Articles du Vendredi : Sélection du 20 janvier 2017

En finir avec les idées reçues sur les changements climatiques(1/4)

5ème rapport du GIEC sur les changements climatiques et leurs évolutions futures / Les arguments climato-sceptiques réfutés en quelques mots puis en quelques lignes
http://leclimatchange.fr/questions-reponses/

Aux origines de la crise écologique

Nic Ulmi
www.letemps.ch/sciences/2016/10/18/aux-origines-crise-ecologique

La transition au service des territoires

Anne Bringault, Membre du réseau pour la transition énergétique et du réseau action climat
www.alternatives-economiques.fr/anne-bringault/transition-service-territoires/00076442

Nicolas Hulot : « Nous avons un cap mais pas de boussole »

Sophie Landrin et Simon Roger
www.lemonde.fr/planete/article/2017/01/17/nicolas-hulot-nous-avons-un-cap-mais-pas-de-boussole_5064044_3244.html

Munduko zortzi pertsona aberatsenek 3.600 milioi txiroenek adina aberastasun biltzen dute


www.argia.eus/albistea/munduko-zortzi-pertsona-aberatsenek-3600-milioi-txiroenek-adina-aberastasun-biltzen-dute

En finir avec les idées reçues sur les changements climatiques(1/4)

5ème rapport du GIEC sur les changements climatiques et leurs évolutions futures / Les arguments climato-sceptiques réfutés en quelques mots puis en quelques lignes
http://leclimatchange.fr/questions-reponses/

Plusieurs forces différentes peuvent influencer le climat. Quand l’activité solaire augmente, la planète reçoit plus d’énergie et se réchauffe. Lorsque des volcans entrent en éruption, ils émettent des particules dans l’atmosphère qui renvoient la lumière du soleil, et la planète se refroidit.

Quand il y a plus de gaz à effet de serre dans l’atmosphère, la planète se réchauffe. Aujourd’hui, la force motrice dominante provient des activités humaines et des émissions de gaz à effet de serre additionnelles provoquées par ces activités.

Les changements climatiques passés ne nous disent pas que les humains ne peuvent pas influer sur le climat, au contraire, ils nous disent que le climat est très sensible aux gaz à effet de serre dont nous contribuons à augmenter la présence dans l’atmosphère terrestre.

Le responsable, c’est le Soleil !

Durant les 35 dernières années, au cours desquelles le climat s’est réchauffé, l’activité du soleil a eu tendance à diminuer.

Le soleil «cause du réchauffement climatique» est l’un des mythes les plus tenaces et les plus communément répandus. Effectivement, sur les périodes passées, l’activité solaire a souvent influencé le climat. Mais si l’on tient compte des dernières décennies, les deux divergent.

Le 5e rapport du GIEC montre comment les différentes variations naturelles, comme celles de l’activité solaire (cf. pages 13 et 16), peuvent expliquer les variations de températures constatées dans le passé, jusqu’à la moitié du XXe siècle. Mais depuis 1950, le réchauffement constaté est explicable principalement du fait des activités humaines.

Les changements climatiques, ce n’est pas si grave !

Les impacts négatifs des changements climatiques sur l’agriculture, la santé ou l’environnement dépassent de très loin ses quelques effets positifs.

Les impacts des changements climatiques seront développés par le 5ème rapport du GIEC en mars 2014. Cependant, la liste des secteurs touchés par ces changements est déjà très longue, touchant des dizaines de secteurs d’activité humaine, dans tous les pays :

Agriculture

Toute l’agriculture dépend de la fiabilité des réserves d’eau, et les changements climatiques sont susceptibles de perturber ces ressources par des inondations, des sécheresses ou une plus grande variabilité. L’agriculture peut être perturbée par des incendies, conséquences des sécheresses et des canicules. L’impact est d’autant plus important dans les pays où les rendements sont réduits ou soumis à un risque d’échec (Afrique subsaharienne notamment).

Santé

Les morts attribuables aux canicules devraient être environ cinq fois plus nombreux que les morts hivernales évitées. Il est largement admis qu’un climat plus chaud encouragera la migration d’insectes porteurs de maladies comme les moustiques, et la malaria (paludisme) est déjà en train d’apparaître dans des zones où elle n’avait jamais été vue auparavant.

Fonte des glaces polaires

Les effets nuisibles incluent la perte de l’habitat de l’ours polaire et l’augmentation des risques de collisions entre icebergs. Les eaux plus chaudes accroissent la fonte des glaciers et de la couche de glace du Groenland.

Acidification de l’océan

Ce processus est causé par l’absorption de plus de CO2 par l’eau, et pourrait avoir des effets déstabilisants sérieux sur la chaîne alimentaire océanique entière.

Fonte des glaciers

Un sixième de la population mondiale dépend de l’eau douce restituée par la fonte annuelle des glaciers dans les mois et saisons suivant l’hiver. Ces ressources en eau (eau potable, agriculture) pourraient venir à manquer en période estivale.

Economie

Le rapport Stern a montré que les coûts de l’inaction face au changement climatique excèdent largement les coûts de sa prévention. Certains scénarios prévus par le 4ème rapport du GIEC témoignent de migrations massives de populations au fur et à mesure que les pays en basses-terres seront inondés. Des perturbations dans le marché mondial, les transports, les réserves d’énergie et le marché du travail, la banque et la finance, l’investissement et l’assurance, feraient toutes des ravages sur la stabilité des pays en développement mais aussi des pays développés. Les marchés endureraient plus d’instabilité et les investisseurs tels que les fonds de pension et les compagnies d’assurance auraient des difficultés considérables.

Il n’y a pas de consensus scientifique sur le réchauffement climatique

97% des scientifiques de la planète compétents en matière climatique s’accordent à dire qu’il y a bien un réchauffement climatique et que ce phénomène est d’origine humaine.

Le fait que les activités humaines soient la cause du réchauffement planétaire est la position prise par les académies des sciences de 19 pays (dont la France), en plus des organismes scientifiques qui étudient la climatologie (dont le GIEC). Plus particulièrement, 97% des climatologues actifs en recherche appuient le consensus.

Les températures n’augmentent plus depuis 1998 !

Comparer les données climatiques par rapport à une seule année ne confère pas une solidité statistique à cette observation. Des périodes de référence plus longues (20 à 30 ans) permettent de mieux appréhender les phénomènes. Le rapport provisoire de l’OMM (Organisation Météorologique Mondiale) pour 2014 indiquait que quatorze des quinze années les plus chaudes jamais mesurées appartiennent au XXIe siècle.

Même si la température moyenne globale augmente moins vite depuis 10 ans, la décennie 2000-2009 a été la plus chaude jamais enregistrée depuis 1850!

Le 5e rapport du GIEC rappelle aussi que depuis 1980, chaque décennie a été significativement plus chaude que n’importe quelle décennie passée depuis 1850. De plus, l’explication du réchauffement climatique repose sur plusieurs facteurs. S’il est naturel de commencer par la température de l’air, un examen plus approfondi devrait aussi inclure la couverture neigeuse, la fonte des glaces, les températures au sol, au-dessus des mers et même la température de la mer elle-même. Aujourd’hui, chacun de ces indicateurs atteste d’un réchauffement global des températures.

Aux origines de la crise écologique

Nic Ulmi
www.letemps.ch/sciences/2016/10/18/aux-origines-crise-ecologique

Idée reçue: la crise environnementale actuelle serait le fruit d’une longue inconscience. On ignorait, en gros, le mal que l’on faisait. Idée fausse, selon Jean-Baptiste Fressoz: il s’agit là d’une illusion d’optique ou d’une amnésie. Historien des techniques et de l’environnement, le chercheur français est invité ce jeudi à Genève pour une conférence sur le thème «Une histoire politique du CO2. Comment sommes-nous entrés dans l’Anthropocène?» Formulé par le prix Nobel Paul Crutzen dans les années 2000, ce terme définit une nouvelle époque géologique marquée par l’impact massif des activités humaines sur la planète.

 

Le Temps: La perception du danger environnemental lié à l’industrie, dites-vous, est présente dès le début de la révolution industrielle.

Jean-Baptiste Fressoz: Jusqu’au milieu du XIXe, l’environnement était au cœur des préoccupations médicales. Pour expliquer les maladies, on invoquait la qualité de l’air et de l’eau. L’industrialisation, avec son cortège de pollutions, était fortement critiquée. Des pétitions étaient lancées pour dire: si vous autorisez telle usine, vous causerez des épidémies, des catastrophes sanitaires, la dégénérescence de la population…

– Comment ces oppositions sont-elles éliminées?

– En France, l’opposition est forte jusqu’aux années 1830. Ensuite, la médecine recentre son attention sur les causes sociales des maladies. Le médecin Louis-René de Villermé étudie l’espérance de vie dans les quartiers de Paris et montre qu’elle est corrélée au niveau de richesse. Ce constat devient un argument: en s’industrialisant, on deviendra plus riches et cela améliorera la santé de la population… Autre facteur: dans la seconde moitié du XIXe siècle, l’arrivée du chemin de fer rend possible une délocalisation intérieure. Les industries s’étaient d’abord établies dans les villes, près de leurs marchés. Suite aux plaintes, elles se transfèrent dans des villages. Dans ceux-ci, la population en vient rapidement à dépendre de l’usine, ce qui limite ses plaintes. À l’intérieur de chaque pays européen, on sacrifie ainsi une partie du territoire où les habitants ont des moyens plus faibles de s’opposer.

– Vous montrez l’apparition précoce du principe du pollueur-payeur.

– Le mode privilégié de régulation de la pollution au XIXe siècle consiste à compenser: les industriels payent pour les dommages qu’ils produisaient, arrosant les voisins pour éviter qu’ils se plaignent. Ce principe, qu’on propose aujourd’hui comme une solution nouvelle, a accompagné en réalité tout le processus l’industrialisation, et il a été voulu par les industriels eux-mêmes.

– Que font les pouvoirs publics?

– Au tout début de la révolution industrielle, au XVIIIe siècle, la police exerce un contrôle permanent des processus de production. Les commissaires patrouillent les quartiers, et s’il y a un atelier qui émet trop de fumée ou relâche des liquides nauséabonds, le policier peut mettre une contravention, voire ordonner la fermeture si le problème se reproduit. À partir du XIXe siècle, les industriels ne tolèrent plus ce type de régulation. Jean-Antoine Chaptal – grand industriel, grand chimiste, grand pollueur et ministre de l’Intérieur sous Napoléon – dit: on ne peut pas accepter que le droit d’exercice de l’industriel dépende d’un simple magistrat de police. Sous son égide, on assiste à une transformation de la régulation, qui sera désormais fondée sur l’autorisation administrative. Suite à un décret de 1810, les industriels doivent demander une autorisation; une fois que celle-ci est accordée, ils ne courent plus aucun risque de voir leur établissement supprimé, quelles que soient les pollutions.

– Venons-en à la prise de conscience des dernières décennies.

– Dans les années 1970, il y a un moment où la régulation devient plus stricte, avec la création d’organismes tels que l’Environmental Protection Agency aux Etats-Unis. Ce basculement est vite contrecarré par l’offensive néolibérale des années 1980. Dès l’élection de Reagan, on voit s’affirmer l’idée que la régulation doit se soumettre à une analyse coûts-bénéfices: si la norme coûte trop cher, on ne va pas l’introduire… Ensuite, la délocalisation des activités les plus polluantes fait en sorte que les effets environnementaux sont déplacés vers les pays à bas revenu. Ce qu’on estime être un tournant environnemental se révèle être en grande partie une délocalisation des activités polluantes.

– Que peut-on dire au sujet des énergies alternatives?

– Pendant très longtemps, les énergies renouvelables n’étaient pas «alternatives». L’éolienne, la solaire, l’hydraulique étaient les énergies dominantes jusque tard dans le XIXe siècle. Aux Etats-Unis, les ¾ de l’énergie utilisée par l’industrie à la fin du XIXe siècle sont d’origine hydraulique. En Angleterre, l’industrialisation s’est faite majoritairement par l’énergie de l’eau, avec des moulins. Le basculement vers l’énergie fossile – le charbon – ne répond pas à une simple rationalité technique. En 1830, alors que la moitié du textile anglais a déjà pris ce tournant, l’énergie du charbon coûte beaucoup plus cher que l’énergie hydraulique. Ce que les industriels recherchent avec le charbon, c’est plutôt la possibilité de s’extraire de la gestion collective propre à l’énergie hydraulique. Y a-t-il aujourd’hui des forces sociales qui auraient le même poids, et qui pourraient faire advenir un système énergétique renouvelable? Ce n’est pas du tout clair…

Conférence «Une histoire politique du CO2. Comment sommes-nous entrés dans l’Anthropocène?», jeudi 20 octobre à 18h30 à Uni Dufour (14, r. du Général-Dufour, Genève), salle U600. Organisation: Maison de l’histoire

À lire: Jean-Baptiste Fressoz, «L’Apocalypse joyeuse. Une histoire du risque technologique» (Seuil, 2012). Christophe Bonneuil et Jean-Baptiste Fressoz, «L’Evénement Anthropocène. La Terre, l’histoire et nous» (Seuil, 2013). 

La transition au service des territoires

Anne Bringault, Membre du réseau pour la transition énergétique et du réseau action climat
www.alternatives-economiques.fr/anne-bringault/transition-service-territoires/00076442

Les Assises européennes de la transition énergétique s’ouvrent le 24 janvier à Bordeaux. Collectivités, entreprises, associations et chercheurs feront le point et échangeront sur les avancées, les tendances et les perspectives dans ce domaine. L’un des axes forts cette année sera le partage des ressources et des bénéfices de la transition énergétique.

Une étude allemande1 vient justement de chiffrer la création de valeur pour un projet d’énergie renouvelable en fonction de l’implication ou non des acteurs locaux. Et les résultats sont impressionnants. Cette étude a été commanditée par la SUN (Stadtwerke Union Nordhessen), association de six entreprises communales du land de Hesse, dans le centre de l’Allemagne. Ces entreprises publiques sont des opérateurs énergétiques territoriaux historiques et elles ont demandé à l’Institut des technologies de l’énergie décentralisée et à l’université de Kassel d’estimer dans quelle mesure les revenus de l’éolien pouvaient profiter à l’économie locale.

Kapital vs Lokal

A partir de données réelles des parcs éoliens de la SUN, l’étude compare un projet-type de 7 éoliennes (puissance totale de 21 MW) suivant deux variantes : dans le premier cas, les porteurs de projet et les investisseurs sont complètement externes et peu impliqués dans l’économie locale. Dans le second cas, le même projet est fortement intégré localement : investissement en capital entièrement assuré par les citoyens et le secteur public, gestion réalisée par l’entreprise communale, contrats passés de manière préférentielle avec les sous-traitants locaux, emprunts réalisés auprès d’une banque locale.

La conclusion ? Selon l’étude, le bénéfice cumulé pour la région (le land) qu’offre le second projet est supérieur de 51 millions d’euros sur 20 ans au premier. En effet, la richesse générée par le parc circule entre les acteurs locaux et permet de nouvelles activités et profits par « effet multiplicateur ». Autrement dit, les revenus de l’énergie engendrent un cercle local vertueux : ils profitent à l’économie locale et finissent par revenir aux collectivités sous forme de taxes, pour ensuite être réinvestis.

En relocalisant les flux et les richesses, le modèle local capte ainsi 59 % de la valeur totale du projet sur la durée de son cycle de vie et entraîne des effets positifs indirects : renforcement du tissu économique, augmentation du budget des collectivités, amélioration de la qualité de vie…

Les bonnes questions qu’il faut poser

Ce résultat n’est pas transposable tel quel à la France. Entre autres parce qu’il y a peu d’opérateurs locaux de l’énergie dans l’Hexagone, les contextes réglementaires diffèrent, ainsi que les temps de développement d’un projet. La conclusion de l’étude reste néanmoins valable : avant de développer un grand projet énergétique, un territoire a tout intérêt à évaluer les conséquences du montage financier proposé pour le développement local. Et le cas échéant de faire évoluer le projet. A cette fin, un rapport récent publié par le CLER2 décrit en détail différents montages adoptés par les acteurs locaux.

L’étude SUN rappelle les différents facteurs à prendre en compte susceptibles d’influencer la capacité de ces projets à générer de la valeur pour l’économie régionale :

  • Qui possède le terrain ?
  • Qui possède les éoliennes ? Le capital est-il ouvert aux collectivités et aux citoyens ?
  • Qui a financé le projet ? Les emprunts sont-ils contractés auprès d’acteurs du territoire (banque locale, crowdfunding…) ?
  • Y a-t-il un critère de proximité ou de préférence régionale dans l’attribution des contrats ?
  • Comment les profits sont-ils employés (réinvestissement, redistribution) ?

Aux Assises européennes de la transition énergétique, la question sera donc posée : oui à la transition énergétique, mais au bénéfice de qui ?

  • 1. Voir http://www.territoires-energie-positive.fr/actus/quelle-creation-de-valeur-locale-pour-les-projets-d-energie-renouvelable-portes-par-les-acteurs-du-territoire
  • 2. Financer le développement de projets d’énergies renouvelables d’intérêt territorial, CLER, Novembre 2016, accessible sur www.tepos.fr

Nicolas Hulot : « Nous avons un cap mais pas de boussole »

Sophie Landrin et Simon Roger
www.lemonde.fr/planete/article/2017/01/17/nicolas-hulot-nous-avons-un-cap-mais-pas-de-boussole_5064044_3244.html

La prise de conscience des dangers du réchauffement et de l’exploitation de la planète progresse trop lentement, estime le défenseur de l’environnement. Figure de l’écologie, Nicolas Hulot a été durant trois ans l’envoyé spécial pour la planète du président de la République. Celui qui a sillonné le globe pour préparer la COP21 dresse le bilan après la COP22 de Marrakech en décembre 2016.

 

L’année 2016 a-t-elle été à la hauteur des promesses climatiques de la COP21 ?

Il y a eu certes un point d’orgue avec la signature de l’accord de Paris aux Nations unies et son entrée en vigueur accélérée, mais tout cela était finalement assez prévisible. Après la COP21 de Paris, je ne voyais pas les Etats ne pas respecter ce calendrier et revenir en arrière. Sur le reste, nous n’avons pas été au rendez-vous. Les grands émetteurs de gaz à effet de serre devaient revoir leurs ambitions à la hausse avant 2020, mais il n’y a pas eu d’annonce en ce sens lors de la COP22 à Marrakech. 2016 aurait dû être l’année de la mise en cohérence des politiques publiques avec des engagements supplémentaires des Etats à lutter contre le réchauffement. Or il s’est passé le contraire avec la tentation de faire passer en force le CETA [traité de libre-échange entre l’Union européenne et le Canada]. Le seul pays qui ne dévie pas de sa ligne, c’est la Chine.

Comment interprétez-vous ce manque de cohérence des Etats ?

Les dirigeants n’ont pas encore réalisé que, pour atteindre les objectifs de neutralité carbone en 2050, il faut des révisions d’investissement fondamentales. Le CETA méritait d’être analysé sous l’angle de cette climato-comptabilité. Dans un autre ordre de grandeur, l’entêtement du gouvernement français sur Notre-Dame-des-Landes est un cas d’école. Notre gouvernement n’a pas encore compris qu’il y a des projets qui étaient pertinents il y a cinquante ans et qui ne sont plus compatibles aujourd’hui avec la préservation de l’environnement. Si nous voulons atteindre l’objectif de contenir le réchauffement climatique, il faut renoncer à exploiter les trois quarts des réserves d’énergies fossiles. Cette équation implique en cascade un certain nombre d’adaptations. On continue par exemple d’accorder des autorisations de recherche d’hydrocarbures dans des lieux éloignés, alors que nous savons que la sortie des énergies fossiles doit être la clé de voûte du moteur économique de demain. La décision de Barack Obama de faire barrage aux forages d’hydrocarbures en Arctique fait partie de ces jalons puissants qui doivent se démultiplier en 2017 et au-delà.

A vous suivre, c’est tout le modèle économique qu’il faudrait revoir ?

Si nous voulons optimiser nos chances de gagner la bataille climatique, il faut accélérer sur les objectifs de réduction des émissions, mais aussi créer un modèle économique qui permette de restaurer les écosystèmes, de rémunérer les pays détenteurs de ces écosystèmes pour, à défaut de les entretenir, les réhabiliter. Il serait aléatoire d’espérer atteindre les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre si nous nous accommodons du fait que des millions d’hectares soient dégradés chaque année, restituant simultanément des millions de tonnes de CO2 ; que les sols continuent à se désertifier ; que les zones humides, les mangroves et a fortiori les écosystèmes comme les barrières de corail soient sacrifiés.

Quand on restaure des milliers d’hectares de terres agricoles, cela a une triple vertu : on redonne capacité aux sols à nourrir le milliard et demi d’habitants qui va nous rejoindre d’ici à 2050. On combat l’exode rural et donc l’immigration. On redonne capacité aux sols d’absorber le carbone. Si la communauté internationale s’engageait à restaurer 4 millions d’hectares par an d’ici à 2050, elle serait en mesure de combler le fossé entre l’objectif de 2 °C de réchauffement, fixé par l’accord de Paris, et celui de 1,5 °C que la communauté scientifique recommande de ne pas dépasser.

Les conférences environnementales de l’ONU, les COP, offrent-elles un cadre efficace pour prendre de telles décisions ?

Non. Il faudrait fusionner les trois conventions des Nations unies qui traitent de l’environnement [la convention sur les changements climatiques, celle sur la biodiversité et celle sur la lutte contre la désertification] et s’interroger sur l’utilité de convoquer la conférence climat chaque année. A Marrakech, en novembre 2016, j’avais l’impression d’être dans une réplique tropicale de la COP21 de décembre 2015. Avec les mêmes mots sympathiques, les mêmes photos, les mêmes acteurs, tout le monde se poussant du coude.

Mais je vois le visage dépité de nos camarades africains qui attendent des actes dans le domaine de l’accès à l’énergie et de la mise en place d’outils économiques et juridiques pour favoriser l’agro-écologie. Il est temps que l’on cesse de créer des distorsions sur les marchés où, pour ­finir, l’agriculture vivrière locale est moins avantageuse que les produits d’importation.

Pensez-vous qu’il est encore possible de contenir le réchauffement qui menace la planète ?

Nous traversons une crise profonde de civilisation. La mondialisation nous a reliés pour le meilleur et pour le pire. Nous devrions nous ouvrir à une forme d’universalisme. Or, ce qui se profile, c’est une tentation contraire, de repli. J’ai une foi incroyable dans une grande partie de l’humanité mais je suis désespéré face à l’inertie du système et aux forces de résistance. Ces forces de résistance sont animées notamment par les lobbys des énergies fossiles. Mais aussi par des multinationales comme Monsanto, qui a mis en coupe réglée les ressources alimentaires de la planète et placé les paysans du monde entier dans un état de dépendance. C’est criminel. J’ai vu en Inde les trains du cancer qui emmènent dans le Pendjab des familles entières malades de l’utilisation des pesticides, à cause des OGM de Monsanto.

L’arrivée au pouvoir de Donald Trump aux Etats-Unis, climatosceptique déclaré, sonne-t-elle la fin des négociations climatiques ?

C’est le pire scénario, qui arrive au plus mauvais moment de l’histoire. Mais les militaires du Pentagone sauront rappeler à l’administration républicaine que le sujet climatique conditionne aussi la sécurité intérieure des Etats-Unis. Et, n’en déplaise à Donald Trump, le désinvestissement du carbone et l’essor des énergies renouvelables dans plusieurs Etats américains ne s’arrêteront pas du jour au lendemain.

Le problème, c’est que nous sommes dans une course de fond où il faut accélérer ; or, les climatosceptiques ont capacité à freiner cet élan.

Quelles mesures environnementales devraient figurer à l’agenda du prochain président français ?

Il faut adapter notre démocratie au long terme en instaurant un lieu de prospective et de planification où se retrouvent les acteurs politiques, des citoyens tirés au sort, les partenaires sociaux et les experts. Car il faut planifier la transition sur trente ans au minimum. Cela doit s’accompagner d’un panel de mesures de démocratie partici­pative, de possibilités de consultations locales et régionales.

Si nous voulons mener une transformation profonde de la société, il faut le faire d’une manière documentée et apaisée. On ne peut pas toujours être dans la précipitation, dans la démocratie de compétition gauche/droite.

La deuxième mesure qui s’impose est une révision profonde du système fiscal pour structurer les modes de production et de consommation de demain. La réforme doit garantir qu’il n’y aura pas une pression fiscale supérieure pour qui que ce soit. L’idée est de déplacer la fiscalité sur deux ­assiettes : la fiscalité écologique d’une part, avec un prélèvement sur les ressources naturelles, et la taxation de la pollution ; la taxation de tous les ­revenus qui ne sont pas issus du travail d’autre part, rente, placements, stock-options. Cette fiscalité introduira un prix carbone et un avantage compétitif pour les énergies renouvelables.

La France devrait également mettre sur pied un grand plan d’investissement dans la transition énergétique, avec le développement des énergies renouvelables, la rénovation des bâtiments anciens et la priorité à l’efficacité énergétique.

Des changements s’imposent-ils aussi dans le domaine de l’agriculture ?

Oui. Un « Grenelle de l’agriculture » doit être organisé pour réfléchir à une nouvelle mutation agricole sur le principe de la souveraineté alimentaire, car les Français ne sont pas autonomes en la matière. Ce Grenelle mettrait pendant un an, autour de la table, tous les acteurs de la ­filière, les producteurs, les distributeurs, les grandes surfaces, les syndicats agricoles, les territoires, les instances communautaires de l’Union européenne, etc. Aujourd’hui, les deux tiers des aides à l’agriculture vont à un tiers de la profession. Le modèle agricole doit se réformer, être plus respectueux de notre environnement. Un double objectif s’impose : zéro pesticide et zéro artificialisation des terres agricoles.

Que retenez-vous des années que vous avez passées à sillonner la planète ?

En trente ans, j’ai vu disparaître des écosystèmes entiers, terrestres et marins, j’ai vu l’impact du réchauffement climatique. Mais, ce que je retiens surtout, c’est le changement d’échelle dans l’exploitation de la mer, dans le pillage de la forêt, dans l’urbanisation de la ­planète. Face à cette accélération, la prise de conscience progresse à un rythme trop lent. La communauté internationale s’est fixé un cap, mais elle n’a pas de boussole.

Munduko zortzi pertsona aberatsenek 3.600 milioi txiroenek adina aberastasun biltzen dute


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Jeff Bezos, Amancio Ortega, Warren Buffett, Carlos Slim, Bill Gates, Mark Zuckerberg, Larry Ellison eta Michael Bloomberg dira munduko pertsonarik aberatsenak eta mundua bitan banatuta zatirik txiroenaren adina aberastasun biltzen dute. Guztiak gizonezkoak dira, sei estatubatuar, mexikar bat eta espainiar bat.

 

Astelehen honetan eman du jakitera datua Oxfamek, Davoseko Mundu Foroa egin bezperetan, eta mundu mailan txiro eta aberatsen arteko arrakala inoiz baino handiagoa dela erakusten du. Zerrenda egiteko Oxfamek Credit Suisse bankuko eta Forbes aldizkariko datuak erabiltzen ditu.

 

Justizia eza eta pobreziaren aurka lan egiten duen gobernuz kanpoko erakundea da Oxfam eta ohikoak dira munduko aberastasunaren banaketari buruz egiten dituen txostenak. Aurtengoaren balorazioa egiterakoan, argi azpimarratu dute aberats eta txiroen arteko desberdintasunak gero eta handiagoak direla eta hori oso kezkagarria eta kaltegarria dela. Bere politikak arrakala horren handitzean zerikusi ugari badute ere, Nazioarteko Diru Funtsak ere kezka agertu du horregatik.

 

Txostenean Europako Batasunaren desberdintasunak ere aipatzen dira eta, Txipreren ondoren Espainia da krisiaren urte hauetan desberdinasunik handienak sortu dituen herrialdea. Espainiako Estatuko hiru pertsona aberatsenek 13,8 milioi pertsonak adina aberastasun biltzen dute.

 

Datu hauei buruz asko ari dela hitz egiten dio Oxfamek, baina azpimarratzen du, halaber, ez dela ezer egiten ari egoera aldatzeko. Txostenean egoera horri aurre egiteko hainbat neurri proposatzen ditu, besteak beste, aberastasunari zerga handiagoak ezartzea. Erakundearen ustez, gaur egun lehia itzela dago herrialdeen artean zerga txikiagoak jarri eta korporazioak erakartzeko, eta joera honekin bukatzeko mundu mailako itun bat behar da.

 

Enpresek gobernuei egiten dieten presioa ere gogor kritikatu da txostenean eta baita “politikari eta enpresen artean dagoen gertutasuna” ere. Presio horiek saiheste aldera, erakunde publikoek mundu hori zorrotzago arautu beharko luketela uste du Oxfamek.