A quelques mois des élections municipales et communautaires, nous détaillons pour vous le bilan écologique du mandat qui s’achève. Pendant six ans, Bizi! a suivi et accompagné 56 communes et l’agglomération pour qu’elles réalisent le Pacte de métamorphose écologique du Pays Basque contenant 7 thématiques : mobilités, maitrise de l’énergie dans les bâtiments, production d’énergie renouvelable, agriculture et alimentation, monnaie locale, déchets et économie circulaire, mise en place du Plan Climat. L’heure est au bilan : où en est-on ?
Cette semaine, nous faisons le point sur la production d’énergies renouvelables : quelles sont les tendances ? quels sont les grands enjeux ? comment se situe le Pays Basque à l’issue de ce mandat 2020-2026 ? que doit-on arrêter et quels sont les exemples à généraliser ?
Le texte suivant est issu du rapport Des petits pas, loin des promesses et de l’urgence – État de la métamorphose écologique au Pays Basque, à retrouver en intégralité sur le site pacte2026.bizimugi.eu. Vous y trouverez également les résultats détaillés commune par commune.
D’après l’Agence Internationale de l’Energie, la voie étroite vers une neutralité carbone, une nécessité pour répondre au défi climatique, ne peut être praticable qu’en cessant dès maintenant de financer tout nouveau projet d’énergie fossile (charbon, pétrole ou gaz naturel) et en installant d’ici à 2030 quatre fois plus de capacités solaires et éoliennes annuelles qu’en 2020. Le GIEC confirme que les énergies renouvelables, solaires et éoliennes, ont le plus fort potentiel de contribution à la réduction des émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2030, présentant également des bénéfices économiques plus élevés que leur coût de mise en place.
Les tendances et objectifs hexagonaux
En 2023, 58 % de la consommation énergétique du territoire hexagonal est encore constituée d’énergies fossiles. La situation de dépendance énergétique française est encore pire si l’on raisonne en empreinte, en quantifiant l’énergie incluse dans nos importations de biens et services, énergie principalement d’origine fossile et très carbonée. Selon une étude du Shift Project, le mode de vie actuel des Français·es nécessite trois fois plus d’énergie que celle produite sur le territoire national.
La part des énergies renouvelables dans la consommation finale brute d’énergie en France s’est élevée à 23 % en 2024. Alors qu’elle avait progressé de 1,8 point en 2023 pour atteindre 22,3 %, la part des énergies renouvelables n’a augmenté que de 0,6 point en 2024. L’objectif de 2020 n’a été atteint qu’en 2024 et la France est en retard sur la moyenne des pays européens. La loi relative à l’énergie et au climat de 2019 fixe pour la France l’objectif de 33 % d’énergie produite à partir de sources renouvelables dans sa consommation finale brute d’énergie en 2030. Cet objectif devrait être revu à la hausse dans la prochaine programmation pluriannuelle de l’énergie en projet (PPE 3), en cohérence avec la révision des objectifs européens. Au niveau européen, l’objectif de 2030 a été révisé à la hausse à au moins 42,5 %, au lieu de 32 % dans la nouvelle directive sur les énergies renouvelables, dite RED III, qui doit être transposée à l’échelle nationale.
En France, la Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) définit les priorités d’actions pour la politique énergétique qui permettront d’atteindre la neutralité carbone en 2050. Autrement dit, elle fixe des objectifs concrets dans les domaines de consommation et de production énergétique (baisse des consommations, développement des énergies
renouvelables, etc). La publication de la PPE 3, qui doit fixer ceux pour les dix années à venir, de 2025 à 2035, et qui, avec deux années de retard, devait intervenir en septembre 2025, n’a finalement toujours pas eu lieu, suite à la chute du gouvernement.
Le projet de PPE 3 prévoit que la consommation énergétique devra être décarbonée à 58 % en 2030, quand elle repose aujourd’hui à 58 % sur des énergies fossiles. Si cet objectif est salutaire, l’abandon d’un objectif spécifique de développement des énergies renouvelables au profit d’un objectif de développement des « énergies décarbonées » est une violation de la directive européenne.

Ce revirement sémantique marque le revirement de la politique énergétique qui est passée de la fermeture programmée de centrales nucléaires dans la PPE 2 à une relance de la production d’énergie nucléaire et la construction de nouvelles centrales dans le projet de PPE 3. Or, le premier nouveau réacteur ne verra pas le jour avant 2038, soit hors de la période couverte par la PPE3. Le potentiel de développement de la production d’énergies renouvelables est, quant à lui, actualisable beaucoup plus rapidement et l’urgence climatique appelle l’inscription dans la loi d’objectifs précis et suffisants pour les filières d’énergie renouvelable.
A l’inverse, dans le scénario négaWatt 2022, l’empreinte environnementale globale de notre système de production et de consommation est fortement réduite : les émissions nettes de gaz à effet de serre deviennent nulles en 2050, le système énergétique est alimenté à 96 % par des sources renouvelables, la consommation de matériaux issus de l’extractivisme est fortement réduite, la biodiversité et la ressource en eau sont davantage préservées. C’est dans cette perspective que s’inscrit territorialement le Pacte de métamorphose écologique du Pays Basque.
Bilan de mandat : Retard pour les énergies renouvelables au Pays Basque
Les engagements du Pacte 2020
Agir pour un territoire 100% énergies renouvelables : “Développer la production des énergies renouvelables sur notre territoire, avec un objectif d’autonomie énergétique 100 % renouvelable à 2045 : photovoltaïque, éolien, méthanisation, réseau de chaleur, hydroélectricité, marémotrice, etc. Accompagner des projets d’initiatives citoyennes et locales pour la production (I-ENER) et la fourniture d’électricité (ENARGIA). Alimenter les bâtiments et équipements communaux et communautaires en électricité, gaz et bois issus de productions locales garanties 100 % renouvelables.”
La production d’énergies renouvelables du territoire stagne : seulement +1,6 % entre 2019 et 2023. En 2023, la production d’énergies renouvelables locales ne couvre que 16,1 % de la consommation territoriale. Le territoire est donc encore dépendant à près de 84 % d’énergies importées. L’objectif du Plan Climat est d’augmenter suffisamment la production d’EnR et baisser la consommation pour couvrir 30 % des besoins territoriaux pour 2030.

La production des dernières années au Pays Basque Nord n’a pas suivi l’accélération observée par ailleurs, à l’échelle hexagonale ou régionale. La baisse du bois bûche, 1ère énergie renouvelable du territoire, n’a pas été suffisamment compensée par l’augmentation du solaire photovoltaïque. Très en-dessous des objectifs du Plan Climat, la production d’énergie photovoltaïque suit pour l’instant la trajectoire tendancielle du Plan Climat, c’est-à-dire celle d’une situation en l’absence de toute nouvelle action volontaire. C’est pourtant la principale énergie renouvelable potentielle à développer identifiée par le Plan Climat pour viser une autonomie énergétique.
La production de photovoltaïque par habitant·e est passée de 0,109 MWh/hab en 2019 à 0,146 MWh/hab en 2023, alors que la Région fixe, pour un territoire de densité intermédiaire comme le nôtre, un objectif de production de photovoltaïque de 1,391 MWh/hab d’ici 2030. Seules cinq communes produisent au moins la moitié de cet objectif en 2023 : Ascarat, Ayherre, Gamarthe, Irouléguy et Pagolle.
Que ce soit pour la production d’énergie renouvelable par habitant·e ou la part que ces énergies couvrent de nos consommations, notre territoire est avant-dernier sur les 9 intercommunalités du département et encore plus loin de la moyenne régionale. L’ambition salutaire de l’agglomération de devenir un territoire à énergie positive en 2050, c’est-à-dire de viser la couverture des besoins énergétiques par les énergies renouvelables locales, paraît mal engagée.
Pour autant, de nombreux projets sont prévus, notamment via le programme ELENA, piloté par l’agglomération – qui prévoit 70 centrales solaires photovoltaïques sur bâtiments publics. Des réseaux de chaleur à Bayonne/Saint-Pierre-d’Irube, Ustaritz, Hasparren, Hendaye, Saint-Étienne-de-Baïgorry ou encore Ostabat-Asme à horizon 2026, s’ajouteront aux trois réseaux de Bayonne, Mauléon et Saint-Jean-Pied-de-Port. Afin d’accompagner les communes sur les volets techniques et financiers, la communauté d’agglomération a signé un contrat de développement des énergies renouvelables thermiques (bois énergie, géothermie, thalassothermie ou solaire) avec l’ADEME.

Les derniers chiffres 2024 d’Enedis concernant la production d’énergies renouvelables territoriales électriques montrent une poursuite de l’augmentation de la production de celle-ci, notamment du photovoltaïque qui commence à dépasser la courbe du scénario tendanciel, et les projets se développent. Mais sans accélération importante de la production actuelle, le territoire risque de décrocher des trajectoires visées. Cette thématique n’atteint pas le stade 1 mais connaît une hausse du score moyen avec 0,9 sur 4, soit un gain de +0,6 depuis le rapport de 2021. Bayonne reste en tête des communes productrices d’énergie renouvelable grâce à son réseau de chaleur bois. Avec 874 MWh, Biarritz est la 1ère commune productrice d’électricité photovoltaïque sur son patrimoine et Baigorri est la 2ème, avec 174 MWh. Saint-Pée-sur-Nivelle est la seule ville à ne produire aucune énergie renouvelable sur son patrimoine et ne prévoit pas de le faire. Parmi les communes répondantes, 14 ne produisent toujours aucune énergie renouvelable, dont 6 bourgs. Gageons que les prochaines équipes sauront montrer l’exemple pour relever le défi d’une métamorphose énergétique du territoire et assurer au Pays Basque la maîtrise de son destin énergétique.

Les mesures du Pacte 2026 pour le climat et les habitant·es du Pays Basque
RÉDUIRE SA DÉPENDANCE ÉNERGÉTIQUE
- Réduire la consommation d’énergie de la collectivité pour diminuer les dépenses.
- Produire une énergie locale, citoyenne et renouvelable pour tendre vers la souveraineté énergétique.
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