Articles du Vendredi : Sélection du 4 novembre 2016

« Changer le système, pas le climat » Conférence internationale Tous à Safi les 4 et 5 novembre 2016

ATTAC/CADTM Maroc
www.cadtm.org/Changer-le-systeme-pas-le-climat

COP22 : Aide mémoire pour la fin du quinquennat


http://rac-f.org/COP22-Aide-memoire-pour-la-fin-du-quinquennat

Nouvelle saison de dénonciation des banques pour les « faucheurs de chaises »

Rémi Barroux
www.lemonde.fr/planete/ article/2016/11/02/nouvelle- saison-de-denonciation-des- banques-pour-les-faucheurs-de- chaises_5024395_3244.html

Climat ou TAFTA et CETA, il faut choisir !


https://alternatiba.eu/2016/10/climat-ou-tafta-et-ceta-il-faut-choisir/

« Notre course à la croissance n’a pas de sens : derrière quoi court-on ? »

Entretien avec Isabelle Cassiers professeure d’économie à l’université catholique de Louvain (Belgique) et chercheuse qualifiée du Fonds de la recherche scientifique (FNRS, belge).
https://reporterre.net/Notre-course-a-la-croissance-n-a-pas-de-sens-derriere-quoi-court-o

« Changer le système, pas le climat » Conférence internationale Tous à Safi les 4 et 5 novembre 2016

ATTAC/CADTM Maroc
www.cadtm.org/Changer-le-systeme-pas-le-climat

Voilà 15 ans, le Maroc accueillait la COP 7. Cette année la Conférence des parties sur le changement climatique prépare sa 22e édition, à nouveau au Maroc. Que s’est-il passé pendant ces 15 ans ? Pas grand chose.

La COP de Kyoto (1997) a misé sur le marché pour contrôler les émissions de carbone. Le protocole de Kyoto, entré en vigueur seulement en 2005 a confirmé que les mécanismes du marché n’ont pas permis de réduire ces émissions qui ont continué d’augmenter de 2% par an (5e rapport du GIEC).

La COP 21 tenue à Paris en 2015 est parvenue à un accord : contenir la hausse des températures en deçà de 2° et s’efforcer de la limiter à 1,5. Grand pas en avant ? Pas vraiment car elle ne s’est pas donnée les moyens d’y parvenir. Ce n’est guère qu’une déclaration d’intention.

22 ans de réunions et de négociations pour parvenir à ce maigre résultat ! Que va-t-il se passer à Marrakech ? Vraisemblablement pas grand chose. Les États continuent de parier sur les engagements volontaires des pays, sans que la mise en place de mécanismes de contrôle et de sanction ne soit envisagée. Les entreprises continuent à faire la loi dans les couloirs des conférences et la confiance aveugle dans les solutions technologiques prévaut sur toute autre considération. Les COP deviennent des conférences où entreprises et gouvernements viennent parler affaires. Le climat lui continue à se réchauffer. C’est ainsi que la MEDCOP 22 tenue à Tanger du 17 au 19 juillet 2016 en amont de la COP 22 s’est terminée par la signature de contrats entre l’État marocain et entreprises multinationales.

Pour ce qui est du Maroc, les différentes politiques sectorielles, plan vert pour l’agriculture, plan Halieutis pour la pêche, plan Azur pour le tourisme, plan Émergence et slogan des Écosystèmes performants au niveau industriel, plan énergétique, ainsi que la signature des accords de libre échange avec les États-Unis et l’Union Européenne, vont toutes dans le sens de la sur-exploitation des ressources naturelles, d’une intensification des échanges, de l’extension des zones franches et des projets productivistes tournés vers l’exportation, loin de toute perspective de préservation de la nature et du climat. Le Maroc à la veille de la COP met en avant ses méga-projets pharaoniques dans le domaine du solaire, mais continue à développer les énergies fossiles, le charbon notamment.

Le changement climatique est une réalité qui nous affecte, nous habitant(e)s du Maroc, du Maghreb, d’Afrique et de toute la planète, dans notre vie de tous les jours. Les épisodes extrêmes, grands froids et grandes chaleurs, sécheresses et inondations se multiplient, les glaciers fondent, le niveau des océans monte, les nappes phréatiques se polluent et se vident. Attendrons-nous silencieux la catastrophe climatique, sociale, écologique qui s’annonce ? Qu’à l’exode des populations fuyant les bombardements, les guerres et les conflits (Afghanistan, Irak, Yémen, Syrie, PALESTINE, Libye,… s’ajoute des cohortes de réfugiés climatiques fuyant la montée des eaux ou au contraire la sécheresse et la désertification, la faim ?

Non, il est urgent de prendre la parole, d’analyser les causes réelles du changement climatique et d’en nommer les responsables. De réfléchir ensemble aux alternatives nécessaires. Non pas les fausses solutions de l’économie verte qui cherche comment transformer la crise climatique en nouvelle source de profit. Les vraies solutions ne peuvent passer que par un modèle de société alternatif, fonctionnant selon de nouveaux modes de produire, de consommer, d’habiter, de manger, de vivre avec la nature. Nous devons exiger que soient prises de toute urgence certaines mesures immédiates, laisser les sources d’énergie fossile dans le sol, relocaliser productions et consommation, défense des biens communs, etc.

Les solutions existent !

Nous vous invitons à participer aux deux journées de rencontres et mobilisation organisées par ATTAC CADTM Maroc à Safi les 4 et 5 novembre 2016 sur le thème « Changer le système pas le climat ».

COP22 : Aide mémoire pour la fin du quinquennat


http://rac-f.org/COP22-Aide-memoire-pour-la-fin-du-quinquennat

Le 7 novembre, s’ouvre pour deux semaine la 22e conférence des Nations unies sur le climat, qui réunira 195 États pendant deux semaines à Marrakech. Notre dossier.

 

L’excellente nouvelle de l’entrée en vigueur de l’accord de Paris doit se traduire par un sursaut au niveau mondial, pour concrétiser les engagements climatiques. La transition énergétique a commencé, comme l’indique le dépassement par les énergies renouvelables des capacités de production électrique à partir de charbon en 2015 (AIE). Mais la crise climatique continue de s’accélérer, avec tous les mois de nouvelles catastrophes et de nouveaux records de température qui confirment les tendances du dérèglement en cours. En 2015 nous avons franchi le cap symbolique de 400 parties par millions (PPM) en teneur moyenne de CO2 dans l’atmosphère, d’après l’Organisation météorologique mondiale (OMM).

Pour pouvoir respecter l’accord de la COP21 – de limiter le réchauffement bien en-dessous de 2°C et si possible 1,5°C – tous les pays doivent, sans plus attendre, mettre en œuvre leurs plans climatiques nationaux et prévoir de les rendre plus ambitieux dès 2018, en phase avec la science et l’équité. En l’état, ces engagements nous mènent toujours vers un réchauffement supérieur à 3°C par rapport à la période préindustrielle. Cela se traduirait par des conséquences dévastatrices sur nos économies et nos sociétés, en particulier sur notre capacité à lutter contre les inégalités et la faim dans le monde. Il faudra donc que les États visent rapidement plus haut.

Dès aujourd’hui, les États, en collaboration avec les collectivités et les acteurs non étatiques, doivent œuvrer pour le déploiement plus rapide des solutions aux changements climatiques, et pour la solidarité vis-à-vis des plus démunis. Cela implique aussi de ne pas mettre de nouveaux bâtons dans les roues à la transition mais au contraire de co-construire un modèle fondé sur 100 % d’énergies renouvelables, pour toutes et tous.

Lors de la COP22, qui aura lieu du 7 au 18 novembre à Marrakech, les pays doivent montrer qu’ils vont accélérer la transition énergétique mondiale. C’est le moment de transformer le texte et la vision de la COP21 en réalité. Ainsi, la COP22 doit acter des décisions qui permettront de renforcer l’action immédiate des les pays face au changement climatique. À la conférence de Marrakech, les gouvernements devront aussi répondre au besoin criant de solidarité entre les pays du Nord et les pays du Sud. La crise climatique frappe de plein fouet les populations les plus démunies de la planète, qui sont pourtant les moins responsables des émissions de gaz à effet de serre. Depuis 2009, des financements sont promis aux pays du Sud. La feuille de route publiée par les pays riches en octobre 2016 montre qu’ils devraient se rapprocher en 2020 de l’objectif de 100 milliards de dollars par an (promis en 2009), notamment via environ 30 milliards de financements privés générés par leurs financements. Mais les actions concrètes pour que les populations puissent faire face aux impacts croissants du dérèglement climatique sont toujours sous-financées : le Fonds Vert, par exemple, ne parvient pas encore à remplir pleinement cet objectif.

À Marrakech, les pays doivent aussi finir les dossiers inachevés à la COP21 et s’assurer que le cadre international créé par l’accord de Paris se développe et continue de renforcer la coopération entre États. Il faudra notamment préciser les règles de mise en œuvre de l’accord, qui n’est pour l’instant qu’un cadre général. En particulier, les pays devront préciser les règles permettant d’assurer la transparence sur ce qu’ils font pour respecter leurs engagements. Ils devront aussi préciser les modalités de la “clause de revoyure” tous les cinq ans, qui s’organise autour d’un bilan mondial et doit permettre de relever les engagements nationaux dès 2018.

Si la transition énergétique est amorcée en France, il reste encore beaucoup de travail pour répondre pleinement à la crise climatique.

Le gouvernement français peut encore laisser un bilan plus honorable sur le climat. Nous lui demandons d’agir sur 12 points précis et mesurables afin qu’il s’investisse concrètement dans la mise sur les rails de l’accord de Paris aux niveaux national, européen et international.

Le dossier est en téléchargement ici Dossier cop22 de RAC-F

Nouvelle saison de dénonciation des banques pour les « faucheurs de chaises »

Rémi Barroux
www.lemonde.fr/planete/ article/2016/11/02/nouvelle- saison-de-denonciation-des- banques-pour-les-faucheurs-de- chaises_5024395_3244.html

C’est en chantant « Où t’es l’argent, où t’es ? » sur l’air du succès de Stromae Papaoutai qu’une cinquantaine de militants d’ONG écologistes et altermondialistes, fanfare comprise, ont envahi, mercredi 2 novembre à 9 h 10, une agence de la banque BNP-Paribas, place de la Bourse, au cœur de Paris.

Derrière la banque française ciblée – « c’est la BNP qui l’a caché », poursuivait la chanson revisitée –, c’est plus généralement l’évasion fiscale qui était visée, soit « 60 à 80 milliards d’euros qui manquent au budget de l’Etat et qui permettraient de financer largement la rénovation thermique des bâtiments et donc de lutter contre la précarité énergétique, mais aussi de construire des écoles, des crèches », a insisté pour les Amis de la Terre Charles-Adrien Louis.

Les ONG entendent faire du procès que la BNP a intenté contre un « faucheur de chaises », Jon Palais, une tribune contre les pratiques bancaires illégales. Durant les mois précédant la conférence sur le climat de Paris, la COP21, des militants avaient volé 196 chaises en une quarantaine d’actions dans des succursales bancaires afin d’organiser un sommet citoyen qui s’est tenu le 6 décembre 2015 à Montreuil (Seine-Saint-Denis).

« C’est la première fois qu’un faucheur de chaises sera jugé, le 9 janvier 2017 à Dax [Landes], mais c’est injuste, c’est l’évasion fiscale en bande organisée qu’il faut sanctionner », a déclaré Jessica Zeganadin, d’Action non violente (ANV)-COP21. D’ici là, les organisations à l’initiative de l’opération bancaire, Attac, Bizi, Les Amis de la terre, ANV-COP21 et le syndicat Solidaires-Finances publiques, appellent à la mobilisation et à faire le siège des banques, en particulier lors des journées des 9 et 10 décembre, un mois avant l’événement à Dax.

« La transition écologique, urgence vitale »

Cette saison 2 des faucheurs de chaise devrait convoquer à peu près les mêmes acteurs que durant l’année 2015 : les philosophes Edgar Morin et Patrick Viveret, le chanteur HK (& les Saltimbanks), le secrétaire général de la Confédération paysanne, Laurent Pinatel, etc. A l’issue de la première vague de ces emprunts de mobilier, les chaises avaient été rendues à la justice lors d’une opération organisée le 8 février 2016, sur le pont au Change, à proximité du palais de justice de Paris, où s’ouvrait alors le procès de l’ancien ministre du budget, Jérôme Cahuzac.

Pour les militants du climat, les questions économiques et sociales sont étroitement liées aux problématiques environnementales. C’était le sens des campagnes lancées en particulier par Alternatiba et ANV-COP21 lors de la préparation de la COP21. « La transition sociale et écologique est aujourd’hui une urgence vitale », insistent les associations. Leur lutte s’accentue contre les banques, dont elles dénoncent les pseudo-engagements à favoriser la transition énergétique, alors qu’elles continuent de financer des projets basés sur les énergies fossiles, tout particulièrement le charbon.

Dans la petite salle d’accueil de la succursale parisienne, mercredi matin, où les clients pouvaient quand même atteindre les comptoirs, Thomas Coutrot, d’Attac, a expliqué qu’il existait les moyens de lutter contre la fraude : « En renforçant les effectifs et les moyens de la police fiscale et des administrations qui traquent les délinquants financiers, en faisant sauter le monopole de Bercy en matière d’ouverture de poursuites pénales ou encore en interdisant le pantouflage [le fait notamment pour de hauts fonctionnaires de rejoindre les banques] ».

Rapport sur les banques et le charbon

Avant d’entonner l’air de Stromae, la cinquantaine de militants s’est essayée à l’art choral en détournant la chanson de Georges Brassens, Les Copains d’abord, devenue « Ces maudits requins » : « C’est la banque d’un monde qui triche, l’argent des riches n’reste pas en friche, aux paradis du monde entier… »

Les Amis de la Terre, associés à d’autres associations spécialisées dans le secteur bancaire (Banktrack, FairfinanceFrance…), devraient publier jeudi 3 novembre un rapport sur les banques qui, « malgré leurs promesses, vont toujours au charbon ». Leur principale cible ? A nouveau la BNP-Paribas, qui compte « toujours des clients qui développent massivement de nouveaux projets charbon ».

Mercredi, à 9 h 43, la première voiture de police est arrivée sur place, en face du palais Brongniart qui a accueilli jusqu’en 1998 la bourse. Les militants étaient partis depuis une dizaine de minutes, emportant leurs chaises pliantes sous le bras… pour de nouvelles actions dans les prochaines semaines.

Plus d’articles sur le même thème :

https://reporterre.net/60- Faucheurs-de-chaises-font-le- siege-d-une-agence-de-la-BNP

 

http://www.politis.fr/ articles/2016/11/les- faucheurs-de-chaises-font- leur-retour-dans-les-banques- 35715/

 

http://www.humanite.fr/les- chaises-assiegent-bnp-paribas- 619643

 

http://www.sudouest.fr/2016/ 11/02/a-paris-l-association- bizi-participe-a-un-siege- symbolique-avant-le-proces-de- l-evasion-fiscale-2555437- 4018.php

 

http://www.letelegramme.fr/ france/dax-eva-joly-defendra- un-altermondialiste-accuse-de- vol-de-chaises-02-11-2016- 11278075.php

Climat ou TAFTA et CETA, il faut choisir !


https://alternatiba.eu/2016/10/climat-ou-tafta-et-ceta-il-faut-choisir/

L’Union européenne (UE) et les États-Unis négocient depuis juillet 2013 un traité de libre-échange connu sous les sigles de TAFTA ou TTIP. Comme tous les traités de libre-échange, il a vocation à supprimer les protections douanières face aux importations de marchandises. Sa spécificité est d’ajouter à l’abaissement des droits de douanes, la sécurisation des investissements des multinationales via des tribunaux d’arbitrage privés, et à avancer vers une uniformisation des normes par le bas.

L’UE et le Canada ont négocié en parallèle depuis 2009 un autre accord de libre-échange, l’Accord économique et commercial global (AECG, en anglais «CETA») qui poursuit très largement la même logique.

Ces accords, négociés en toute opacité dans un contexte de forte représentativité des intérêts de quelques multinationales, avantageraient la commercialisation de produits ou services importés et peu soucieux des conditions sanitaires, sociales ou environnementales dont ils sont issus, au détriment de produits locaux plus vertueux. La seule valeur considérée resterait un coût économiquement bas, dissimulant les coups répercutés sur les hommes et la Terre.

Revalorisation de services publics de qualité et de normes de protection agricoles favorisant l’agriculture paysanne, transition énergétique, interdiction des gaz de schiste et autre actions nécessaires à la limitation du dérèglement climatique, relocalisation de l’économie : ce sont toutes ces dynamiques cruciales pour l’équilibre de nos sociétés qui sont menacées par les traités TAFTA et CETA !

Production toujours plus délocalisée, augmentation du transport de marchandises, exploitation de sources d’énergies fossiles fortement émettrice de CO2, ces accords commerciaux sont en complète incompatibilité avec les objectifs fixés par l’accord de Paris pendant la COP21 : ils menacent d’augmenter de façon significative les émissions de gaz à effet de serre mondiales, alors qu’il est désormais admis qu’il faut les réduire drastiquement ! Ces traités représentent bien plusieurs risques pour le climat. Face à cette menace, Alternatiba a décidé en mai 2016 de s’engager dans la bataille déterminante pour stopper TAFTA et CETA, pour le climat et les alternatives, en la considérant comme un de ses axes stratégiques prioritaires. Alternatiba a rejoint le collectif Stop TAFTA, aux côtés de près de 80 membres – organisations de solidarité internationale, de protection des consommateurs, de défense de l’environnement, syndicats, groupes de citoyens…

Alors que ces deux traités avançaient malgré la résistance de la société civile, les mobilisations de l’année 2016 ont mis de nombreux grains de sable dans les rouages des négociations !

Les négociations du TAFTA, après des critiques formulées jusqu’au niveau des gouvernements, restent gelées en attendant les différentes élections et la constitution de nouvelles majoritées politiques aux Etats-Unis, en France et en Allemagne.

Quant au CETA, il est présenté comme un “bon accord” parce que les intérêts des multinationales européennes y sont protégées. L’opposition de la Wallonie et les mobilisations citoyennes ont permis de repousser la signature initialement prévue le 27 octobre 2016, et de faire émerger les problèmes posés par ces accords commerciaux, tant par leur contenu que par le processus de négociations, dans le débat public.

Le dimanche 30 octobre 2016, le traité CETA a finalement été signé par les Etats membres après plusieurs épisodes relevant d’un déni de démocratie évident et d’une volonté d’étouffer le débat. C’est maintenant au Parlement européen (puis aux Parlements nationaux) que la bataille va se jouer… et la société civile a de vraies chances de pouvoir faire pencher la balance, maintenant que le CETA est sorti de l’ombre et que ses dangers ont été mis en lumière !

Et en même temps, nous sommes chaque jour plus nombreux à prendre connaissance des dangers de ces traités pour le climat et la justice sociale, et à prendre conscience de l’importance de nous mobiliser maintenant pour empêcher leur signature et mise en place.

C’est grâce à une mobilisation citoyenne sans précédent à travers l’Europe, le Canada et les Etats-Unis que le TAFTA et le CETA ont été questionnés et freinés! Plus de 3 millions de citoyennes européennes, 2000 collectivités locales, de nombreux représentants de tous bords de la société civile convergent pour s’opposer à ces traités. Aujourd’hui et après 3 ans de mobilisation montante, l’opportunité d’avancer vers une toute autre vision économique en remettant le local, l’humain et l’environnement au centre du jeu, se renforce.

Alternatiba s’est mobilisé et continuera à se mobiliser! De nombreux collectifs Alternatiba ont participé à l’opération pour que des lieux et territoires se déclarent “Hors TAFTA” et à la mobilisation nationale Stop TAFTA du 15 octobre 2016, menant ou participant à des actions et des manifestations partout en France ( quelques photos)

Avec nos alliés ANV COP21, Attac, les Amis de la Terre et 350.org, nous avons également simulé la démolition du ministère de l’environnement le 14 octobre dernier, pour montrer dans le cadre d’une action non-violente que celui-ci risquerait de devenir inutile du fait des dispositions du CETA !

Alternatiba avec plusieurs organisations vous invite à venir à Bruxelles pour les TTIP Game Over, les 3, 4 et 5 novembre 2016 pour porter la bataille au niveau européen! 3 jours d’actions variées de désobéissance civile non-violente pour dénoncer les lobbies, pour lesquelles un groupe d’Alternatiba et d’ANV COP21 se prépare à l’action non-violente.

« Notre course à la croissance n’a pas de sens : derrière quoi court-on ? »

Entretien avec Isabelle Cassiers professeure d’économie à l’université catholique de Louvain (Belgique) et chercheuse qualifiée du Fonds de la recherche scientifique (FNRS, belge).
https://reporterre.net/Notre-course-a-la-croissance-n-a-pas-de-sens-derriere-quoi-court-o

L’Occident assimile prospérité et croissance économique, cette dernière étant donc recherchée comme un remède à tous les maux. Pourtant, elle accentue la défaillance de notre modèle de développement (désastre écologique, inégalité de la répartition de la richesse, question du sens). Il serait temps de redéfinir ce que nous entendons par prospérité.

 

Reporterre — Comment, en tant qu’économiste, en êtes-vous venue à étudier la thématique du bonheur ?
Isabelle Cassiers — C’est au terme d’un long parcours de recherche en histoire économique et sociale, parcours qui m’a dirigée vers le questionnement de notre conception de la prospérité. En Occident, aujourd’hui, la prospérité est fréquemment assimilée à la croissance économique, qui est supposée nous apporter une multitude de bienfaits : emploi, pouvoir d’achat, sécurité et qualité de vie, progrès, paix sociale… Toutefois, la crise multiforme que nous traversons — crise économique et financière, mais aussi crise écologique et sans doute crise de civilisation — pointe du doigt les sévères défaillances de notre modèle de développement et nous invite à en (ré)explorer d’autres. Ailleurs, ou en d’autres temps, la prospérité a reçu ou reçoit encore une définition dans le registre de l’être (état de plénitude, de bonheur) plutôt que dans celui de l’avoir (accumulation de richesses, succès dans les affaires). Toutes les sociétés ont recherché la prospérité, mais elles n’ont pas toutes recherché la croissance économique. À titre d’exemple, le Bhoutan propose le bonheur comme finalité du développement. N’est-il pas temps, chez nous, de redéfinir la prospérité, et d’encourager le débat public à ce propos ? Cette question est au cœur de l’ouvrage collectif que j’ai coordonné sur ce thème [1].

Pourquoi cette question de la redéfinition la prospérité s’impose-t-elle aujourd’hui au monde occidental avec une telle acuité ?

Pour au moins trois familles de raisons — je laisse au lecteur le soin de compléter la liste ! Tout d’abord pour des motifs écologiques : poursuivre une croissance sans limite, comme nous le faisons, conduit au désastre environnemental. Outre le changement climatique et la perte de biodiversité qui sont les plus médiatisés, les études scientifiques relèvent une dizaine d’alertes graves (acidification des océans, contamination des eaux douces, etc.). Ensuite, pour des raisons de répartition : la croissance des quarante dernières années a été très inégalitaire, enrichissant surtout les plus riches ; les ressources étant limitées, les pays émergents ne pourront jamais prétendre faire accéder leur population au niveau de vie matérielle dont jouissent les Occidentaux ; notre modèle de croissance contient donc une bombe géopolitique à retardement. Enfin, parce qu’il semble de plus en plus évident que notre course à la croissance n’a pas de sens : derrière quoi court-on ? De nombreuses études suggèrent que les vraies valeurs sont ailleurs ; de nombreuses maladies (burn-out, dépression, insomnies chroniques) révèlent le mal-être qui accompagne la hausse du niveau de vie moyen des populations occidentales.
 

 

 

Dans un article intitulé « La croissance ne fait pas le bonheur : les économistes le savent-ils » [2], vous soulignez la divergence entre l’évolution du PIB par habitant et celle de l’évaluation subjective de la « satisfaction de vie ». Comment s’explique cette divergence ?

Ce contraste, observable dans tous les pays occidentaux depuis au moins quarante ans, est très symptomatique de ce que nous venons d’évoquer et illustre bien la nécessité d’une redéfinition de la prospérité. Ce hiatus trouve plusieurs types d’explication. Tout d’abord, le PIB par habitant est une moyenne statistique qui, lorsque les écarts se creusent au sein de la population, ne reflète plus le niveau de vie de l’habitant médian. Ensuite, toute richesse est relative : au fil de la croissance économique, nos aspirations sont continuellement révisées à la hausse, soit parce que nous nous habituons à notre situation et relevons nos normes, soit parce que nous nous comparons à nos voisins dans une course permanente à qui sera le mieux loti. Enfin, la richesse n’est pas tout : la satisfaction de vie ou le bien-être dépend de quantité de facteurs qui peuvent être étrangers à la croissance économique (douceur de la vie affective) ou lui être, par certains aspects, négativement corrélés (en matière d’environnement ou de santé, par exemple). Dix ans près la publication de cet article, l’idée selon laquelle la croissance économique ne conduit pas nécessairement à plus de bien-être a fait son chemin. Dès lors, la question du but ultime poursuivi par les politiques de soutien à la croissance arrive au-devant de la scène. Pourquoi veut-on plus de croissance, et pour qui ? Cet exercice conduit à revisiter les objectifs du développement économique et social. Si un consensus émergeait quant à ces objectifs, des outils de mesure alternatifs au PIB se mettraient plus aisément en place.

 

Quels sont les nouveaux indicateurs de prospérité qui vous semblent aujourd’hui les plus pertinents pour refonder notre développement économique ?

On ne voit pas encore émerger l’un ou l’autre indicateur sur lequel il y ait consensus, mais, à l’évidence, le débat avance. En Belgique comme en France, des lois récemment votées (2012 et 2014 en Belgique, 2015 en France) imposent la publication d’indicateurs complémentaires au PIB. C’est un grand pas en avant ! Malgré les différences qui existent d’un ensemble d’indicateurs à l’autre, la tendance commune est de réunir des mesures de la pression sur l’environnement d’une part et de la qualité de vie d’autre part. Au fil d’un tel exercice, les questions posées par la statistique sont nombreuses et complexes (comment quantifier ce qui relève d’une appréciation qualitative ? La valeur d’une ressource en voie de disparition ne tend-elle pas vers l’infini ?). Elles renvoient souvent à des jugements de valeur (qu’est-ce qui compte ?) et aux fondements de la démocratie (qui est habilité à définir ce qui compte) ? Proposer de nouveaux indicateurs revient de facto à redéfinir notre modèle de développement. À cet égard, un pays fait figure d’exception : le Bhoutan déclare depuis longtemps s’intéresser davantage au « bonheur national brut » qu’au « produit national brut » [3].

 

Vous avez effectué plusieurs séjours au Bhoutan, entre 2013 et 2015, en vue d’étudier l’indicateur du bonheur national brut. Quelle est la philosophie sous-jacente à cet indicateur ?

L’idée est de favoriser un développement équilibré, qui avance « sur deux pieds », associant le progrès spirituel au progrès matériel. Car, à quoi bon s’enrichir si cela nous détourne de la sagesse, d’une quête essentielle sur le sens de notre vie ? Dans la tradition bhoutanaise, le rôle de l’État est de fournir au peuple les conditions d’accès au bonheur, c’est-à-dire au plein épanouissement des potentialités de l’humain. Pour cette raison, l’indicateur comporte neuf domaines, le niveau de vie étant situé parmi huit autres dimensions constitutives du bonheur aux yeux des Bhoutanais : bien-être psychologique, santé, utilisation du temps, éducation, diversité et résilience culturelles, bonne gouvernance, vitalité communautaire, diversité et résilience écologiques. Cette variété de domaines reflète « ce qui compte » aux yeux de la population.

 

Comment cet indicateur du bonheur national brut est-il construit ? Pourrions-nous nous en inspirer ?
Chaque domaine est subdivisé en sous-indicateurs — trente-trois en tout — comportant eux-mêmes plusieurs variables spécifiques — cent vingt-quatre au total. La plus grande originalité de l’indicateur du bonheur national brut réside à mes yeux dans l’existence, pour chaque sous-indicateur, de seuils de suffisance.

Une même question est posée pour chacun : quel seuil faut-il atteindre pour que les conditions sociétales du bonheur soient réunies ? L’indicateur global unifie les réponses à cette question (dont le caractère normatif et évolutif est pleinement assumé). Dès lors, les politiques publiques guidées par cet indicateur et par les divers instruments de pilotage qui lui sont associés sont systématiquement orientées vers les domaines d’insuffisance et vers les catégories de population concernées. Toute accumulation au-delà des seuils de suffisance est sans effet sur l’indicateur global de bonheur. L’expérience du Bhoutan pourrait-elle nous inciter à définir un tel ensemble statistique ? Ou à introduire des seuils de suffisance dans les nouveaux indicateurs de prospérité qui se multiplient en Occident ? Sûrement, mais on ne s’étonnera pas que les résistances soient nombreuses : sommes-nous prêts, en tant que collectivité et en tant qu’individus, à abandonner la course à la consommation, à la productivité, au profit, et à tout ce qui accompagne notre conception séculaire — mais très particulière — du progrès ? Or, si le monde globalisé reste marqué par l’obsession d’une croissance pour la croissance, la résistance du Bhoutan, qui nous interpelle aujourd’hui, s’avèrera bien fragile. Peut-être chacun de nous pourrait-il, là où il est, avec ses modestes moyens d’action, tenter de faire bouger les lignes, comme le propose le film Demain [4] ?

 

[1I. Cassiers et. alii, Redéfinir la prospérité — jalons pour un débat public, La Tour-d’Aigues, éditions de l’Aube, 2011.

[2I. Cassiers et C. Delain, « La croissance ne fait pas le bonheur, les économistes le savent-ils ? » Regards économiques, mars 2006, n° 38, téléchargeable ici.

[3Voir I. Cassiers : « Le Bhoutan nous interpelle : bonheur national brut et nouveau paradigme de développement », dans D. Bourg, A. Kaufmann et D. Méda (dir.), Quelles transitions écologiques ? Les Petits Matins – Institut Veblen, Paris, texte partiellement repris dans les réponses ci-dessous. Voir aussi le blog de voyage au Bhoutan de l’auteure.

[4Film de Cyril Dion et Mélanie Laurent, 2015, César du meilleur documentaire.