Le magazine bimensuel Society fait sa une sur Jon Palais et les faucheurs de chaises!
Ils ont suivi Jon entre Paris et Dax, courrez dans vos kiosques!
EXTRAIT…
Il s’appelle Jon Palais, a 37 ans et une drôle de spécialité. Depuis des mois, il pénètre dans des banques et en repart, sans arme ni violence, avec des chaises. Son objectif? Dénoncer l’évasion fiscale et sensibiliser l’opinion publique aux dérives des établissements bancaires. Mais, mieux que ça, Jon Palais et ses acolytes militants écologistes tentent d’inventer une nouvelle façon de faire de la politique. Loin des partis, des guerres idéologiques et du fatalisme ambiant.
C’est comme si une force surnaturelle voulait empêcher Jon Palais de rallier Dax dans les temps. “Problème de RER, suis bloqué, vais rater le train de 17h28.” Le SMS est envoyé une trentaine de minutes avant le dernier départ de la journée entre Paris-Montparnasse et la station thermale landaise. Qu’à cela ne tienne, il reste le train de nuit. depuis la gare d’Austerlitz. Mais un autre message tombe: “Je viens de me tromper deux fois de métro et de sens, c’est vraiment pas mon jour niveau transports…” La raison de ce stress? A priori, pas l’attente des résultats de la primaire de la gauche. qui viennent d’être annoncés et donnent Benoît Hamon largement en tête au premier tour. “J’ai vu ça. Pour moi, ce n’est pas très surprenant”, juge un Jon impassible en commandant finalement une eau gazeuse à l’Austerlitz K’fé. Il pose son sac par terre, ouvre son sweat à capuche et souffle enfin. Si Jon s’inquiétait tant de ne pas pouvoir rentrer à Dax, c’est qu’il a rendez-vous le lendemain à 13h30. Au tribunal, plus exactement. Convoqué pour entendre le verdict de son procès, à la suite d’une plainte de BNP Paribas, il risque jusqu’à cinq ans de prison et 75000 euros d’amende pour des faits de vol en réunion. notamment. Malgré la petite lampe frontale qui pend autour de son cou, cet homme à la voix posée et aux mots mesurés n’a pas vraiment un style à braquer des banques. Mais les apparences sont parfois trompeuses.
D’une certaine façon, c’est bien pour une série de hold-up que le militant de 37 ans est poursuivi aujourd’hui. Le 19 octobre 2015, comme de nombreuses fois auparavant et encore quelques-unes par la suite. Jon Palais et le gang des “Faucheurs de chaises” entraient dans une agence bancaire -en l’occurrence la BNP Paribas Saint-Paul, dans le IV” arrondissement de Paris-, non pas
pour vider les coffres mais pour procéder à une « réquisition citoyenne » des fauteuils de l’endroit, afin de protester contre la présence de la banque en question dans des paradis fiscaux. “BNP Paribas a six filiales dans les îles Caïmans, où il n’emploie aucun salarié et où il a réalisé 134 millions d’euros de bénéfices en 2015. Il faudrait qu’ils nous expliquent comment c’est possible”, justifie Jon en s’asseyant sur une couchette de l’Intercités, tandis que le train s’enfonce dans la nuit. Avec Barth, un compagnon faucheur de chaises qui l’a rejoint à bord, ils fouillent dans leur mémoire pour savoir comment est née l’idée. ‘je crois que c’est Txetx qui y a pensé, et qu’il était aussi dans un train réfléchit Barth à voix haute. Jean-Noël Etcheverry, alias Txetx, est l’un des fondateurs du mouvement écologiste Bizi! (“Vivre!”, en VF), au sein duquel Jon et Barth militent. À 52 ans, Txetx, figure du militantisme basque non violent à l’accent de rocaille, a eu l’éclair de génie le 8 février 2015.
Ce jour-là, Le Monde fait sa une sur l’affaire SwissLeaks, la révélation d’un gigantesque système d’évasion fiscale organisé et encouragé par le groupe HSBC. “On sortait de Ia COP20 (sommet sur le climat à Lima en décembre 2014, ndlr), où les États avaient mis des années à se mettre d’accord pour injecter dix malheureux milliards dans le fonds pour le climat alors qu’il en fallait 100. Et de l’autre côté, on sait qu’il y a entre 20 et 32 000 milliards de dollars dans les paradis fiscaux, assène Txetx aujourd’hui.
On s’est dit que l’on était comme des papillons attirés par la lumière et qu’il fallait orienter cette lumière vers l’endroit où il y a de l’argent en grande quantité.” Dès le 12 février, les militants de Bizi! se rendent donc à l’agence HSBC de Bayonne et repartent calmement avec huit chaises. “On aurait pu repartir avec les bureaux mais c’était un peu lourd, sourit Txetx. On leur
a juste expliqué: ‘Désolé, mais nous avons calculé que HSBC a volé 2,5 milliards de dollars en six mois, donc ce mobilier est à nous!”
En sortant, les militants répètent le message à la presse. “Il y avait des ouvriers du bâtiment en pause à côté, ils nous ont applaudis, se souvient Jon Palais. Après, sur France 3, on voyait une femme au style un peu bourgeois qui disait qu’elle était d’accord. C’est là qu’on a compris que cette action pouvait parler à un grand nombre de personnes.”
Cahuzac, BNP Paribas et 243 chaises…
Rapidement, des “réquisitions citoyennes de chaises” sont organisées dans la France entière. Outre HSBC, les Faucheurs ciblent BNP Paribas, la Société générale et le Crédit agricole, selon eux les banques les plus mouillées dans l’évasion fiscale. Apprenant par la police que chaque personne impliquée de près ou de loin dans l’action risquait également d’être poursuivie pour recel de vol en réunion, les militants ont eu une nouvelle idée: envoyer leurs chaises à des personnalités. Le président d’Attac, celui des Amis de la Terre, le secrétaire général de Solidaires finances publiques, le philosophe Patrick Viveret et même Edgar Morin acceptent de se mettre dans l’illégalité en en accueillant chez eux. “Pendant ce temps, on continuait à faucher des chaises, raconte Jon. Je me souviens d’une banque où la responsable nous a accueillis avec le sourire: ‘Tiens, on se demandait si vous alliez venir chez nous.”’ (…..)