Articles du Vendredi : Sélection du 12 juillet

Dans le plan énergie-climat de la France soumis à Bruxelles, des objectifs insuffisants en matière de renouvelables
Audrey Garric et Perrine Mouterde
www.lemonde.fr/planete/article/2024/07/11/dans-le-plan-energie-climat-de-la-france-soumis-a-bruxelles-des-objectifs-insuffisants-en-matiere-de-renouvelables_6248839_3244.html

Paris s’entête à défendre une cible d’« énergie décarbonée » incluant le nucléaire, plutôt qu’une cible sur les énergies renouvelables, contrairement à ce que prévoit une directive européenne.

Si, à Paris, l’avenir des textes programmatiques sur l’énergie et le climat demeure très incertain, du fait de la situation politique, les grandes orientations du pays en la matière se précisent à Bruxelles. Contre toute attente, la France a soumis à la Commission européenne une version révisée de son plan national intégré énergie-climat (Pniec), publiée mercredi 10 juillet. Elle est ainsi l’un des six pays des Vingt-Sept à respecter, à quelques jours près, le délai fixé par l’exécutif européen : les Etats membres avaient jusqu’au 30 juin pour transmettre leurs feuilles de route décrivant la manière dont ils comptent atteindre, au cours de la prochaine décennie, les objectifs fixés par l’Union.

Ce document de plus de 300 pages s’appuie sur les travaux entamés en 2021 pour réviser la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE), la stratégie nationale bas carbone (SNBC) et le plan national d’adaptation au changement climatique (Pnacc). Des textes cruciaux qui auraient déjà dû être adoptés, mais dont la finalisation n’a cessé d’être retardée. Le Pniec nous « permet de confirmer notre trajectoire et de montrer que l’on est dans l’esprit de mise en œuvre du pacte vert », indique Antoine Pellion, le secrétaire général à la planification écologique. L’incertitude politique actuelle n’y change rien : ce document « ne crée pas d’irréversibilité », assure-t-il.

Le plan soumis à Bruxelles officialise donc des orientations en partie connues. Il réaffirme l’ambition de faire passer la part du gaz et du pétrole dans le mix énergétique d’environ 60 % aujourd’hui à 42 % en 2030 et 29 % en 2035, et prévoit de « tendre vers » une baisse de la consommation finale de 30 % (par rapport à 2012) d’ici à la fin de la décennie.

Concernant les renouvelables (éolien, solaire, chaleur et froid renouvelables, hydroélectricité…), la France confirme les cibles de développement énoncées dans la version provisoire du Pniec, soumise en 2023. Elle s’entête, en revanche, à ne pas afficher d’objectif chiffré, en pourcentage, de la part des renouvelables dans la consommation finale – contrairement à ce que prévoit une directive européenne. A la place, Paris met en avant une cible en matière d’« énergie décarbonée » (58 % dans sa consommation finale en 2030, contre 43 % aujourd’hui), qui permet d’inclure le nucléaire. « Notre objectif a toujours été de raisonner en baisse des émissions de gaz à effet de serre, et non en fonction de l’origine des électrons », justifie-t-on au ministère délégué à l’industrie et à l’énergie.

Forte mortalité des arbres

Les objectifs de développement des renouvelables n’ayant pas été rehaussés, cette nouvelle version du plan ne devrait pas satisfaire la Commission européenne : en novembre 2023, celle-ci a estimé que le pays atteindrait, avec sa stratégie, 33 % de renouvelables dans sa consommation finale en 2030, au lieu des 44 % attendus. Le gouvernement est, par ailleurs, toujours en négociation avec la Commission concernant son retard par rapport à l’objectif de 2020 (23 % de renouvelables). Selon le Pniec, cette cible sera finalement « atteinte en 2024 et même dépassée de près de 1 point ».

La SNBC, la feuille de route climatique du pays, prévoit quant à elle d’atteindre la neutralité carbone en 2050, avec un jalon important d’ici là : réduire les émissions de gaz à effet de serre de 50 % entre 1990 et 2030, en brut, c’est-à-dire sans tenir compte de l’absorption du CO2 par les puits de carbone comme les forêts. La France a relevé ses objectifs (qui étaient de − 40 % auparavant), une conséquence de la nouvelle ambition climatique européenne.

La marche est haute : il s’agit de passer de 373 millions de tonnes équivalent CO2 (MtéqCO2) en 2023, hors importations, à 270 MtéqCOen 2030. Pour y parvenir, les rejets carbonés doivent être abaissés de 5 % par an entre 2022 et 2030, contre 2 % de réduction annuelle en moyenne de 2017 à 2022, ce qui implique une accélération dans tous les secteurs, qu’il s’agisse de l’électrification des moyens de transport, de la rénovation des bâtiments ou d’une moindre consommation de protéines animales. Après les bons résultats de 2023 (− 5,8 %), le Haut Conseil pour le climat a jugé pour la première fois que les objectifs pour 2030 sont « accessibles », à condition de maintenir les efforts dans la durée, de poursuivre les investissements verts et de préserver les forêts. Au premier trimestre 2024, la tendance reste favorable, avec − 5,3 %.

En revanche, le gouvernement n’affiche plus l’autre cible qu’il évoquait jusqu’alors : une réduction de 55 % des émissions nettes (en intégrant les puits de carbone) d’ici à 2030, soit l’objectif européen. La France ne peut y parvenir à ce stade, en raison de la forte mortalité des arbres, liée aux sécheresses et aux maladies. « Mais l’objectif n’est pas abandonné », assure Antoine Pellion.

Le Pniec ne détaille pas non plus les mesures pour s’adapter à un réchauffement climatique qui pourrait atteindre 4 °C dans l’Hexagone en 2100. Le Pnacc, comme la SNBC et la PPE, doit encore être soumis à la consultation du public dans les prochains mois ou en 2025, et pourrait fortement varier, en fonction du gouvernement qui sera nommé. Tout dépendra également du futur budget, en cours de négociation.

Au nom du séparatisme, l’État réprime les associations écologiques

Marie Astier
https://reporterre.net/Au-nom-du-separatisme-l-Etat-reprime-les-associations-ecologiques

Plusieurs organisations écologistes ont subi des pressions au nom de la loi Séparatisme. Selon les préfectures, elles auraient incité à la désobéissance civile.

Pour l’association, c’était une première. La Maison régionale de l’environnement et des solidarités (MRES), située à Lille, dans le Nord, a eu la désagréable surprise d’être convoquée par la préfecture le 9 décembre dernier. En cause, un prêt de salle au collectif Non à l’agrandissement de l’aéroport de Lille-Lesquin (Nada), qui accueillait début octobre quatre jours de conférences de Stay Grounded, un réseau européen d’organisations qui dénoncent les effets du trafic aérien sur le climat. Des activistes qui ne se cachent pas de pratiquer la désobéissance civile. Une entorse au « contrat d’engagement républicain », a rappelé la préfecture à la MRES.

Prévu par la loi « confortant le respect des principes de la République » — dite loi Séparatisme —, ce « contrat » est obligatoire pour les associations recevant des subventions publiques ou celles ayant un agrément (qui leur permet d’agir en justice). Il est en place depuis le 2 janvier 2022, soit tout juste un an. Il stipule notamment que ces associations « ne doivent entreprendre ni inciter à aucune action manifestement contraire à la loi ». Présenté comme un outil pour lutter contre l’islamisme radical, il a suscité avant même l’adoption de la loi une levée de boucliers du milieu associatif. Celles menant des actions de désobéissance civile, en particulier, se sont senties visées. Elles n’avaient pas tort.

« De telles incitations à la désobéissance civile s’apparentent à un trouble à l’ordre public », a ainsi expliqué la préfecture du département à La Voix du Nord. « Rien dans nos statuts, nos modes de gouvernance, nos modes d’action et nos décisions ne contredit les valeurs républicaines de Liberté, Égalité, Fraternité, que nous prétendons au contraire défendre pied à pied, se défend la MRES dans son édito de nouvelle année. De même, nous sommes opposés à tout acte violent. »

« 75 % de notre budget vient de financements publics »

À Lille, la structure est un pilier de la vie associative, elle existe depuis plus de quarante ans. Elle regroupe 119 associations dans les domaines de la nature, de la défense des droits humains, des solidarités. « On accueille plusieurs milliers de réunions dans nos locaux chaque année. On ne contrôle pas leur contenu », dit Xavier Galand, directeur de la MRES. La préfecture a pris note des explications, et appelé l’association à plus de vigilance.

La situation fragilise la structure. « 75 % de notre budget vient de financements publics », indique le directeur. Autant de ressources qui pourraient être remises en cause si l’administration considère que l’association ne respecte pas le « contrat d’engagement républicain ». « On est en train de déposer des dossiers de financement pour 2023, on verra comment ils seront instruits. Cela nous incite à une forme d’autocensure, on se demande “Peut-on faire ceci, ou cela ?” La fonction de répression du contrat d’engagement républicain apparaît au grand jour. »

Un nouvel outil de contrôle des associations, dont n’a pas hésité à se saisir Xavier Bertrand, le président Les Républicains de la région. À son arrivée à la tête des Hauts-de-France, en 2016, il avait réduit les subventions des associations environnementales. Dans le cas qui nous occupe, c’est lui qui a demandé à la préfecture du Nord de convoquer la MRES. Notons aussi que la région est l’une des collectivités gestionnaires de l’aéroport de Lille-Lesquin, propriétaire du terrain sur lequel il s’étend, et promeut son agrandissement.

D’autres cas à Poitiers, en Corrèze…

Ce rappel à l’ordre n’est pas le premier. À Poitiers, en septembre, le préfet de la Vienne avait demandé à la Ville et à la métropole de retirer leurs subventions (de respectivement 10 000 et 5 000 euros) à Alternatiba Poitiers, pour l’organisation d’un Village des alternatives. Il était notamment reproché à l’association d’accueillir un atelier et un débat sur la désobéissance civile. Des activités contraires au « contrat d’engagement républicain », car elles « inciteraient à un refus assumé et public de respecter les lois et règlements », écrivait le préfet de la Vienne Jean-Marie Girier, par ailleurs ex-directeur de campagne d’Emmanuel Macron en 2017.

L’organisation sur la radio locale Radio Pulsar d’un débat autour des mégabassines — ces grands réservoirs d’eau contestés — avec le collectif Bassines non merci l’avait également irrité, racontait alors Reporterre. Là encore, ce nouveau contrat a servi à s’en prendre non seulement au mode d’action qu’est la désobéissance civile, mais également à une lutte de terrain contre un projet d’aménagement.

Les collectivités locales ont maintenu leurs subventions, le Village des alternatives a bien eu lieu en septembre. Mais le préfet a saisi le tribunal administratif fin octobre afin de faire annuler les subventions. « C’est une épée de Damoclès ce procès, s’inquiète Thierry Grasset d’Alternatiba Poitiers. Les subventions, on les a dépensées. Et en parlant de désobéissance : l’État français, lui, a été condamné deux fois pour inaction climatique. »

En Corrèze, la pression a été plus discrète. C’est Mediapart qui a rapporté le contenu d’une réunion en mai dernier, où s’est décidé l’attribution de subventions au niveau du département. Le secrétaire général de la préfecture aurait justifié le refus de subventions à plusieurs associations en raison de leur appartenance à la « mouvance radicale » de l’« ultragauche ». À ce titre, elles ne respecteraient pas le « contrat d’engagement républicain ». Parmi elles, deux associations paysannes, l’une de défense des races locales et l’autre d’aide aux bergers, et le journal indépendant La Trousse corrézienne. Malgré les témoignages recueillis, la préfecture a assuré à Mediapart que le « contrat d’engagement républicain » n’avait rien à voir dans ces refus.

« Un message extrêmement puissant à l’ensemble du secteur écolo »

« Le nombre de cas directement répressifs n’est pas extrêmement nombreux », observe Julien Talpin, chercheur en sciences politiques et animateur de l’Observatoire des libertés associatives. Pourtant, ces affaires ont mis le monde associatif en émoi. Alternatiba et la MRES sont loin d’être les associations écologistes les plus radicales. Elles ne prônent ni sabotage ni actions violentes. « En choisissant de s’attaquer à des acteurs mainstream, les autorités envoient un message extrêmement puissant à l’ensemble du secteur écolo », estime Julien Talpin.

Pour lui, la pression est croissante depuis 2015. « Après les attentats terroristes, on se souvient des interdictions de manifestations lors de la COP de Paris. Puis ont suivi la cellule de renseignement Déméter, les formes de criminalisation plus dures comme à Bure. La loi Séparatisme a donné un socle juridique solide à des pratiques qui existaient déjà, mais étaient limites. »

Face à cela, les associations se regroupent pour défendre leurs libertés. En soutien à Alternatiba Poitiers, « une trentaine d’organisations environnementales et la Ligue des droits de l’Homme ont demandé à être intervenantes volontaires au procès », rapporte Thierry Grasset. La justice estimera-t-elle que la désobéissance civile est un « trouble à l’ordre public » ? Sa décision fera jurisprudence et sera déterminante pour toutes les associations qui revendiquent ce mode d’action. Est aussi attendu le résultat du recours déposé par vingt-cinq associations en mars contre le « contrat d’engagement républicain ».

Shift project, Fresque du climat… Ces associations écologistes muettes sur l’extrême droite

Laure Noualhat
https://reporterre.net/Shift-project-Fresque-du-climat-Ces-associations-ecologistes-muettes-sur-l-extreme-droite

Plusieurs organisations dédiées à la décarbonation, se disant « apartisanes », ne donnent aucune consigne explicite pour contrer l’arrivée aux manettes de l’extrême droite.

Si, « comme partout dans la société », la dissolution de l’Assemblée a provoqué un certain émoi pour nombre d’associations dédiées à la décarbonation, leur leitmotiv est de se revendiquer « apartisan » — comme l’a écrit l’association la Fresque du climat. Dans un long courriel à ses 80 000 animateurs, elle explique qu’elle ne donnera « aucune consigne de vote ». Comment le justifier à quelques jours d’une possible accession du Rassemblement national au pouvoir ?

Contactée plusieurs fois par Reporterre, elle nous renvoie à sa publication sur Linkedin qui invite à l’étude des programmes des candidats. « Les 30 juin et 7 juillet, rappelons-nous que dans la lutte contre le dérèglement climatique, chaque dixième de degré gagné est essentiel et donc que chaque action et chaque choix compte. » Zéro mention d’un front anti-RN.

Un appel à voter « avec discernement »

L’association 2 tonnes qui propose des ateliers pédagogiques pour réduire son empreinte carbone, a publié un appel à mobilisation sur son site et auprès de ses 10 000 animateurs : là encore, pas d’appel explicite à contrer le RN mais un appel à voter « avec discernement dans cette situation écologique et sociale urgente » selon Pierre-Alix Lloret-Bavai, son cofondateur. Le texte contient une bonne dose de circonvolutions. Extrait. « Nous invitons chacun et chacune à se saisir de ce vote pour en faire le fruit d’une décision éclairée et assumée, prenant en compte ses convictions, et s’appuyant sur une analyse la plus factuelle possible des différentes options et de leurs implications. » Et aussi : « Votons, et soyons maîtres de nos votes ; Faisons voter autour de nous ; Provoquons le dialogue. »

Le Shift et les Shifters ne font pas non plus barrage contre le RN. Ils invitent à regarder ces élections « dans la perspective du changement climatique et de notre dépendance aux énergies fossiles ». Fort de 30 salariés, 80 financeurs et 25 000 aficionados réunis dans l’association les Shifters, le groupe de réflexion estime être parvenu à une position de « pivot » qui lui permet de toucher un monde jusqu’alors rétif aux questions climatiques et énergétiques : celui de l’économie et des secteurs les plus émetteurs. « Nos organisations se situent à la croisée des ONG, de la recherche, du public et du privé. Elles regroupent une diversité d’opinions politiques rassemblées sur les questions climatiques. Notre ambition : parler à tous les corps intermédiaires, précise Jean-Noël Geist, responsable des affaires publiques et relations Shift-Shifters.

La situation « tarabuste un peu » Jean-Marc Jancovici

Il y avait bien un kit de présentation des enjeux climat pour les élections européennes mais pour les législatives, l’organisme n’a « pas eu le temps » de remettre le couvert pour une « analyse fine » des programmes, selon M. Geist. Le Shift validerait-il la position du RN, entre la construction de vingt EPR et le démantèlement des éoliennes ? « Non, nous ne validons rien car nous n’avons pas publié d’analyse détaillée des programmes. »

 

Pour autant, le Shift a étrillé dans le passé les programmes du RN [1]. Sans prendre aujourd’hui une position ferme : il y a deux semaines, son patron, l’ingénieur totémique Jean-Marc Jancovici, était interviewé par Vinz Kanté du podcast Limit auquel il confiait que la situation le « tarabuste un peu » et que « la dégradation du climat social liée à l’incompréhension de la cause profonde de ce qui est en train de nous arriver est la porte ouverte à des malentendus qui peuvent nous emmener très loin. […] C’est un domaine dans lequel chacun est renvoyé à ses intuitions et ses convictions. »

Normalisation de l’extrême droite

En jetant des passerelles entre les questions climatiques et la sphère des grandes entreprises, la Fresque, le Shift ou les Ateliers 2 tonnes ont réussi là où les associations écologistes traditionnelles ont échoué. Centrées sur la pédagogie et la décarbonation, travaillant au sein d’entreprises ou de services de l’État, elles considèrent qu’elles prendraient trop de risques sur leurs objectifs en se mouillant. « Le Shift porte une telle aura chez les gens de droite qu’un positionnement clair pourrait entacher son travail. Il est bon de garder une posture universaliste, qui permet d’embarquer tout le monde » se désole un Shifter auprès de Reporterre tout en notant que les temps ont changé. « En 2002, il eut été parfaitement possible de se revendiquer “apartisan” tout en appelant à faire barrage. Mais le RN s’est normalisé et on se fait embarquer dans la fenêtre d’Overton [2] comme tout le monde. »

Certains s’avouent toutefois « stupéfaits » par ce positionnement délibérément flou. « Le projet de l’extrême droite va à rebours des conditions matérielles d’une décarbonation », s’étrangle Cédric Philibert, chercheur associé à l’Institut français des relations internationales (Ifri) et spécialiste des questions d’énergie.

Faire profil bas pour conserver son association

En effet, décarboner ne se résume pas à augmenter les moyens de production via des réacteurs nucléaires, c’est aussi une transformation massive des usages : imposer le véhicule électrique, mettre le paquet sur l’isolation des bâtiments, déployer les renouvelables, reconsidérer les modes de vie et de consommation. « Tous ces enjeux sont clairement ignorés par le RN ! » Voire dénigrés par l’aile climatonégationniste du mouvement.

Face au RN qui arrive, trois stratégies cohabitent : faire barrage, surfer sur la vague avec celles et ceux qui seront nommés tout en travaillant à des îlots d’alternatives ou bien souffler dans les voiles de la transition énergétique quel que soit le contexte politique. « Donner des consignes de vote n’est pas la seule façon d’avoir de l’impact », confirme Pierre-Alix Lloret-Bavai. « Derrière un non-positionnement se cache une multitude de points de vue et notamment des stratégies de long terme, plus efficaces et plus intelligentes qu’un simple appel à voter », analyse un autre militant à l’interface d’organisations climat et justice sociale. Certains ont plus intérêt à faire profil bas pour conserver leur association sur le long terme.

« Tout l’arsenal légal pour dézinguer les organisations est prêt »

D’après lui, l’urgence est déjà à l’après-8 juillet. « Les dirigeants d’associations anticipent un monde avec le RN au pouvoir. C’est peut-être ça le véritable enjeu car tout l’arsenal légal pour dézinguer les organisations civiles est prêt : les risques humains, physiques, légaux ou de perte de financement sont réels. Macron a très bien travaillé. »

 

 

 

 

 

Le monde qui arrive porte en lui les germes d’une grande déstabilisation parmi la base militante ou les membres de ces associations. « Comment travailler ensemble, quel que soit le positionnement, interroge Armonia Pierantozzi, cofondatrice de l’école Fert’îles dédiée à la coopération. « Entre ceux qui se sont affichés contre et d’autres qui travaillent au sein d’institutions, il y a un enjeu de coopération pour avancer au-delà de nos désaccords. Nous devrons toutes et tous composer avec la réalité. Et aussi prendre soin des enjeux humains, de la potentielle détresse chez les militants, les équipes, et la communauté de la transition en général. »

Le 4 juillet, Le Shift project a profité de l’entre deux tours pour finalement prendre une position plus claire et appelle à voter dimanche. « Apartisan, le Shift Project n’est pas apolitique pour autant », conclut la note qui accompagne leur passage en revue des programmes des trois principaux partis en lice pour le second tour : Ensemble, le NFP et le RN.

Certes, il laisse à celles et ceux qui liraient leur analyse « le soin d’en tirer leurs conclusions » et reste dans le strict domaine qui est le sien : le climat et l’énergie. Et sur ce point, le RN pèche plus que les autres… Ses propositions en matière d’énergie (ralentissement du déploiement des énergies renouvelables, déploiement nucléaire au-delà des niveaux les plus forts proposés par RTE) « constituent un pari qu’on peut qualifier d’extrêmement risqué, contre-indiqué par la logique prudente du PTEF ». Autre exemple, en termes de mobilité, le RN va « à l’encontre de l’électrification du parc automobile et donc de la décarbonation de la mobilité ».

Birtokiratu
Txerra Rodriguez
https://zuzeu.eus/euskara/birtokiratu/

Bizi mugimenduak liburua plazaratu zuen 2023an: Euskal Herria burujabe. Liburua zeharo interesgarria da, baina blog honen edukietatik apur bat urruntzen dena. Hala ere, amaiera aldean, birtokiratu kontzeptuari heltzen dio.

Hauxe da birtokiratu kontzeptu hori: “birtokiratzearen helburua guhaurren garapenaren eragile berriz bilakatzea da, lurralde proiektua ekoizpen-prozesuaren bihotzean kokatuz”. Horri lotuta, subsidiariotasun printzipioa plantan ematea aipatzen dute: tokiko mailan egin daitekeena tokiko mailan egin behar da. Azken printzipio honek aplikagarritasuna izan dezake hizkuntzan ere: tokiko hizkuntzan egin daitekeena tokiko hizkuntzan egin behar da. Azken finean, birtokiratzeak (eta subsidiariotasun printzipioak) galdera bat pausatzen dute: zer da birtokiratu daitekeena? Edo, gurera ekarrita, zer da euskaraz egin daitekeena?

Era berean, liburuan zehar metamorfosi sozial eta ekologikoari buruz behin eta berriro egiten da berba. Eta komunitatearen garrantziari buruz. Metamorfosi bi horiei, nire ustez, hirugarrentxo bat datorkie erreskadan: metamorfosi linguistikoa. Baina hori, besteak beste, geure esku dago heintxo batean.

PD: Biziko liburuak honako hau dio euskararen biziberritzeari buruz: “Diruzko irabazien logikatik kanpoko helburua duen herritar mobilizazio baten adibide biziki ederra da euskararen garapenaren aldeko borroka”.