A quelques mois des élections municipales et communautaires, nous détaillons pour vous le bilan écologique du mandat qui s’achève. Pendant six ans, Bizi! a suivi et accompagné 56 communes et l’agglomération pour qu’elles réalisent le Pacte de métamorphose écologique du Pays Basque contenant 7 thématiques : mobilités, maitrise de l’énergie dans les bâtiments, production d’énergie renouvelable, agriculture et alimentation, monnaie locale, déchets et économie circulaire, mise en place du Plan Climat. L’heure est au bilan : où en est-on ?
Cette semaine, nous faisons le point sur le Plan Climat Air Energie Territorial du Pays Basque : quelles sont les tendances ? quels sont les grands enjeux ? comment se situe le Pays Basque à l’issue de ce mandat 2020-2026 ? que doit-on arrêter et quels sont les exemples à généraliser ?
Le texte suivant est issu du rapport Des petits pas, loin des promesses et de l’urgence – État de la métamorphose écologique au Pays Basque, à retrouver en intégralité sur le site pacte2026.bizimugi.eu. Vous y trouverez également les résultats détaillés commune par commune. Vous pouvez soutenir la démarche en faisant un don ou en adhérant à Bizi!
Les tendances et objectifs hexagonaux
Alors que la température moyenne entre 2013 et 2022 a déjà augmenté de + 1,9 °C en France par rapport à la période 1900-1930, le Haut Conseil pour le Climat déplore un fort ralentissement du rythme de décarbonation en 2024, dans son dernier rapport. Celui-ci devra doubler pour atteindre la cible fixée en 2030. Alors que les deux tiers des émissions de GES de la France sont liés à l’usage des combustibles fossiles, l’atteinte de nos objectifs dépend en particulier de la sortie des énergies fossiles. Rappelant que le climat change plus vite et que les impacts s’intensifient sur les territoires, l’instance indépendante s’étonne des reculs observés sur des mesures rencontrant pourtant du succès (rénovations complètes, leasing social) et qui remettent en cause la lisibilité et la crédibilité de la politique climatique.
Le Réseau Action Climat a même recensé « plus de 43 reculs environnementaux » en six mois de la part du gouvernement ou du parlement. Ces régressions se traduisent dans le décrochage de la France de sa trajectoire de baisse de ses émissions de gaz à effet de serre. Selon l’organisme Citepa, chargé du bilan carbone français, le rythme de baisse des émissions brutes de gaz à effet de serre s’est nettement essoufflé en 2024 avec -1,8 %, alors que le pays devait viser un rythme de -5 % par an pour tenir son objectif provisoire de 270 Mt CO2e d’émissions brutes sur son sol en 2030.
Bilan de mandat : Un début de planification écologique au Pays Basque
Les engagements du Pacte 2020
Exécuter totalement le plan climat air énergie territorial du Pays Basque : “Adopter avant la fin de la première année de mandat une délibération qui précise sous forme de plan communal les déclinaisons opérationnelles du PCAET à l’échelle de la commune. Assurer la transparence de sa mise en place via des outils de suivi. Ne pas mettre en oeuvre des projets en contradiction avec les objectifs du PCAET.”
Dans son 6ème rapport, le GIEC précise pourtant qu’une limitation du réchauffement à +1,5°C implique que les émissions de gaz à effet de serre baissent de 43 % d’ici à 2030 par rapport à 2019. Dans son Plan Climat, la CAPB n’a pour objectif qu’une baisse des émissions de 18 % en 2030 et 56 % en 2050. Avec de telles ambitions, le Pays Basque Nord n’est pas sur une trajectoire de neutralité carbone et ne prend pas sa juste part dans la lutte contre le dérèglement climatique. Cet objectif trop faible a amené Bizi! à se retirer du Comité Partenarial du Plan Climat ; elle est disposée à le réintégrer sous réserve d’une réhausse des ambitions.
En 2023, à l’exception de Saint-Jean-Pied-de-Port, aucune commune n’avait respecté l’engagement de mettre en place un plan d’action déclinant le Plan Climat à l’échelle communale, avec des échéances et des moyens dédiés. Suite à une campagne d’interpellation impulsée par Bizi! et invitant les communes à solliciter le Secrétariat général à la transition énergétique et à la planification écologique (SG TEPE) de la Communauté d’Agglomération pour les accompagner, 14 communes sont engagées dans une démarche de plan d’action : 9 sont en cours d’élaboration ou en attente d’accompagnement de l’agglomération (Biriatou, Ascain, Sare, Anglet, Biarritz, Ciboure, Hasparren, Saint-Jean-de-Luz et Saint-Pée-sur-Nivelle) et 5 ont débuté la mise en oeuvre de leur plan : Bayonne, Bidart, Saint-Pierre-d’Irube, Urrugne et Saint-Jean-Pied-de-Port, seule commune à mettre à jour des fiches actions accessibles en ligne : une transparence exemplaire à suivre ! Un accompagnement des communes pour élaborer et structurer des plans de transition est également en cours de la part de l’agglomération. D’après les engagements pris par 129 communes lors de la semaine Klima 2024, seules 20 (16 %) déclarent s’intégrer au Plan Climat Pays Basque, 34 % déclarent être en cours, 7 % le prévoir dans les 3 ans, 8 % dans les 6 ans et 36 % ne rien prévoir ou ne pas être concernées.
Un déficit de formation aux enjeux écologiques
Alors qu’il y a consensus sur la nécessité de se former pour y répondre adéquatement, on constate un déficit majeur de formation des élu·es aux enjeux écologiques. De 2022 à 2024, seul·es 18 élu·es sur les 1134 élu·es des 56 communes suivies ont participé à une formation aux enjeux écologiques en mobilisant leur Droit Individuel à la Formation des Élu·es. Sur la même période, seul·es 5 élu·es ont mobilisé leur droit à la formation en tant qu’élu·es communautaires pour 9 formations proposées dans le cadre des cycles co-organisés par Bizi! en 2024 ! Aucune autre formation n’a été suivie en mobilisant ce droit au cours des autres années. Le comité Hitza Hitz rejoint le conseiller du label TETE de l’ADEME lorsqu’il propose d’élaborer un plan de formation formalisé. Les deux cycles de formation (2022 et 2024) coorganisés par Bizi! ont abouti, quant à eux, à 108 participations, pour 59 élu·es et 6 agent·es, de 34 communes différentes (dont 5 non suivies). D’après les engagements pris par 129 communes lors de la semaine Klima 2024, seules 8 (6 %) déclarent avoir formé l’ensemble des agent·es et des élu·es aux enjeux de transition écologique et solidaire, 19 % déclarent être en cours de formation, 17 % le prévoir dans les 3 ans, 11 % dans les 6 ans et 47 % ne rien prévoir ou ne pas être concernées !
Le suivi des politiques climatiques communales exige qu’un·e élu·e, de préférence un·e adjoint·e, mais a minima un·e élu·e référent·e, soit en charge de la coordination. Or d’après les engagements pris par 129 communes lors de la semaine Klima 2024, seules 29 (22 %) déclarent avoir défini un·e référent·e climat, 12 % déclarent être en cours, 6 % le prévoir dans les 3 ans, 5 % dans les 6 ans et 55 % ne rien prévoir ou ne pas être concernées !
Par ailleurs, la mise en oeuvre de politiques écologiques suppose une ingénierie qualifiée. Des communes comme Anglet, Saint-Pierre-d’Irube ou Urrugne ont recruté des agent·es pour un pilotage effectif et transversal.
Des budgets à mettre en conformité avec les paroles
Les collectivités territoriales, leurs établissements et groupements possèdent environ 20 % du parc immobilier public et supportent près de 60 % de l’investissement public civil (construction, transports publics, développement de nouvelles technologies…). C’est pourquoi depuis cette année 2025 (à partir de l’exercice 2024), les collectivités de plus de 3500 habitant·es ont l’obligation de produire une nouvelle annexe environnementale «Impact du budget pour la transition écologique», rattachée au compte administratif ou au compte financier unique. Celle-ci ne s’applique qu’aux investissements et ne concerne pour cette année que l’axe « Lutte contre le changement climatique » qui correspond aux objectifs visés par les politiques d’atténuation du changement climatique, dont la réduction des gaz à effet de serre et la création de puits de carbone. A partir de l’année prochaine, elle devra aussi intégrer l’axe « Préservation de la biodiversité, protection des espaces naturels, agricoles et sylvicoles ».
Nous n’avons pas pu analyser les budgets dans le cadre de ce rapport mais de nombreuses villes semblent ne pas avoir respecté cette obligation. D’après les engagements pris par 129 communes lors de la semaine Klima 2024, seules 3 (2 %) déclarent avoir mis en place un budget vert, 8 % déclarent être en cours, 9 % le prévoir dans les 3 ans, 5 % dans les 6 ans et 76 % ne rien prévoir ou ne pas être concernées. Dans son dernier rapport, le Haut Conseil pour le Climat affirme pourtant que “le budget vert de l’Etat et des collectivités territoriales fournit un outil essentiel au service de la transparence de l’action climatique. Il permet notamment, depuis 2024, de mieux caractériser l’incidence environnementale du budget des collectivités et d’évaluer le volume d’investissements verts réalisés au niveau local.” L’instance indépendante appelle aussi “à définir une doctrine de gestion des finances publiques adaptée à l’exigence de la transition climatique pour passer d’une programmation annuelle à un pilotage pluriannuel de l’action climatique.”
Cesser d’être complice d’une communication dissonante
Les communes communiquent de plus en plus sur leur gazette ou via leur site dans l’objectif de sensibiliser davantage leur population aux changements de comportements qu’appelle l’urgence écologique. Pourtant, les communes de la côte, voire du rétro littoral, sont à l’inverse trop souvent complices de la diffusion de messages publicitaires dans l’espace extérieur qui continuent à inciter des façons de se déplacer, de se nourrir, de consommer, nuisibles pour la santé et pour l’environnement. Alors que nous sommes déjà bombardés de ces messages dans l’espace numérique ou via les médias, ces collectivités exposent aussi leur population, notamment les enfants, à ces incitations néfastes dans l’espace extérieur privé, quand elle ne font pas correctement appliquer les interdictions du code de l’environnement, voire même dans l’espace public, sur les abris voyageurs ou les mobiliers d’information.
Dans une vision court-termiste et comptable d’économies budgétaires, ces communes signent des contrats de mobilier urbain avec des afficheurs qui assurent gracieusement le coût de la mise en place et de la gestion de mobiliers urbains, en contrepartie du droit à livrer l’espace public à des publicités la plupart du temps nocives, encourageant à s’alimenter en malbouffe ou en produits ultra transformés aux abords des établissements scolaires. Ces communes vont même jusqu’à participer à cet imaginaire climaticide de surconsommation en élaborant des règlements locaux de publicité dérogatoires qui autorisent les publicités dans des secteurs patrimoniaux ou naturels, normalement protégés par le Code de l’environnement. C’est le cas du RLPi Côte Basque Adour qui couvre les communes d’Anglet, Bayonne, Biarritz, Bidart et Boucau. Le RLPi Pays Basque, qui va couvrir les 158 communes de l’agglomération, est toujours en cours d’élaboration. Le Collectif Stop pub Pays Basque, dont Bizi! fait partie, veillera à rappeler les élu·es et communes à leurs déclarations volontaristes de défendre un RLPi réellement protecteur.
Le score moyen de cette thématique ne passe que de 0,4/4 en 2023 à 0,5/4 en 2025, mais masque de fortes disparités. Sur les 14 communes à avoir atteint ou dépassé le stade 1, la plupart sont des villes, quand les bourgs ou villages sont encore rarement engagés dans cette approche transversale.
Les mesures du Pacte 2026 pour le climat et les habitant·es du Pays Basque
SE DONNER LES MOYENS D’AGIR
- Attribuer des moyens humains suffisants pour assurer la coordination des politiques écologiques (a minima un·e adjoint·e).
- Accorder une véritable place aux habitant·es dans les décisions impactant leur cadre de vie.
- Mettre en place un budget vert dès la première année de mandat.
- Former élu·es et agent·es aux enjeux écologiques et sociaux dès la première année de mandat.
- Planifier son action pour un territoire à la hauteur des défis écologiques et sociaux.
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