue à New York, à quatre jours d’un Sommet sur l’ambition climatique à l’ONU.

Sortir enfin de notre addiction suicidaire aux énergies fossiles, de cette folie collective qui nous fait consommer toujours plus de pétrole, de gaz et de charbon, alors même que nous savons qu’ils sont de loin les premiers responsables du dérèglement climatique et menacent à court terme les conditions de vie sur la planète. Eliminer enfin ces combustibles de façon «rapide, juste et équitable». Voici ce que vont exiger les «millions» de manifestants attendus dans les rues du monde entier à partir de ce vendredi et jusqu’à dimanche par les organisateurs de «plus de 650 actions prévues dans 60 pays». A l’origine de ces marches, ce sont souvent des ONG de défense de l’environnement mais aussi, parfois, des associations de professionnels de la santé préoccupés par le changement climatique.

De Mumbai (Inde) à Manille (Philippines), de Londres (Royaume-Uni) à Nairobi (Kenya) en passant par Paris et plusieurs autres villes françaises et jusqu’aux nations du Pacifique, très touchées par l’élévation du niveau de la mer et les tempêtes, les participants appuieront les revendications du mouvement de lutte mondiale pour l’élimination des combustibles fossiles. Le point d’orgue de ce long week-end de rassemblements et de «grève des jeunes pour le climat» sera une «énorme» marche, prévue dimanche à New York, aux Etats-Unis. L’idée est notamment de soutenir l’appel du secrétaire général des Nations unies, António Guterres, pour que les nations prennent des engagements ambitieux en vue d’éliminer progressivement les combustibles fossiles lors du Sommet sur l’ambition climatique qui se tiendra au siège de l’ONU mercredi.

«Profits obscènes»

Ce qui est loin d’être gagné : le week-end dernier, les dirigeants du G20, responsables de 80 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre, ont échoué à s’entendre sur un appel commun à sortir des énergies fossiles. L’objectif est pourtant jugé «indispensable» par le premier bilan de l’accord de Paris, publié le 8 septembre par l’ONU Climat. S’opposant à une industrie des combustibles fossiles «qui a réalisé des profits obscènes au détriment des populations, de la biodiversité et d’un climat sûr et vivable», la campagne mondiale pour l’élimination de ces énergies «appelle les gouvernements et les entreprises à mettre immédiatement un terme à l’expansion des combustibles fossiles et aux subventions qui leur sont accordées».

Des subventions qui refusent de baisser. Au contraire : elles flambent pour atteindre des niveaux stratosphériques, dépassant l’entendement. Fin août, le Fonds monétaire international (FMI) annonçait que pour la totalité des 170 pays recensés, les subventions au pétrole, au charbon et au gaz ont atteint en 2022 l’incroyable record de 7 000 milliards de dollars, dont 1 300 milliards d’aides directes (le reste étant des coûts indirects liés à la pollution ou aux accidents de la route). En cause, les «aides aux consommateurs et aux entreprises pour leur permettre de faire face à la flambée mondiale des prix de l’énergie qu’a entraînée l’invasion de l’Ukraine par la Russie et pour favoriser le redressement de l’activité économique au lendemain de la pandémie», note le FMI.

Prévenir les décès prématurés et augmenter les recettes publiques

L’institution, qui n’est pas réputée pour être un repaire de décroissants hirsutes, ne mâche pas ses mots. «Alors que le monde s’emploie difficilement à limiter le réchauffement climatique à 1,5 °C et que des régions entières d’Asie, d’Europe et des Etats-Unis sont en proie à des épisodes d’extrême chaleur, les subventions au pétrole, au charbon et au gaz naturel coûtent l’équivalent de 7,1 % du PIB mondial. C’est davantage que les dépenses publiques annuelles d’éducation (4,3 % du revenu mondial) et environ deux tiers des dépenses publiques annuelles de santé (10,9 %).»

Et le FMI de proposer une feuille de route concrète aux dirigeants mondiaux : «Si les pouvoirs publics éliminaient les subventions explicites et mettaient en place une fiscalité corrective, les prix des combustibles augmenteraient. Ce renchérissement inciterait les entreprises et les ménages à prendre en compte les coûts environnementaux de leurs choix en matière d’investissement et de consommation.

Il en résulterait une baisse notable des émissions de dioxyde de carbone, une amélioration de la qualité de l’air, une diminution des cas de maladie cardiopulmonaire, et un surcroît d’espace budgétaire pour les pouvoirs publics.»

D’après les estimations du fonds, l’élimination des subventions aux fossiles préviendrait 1,6 million de décès prématurés chaque année, augmenterait les recettes publiques de 4 400 milliards de dollars et permettrait de faire baisser les émissions de façon à atteindre les objectifs de limitation du réchauffement mondial. Elle contribuerait aussi à «une redistribution des revenus, dans la mesure où ces subventions profitent davantage aux ménages aisés qu’aux ménages pauvres».

«Aider les ménages vulnérables»

Reste à éviter l’opposition «fin du monde versus fin du mois», à réconcilier les deux et éviter des grognes type «gilets jaunes». Là aussi, le FMI assure que la solution existe : «Une part du surcroît de recettes engendré par ces réformes doit servir à aider les ménages vulnérables à faire face à la hausse des prix de l’énergie. Le restant pourrait financer une baisse de la fiscalité du travail et de l’investissement et être consacré à des biens publics comme l’éducation, la santé et l’énergie propre.» La mobilisation mondiale pour la fin de l’ère des fossiles souligne aussi la nécessité d’une justice climatique «Nord-Sud» : «Les nations ayant un héritage historique de pollution doivent mener la mise en œuvre d’une élimination rapide et équitable des combustibles fossiles et la financer à l’échelle mondiale.»

Ne manque qu’une réelle volonté politique. Plus de 80 pays, dont la France – qui pourtant continue elle aussi à subventionner les fossiles –, entendent obtenir un accord sur une sortie progressive de ces énergies lors de la COP28, la prochaine conférence sur le climat de l’ONU, prévue à Dubaï à la fin de l’année. Si jamais, ô miracle, un tel accord était trouvé, resterait à bien peser chaque mot employé. Les détails sont réputés pour cacher le diable.

Exemple avec le «Pacte de Glasgow», adopté en 2021 à l’issue de la COP26 : le texte, qui a été progressivement affaibli durant cette COP, se contentait finalement d’appeler les pays à «accélérer les efforts vers la réduction de l’énergie au charbon sans système de capture (de CO2) et des subventions inefficaces aux énergies fossiles». La mention des systèmes de capture de CO2, technologie très coûteuse et encore peu rodée, «peut laisser la porte ouverte à maintenir, voire à développer des centrales associées à des promesses de capture ou compensation carbone, surtout quand cet adjectif n’est pas défini et laissé à l’interprétation des Etats», pointait alors Lorette Philippot, des Amis de la Terre. Sur les subventions aux énergies fossiles, même logique : selon elle, le terme «inefficaces permet de continuer à accorder des financements publics à des projets jugés efficaces par les Etats, sans définition, alors que l’urgence impose une fin stricte de ces nouveaux investissements dans le charbon, le pétrole et le gaz».

Avant la COP28, l’ONU pointe le mauvais bilan de l’accord de Paris
Manuel Magrez
www.mediapart.fr/journal/ecologie/090923/avant-la-cop28-l-onu-pointe-le-mauvais-bilan-de-l-accord-de-paris

 

Dans un rapport du secrétariat de la convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques, l’ONU revient sur l’accord signé en 2015, et juge que les émissions mondiales de CO2 ne sont « pas compatibles avec les objectifs ». À l’approche de la COP28 de Dubaï, les Nations unies exhortent les États à prendre des mesures strictes.

Pour ne pas dépasser le réchauffement à + 1,5 °C par rapport à l’ère préindustrielle, « la fenêtre se resserre rapidement », avertit à de nombreuses reprises l’ONU dans un rapport publié vendredi 8 septembre par le secrétariat de la convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC).

Ce document d’une quarantaine de pages dresse le bilan de l’accord de Paris, signé en 2015. Un traité qui avait pour objectif de maintenir le réchauffement climatique à + 2 °C par rapport à l’ère préindustrielle, voire à + 1,5 °C, si possible. Le premier « bilan mondial », de son nom anglais « Global Stocktake », n’est guère positif. Les experts onusiens estiment ainsi, à l’issue d’une présentation par les États signataires des actions menées, que « les émissions mondiales de CO2 ne sont pas compatibles avec les objectifs » posés par l’accord de Paris. Le langage technique et feutré de ce premier bilan mondial ne cache pas l’inquiétude de ses auteurs et de la communauté internationale. « L’effondrement climatique a commencé.

Notre climat implose plus vite que nous ne pouvons y faire face, avec des phénomènes météorologiques extrêmes qui frappent tous les coins de la planète », a déclaré António Guterres, le secrétaire général des Nations unies, dans un communiqué publié le 6 septembre.

Avec cette phrase sans détour, le secrétaire général de l’ONU réagissait à l’annonce fracassante de l’institut européen Copernicus. Celui-ci a observé en 2023 la période de juin à août la plus chaude jamais enregistrée, avec une température moyenne planétaire de 16,77 °C, soit 0,66 °C au-dessus de celle établie pour la période 1991-2020.

En juillet, le même António Guterres disait l’ère du réchauffement climatique « terminée », tout en annonçant l’arrivée de « l’ère de l’ébullition mondiale » – déclaration immédiatement taxée d’alarmisme démesuré.

Sortie des énergies fossiles, stop à la déforestation

Concrètement, dans les projections du « bilan mondial » de l’accord de Paris, le maintien à + 1,5 °C apparaît, sans surprise, quasi impossible. Et pour cause : pour respecter cette limite, il faudrait baisser de 43 % les émissions de gaz à effet de serre dès 2030, et de 48 % les émissions de CO2 à la même échéance.

Pour l’objectif plus réaliste du maintien à + 2 °C, rien n’est pourtant gagné. Même si l’ONU admet dans son rapport une « augmentation de l’ambition », dans les mesures qui lui sont présentées par les gouvernements, et salue la révision à la hausse du plan d’action pour 74 % des parties prenantes, cela ne suffira pas.

Pour les experts onusiens, « cette augmentation [de l’ambition] ne compense que partiellement la croissance des émissions », et ne permettrait même pas de se hisser à la hauteur des modèles nécessaires au maintien à + 1,5 °C ou + 2 °C. Pour tenter malgré tout de parvenir à respecter les engagements pris en 2015 à Paris, les Nations unies dressent une liste des politiques prioritaires à mener. En pointe dans ce combat : « la montée en puissance des énergies renouvelables », « l’élimination progressive de tous les combustibles fossiles » et « la lutte contre la déforestation ».

Sur ce dernier point, les experts onusiens exhortent, au-delà de « freiner la déforestation », à « protéger les puits océaniques naturels », abritant parfois des métaux rares suscitant les convoitises.

La COP28, « un moment de vérité crucial »

Pour le bureau onusien chargé des questions du climat, la publication de ce rapport marque « un moment significatif », mais bien loin de la fin du travail. « Il est clair que la prochaine vague [de mesures] devra être différente », nuance Laurence Tubiana, dirigeante de l’European Climate Foundation, et qui avait mené pour le compte du gouvernement français les négociations lors de la COP21.

La haute fonctionnaire française, qui estime que les mesures prises dans le monde sont « loin d’être suffisantes », voit au-delà de ce rapport. Après ce premier passage sur le gril, les États signataires de l’accord de Paris devront présenter de nouvelles projections et mesures courant 2024-2025. Mais avant cela, dès décembre 2023, Dubaï accueillera la COP28. « Un moment de vérité crucial », estime Laurence Tubiana, qui presse les États y participant à « être sérieux » pour « faire quelque chose ».

D’autres observateurs croient davantage en des leviers différents. Tom Taylor, chargé des questions climatiques pour l’assureur britannique Aviva, a demandé aux gouvernements, au cours d’une conférence de presse, d’envoyer des « signaux stricts » et « à long terme » aux entreprises.

« Au G7 par exemple, le monde économique n’a pas pris en compte le signal », reprend-il, dénonçant de fait l’indécision des pays membres qui s’étaient réunis courant avril et avaient simplement conclu qu’il fallait « accélérer » la sortie des énergies fossiles, sans date ni méthode précise.

Le sommet du G20, qui se tient les 9 et 10 septembre à New Delhi, ne laisse pas apparaître plus d’avancées. Mais le « bilan onusien » pourrait bien nourrir les discussions, puisqu’il recommande de développer « le transfert de nouvelles technologies, afin de répondre aux besoins des pays en développement ». Idée dont s’est fait l’écho le premier ministre indien Narendra Modi, dans une tribune publiée dans le Times.

Son titre, « Ne nous faites pas la leçon sur le changement climatique », visant directement les pays de l’hémisphère nord, dévoile le cœur du sujet de ce G20 : les tensions entre les pays pauvres et les plus développés autour du climat. Les premiers attendent toujours l’aide financière promise par les seconds pour mener à bien la transition écologique.

Euskal Herria Burujabe, un nouvel élan !
Elise Dilet
www.enbata.info/articles/euskal-herria-burujabe-un-nouvel-elan

Au-delà de la conscientisation et de la mobilisation autour d’une nécessaire métamorphose écologique et sociale, Bizi! propose les 7 et 8 octobre prochains deux journées d’information et de rencontres, sérieuses tout autant que joyeuses. Invitation est lancée à toutes celles et ceux qui se posent la question d’avancer vers un Pays Basque maître de son destin écologique, énergétique, habitable : Euskal Herria burujabe !

Espoir et détermination

Lorsque l’on interroge les militant·es sur les raisons de leur engagement au sein de Bizi!, beaucoup évoquent le fait que cela les aide à combattre leur éco-anxiété. Elles·ils se sentent utiles, ont l’impression de contribuer à gagner des victoires contre le changement climatique et le capitalisme destructeur. Les forces en face sont immenses, les victoires sont petites, mais elles permettent d’alimenter l’espoir et de ne pas se laisser envahir par le sentiment d’impuissance. Nous avons tous besoin de rêver que l’avenir nous réserve de belles surprises, à nous et à nos enfants, ainsi que la possibilité de vivre heureux et dans de bonnes conditions. Nous avons tous besoin de voir que l’humain peut mettre sa créativité au service du respect de l’autre, de la vie, de la planète, au service de l’intelligence, du beau et du joyeux. Malheureusement, ce n‘est pas vraiment le message qui nous est renvoyé au quotidien… C’est pourquoi des rendez-vous comme l’événement ‘Euskal Herria Burujabe’, fête populaire et militante dans la droite ligne des villages Alternatiba, sont si importants. Organisé les 7 et 8 octobre prochains à Bayonne, il a pour objectif de proposer un horizon à la fois désirable et atteignable, qui donne de l’espoir et de la détermination. L’enjeu est d’engager l’ensemble de la société dans un nouvel élan de mobilisation, de montrer qu’il existe des moyens d’agir à notre portée.

Un projet de territoire soutenable, souverain et solidaire

L’événement d’octobre sera une illustration pratique du projet de territoire élaboré par Bizi!en 2018 et réactualisé. Les différentes crises que nous avons connues depuis (sanitaire,énergétique…) et l’accentuation des conséquences visibles du bouleversement climatique ont montré toute la pertinence de ce projet mais demandent à être intégrées dans la réflexion. La nouvelle version sera articulée en sept chapitres : politiques territoriales ; agriculture,alimentation, eaux et forêts ; habitat ; mobilités soutenables ; énergies ; communs, inclusivité et entraide ; économie relocalisée. Ce document sera disponible à l’automne mais pour les impatient·es, chaque chapitre est entrain d’être décliné sous forme de sketchnote, une technique de synthèse graphique (les premiers sont disponibles sur le site de Bizi!). Pour permettre au plus grand nombre de se l’approprier, une autre déclinaison du projet se prépare : un petit roman illustré par plusieurs artistes, accessible aux jeunes et aux adultes,mettant en scène un Pays Basque qui, en2050, aurait opéré sa métamorphose écologique et sociale.

7 et 8 octobre à Bayonne,le rendez-vous à ne pas manquer !

Retour en 2023 : le samedi 7 octobre, à partir de 14h, les rues de Bayonne vont s’animer d’une diversité d’ateliers de sensibilisation,de formations, de spectacles de rue… À 17h, meeting d’ouverture avant la soirée festive avec bar, talos et plusieurs concerts, notamment Zea Mays et Zoufris Maracas !Le dimanche 8, dès 9h du matin, petits et grands pourront déambuler parmi les sept quartiers thématiques correspondant aux chapitres du projet de territoire. Une centaine d’acteurs et de structures seront présents. Ils proposeront des ateliers participatifs, des expositions, des stands, des mini-conférences permettant de découvrir des moyens concrets existants ou à mettre en place ici pour répondre collectivement au défi climatique et construire un territoire plus juste et solidaire. Au fil des rues, de l’esplanade Roland Barthes à la place Patxa, l’on pourra faire un quizz sous un dôme  géodésique dans l’espace habitat, s’initier aux mutxiko, recevoir des conseils énergétiques personnalisés, tester différents modes de transports doux, préparer une soupe zéro déchet…Le tout dans une ambiance festive. Un espace sera spécialement dédié aux enfants. Réparties entre le samedi et le dimanche, une quarantaine de conférences en français et en euskara offriront au public des pistes d’analyse et des expériences menées dans d’autres territoires, qui permettront d’imaginer de nouvelles solutions pour mener à bien la métamorphose en Pays Basque.

La dynamique Burujabe

10 000 personnes sont attendues au cours de ces deux journées et 500 bénévoles en assureront le bon déroulement. Depuis des mois, des équipes se forment et phosphorent pour préparer l’événement. Motivées par le projet,de nombreuses bénévoles rejoignent les membres de Bizi! dans les différentes commissions. Des synergies se créent entre les acteurs du territoire. Cette dynamique de centaines de personnes réfléchissant et bataillant ensemble, chacune membre de ses propres réseaux, c’est cela aussi le terreau sur lequel germent les initiatives qui dessinent la métamorphose du territoire !

Propriété collective des terres : « Des espaces de résistance face à l’agriculture industrielle et capitaliste »

Sophie Chapelle
https://basta.media/Propriete-collective-des-terres-des-espaces-de-resistance-face-a-l-agriculture-industrielle-et-capitaliste-tanguy-martin

Peut-on sortir l’agriculture du capitalisme ? Pour Tanguy Martin, auteur de Cultiver les communs, il faut combiner les expérimentations de propriété collective tout en s’attachant à la régulation foncière.

basta!  : Dans le secteur agricole, on compte seulement une installation pour deux à trois cessations d’activité, alors qu’un agriculteur sur quatre doit partir à la retraite d’ici 2030. L’accès à la terre est-il le frein principal à l’activité agricole en France ?


Tanguy Martin
: L’accès à la terre est clairement un frein, économique d’abord. La terre, selon les régions, peut coûter assez cher. S’y ajoutent les coûts des bâtiments, du cheptel, des machines, dans un contexte où les fermes n’ont cessé de grandir en taille depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale.

Il y a aussi un principe de défiance : c’est plus facile de vendre ses terres, ou de les louer à son voisin qu’on connaît depuis très longtemps, qu’à quelqu’un qu’on ne connaît pas, qui peut vouloir faire différemment, non issu du territoire… Or, 60 % des gens qui veulent s’installer aujourd’hui ne sont pas issus du milieu agricole. Les freins administratifs se combinent à ce parcours du combattant.

Aujourd’hui l’accès à la terre se fait par le marché : les terres sont allouées aux gens capables de rentabiliser une ressource, et pas forcément aux gens capables de nourrir un territoire ou de préserver un environnement.

À partir de quel moment la terre agricole est-elle devenue une marchandise ?

Jusqu’à la fin de la Seconde Guerre mondiale, la terre est restée un bien de prestige et de pouvoir à travers lequel on maîtrise la subsistance de la population.

Mais après 1945, l’agriculture est entrée dans le capitalisme : on commence à faire plus de profit avec la terre et la production de nourriture, voire à spéculer sur le prix de la terre.

La terre est même depuis devenue un actif financier. Aujourd’hui, les sociétés dites à capitaux ouverts (financiarisées), dont le contrôle peut être pris par des non-agriculteurs, ont fait main basse sur 14 % de la surface agricole utile française. C’est plus d’une ferme sur dix en France [1]. Le phénomène a doublé en 20 ans !

Peut-on vraiment parler de spéculation sur les terres en France alors même que le prix stagne en moyenne à 6000 euros par hectare depuis plusieurs années ? Il est quand même de 90 000 euros par hectare aux Pays-Bas !

Depuis quelques années, le prix de la terre stagne et on pourrait en conclure qu’il n’y a pas de spéculation. En réalité, le prix de la terre a globalement augmenté en France sur les 20 dernières années.

Actuellement, ce prix augmente dans certaines régions et baisse dans d’autres. Les endroits où l’on peut spéculer sur la terre sont globalement ceux où l’agriculture s’est industrialisée : les zones céréalières dans le centre de la France, de betteraves en Picardie, de maïs dans le Sud-Ouest… Là, le prix de la terre continue à augmenter.

En revanche, il y a des endroits en déprise, notamment les zones d’élevage comme le Limousin, où le prix de la terre peut baisser. Les prix augmentent aussi à proximité des villes et des zones touristiques, où la terre risque de devenir constructible.

En France, ce sont les Sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural (Safer) qui sont en charge de réguler le marché des ventes des terres agricoles. Elles sont très critiquées. Que faut-il faire de ces organisations ?

Les Safer ont participé à limiter les inégalités d’accès à la terre et un prix de la terre relativement bas en France. C’est vrai, même s’il y a d’autres explications aussi, comme la plus faible valeur ajoutée produite par hectare en France.

Pour autant, les Safer doivent encore évoluer pour pouvoir répondre aux enjeux alimentaires et agricoles du 21e siècle, il faut arriver à démocratiser leur gouvernance. Celles-ci restent aujourd’hui très liées aux décisions du syndicalisme majoritaire (de la FNSEA, ndlr). Les Safer doivent aussi devenir plus transparentes. Actuellement, les réunions de décision se tiennent à huis clos : c’est censé protéger les gens qui prennent les décisions pour qu’ils soient éloignés de certaines pressions, mais cela crée une opacité très délétère pour l’institution.

Un autre élément à revoir, c’est la façon dont on fixe les objectifs politiques des Safer. Ces dernières, quand elles achètent une terre, doivent la revendre à la personne qui répond aux objectifs politiques qui sont notamment fixés dans des documents nommés « schémas directeurs régionaux des exploitations agricoles ».

Ces documents, écrits par l’État et validés par arrêté préfectoral, décrivent quel type d’agriculture vont viser les Safer et d’autres instances de régulation foncière. Or, ces documents, du fait que le syndicat majoritaire est largement consulté, défendent plutôt la prolongation de l’agriculture vers son industrialisation. Il y a donc un enjeu à ce que ces documents soient écrits pour défendre une agriculture du 21e siècle qui défend l’agroécologie, et des paysannes et paysans nombreux sur les territoires. À ces conditions-là, il n’y a pas de raison de vouloir se passer des Safer.

Le fait que nous ayons un système qui alloue la terre, non pas en fonction de l’offre et de la demande, mais en vertu d’un projet politique censé répondre à l’intérêt général, est un trésor inestimable en France qu’il faut absolument garder.

En creux de votre ouvrage se pose la question du rapport à la propriété. Est-il possible de dépasser le modèle du paysan propriétaire ?

Sur le principe, rien ne justifie le fait qu’à un moment, une personne ait pu dire « cette terre m’appartient ». La terre étant à la fois un lieu d’accueil du vivant et le lieu où l’on produit la nourriture, on peut estimer que la propriété de la terre doit être abolie. Sauf que, dans une société très attachée à la propriété privée, cela paraît utopique.

Prenons donc le problème d’une autre façon, et voyons ce qu’on peut déjà faire à court terme.
Il faut avoir en tête que les agriculteurs ne sont pas majoritairement propriétaires des terres qu’ils travaillent : 60 % de cette surface est louée dans le cadre du fermage. Il y a même des paysannes qui décident parfois de ne pas acheter la terre et préfèrent la louer pour éviter de s’endetter.

D’autre part, on dispose d’une régulation foncière selon laquelle la terre n’est pas une marchandise comme les autres et ne doit pas être uniquement dirigée par le marché. Ces mécanismes juridiques permettent à l’État, aux collectivités locales et aux syndicats agricoles, de définir ensemble qui va accéder à la terre indépendamment du fait que ces personnes soient riches ou pas.

On a là un embryon qui pourrait faire imaginer un droit de l’accès à la terre en France institué en commun. Il faut renforcer et orienter ces mécanismes – qui ont plein d’écueils ! – vers des enjeux d’alimentation, d’emploi, d’environnement… Chercher à démocratiser la question de l’accès à la terre et « le gouvernement des terres », c’est à la fois une capacité à se prémunir des effets mortifères du capitalisme, et cela permet de penser comment on pourrait gérer les terres autrement.

Le capitalisme n’est pas une fatalité : il y a d’autres manières d’être au monde, de produire de l’alimentation, de vivre, de sortir d’un monde où le but n’est que la recherche du profit. C’est comme quand on milite pour la sécurité sociale de l’alimentation : la Sécurité sociale en 1946 n’a pas renversé le capitalisme, mais elle a créé des espaces de répits face au capitalisme, extrêmement importants pour que les gens vivent bien et envisagent de transformer la société.

Le livre dresse un panorama des organisations qui travaillent au rachat des terres pour les mettre à disposition de paysannes répondant à des critères socio-environnementaux, avec des règles transparentes d’attribution de l’accès au foncier. Les surfaces acquises restent toutefois modestes. Peut-on uniquement compter sur ce type d’initiatives ?

Les gens qui s’intéressent à la terre aujourd’hui ont bien compris qu’on n’allait pas abolir la propriété privée demain. Ils ont aussi compris que s’ils voulaient expérimenter d’autres manières de faire de l’agriculture et de l’alimentation, il fallait accéder à la propriété des terres.

« Avec de moins en moins d’agriculteurs dans la société, les enjeux agricoles ne peuvent être uniquement du ressort des luttes paysannes »

L’idée de la propriété collective, ce n’est pas l’abolition de la propriété privée, mais que des gens se mettent ensemble pour acheter de la terre. C’est ce que fait Terre de Liens en louant ensuite la terre à des paysannes qui mettent en œuvre des projets répondant aux enjeux de société, d’emploi, d’environnement, d’entretien du territoire… Mais c’est aussi ce que font d’autres structures de propriété foncière – la Société civile des terres du Larzac, la Terre en commun sur la Zad de Notre-Dame des Landes, Lurzaindia dans le Pays basque, la foncière Antidote, et bien d’autres.

Tout un tas de gens essaient d’acheter des terres pour en faire des espaces de résistance face à l’agriculture industrielle et capitaliste. Cela permet d’imaginer d’autres rapports à la propriété. Ce sont des lieux d’expérimentation très importants pour susciter de nouveaux imaginaires, apprendre à faire autrement, créer de nouvelles manières d’être au monde.

Le problème de ces lieux-là, c’est qu’ils ne peuvent pas permettre un changement d’échelle. Cela ne peut pas être la solution de sortie des terres du capitalisme. Comme elles n’abolissent pas la propriété, s’il fallait racheter toutes les terres, cela coûterait des centaines de milliards d’euros.

Par ailleurs, ces terres ne sont pas à vendre à court terme – une terre se vend en moyenne tous les 75 ans. D’où la nécessité de faire à la fois des expérimentations de propriété collective, tout en ravivant la question de la régulation foncière pour sortir l’agriculture du capitalisme.

En quoi la lutte de Notre-Dame des Landes, victorieuse en 2018, a reconfiguré les luttes, notamment anticapitalistes, autour des terres ?

« La lutte de Notre-Dame des Landes a produit des façons de faire inspirantes pour toute une génération militant contre le capitalisme »

La question agricole et foncière, en France et même en Europe, était très peu investie par les milieux anticapitalistes. L’activisme des gens qui vont s’installer dans la Zad, les coopérations menées avec des syndicats agricoles comme la Confédération paysanne, ont – non sans débats houleux et conflits internes – mené à une lutte assez exemplaire sur un territoire.

La répression peut être énorme, mais la capacité de résistance aussi. Cette lutte a produit des façons de faire sur le territoire – en termes d’habitat, d’agriculture collective, de vivre ensemble – inspirantes pour toute une génération militant contre le néolibéralisme et le capitalisme. Beaucoup de milieux politiques aujourd’hui parlent de subsistance, d’alimentation, de terres.

Notre-Dame des Landes marque aussi le fait qu’avec de moins en moins d’agriculteurs dans la société (2,5 % des gens sont des travailleurs de la terre dont 1,9 % sont des agriculteurs au sens légal), les enjeux agricoles ne peuvent être uniquement du ressort des luttes paysannes. La centralité de ces luttes doit être partagée avec d’autres types d’acteurs politiques, notamment des gens qui habitent le territoire sans être forcément paysans.

La dynamique des Soulèvements de la Terre est-elle un prolongement de Notre-Dame des Landes ?

En effet, il me semble que Notre-Dame-des-Landes est une inspiration forte de la pensée qui s’agrège autour des Soulèvements, mouvement riche de sa pluralité. Les Soulèvements montrent que les espoirs nés de l’expérimentation à Notre-Dame-des-Landes sont possibles partout et qu’il va falloir faire différemment dans tous les territoires – chaque endroit ayant ses spécificités. Les questions de rapport à la terre ont aussi émergé dans l’espace politique des années 1990, avec les luttes au Chiapas, au Mexique, qui continuent d’inspirer les milieux politiques en Europe et en France. Cette circulation des imaginaires de luttes permet de penser des mondes différemment. Les Soulèvements arrivent à fédérer de manière assez importante et repolitisent très clairement ces questions de la terre. Ils portent ces questions sur tous les territoires qui ont envie de s’en emparer en disant : « C’est possible aussi chez vous ».

Muturreko eguraldiak ez dira gai haiek bakarrik kontzientziak pizteko
Nicolas Goñi
www.argia.eus/argia-astekaria/2837/muturreko-eguraldiak-ez-dira-gai-haiek-bakarrik-kontzientziak-pizteko

Uda honetan berriro biderkatu dira muturreko eguraldiak, Ipar hemisferioan han hemenka bero uhinak, lehorteak edota suteak zabaldu direlarik. Klimatologoek duela 30 urtetik aipatzen dituzten beroketa globalaren eragin aurreikusiak dira, gero eta maizago –eta indartsuago– ikusiko ditugunak. Funtsean, kontuak ez du bertze azalpenik behar, eta horrekin bukatu nezake artikulu hori. Baina azalpen ezagun eta frogatu hori talde batzuk ez dute onartzen, funtzio politiko bat betetzen duten narratibak lehenetsiz eta marko horretan errudun identifikagarriak seinalatuz.

Ukatze horrek arrazoi ezberdinak izan ditzake: edo klima aldatzen ari denik ez dute onartu nahi; edo aldatzen dela bai, baina, ezer egiterik ez omen dagoelakoan daude; edo hondamendi guzi horiek bertze erru bat dutelakoan daude. Azken kasu honetan errudunak “nazioaren etsaiak” izan ohi dira. Eguraldiak normala izaten jarraitzen duela diotenentzat aldiz “nazioaren etsaiak” klima aldaketa aitorrarazi nahi dutenak dira. Absurdoa dirudien arren, interpretazio horiek munduaren ikuspegi bat islatzen dute, narratiba bat. Eta eguraldi gertakariek ezohiko mailakoak izanik eta ezohiko kalteak sorturik ere, ez dira beti narratiba batzuk aldatzeko bezain indartsuak.

Dena normal, dena ongi

Arizonan, uda honetako ezohiko beroari aurre egiteko otoitza egin zuten legegileek abuztu hasierako beren lehen sesioan: “Otoitz egiten dizugu, Aita, sufrimendua bukatzeko konponbideak lortzeko eta gure tenperatura behera itzultzeko, hainbati sosegua itzultzeko”. Phoenix hiriburuan 43 gradu gainditu ziren uztaileko egun bakoitzean, marka historiko guziak gaindituz eta hamarnaka pertsonari bizia kenduz. Pandemiaren hasieran bezala, gorpuak biltzeko hozkailu berriak erosi behar izan zituzten. Arizonako alderdi errepublikarreko hainbat kidek, aldiz, Antonio Turielen esaera famatua –“dena normal, dena ongi”– errepikatzen zutela zirudien, baina modu ez ironikoan. Justine Wadsack senatari errepublikarrak “eguraldi hori normala da” zioen sare sozialetan, eta hedabideetan frenesia dagoela zioten bere alderdikide batzuk, helburua izanki ezkertiarren klima aldaketa narratibari oihartzuna ematea eta jendea gobernuari kontuak eskatzera bultzatzea.

Justin Heap Arizonako legegilea esplizituagoa izan da: bere ustez klima aldaketaren “narratiba mediatikoa” “elite globalek” bultzatzen omen dute, energia berdeak garatzeko subentzio publiko masiboak lortzeko omen. Adierazpen deigarria da, jakinik erregai fosilen sektoreak –tradizionalki alderdi errepublikarrari lotua– hainbat hamarkadatan energia berdeen garapena oztopatzeko eta petrolioaren negozioa jarraitzeko narratibak bultzatu dituela. Heapek aitortu du halere klima aldatzen ari dela eta CO2 isurketek zerikusia izan dezaketela, baina gehituz funtsean ezin duela onartu gobernuaren esku hartze gehiago konponketarako, hori egitea ezkertiarregia litzatekeelako. 2012an Virginia estatuko Chris Stolle legegileak Virginiako itsas bazterreko uholdeei buruzko txosten batetik “itsas mailaren igoera” hitzak kenduarazi zituen, bere iritziz hitz horiek ezkertiarrak direlako. Nortzuk ari dira klimaren auzia politizatzen?

Mezularia hil

Europa hegoaldean ere uda gogorra izan da, iberiar penintsulan bereziki lehorte luzeak kalte handiak eragin ditu laborantzaren sektorean. Egoera normala denik erratera inor ez zen ausartu, baina batzuentzat muturreko egoera hori ez zen aski klimarekin ea zerbait benetan gertatzen ari den ausnartzeko. Klima aldaketaren auzia “elite globalek inposaturiko” iruzurra edo aitzaki hutsa dela sinetsi nahi duenarentzat, lehortearen errua baitezpada bertze nonbait egon behar da. AEMET meteorologiako agentziak berak eguraldia manipulatzen duelako zurrumurruak zabaltzen eta indarra hartzen hasiz gero, chemtrail edo aire-arrasoen narratiba zahar hura berpiztuz, maila handiko jazarpen kanpaina pairatu zuten agentzia honetako langileek. “Kriminalak”, “hiltzaileak”, “gaitzaren zerbitzuko informazioaren sikarioak”, “manipulatzaileak”, “ordainduko duzue”, “zuei begira gaude” izan ziren jasotako mezuetarik batzuk. Apirilean Isabel Moreno meteorologoak sare sozial batean azaldu zuen berriro euri fronte batek Espainia saihestuko zuela. Erantzunak azkar agertu ziren: “Ez gaitzazu inozotzat hartu”, “lehortzen gaituzte eta zu zara horien bozeramailea” eta holako. Morenok ez zuen inoiz ikusi bere mezu bati hainbat erantzun, ezta ere hainbertze oldarkortasun. AEMETeko bozeramaile Estrella Gutierrezek azaldu zuen lanean daramatzan 30 urteetan inoiz ez zutela halako egoerarik pairatu.

Arrazistentzat aitzaki gehiago

Grezian ehundaka sute izan dira, horietarik asko kontrolagabeak. Handiena Evros eskualdean egon da, Turkiarekiko mugan –Copernicus zerbitzuaren arabera, Europan urte askotan ikusitako sute handiena izan da–. Poliziak eta suhiltzaileek sutea tximista batek piztu duela baieztatu arren, errefuxiatuek abiarazi omen dutenaren narratiba oso azkar zabaldu da, sutea bera baino azkarrago. Sorpresarik gabe, eskuin muturreko alderdiek miliziak osatzera deitu dute, giza-ehizan aritzeko. Pavlos Roufos saiakeragileak azaldu duenez, Evros eskualdeko biztanle batek hamabost pertsona atxilotu zituen bagoi batean, bideo bat argitaratu eta gero iruzkin gehienek errefuxiatuak tirokatzera edo zuzenean erretzera deitzen zuten. Dadia oihanean poliziatik ihes egin nahian bertze hemezortzi pertsona suak kiskailduta hilik ere, giroa ez da baretu. Zurrumurru zentzugabeenak zabaltzen dira, hala nola errefuxiatuak suhiltzaileen lana oztopatzen saiatzen omen direla hegazkinei harriak jaurtiz. Hori bertako jende gehiegik sinesten dute. Gobernuak eromen kolektibo honen aurka deus ez egiteaz gain, migrazioen ministroak adierazi zuen hemezortzi heriotza horiek legez kanpoko muga gainditzearen ondorioa direla, bertzerik gabe. Roufosek dio dagoeneko Grezian menderakuntza menderatuek berek zabaltzen dutela, eta inboluzio hori hainbat urteko beherapen ekonomikoak baita harreman sozialen desegiteak ere elikatu dutela.

Psikologia sozialeko ikertzaile Harald Welzerrek Klimakriege (“Klimaren Gerrak”) liburuan azaltzen zuen muturreko eguraldi gertakariek pertsona talde baten bizi baldintzak kaltetzen dituztenean, Espainian lehorteak edo Grezian suteek egiten duten bezala, horrek sortzen den injustizia sentimenduak errudun identifikagarri baten bilaketa bultza dezakeela. Ikus dezakegunez, funtzio politiko bat betetzen duen narratiba bateko errudunak dira, “nazioaren etsai” funtzioa alegia –balizko elite global izkutua edo atzerritarrak–, atentzioa eta haserre haiengana bideratzeko, bitartean klima aldaketa eta bere inplikazio sozialak aipatu gabe jarraitzeko.