Articles du Vendredi : Sélection du 9 septembre 2016

COP21 : quand l’Europe ratifiera-t-elle l’accord ?

Liliane Charrier
http://information.tv5monde.com/info/cop21-pourquoi-l-union-europeenne-ne-ratifie-pas-127093

Ocean Climax à Bordeaux : Nicolas Hulot parle “des intérêts et des inerties à combattre”

Jean-Denis Renard
www.sudouest.fr/2016/09/09/des-interets-et-des-inerties-a-combattre-2493854-2780.php

« On ne sauvera pas le climat si on ne change pas le système »

Noël Mamère
https://reporterre.net/Noel-Mamere-On-ne-sauvera-pas-le-climat-si-on-ne-change-pas-le-systeme

Ez hitz egin klima aldaketaz, justizia klimatikoaz baizik

Jenofa Berhokoirigoin
www.argia.eus/argia-astekaria/2519/ez-hitz-egin-klima-aldaketaz-justizia-klimatikoaz-baizik

COP21 : quand l’Europe ratifiera-t-elle l’accord ?

Liliane Charrier
http://information.tv5monde.com/info/cop21-pourquoi-l-union-europeenne-ne-ratifie-pas-127093

Fin 2015, 180 pays, auxquels s’ajoutent l’Union européenne, adoptent, à Paris,  l’accord mondial sur le climat. Depuis, une à une, les “parties” de la COP21 ratifient. Mais de la part de l’Europe, toujours rien… Explications de Célia Gautier, du Réseau Action Climat.

 

Mais pour qu’il soit mis en oeuvre, encore fallait-il que chaque pays ou entité signataire le ratifie, autrement dit qu’il en définisse les modalités de mise en oeuvre selon son arsenal législatif (vote au Parlement, décret…). Car pour que l’accord entre en vigueur en 2020, au moins 55 pays totalisant 55% des émissions mondiales de gaz à effet de serre devront l’avoir ratifié. Rappelons qu’en 1997, les États-Unis avaient signé, mais jamais ratifié, le protocole de Kyoto, le privant d’une grande partie de sa portée.

Une ratification de poids

Hier encore, seuls 24 pays étaient allés au bout du processus, selon le site des Nations unies – surtout des petits Etats insulaires, les plus exposés, mais qui ne représentent à peine plus de 1 % des émissions. Et puis samedi 3 septembre, à quelques heures de l’ouverture du G20, qui se tenait en Chine les 3 et 4 septembre 2016, les Etats-Unis et la Chine ont ratifié de concert l’accord mondial sur le climat.
Très attendue, cette avancée donne beaucoup de poids à l’accord de Paris, puisque la Chine et les Etats-Unis restent les deux principaux émetteurs mondiaux de gaz à effet de serre de la planète : la première compte pour 24 % du total mondial et les seconds pour 17,9 %. Désormais, les 26 pays ayant déjà ratifié l’accord représentent un peu plus de 39 % des émissions mondiales.

Les grands absents

L’Inde a déjà indiqué qu’elle ne signerait pas cet accord avant des lustres, si tant est qu’elle le signe. En cause : le refus obstiné de la Chine de voir l’Inde rejoindre le Groupe des Producteurs Nucléaires. De plus, le Premier ministre Modi s’est promis de donner à tous les Indiens accès à l’électricité bon marché – un objectif incompatible avec ceux de la COP21.  Le président Philippin Rodrigo Duterte tient le même discours et annonce qu’il n’honorera pas les promesses faites à Paris. Quant à la Russie et au Brésil, ils se tâtent et attendent de voir quels bénéfices juteux ils pourraient en retirer.

Et l’Europe ?

L’Union européenne compte comme l’une des “parties” de la COP, qui devrait ratifier l’accord en même temps que ses 28 États membres. Ceux-ci devront au préalable avoir convenu entre eux de la répartition de l’effort pour atteindre l’objectif commun d’une réduction pour l’Union d’au moins 40 % des émissions de gaz à effet de serre en 2030.

 

Les ratifications chinoise et américaine sonnent comme un appel à l’Europe à accélérer le processus de ratification, mais auprès des institutions européennes, où en est-il ?

Eléments de réponse avec Célia Gautier, économiste de l’environnement et responsable des politiques européennes au sein de Réseau Action Climat France.

L’Union européenne doit-elle attendre que tous ses membres aient ratifié l’accord pour le ratifier à son tour ?

La question de la ratification européenne est politique, pas juridique. Certains Etats
prônent la simple ratification par les institutions européennes prévue à l’automne ; d’autres estiment que les Etats, individuellement, doivent aussi ratifier – c’est cette dernière, la ratification double, qui, pour l’heure, est retenue.

Reste que, aujourd’hui, diplomatiquement, il serait problématique pour l’UE de ne toujours pas être membre de l’accord de Paris. Ce flou révèle l’Union européenne a perdu son rôle moteur en matière climatique, alors que c’est le bloc de pays qui avait, au départ, insufflé une logique de coopération à l’échelle internationale. Aujourd’hui, les autres pays sont plus rapides que l’Europe, à commencer par la Chine.

Combien de pays européens ont ratifié l’accord de Paris ?

Pour l’instant, seule la France, l’Autriche et la Hongrie ont ratifié le traité au niveau du Parlement national. D’autres ne devraient pas tarder. Leur objectif est maintenant d’accélérer le processus pour qu’il aboutisse en même temps que celui qui est en cours au niveau européen, de façon que l’Union puisse déposer sa ratification à l’ONU à l’automne. D’autres encore estiment qu’ils ont besoin de temps.

Lesquels freinent ? Pourquoi ?

Ce sont les Etats qui dépendent des énergies fossiles, comme les pays de l’Est, à commencer par la Pologne, ou encore l’Allemagne, qui reste très liées au charbon. En règle générale, face à l’absence de projet européen, chacun a tendance à revenir à ses préoccupations nationales et à préserver le status quo de son système énergétique. Or s’il est un domaine qui a besoin d’une coopération internationale, c’est bien le climat !

A l’horizon 2030, l’Europe s’était déjà fixée des objectifs en 2014 avec le paquet énergie-climat, dont les modalités d’application sont actuellement en négociation. Or ces objectifs sont faibles et incohérents avec ceux la COP21, car ils sont antérieurs. Si certains pays ont tendance à ralentir le processus de ratification, c’est aussi dans l’espoir de tirer leur épingle du jeu à travers la négociation actuelle. En ce qui concerne le partage de l’effort climatique, par exemple, ils tentent d’ores et déjà d’obtenir la contribution la plus faible possible, alors que des objectifs bien plus ambitieux sont atteignables. De fait, rares sont les pays qui se déclarent prêts à faire plus, dans l’esprit de la COP21…

Quelles sont les conséquences du Brexit ?

Difficile, à l’heure actuelle, de savoir comment le Royaume-Uni va se positionner en matière de politique climatique à l’issue du Brexit. Aujourd’hui, l’article 15 n’est pas encore activé, mais la position des conservateurs, qui sortent renforcés du référendum, ne présage pas d’un grand allant, alors qu’au départ, le Royaume-Uni était moteur sur le climat.

Et la France ?

La France pousse à la ratification par l’Union européenne, mais elle se révèle beaucoup plus silencieuse sur la question de l’ambition européenne – le rythme de développement des énergies renouvelables, qui remplaceraient les énergies fossiles, par exemple. De fait, la mise en œuvre de la loi de transition énergétique, qui correspond à la part de la France à l’effort européen et au sein de la COP21, ne suit pas. Au rythme où les énergies renouvelables se développent en France, les objectifs de 2020 ne seront pas atteints avant 2031. Or l’objectif prévu pour 2030 est déjà de 32 %.

Ocean Climax à Bordeaux : Nicolas Hulot parle “des intérêts et des inerties à combattre”

Jean-Denis Renard
www.sudouest.fr/2016/09/09/des-interets-et-des-inerties-a-combattre-2493854-2780.php

Nicolas Hulot est ce matin à Bordeaux, où il participe au festival Darwin Ocean Climax. Pour l’écologiste le plus populaire du pays, les bonnes intentions sur le climat ne suffisent plus

La parole de Nicolas Hulot est rare cet été. Le 5 juillet, il annonçait qu’il renonçait à se lancer dans la bataille pour l’élection présidentielle. Depuis cette date, il ne s’est plus exprimé sur le sujet et ne désire toujours pas parler politique. Mais l’engagement demeure. Le président de la Fondation Nicolas Hulot pour la nature et l’homme (FNH) sera ce matin à Bordeaux pour l’ouverture du cycle de conférences au festival Darwin Ocean Climax. L’événement se tient jusqu’à dimanche, quai des Queyries.

 Le week-end dernier, la Chine et les États-Unis ont indiqué qu’ils ratifiaient l’accord de Paris sur le climat, adopté à l’issue de la COP 21 (1). Quelle est votre réaction ?

Nicolas Hulot Si on se projette deux ans en arrière, il n’était pas évident que la Chine comme les États-Unis viennent à la COP 21 à Paris pour trouver un accord. Ce sont les deux principaux pays émetteurs de gaz à effet de serre, et c’est encourageant. Mais ratifier ne suffit pas. Il faut se recentrer sur l’accélération de nos efforts face à la crise climatique.

Seuls trois pays européens (dont la France) ont ratifié l’accord. Il faudra attendre que les 28 États membres l’aient fait pour que l’UE entame à son tour la procédure. Qu’en pensez-vous ?

Comment s’étonner que les gens désespèrent de l’Europe ? Je suis proeuropéen mais je réclame de l’ambition. Sur ce sujet essentiel, la Chine et les États-Unis nous montrent l’exemple alors que la COP 21 a eu lieu au cœur de l’Europe. Il est consternant que, sur le climat comme sur la crise des réfugiés, l’Europe se montre incapable de faire front commun. Elle a été pionnière lors de l’adoption de son premier « paquet énergie climat » en décembre 2008, à la suite du Grenelle de l’environnement français. Depuis, elle ne fait qu’alimenter la déception alors que nous avons cruellement besoin d’une transition énergétique à l’échelle du continent. Nous avons les moyens de cette transition.

Espérez-vous une mise en œuvre rapide de l’accord de Paris ?

Restons prudents. Je l’ai d’ailleurs toujours été. À Paris en décembre dernier, je me suis réjoui de cet accord mais je n’ai pas fait montre d’un enthousiasme délirant. Accord ou pas, ratification ou pas, nous parlons d’un texte qui n’est pas contraignant. Il fixe un cap, mais les boussoles manquent. Quels sont les instruments qui vont permettre à la communauté internationale d’enclencher une transition énergétique mondiale ? Il faut à la fois réaliser les engagements pris et les rehausser. Ce sera un point central de la COP 22, en novembre, à Marrakech.

Qu’attendez-vous de concret ?

La priorité des priorités – et c’est la raison de ma venue au festival Darwin Ocean Climax de Bordeaux -, c’est la sortie des énergies fossiles. Elle passe par la fin des subventions et des aides de toute sorte qui leur sont allouées. Chaque pays doit aussi donner un prix au carbone émis dans l’atmosphère, ce prix peut être évolutif mais doit dissuader les investisseurs de financer les énergies fossiles. Il faut enfin que la commande publique, qui représente 20 % à 30 % de l’économie mondiale, rompe avec les énergies fossiles.

Quelle est l’importance des subventions aux énergies fossiles ?

Elles se chiffrent au minimum à 400 milliards d’euros par an dans le monde. En basculant cet énorme volume de subventions vers les énergies renouvelables, on leur donnerait un avantage compétitif par rapport aux fossiles. Cette ambition dépasse le seul cadre énergétique. Au cours de ce dernier siècle, on n’a cessé de se faire la guerre pour les énergies fossiles. Par contraste, le soleil, le vent et la houle sont disponibles presque partout sur les territoires, et gratuitement. C’est une formidable chance. Nous nous sommes fait la guerre pour le pétrole, nous avons l’opportunité de faire la paix autour du photovoltaïque.

 

Ce changement supposerait par exemple de supprimer l’exonération fiscale dont bénéficie le kérosène sur les lignes aériennes intérieures françaises ?

Cette exonération fiscale n’est pas justifiée et se fait au détriment de modes de transport écologiques. On peut le faire progressivement, mais le signal doit être clair : à terme, le transport aérien devra payer sa pollution.

Sur ces sujets, le G20 réuni le week-end dernier en Chine n’a fait aucune annonce significative.

Le monde est dopé aux énergies fossiles depuis cent cinquante ans, elles ont eu leur part dans la croissance économique et dans une forme de progrès. Je tiens compte de cette histoire. Mais il y a aussi des intérêts et des inerties qu’il faut combattre, il y a un lobby surpuissant qui freine le basculement vers un nouveau modèle énergétique et économique. À titre d’exemple, nous ne pouvons plus nous autoriser des incohérences aussi flagrantes que la prospection de nouveaux gisements d’hydrocarbures en eaux profondes. Nous ne pouvons pas non plus adopter des traités de libre-échange aussi climaticides que le Ceta, le traité entre l’Union européenne et le Canada.

La COP 22 se tiendra en novembre, au moment de l’élection présidentielle américaine. Ce second événement n’est-il pas le plus important pour le climat ?

Je n’ai pas vocation à me mêler de politique américaine, mais quand on voit les difficultés qu’a eues Obama à faire avancer la cause du climat dans son pays… Si l’adversaire d’Hillary Clinton venait à être élu, ce serait une très mauvaise nouvelle pour le climat comme pour la sécurité du monde.

 

  • Les États-Unis ont assuré, hier, que l’Inde s’engageait à ratifier rapidement l’accord de Paris. La Chine et les États-Unis cumulent 39 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre, l’Inde en représente 7 %.

« On ne sauvera pas le climat si on ne change pas le système »

Noël Mamère
https://reporterre.net/Noel-Mamere-On-ne-sauvera-pas-le-climat-si-on-ne-change-pas-le-systeme

La bonne nouvelle de la ratification de l’accord de Paris sur le climat par la Chine et les États-Unis ne peut dissiper les doutes sur son application, explique notre chroniqueur. En s’interdisant toute critique des énergies fossiles et du modèle économique dans lequel nous vivons, la COP21 a accouché d’une feuille de route « indigente ».

La ratification de l’accord de Paris sur le climat par la Chine et les États-Unis est une avancée que personne ne peut contester. Une bonne nouvelle est toujours bonne à prendre. Mais, même si cette ratification est entérinée avant la fin de l’année par 55 États, les interrogations sur la réalisation de l’accord subsisteront.

Si la Chine a ratifié l’accord, c’est qu’il ne l’engageait pas à grand-chose, sinon à éviter d’atteindre un pic de ses émissions de CO2 d’ici à 2030. Mais cette ratification revêt une importance politique majeure pour la Chine, puisqu’elle acte son rôle de leader mondial des énergies renouvelables ainsi que la baisse significative de sa production et de sa consommation de charbon, due en grande partie au ralentissement de sa croissance économique des dernières années.

Quant à la ratification par les États-Unis, elle n’est malheureusement qu’une promesse tant que le Congrès n’a pas donné son accord… On en est encore loin.

« Inverser la courbe du réchauffement »

Il est donc permis de douter de la réalisation effective d‘un accord, qui a été un succès diplomatique pour la France, mais qui doit encore trouver sa traduction en « inversant la courbe du réchauffement », comme dirait François Hollande.

Première question à régler, celle du financement. Souvenons-nous que le protocole de Kyoto, adopté en 1997, n’a été mis en application que huit ans plus tard et qu’il n’avait pas été ratifié par les États-Unis ; le volet financement était gravement défaillant. En sera-t-il de même malgré ces deux ratifications de poids ? Le Fonds climat et les 100 milliards de dollars qui devraient l’abonder sont pour le moment des objets virtuels, au point que les pays du Sud peuvent légitimement se poser des questions sur l’engagement des pays du Nord ou de la Chine, interrogations d’autant plus légitimes qu’une véritable taxe sur les transactions financières, visant à financer l’adaptation au changement climatique, n’est toujours pas appliquée. Si le Fonds vert n’est pas abondé en permanence par des financements qui proviendraient de l’application du principe pollueur/payeur et de la lutte contre l’évasion fiscale, l’Accord de Paris sera mort-né.

Deuxième sujet d’inquiétude, les énergies fossiles. Quel calendrier a-t-on prévu pour la réduction de la production et de la consommation de ces énergies ? Aucun ! L’Accord de Paris n’a pas réussi à imposer un moratoire international sur toute nouvelle exploration d’énergies fossiles et a fait l’autruche sur l’exploitation existante. Or, c’est en mettant concrètement fin aux subventions publiques, directes et indirectes et aux prêts bancaires, aux acteurs du secteur des combustibles fossiles, que pourra s’engager une politique efficace de réduction des gaz à effet de serre.

Troisième question, celle de la souveraineté alimentaire. 70 % des cultures pourraient être affectées par le changement climatique. Si rien n’est fait, 600 millions de personnes supplémentaires souffriront de la faim d’ici à 2080. Ajoutons à cela l’accaparement des terres, accéléré par la demande accrue en agrocarburants, qui se substituent à la production de blé ou de maïs et qui participent ainsi de la crise alimentaire. Là encore, l’Accord de Paris est resté muet.

Refus de créer un « tribunal de la justice climatique »

De surcroit, le mécanisme de sanctions de cette forme de criminalité écologique est défaillant, pour ne pas dire inexistant. Le refus de créer un « tribunal de la justice climatique », chargé, en particulier, d’appliquer des sanctions contre les États, entreprises ou individus qui ne respecteraient pas la charte commune, montre que le rapport entre l’OMC et la COP21 est inégal.

Les raisons de ces doutes légitimes sur l’application, même a minima, de la COP21, ont des racines connues. Le chaos climatique est une donnée structurelle, directement liée à la folie du mode de développement capitaliste, marqué par la voracité et la démesure. La globalisation économique et financière de ces deux dernières décennies a accéléré cette course à l’effondrement, dont les effets dépassent en ampleur tout ce qu’on nous avait prédit. Il est donc illusoire de vouloir sauver le climat sans rien toucher au système [1]. Or, les dirigeants des puissances réunies au Bourget voulaient le beurre et l’argent du beurre : ils s’obstinent à rechercher la croissance indéfinie de leur propre économie, qui ne peut se passer des ressources de la manne pétrolière… Tout en nous promettant de réduire leur production de gaz à effet de serre… Ce jeu de dupes continue, parce que les véritables solutions à la crise climatique entrent nécessairement en conflit avec le modèle économique dominant et l’idéologie qui le porte.

Tout le monde n’a pas intérêt à changer de système

Le réchauffement climatique est intimement lié à nos modes de vie, de production et de consommation. Or, ce qui a été traité dans l’Accord de Paris — la réduction des émissions de gaz à effet de serre — n’est que l’arbre qui cache la forêt. La méthode suivie n’était pas la bonne : parce que la COP21 ne s’est intéressée qu’aux conséquences du réchauffement mais pas à ses causes. Aucune critique des énergies fossiles n’ayant été admise, la feuille de route ne pouvait être qu’indigente. Elle a dû se contenter de reposer sur la communication du « plan climat » de chaque pays, à travers les « intentions de contributions nationalement déterminées ». Les négociations s’étant faites sur cette base, cela a permis à chaque État de laisser croire qu’il ferait quelque chose, sans s’engager sur rien en fin de compte.

En France aussi, l’Accord n’est pour le moment qu’un affichage politique. Après l’enterrement de la taxe poids lourd, la fermeture d’une partie des lignes de trains intercités et la libéralisation Macron prônant le tout-autocar, le gouvernement a renforcé la fracture territoriale entre des zones rurales, des territoires abandonnés et des métropoles toutes puissantes, sans se préoccuper de la lutte contre le dérèglement climatique. Face à cette réalité, la loi sur la transition énergétique n’est qu’un catalogue de principes hors-sol et sans effet. Quand on entend Manuel Valls nous dire que l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes contribue à la lutte contre le dérèglement climatique, on voit bien que l’écologie est le dernier souci d’un pouvoir uniquement obsédé par sa survie.

Cette vision court-termiste est à l’image du reste : ils n’ont rien appris. Nous le savons, tout le monde n’a pas intérêt à changer de système. Pour « sauver le climat », il ne peut y avoir d’accommodement raisonnable avec des modes de développement productivistes et insoutenables.

Ez hitz egin klima aldaketaz, justizia klimatikoaz baizik

Jenofa Berhokoirigoin
www.argia.eus/argia-astekaria/2519/ez-hitz-egin-klima-aldaketaz-justizia-klimatikoaz-baizik

Klima aldaketaren desafioa irabazteko beharrezkoa eta premiazkoa den paradigma aldaketaz aritu ziren Munduko Foro Sozialean antolatu Sistema aldatu, ez klima! hitzaldi arrakastatsuan. Borroka hori irabazteko segurtasuna inork adierazi ez bazuen ere, irabaztekotan herri mobilizazioari esker irabaziko dela adierazi zuten hizlari guztiek.

 

Merkataritza askeko akordioak (TTIP, CETA…) klima aldaketaren aurkako borrokarako oztopo handia izan daitezkeela nabarmendu zuten, besteak beste, Montrealeko hitzaldiaren emaileek (Anne-Céline Guyon, Maite Llanos, Roger Rashi (aurkezlea), Naomi Klein, Clayton Thomas-Muller eta Tadzio Müller).

Demokrazia energetikoa izango da klima aldaketaren desafioa irabazteko baldintza. Paradigma aldaketa hori gabe ez da lortuko. Premiazkoa den aldaketa hori agenda politikoan ez izanki, haren gauzapenaz gogoetatzen aritu ziren hainbat militante ekologista ezagun, Munduko Foro Sozialaren barruan antolatu Sistema aldatu, ez klima! hitzaldian, ehunka entzuleren aitzinean.

Demokrazia energetikoa xeheki azaldu zuen Maite Llanos demokrazia energetikoaren alde dabilen Trade Unions for Energy Democracy sindikatuko kide argentinarrak. Hasteko, krisi klimatikoa krisi sistemiko bat dela ohartarazirik, argi utzi zuen eredua iraultzen ez deino, ez dela benetako aterabiderik marraztuko. “Klima aldaketaz hitz egitea peto bat da, bide orri ‘onargarri’ bat garatuko dutelako enpresa kapitalistek. Krisi sistemikoaz hitz egin behar dugu, sistema aldatzeko eta trantsizio justua herritarrentzat eta herritarrek bideraturik izateko”.

Energia politika marrazteko, erabakitzeko eta kudeatzeko eskumena herriek eta herritarrek ukanen dutenean hitz egingo da benetako demokrazia energetikoaz, Llanosen ustez. Hain zuzen, enpresa handiek klima aldaketaren aurka ekin nahi badute ere, ekoizpen eredua aldatzeko nahikeriarik ez dutelako. Iaz Parisen eginiko klima aldaketari buruzko COP21 gailurrean adosturiko testua kritikatu zuen: “Azkenean kutsatzeko eskubidea ematen duen AEB eta Txinaren arteko akordio bat besterik ez da”.

Aldaketa itxaroteko denborarik ez dela errepikatu zuten behin baino gehiagotan. Bihar berantegi izanen delako. “Urrunegi joan gara, aitzina urrats bakar batzuk eginez gero leize-zulora eroriko gara. Amildegiaren gainetik jausi egiteko garaia da”, abisua luzatu zuen Naomi Klein kazetari eta militante altermundialistak.

Merkataritza askea jomugan

Giltzetariko bat izan zen merkataritza askeko akordioen (CETA, TTIP, TPP…) aurkako borroka. Hain zuzen, testuingurua ikusirik, ez delako sinple Kleinek aipatu jauzia egitea: klima aldaketaren aurkako mobilizazioa jendetsua izanik ere, parean eskutada bat multinazional boteredun direlako. Multinazionalek geroz eta botere gehiago ukaiteak aldaketa lortzea zailtzen duela deitoratu zuten. Besteak beste, justizia klimatikoaren aldeko militante Tadzio Müller alemaniarrak: “Boteredunak gara, gure boterea kalean dugu, bai. Baina multinazionalek botere guztiak jasoz gero, gurea desagertuko da. Akordio horiek debekatu behar ditugu”. Hitzarmen horiek oztopatzeko behar gorria azpimarratu zuen, boterea finantzara bideratuz gero herri mobilizazioek ezingo dutelako gehiago fruiturik jaso.

 

Maite LLanos: “Parisko COP21 gailurrean adosturiko testua, azkenean, kutsatzeko eskubidea ematen duen AEB eta Txinaren arteko akordio bat besterik ez da”

 

Akordio horiei lotuak izan ohi diren inbertsiogile eta estatuen arteko desadostasunen konponbiderako mekanismoei esker, multinazionalek botere publikoak auziperatzen ahalko dituzte, etekinak egiteko bidean oztopo dituztela argudiatuta. Adibideak ez dira eskas, eta munduko lau xokotan dabiltza milioiak exijitzen erakunde publikoei.  Hots, herri mugimenduen bidez erabaki politikoak lortzen baldin badira ere, azkenean, hitzarmen horiei esker, multinazionalek ukango lukete azken hitza.

Herri mobilizazioak ehundu

“Mobilizatzen jarraitu behar dugu, mugimendu sozialak direlako kausitzen aldaketa handi guztien iturrian”, zioen Müllerek. Alemaniak energia nuklearra alde batera uzteko hautuaren kasua eman zuen adibidetzat, oroitaraziz azken 35 urteetan eginiko borroka antinuklearraren emaitza zela. Desobedientzia zibilaren pausoa emateko deia luzatu zuen. Horrez gain, mugimendu eta eragile guztiak ehuntzeko deia egin zuten hizlari guztiek, argudioek baino gehiago herri masak duelako eragingo. Enpresa handiak baino eraginkorrago izateko, sare hori nazioartekoa izan behar dela gaineratu zuen Kleinek. Borrokak ikuspegi intersekzional batekin eraman behar direla ere esan zuen, immigrazioen egoera jasanezina, austeritate politikak zein arrazakeria azkartzea, azkenean arazo sozioekonomiko eta ekologiko guztiak elkarlotuak direlako. Guztia, demokrazia energetiko ezaren froga.

Kanada mendebaldetik ekialdera eta Quebecen gaindi pasako litzatekeen Énergie Est deitu 4.600 kilometroko oliobidearen aurkako protestetan dabilen Anne-Céline Guyon ekintzaileak ere masaren indarra azpimarratu zuen, bi desafio finkatuz: taldeen arteko aliantzekin jarraitzea eta borroka ezberdinak bateratzea. Gaur egun, Quebeceko biztanleriaren %60 eta 300 herriz gora dira Énergie Est proiektuaren kontra. “Arazoaz kontzientziarik ez zuten anitz ditugu gure borrokari lotu, gure mezuei esker ohartu dira geroa zalantzan jartzen duela Kanadaren politika estraktibistak”.

Petrolio erreserbak idortuz doazen bitartean, ustiatu gabeko harea bituminosoei begira dira industria zein Kanadako gobernua. Munduko petrolio erreserba handienen hirugarrena du gorderik Kanadak haien oihanen azpian. 2014an, egunero 3,7 milioi upel atera zituzten; 5,3 milioira heltzea dute helburu 2030erako. Nagusiki, petrolio guneak Alberta probintzian —hots, Kanada erdigunean— dira kokaturik, eta handik petrolio portuetara bideratzeko, oliobideak eraikitzen dabiltza. Énergie Est aitzina doan arren, oliobidearen eraikuntza geldiaraziko dutelako esperantza ez du galdurik Guyonek. Europako eragileekin ere elkarlana eraman beharra nabarmendu zuen. “Harea bituminosoetarik ateratako petrolio zikinaren bezeroak Europan dira, eragin desmasiaz kontzientzia harrarazi behar diegu”.

Klima aldaketaren aurkako mobilizazio jendetsuak arrakasta izan dezan parean diren multinazionalek  botere guztia hartzea eragotzi beharra nabarmendu zuten hizlari guztiek

 

Clayton Thomas-Muller cree populu autoktonoko kideak berriz, autoktonoen eta zurien arteko elkarlana garatzeko beharra azaldu zuen. Énergie Est oliobideari doakionez, 150 bat komunitate autoktono lirateke hunkiak.

 

Autoktonoen filosofiaz elikatu

Klima aldaketa eta kolonizazioa eskuz esku dabiltzala ohartarazi zuen Thomas-Mullerek: “Lehen apaizak etorri zitzaizkigun gisara, gaur egun multinazionalen ordezkariak zaizkigu heldu, ekonomiaz dugun ikuspegia aldatu behar dugula erranez”. Autoktonoek azkar pairatu behar izaten dituzte politika estraktibista horren ondorioak, hots, lur desjabetze, ur eta aire kutsatze edota immigrazio behartuak.

Presio horien parean, desobedientzia zibila aurkeztu zuen aterabidetzat. Autoktonoa izateagatik jasan diskriminazioa, arrazakeria eta bazterketa deskribatuz hasi zuen hitzaldia. “Autoktonoen bazterketan oinarritua da ekonomia, gure lurretarik kenarazi nahi gaituzte, konpainia handien interesetan”. Indigenen filosofiari interesatzeko aholkua luzatu zien entzuleei, klima aldaketak ondorioztatu minez sendatzeko erantzun anitz dituztelako. Hala, Kanada mendebaldeko Manitoba probintzian areagotuz dabiltzan tornadoez babesteko bertako autoktono zaharrak hainbat abilezia azaltzen hasiak direla zehaztu zuen.

Etorkizuneko borroka: ura

Ondoko borroka zein izanen den abisatuz bukatu zuen hitzaldia Thomas-Mullerrek: “Petrolio konpainiak kanpo ezartzea lortuko dugunean, uraren salerosketari lotuko dira beste batzuk. Ura sakratua da eta urarena izango da ondoko belaunaldien desafio potoloa”.