Articles du Vendredi : Sélection du 23 décembre 2011

Le pétrole déclinera peu après 2015, selon un ancien expert de l’Agence internationale de l’énergie

Matthieu Auzanneau, journaliste indépendant
http://petrole.blog.lemonde.fr/2011/12/20/le-petrole-declinera-peu-apres-2015-affirme-un-ancienexpert-de-lagence-internationale-de-lenergie/

Des pistes de solutions à la crise actuelle –
Tout cela passe par une mobilisation contre le “mur de l’argent”

Jean gadrey, professeur emerite d’economie, membre de la commission stiglitz sur les nouveaux indicateurs de richessses
Enbata-Alda ! du 15.12.2011

Le philosophe français Pierre Rabhi et le directeur de l’ONG Colibris Cyril Dion ont répondu à vos questions…


www.20minutes.fr/vousinterviewez/838308-interviewe-pierre-rabhi-cyril-dion-campagne-touscandidats-2012

Klima aldaketa: Negutegi efektua eragiten duten gasen isurketak gora egin du urteotan, baina agintariek ezikusiarena egiten dute

Jose Angel Oria
www.gaur8.info/edukiak/20111217/310116/Klima-aldaketa-Negutegi-efektua-eragiten-duten-gasenisurketak-gora-egin-du-urteotan-baina-agintariek-ezikusiarena-egiten-dute-b POLITIKA / 2011.12.16

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Le pétrole déclinera peu après 2015, selon un ancien expert de l’Agence internationale de l’énergie

Matthieu Auzanneau, journaliste indépendant
http://petrole.blog.lemonde.fr/2011/12/20/le-petrole-declinera-peu-apres-2015-affirme-un-ancienexpert-de-lagence-internationale-de-lenergie/

Olivier Rech a élaboré les scénarios pétroliers de l’Agence internationale de l’énergie (AIE) durant trois ans, jusqu’en 2009. Il conseille désormais d’importants fonds d’investissements pour le compte de La Française AM, un gestionnaire d’actifs parisien.

Ses pronostics sur l’avenir de la production de pétrole sont aujourd’hui beaucoup plus pessimistes que ceux publiés par l’AIE…

Un élément de plus, et non des moindres, à ajouter à la liste déjà fort longue des sources de premier plan qui agitent la menace d’un déclin imminent des extractions mondiales de brut.

Quels sont vos pronostics ? Commençons par les pays producteurs en dehors de l’Opep [qui représentent 58 % des extractions et 23 % des réserves mondiales].

Hors Opep, les choses sont claires : sur 40 millions de barils par jour (Mb/j) de pétrole conventionnel extraits des champs existants, on est face à un déclin annuel de l’ordre de 1 à 2 Mb/j.

Selon vous, on est donc proche du déclin de 5 % par an de la production existante évoqué par Shell ?

Oui, c’est à peu près ça.

Et pour la production des pays de l’Opep [42 % des extractions et 77 % des réserves mondiales] ?

C’est plus difficile à dire, les données sont toujours aussi opaques, on reste dans le brouillard. Je remarque néanmoins que les banques Barclays et Goldman Sachs estiment que les capacités de production non-utilisées de l’Opep, notamment celles de l’Arabie Saoudite, sont bien moins importantes que ce qui est annoncé officiellement.

De nombreux nouveaux projets de production sont actuellement en cours de développement. Que faut-il en attendre ?

En effet, il y a de nouveaux projets au large du Brésil, du Ghana et de la Guyane. Le golfe du Mexique est encore loin d’être épuisé. L’Arctique, c’est plus incertain, mais il y a un vrai potentiel pour le gaz naturel. Cependant, il faudra compter encore une décennie avant d’en voir sortir une production significative, éventuellement de pétrole.

Alors le pic et le déclin de la production mondiale de pétrole, c’est pour quand, selon vous ?

Il est toujours délicat d’avancer une date précise. Les taux de récupération des champs existants augmentent. Aux Etats-Unis, la production à terre décline très lentement (il faut dire qu’ils forent comme des fous là-bas). C’est une erreur de sous-estimer le savoir-faire des ingénieurs spécialistes du forage.

Compte tenu de tous ces facteurs capables de retarder un déclin, quelle est votre conclusion ?

On restera certainement en-dessous des 95 Mb/j pour l’ensemble des pétroles conventionnels et non-conventionnels.

Donc, vous êtes nettement plus alarmiste que l’AIE et que Total, le plus pessimiste des groupes pétroliers, qui évoque la possibilité de maintenir la production sur un plateau situé aux alentours de 95 Mb/j jusqu’en 2030.

C’est exact. La production de l’ensemble des pétroles se trouve déjà sur un plateau depuis 2005, autour de 82 Mb/j. [NDLR : avec les biocarburants et la transformation du charbon en carburant liquide, on arrive à 88 Mb/j]. Il me paraît impossible d’aller beaucoup plus loin. Puisque la demande, elle, devrait continuer à augmenter (sauf, peut-être, si la crise gagne les économies émergentes), je m’attends à voir les premières tensions d’ici 2013-2015.

Et ensuite ?

Ensuite, d’après moi, ce sera un déclin de la production sur la période 2015 à 2020. Un déclin pas forcement rapide d’ailleurs, mais un déclin, ça semble clair.

Vous dites «pas forcément rapide». Pourquoi ?

Tout va dépendre du rythme auquel les filières de pétroles non-conventionnels vont pouvoir se développer. La transformation du charbon et du gaz naturel en carburant liquide restera infinitésimale. Pour les biocarburants de première génération, je pense qu’on est déjà proche de la limite maximale. En ce qui concerne la seconde génération, on en est encore au stade des pilotes industriels. Pour arriver à une production significative à l’échelle mondiale, de 2,5 Mb/j mettons, il faudra compter encore un quart de siècle.

Tout cela sera insuffisant pour compenser le déclin des champs existants de pétrole conventionnel, d’après vous ?

Insuffisant, oui.

Des pistes de solutions à la crise actuelle –
Tout cela passe par une mobilisation contre le “mur de l’argent”

Jean gadrey, professeur emerite d’economie, membre de la commission stiglitz sur les nouveaux indicateurs de richessses
Enbata-Alda ! du 15.12.2011

Suite et fin de l’article de Jean Gadrey professeur émérite d’économie, collaborateur d’Alternatives Economiques, membre du Conseil Scientifique d’ATTAC et de la Commission Joseph Stiglitz sur les nouveaux indicateurs de richesses. Après la présentation des origines de la crise, voici des pistes de solutions envisageables.

 

À court terme (dès 2012)

 

*Obliger la BCE à prêter directement aux États en difficulté et annuler la partie illégitime de leurs dettes sur la base d’audits citoyens. Cela couperait les ailes aux marchés et à leurs agences. On y viendra, sauf éclatement dramatique de l’Europe. Mais en cas de refus dans l’immédiat, des solutions nationales existent, sans quitter l’UE ni l’euro.

On en trouve dans le livre de l’économiste Jacques Généreux «Nous, on peut !» (p. 121 et suivantes et p. 99-100) et dans les propositions de l’économiste Alain Grandjean (www.alaingrandjean.fr)  et de la FNH(1)  : passer par un organisme public national de crédit qui pourrait légalement emprunter à la Banque Centrale Européenne (BCE).

Une proposition «nationale» (mais avec l’idée qu’elle soit adoptée par d’autres pays) est retenue aussi bien par Jacques Généreux que par Thomas Coutrot ou plus récemment Jacques Sapir (Le Monde du 2 décembre).

Elle consiste, en France par exemple, à «réquisitionner» la Banque de France pour une période temporaire afin qu’elle crédite le Trésor Public de plusieurs centaines de milliards d’euros à un taux d’intérêt très faible, par exemple 0,5%.

Avec cette création monétaire, le Trésor rachèterait en priorité les obligations détenues par les non résidents, le tout aboutissant à une forte baisse des charges d’intérêt sur la dette française.

«On criera à la rupture des traités. Mais aucun moyen n’existe pour expulser un pays de la zone euro.»

Il y aura certes des mesures de rétorsion envisagées, mais il y aura aussi d’autres peuples qui y verront une issue.

Et cela ferait une énorme pression pour changer le statut et les missions de la BCE. Quant au risque inflationniste lié à cette «planche à euros», il est très faible dans le contexte actuel.

D’autres dispositifs nationaux sont évoqués : emprunt «forcé», comme l’a fait la Californie en 2009 et le premier gouvernement Mitterrand forçant les plus riches à acheter des obligations à deux ans (propositions de l’économiste  Jean-Paul Fitoussi(2)), taux minimum de détention d’obligations nationales par les banques françaises (J. Généreux)…

Et bien entendu, des audits citoyens pouvant déboucher sur l’annulation partielle de la dette décidée unilatéralement mais «légitimement».

Si on ajoute à cela la proposition de la FNH (a priori réservée aux grands investissements de la transition écologique et sociale), cela fait beaucoup de solutions possibles, bien que toutes exigent, à des degrés divers, un bras de fer en Europe (avec  des alliés possibles) mais dont aucune ne suppose de sortir de l’euro.

 

* Une réforme fiscale réduisant fortement les écarts de revenu et de patrimoine, par le bas et par le haut. Cela s’est fait dans le passé, en France comme aux Etats-Unis.

On peut en attendre, sans invoquer la croissance, 100 milliards d’euros par an pour la solidarité nationale, pour revenir à une dette raisonnable et pour les investissements matériels et humains d’une transition écologique et sociale créatrice d’emplois.

Selon des estimations issues de rapports officiels, les niches fiscales et sociales créées depuis 2000 privent l’État de 100 à 140 milliards de recettes annuelles.

Certaines sont défendables au nom de l’intérêt général (fiscalité incitative utile si l’efficacité est prouvée), mais une bonne moitié au moins est constituée de cadeaux aux riches, baptisés investisseurs, et aux entreprises, surtout les plus grandes.

Ces niches légales ne comptent pas les modifications du barème de l’IR, autre facteur de perte de recettes, ni la fraude fiscale, ni la fraude aux cotisations sociales, ni l’évasion dans les paradis fiscaux.

 

* Une séparation des banques d’affaires et des banques de dépôt. L’idée progresse nettement. Une telle séparation peut parfaitement se décider dans un cadre national, avec l’idée de faire tache d’huile.

 

* Une taxation des transactions financières en commençant par l’UE. On y vient, pas assez vite. Une telle décision peut être limitée à l’UE, à un groupe de pays volontaires, et peut même commencer dans un seul pays.

 

* L’interdiction des produits financiers à risques systémiques ou revenant à faire des paris sur les cours de biens essentiels ou sur les pertes d’autrui. On y vient, trop lentement.

Le Parlement Européen a voté le 15 novembre à une écrasante majorité l’interdiction des CDS «à nu», c’est-à-dire des assurances sur les risques des autres permettant de faire des profits spéculatifs en cas de risque de défaut sans détenir d’obligations du pays concerné. On avait comparé ces CDS à des assurances contre le risque d’incendie… de ses voisins. L’impact de la décision du PE est limité, mais cela prouve au moins qu’on peut interdire la spéculation quand on le veut.

 

À moyen terme (2012-2014 et au-delà)

 

Socialiser les banques ou les nationaliser/démocratiser pour les mettre en dehors de tout pouvoir d’actionnaires privés. La monnaie et le crédit comme biens publics.

Ici aussi, des mesures nationales peuvent faire l’affaire si la volonté existe de créer un pôle bancaire public et coopératif chargé d’une politique sélective du crédit (taux très faibles pour les projets d’intérêt général).

On rejoint certaines idées de la FNH de «financer l’avenir sans creuser la dette»(3).

 

*  Des mesures (à débattre) de contrôle des mouvements de capitaux.

 

* En finir avec les paradis fiscaux en s’appuyant au départ sur la reprise en main des banques nationales et européennes.

 

 

 

Pour les deux derniers points on peut penser à un contrôle public et à une taxation des mouvements entre l’UE et le reste du monde et bien entendu à l’interdiction des transactions avec les paradis fiscaux, y compris ceux de l’UE.

 

Une politique de partage du travail (décent) et de création d’emplois d’utilité écologique et sociale mettant fin aux impacts sociaux délétères du chômage.

Les propositions de P. Larrouturou, homme politique français spécialisé dans les questions d’économie  et partisan actif du partage du temps de travail sont utiles dans ce domaine. Voir son «Pour éviter le krach ultime», 2011, (chapitres 8 et 9) avec notamment ses propositions en faveur de la semaine de quatre jours à la carte ou des 32 heures.

Quand il y a au moins 5 millions de chômeurs (si on les compte tous), cette mesure devrait être prioritaire, à côté de la création d’emplois aidés de qualité pour des activités à grande utilité sociale et écologique.

Le tout étant relayé à moyen terme par les effets positifs sur l’emploi d’une grande transition écologique et sociale nécessaire.

 

(1) www.fondation-nature-homme.org

(2) www.ofce.sciences-po.fr/blog/?p=253

http://bercy.blog.lemonde.fr/2011/09/20/lemprunt-force-une-arme-des-etats-face-aux-marches

(3) Téléchargeable via http://financerlavenir.fnh.org/ propositions/financer-lavenir-proposition-et-debat-sur-linnovation-financiere/

Le philosophe français Pierre Rabhi et le directeur de l’ONG Colibris Cyril Dion ont répondu à vos questions…


www.20minutes.fr/vousinterviewez/838308-interviewe-pierre-rabhi-cyril-dion-campagne-touscandidats-2012

Présentation du chat:

Peut-on réellement changer la société? Comment, et quel chemin prendre? Le mouvement Colibris lance une grande campagne citoyenne en parallèle à l’élection présidentielle intitulée Tous candidats en 2012. L’objectif est simple. Il s’agit de créer une communauté de citoyens, d’élus, d’entrepreneurs pour proposer des solutions à l’échelle nationale et européenne et d’agir localement, pour construire une société nouvelle, véritablement écologique et humaine.

– Pierre Rabhi est un auteur et philosophe français. C’est aussi et surtout l’un des pionniers de l’agriculture écologique en France. Il est à l’origine de nombreuses structures, comme l’association Terre & Humanisme, le Mouvement des Oasis en Tous Lieux, le centre agroécologique Les Amanins, la Ferme des enfants-Hameau des Buis et plus récemment Colibris – le Mouvement pour la terre et l’humanisme.

– Cyril Dion est le directeur de l’ONG Colibris. De 2003 à 2007, il a été coordinateur de projets et directeur éditorial pour la fondation « Hommes de Paroles » avec laquelle il a co-organisé un congrès israélo-palestinien en Suisse ainsi que les deux premiers congrès mondiaux des Imams et Rabbins pour la Paix en 2005 et 2006.

 

Bonjour. Que vous inspire la situation actuelle en France et en Europe au niveau de la société et de l’économie? (Christophe G.)

Cyril Dion: Il y a un vrai déficit du politique et des leaders politiques a vraiment avoir prise sur la situation. Ils ont énormément de mal à juguler le système financier et bancaire, le pouvoir se trouve plus du côté financier et cela appelle à une réappropriation du pouvoir par les citoyens pour orienter la société.

Pierre Rabhi: Cela nécessite un véritable changement de paradigme. La logique sur laquelle s’est construite notre existence sur la planète n’est pas durable.

 

Pourquoi avez-vous lancé la campagne « Tous Candidats 2012 »? Pouvez-vous nous expliquer brièvement ce que c’est ? (Lonli)

Cyril Dion: On pense que pour qu’il y ait un vrai changement de société il faut qu’un vaste mouvement populaire se constitue pour agir localement et orienter les décisions politiques à l‘échelle nationale et européenne. On connait des solutions aux crises qu’il y a dans l’agriculture, l’énergie, l’éducation, l’économie, et pour que ces solutions puissent être mises en œuvre il manque une masse critique de personnes qui les portent car les leaders politiques sont pris dans un faisceau d’intérêts qui les mène à l’inertie. Il faut que chacun se réapproprie la politique. Concrètement, les gens peuvent faire deux choses: se déclarer candidat sur touscandidats2012.fr, l’idée étant de compter combien nous sommes à vouloir une autre société, et participer à des forums dans toute la France pour construire un programme citoyen pour 2012 à long-terme, sur 20 ou 30 ans.

Pierre Rabhi: En 2002, il y a eu une expérience de candidature de ma part avec le slogan “appel à l’insurrection des consciences”. Nous avons été surpris de collecter en deux mois et demi presque 200 signatures d’élus avec la création de 96 comités régionaux, y compris DOM TOM, et un débat public démocratique avec des salles combles. Le bilan que nous avons fait a bien mis en évidence que les valeurs que nous mettions en avant étaient des valeurs partagées par un nombre important de citoyens français. En 2007 on m’avait demandé de présenter, mais j’ai refusé car avec 500 signatures on ne veut pas créer un parti ou adhérer à un parti compte tenu que la politique internationale n’est pas en phase avec les grandes mutations et la réalité du monde d’aujourd’hui. On est donc repartis sur une idée de réitérer l’expérience mais sous une nouvelle forme.

 

Qu’est-ce que c’est qu’être un Colibri? Si j’adhère à votre mouvement, qu’est-ce que je pourrai faire ?

Cyril Dion: Etre un colibri, c’est être quelqu’un qui aspire à construire une société vraiment écologique et humaine. Si vous adhérez, vous pourrez découvrir des solutions qui participent à construire cette société, être en relation avec énormément de gens qui partagent les mêmes valeurs, trouver à côté de chez vous des acteurs ou des projets dans cette démarche et initier des actions avec des élus, des entrepreneurs, des citoyens de votre territoire qui souhaitent engager une véritable mutation dans leur ville, leur quartier, leur village.

Pierre Rabhi: Il y a une légende amérindienne qui dit qu’un jour un grand incendie de forêt a pris, tous les animaux étaient atterrés, impuissants, sauf le colibri qui allait prendre quelques gouttes d’eau dans son bec et la jetait sur le feu. Le tatou agacé dit au colibri: “Tu n’imagines quand même pas que c’est avec une goutte d’eau que tu vas éteindre le feu ?” et le colibri répond “Je sais, mais je fais ma part”. Faire sa part peu paraitre anodin mais toutes ces initiatives réunies peuvent produire un séisme positif.

 

D’abord grand MERCI pour tout ce que vous faites ! Avez-vous prévu des actions de grande envergure pour toucher le plus grand nombre? (Green Bazar)

Cyril Dion: Oui nous prévoyons une action de grande envergure en mars qui est pour l’instant un peu secrète. En revanche, nous travaillons déjà à faire connaître l’initiative à travers les médias, que les réseaux et les personnes prennent la responsabilité de diffuser la campagne (chacun trouve 10 personnes qui aspirent au changement). On croit à quelque chose de viral par rapport à une action de mass media.

 

Que pensez-vous de l’initiative du Bhoutan qui mesure la « progression », la richesse de son peuple, via le Bonheur national Brut, et non le Produit national Brut.

Pierre Rabhi: En 1968, un slogan disait “on ne tombe pas amoureux d’un produit national brut”. Le PNB implique la croissance économique, qui se révèle être le problème et non la solution. C’est pour faire de la croissance économique que nous dévorons la planète, qu’on détruit les forêts, qu’on écume les mers, qu’on exclut… Donc on est dans un malentendu et mettre l’indice du bonheur comme référent du progrès me parait tout à fait légitime et pertinent. Nous ne sommes pas sur cette terre pour produire et consommer jusqu’à la fin de nos jours, pour produire du capital mal partagé et destructeur.

 

Êtes-vous pessimistes ou optimistes sur l’avenir? Si vous êtes optimistes, quelles sont les raisons qui vous donnent envie d’y croire ?

Pierre Rabhi: Un écrivain qui s’appelait Bernanos disait que le pessimiste est un imbécile triste, et l’optimiste un imbécile heureux.

Il n’y a que le réalisme et on s’aperçoit que d’un côté on a l’impression que le pire sur cette planète domine le meilleur et pourtant il y a lieu d’être optimiste car on voit partout des gens prendre des initiatives constructives, c’est d’ailleurs la raison pour laquelle nous avons voulu ce mouvement de 2012 pour mettre en évidence tout ce génie créateur de la société civile qui participe à remettre l’histoire sur le chemin.

Cyril Dion: Qu’on soit optimiste ou pessimiste, l’essentiel est de trouver notre propre cohérence là où l’on est et de faire ce qui nous semble le plus juste, faire ce qui rend les gens heureux autour de nous et se nourrir de chaque petit pas qu’on fait quelque soit l’issue. On peut avoir un impact très fort sur la petite partir du monde sur laquelle on vit et on peut se concentrer sur celle-ci, en cherchant à être heureux et à rendre heureux les gens autours de nous en faisant des choses qui ont du sens pour nous.

 

Pensez-vous que l’économie de marché a sorti le monde de la précarité?

Pierre Rabhi: A l’évidence, elle a créé beaucoup plus de précarité qu’elle n’en a résolu, elle est même la cause de la précarité grandissante dans le monde car elle implique la concurrence, la dualité et par conséquent l’idée de la compétitivité, de la performance, exacerbe le fort par rapport au faible et elle devrait être abolie le plus vite possible pour une économie maîtrisée par les individus sur leur propre territoire pour construire leur autonomie. Tout le superflu que je n’achète pas, c’est la richesse que je gagne.

Cyril Dion: La théorie des économistes classiques est que l’économie de marché provoque un ruissellement de la richesse jusqu’aux couches les plus basses de la société, or aujourd’hui on voit plutôt l’inverse: 80% des richesses se concentrent dans 20% des mains. Plus l’économie de marché a de liberté, plus cet effet augmente. C’est intéressant de lire des livres “Quand la misère chasse la pauvreté” de Majid Ranhema, qui explique comment le modèle de développement occidental a déstructuré des sociétés vernaculaires qui avaient organisé les moyens de leur propre subsistance avec peu de choses et qui sont passées d’une situation pauvre mais digne à une situation de misère, conformément aux standards de l’Occident. Des modèles axés sur l’économie locale recréent une forme de prospérité, notamment par la réappropriation de l’économie et de la création monétaire par les citoyens: par exemple le Sol violette à Toulouse, cet argent circule 6 fois plus vite que l’euro. Sur 100 euros investis dans l’économie locale, 80% continuent à irriguer le territoire, tandis que dans l’économie mondialisée comme les multinationales, 20% restent sur le territoire et 80 sont aspirés vers les actionnaires et servent à la recapitalisation de l’entreprise.

Pierre Rabhi: un grand précurseur de tout ça est Ivan Illich, qui mérite d’être réhabilité et relu.

 

Pouvez-vous nous dire quel intérêt autre que symbolique peut-il y avoir dans le fait que nous nous présentions tous? Le symbole a beau être fort (entre 10 et 20.000 « candidats » à ce jour), en quoi peut-il faire changer les choses? (Lelapin64)

Cyril Dion: Les leaders politiques sont bloqués, paralysés. On a vu le sommet de Copenhague où Obama n’a pas réussi à faire passer une réforme de Wall Street, donc la transformation de la société ne passe pas par là. Donc elle passera par la création de prototypes à petite échelle et leur appropriation par une masse critique de personnes. Ca s’est passé comme ça pour l’agriculture, l’écriture, les religions monothéistes… Il faut créer cette communauté pour porter ces prototypes et nous sommes au moment de l’émergence, où ces personnes se réunissent pour constituer une force. On espère que demain on sera 100.000 ou plus et que cette force se construira au fil des mois.

Pierre Rabhi: Il faut sortir de l’illusion selon laquelle si on change les structures on change la société, il faut que l’humain change aussi.

Le problème du changement social passe par le changement de l’humain, une autre éducation plus dans la complémentarité, la solidarité… Il faut reprendre les symboles et les représentations mentales. On peut se chauffer avec des panneaux solaires et manger bio, tout en exploitant son prochain. L’humain s’intègre-t-il comme paramètre du changement ou reste-t-il ce qu’il est avec ses pulsions négatives et change les formes et les apparences alors qu’il faut changer l’esprit. En 2002 on parlait d’insurrection des consciences et pour 2012 on parle de république des consciences. On a toujours voulu substituer des situations les unes aux autres mais on est toujours dans le même dilemme entre le meilleur et le pire, mais fondamentalement la mutation doit être humaine. Si on a des êtres humains modérés, sobres, cela amènera un changement  profond.

 

Quelles sont vos propositions essentielles ? (Green Bazar)

Pierre Rabhi: On vient de parler du changement humain, et cela ramène à notre responsabilité propre à l’égard du changement social par le changement individuel. Ensuite, l’éducation des enfants, pourquoi la compétitivité alors que la complémentarité serait mieux, pourquoi la subordination du féminin alors que féminin et masculin sont les deux éléments constitutifs de l’équilibre, produire et consommer localement plutôt que transporter la nourriture des antipodes.

Cyril Dion: On voudrait aller vers une agriculture fondée sur l’agro écologie biologique en circuit court et vivrière, engager un plan de transition énergétique pour nos territoires et spécifiquement pour la France basé sur la sobriété, l’efficacité énergétique et les énergies renouvelables et sortir progressivement des énergies fossiles (pétrole et nucléaire). Sortir aussi de la monoculture monétaire pour rendre la création monétaire aux Etats, mais de façon plus large aux peuples, aux collectivités, aux entreprises pour construire des économies locales, sociales, qui participent au bien être des communautés et pas dont l’objectif est de faire du profit à tout prix, repenser l’urbanisme pour remettre l’être humain en lien avec la nature, etc.

 

Pourquoi ne pas créer des « avant postes » Colibris dans chaque ville sous forme de café associatif, lieu d’échange et de partage de savoir… Des Jardins collectifs, partagés, pédagogiques, dans toutes les villes… pour alimenter les collectivités et les habitants… (Green Bazar)
Cyril Dion: Il existe près d’une centaine de relais locaux Colibris en France, Belgique, Suisse et au Québec, que vous pouvez trouver sur le site. Ces relais sont des groupes qui initient des actions sur leur territoire pour transformer la société à leur échelle (AMAP, jardins partagés, cantines bio, monnaies locales, écoles alternatives…).

 

Pourquoi les AMAP ne sont-ils pas plus encouragés par les politiques? C’est quand même un excellent système pour la planète, l’économie des agriculteurs, notre santé… (Lilou)

Cyril Dion: Parce qu’il y a un lobby agroalimentaire en France considérable. Le lobby de la pétrochimie (engrais, produits phytosanitaires, semences) est extrêmement puissant. Les AMAP sont un système vraiment autonome qui ne permet pas à des entreprises privées de faire du profit, donc ça ne participe pas à la logique de croissance économique, donc le politique ne l’encourage pas.

Pierre Rabhi: Des dispositifs criminels existent, on essaye de faire avancer les OGM, on vient d’interdire aux agriculteurs d’utiliser gratuitement leurs semences de ferme.

 

 

On peut dire qu’il y a un scénario actuellement entre les sols pollués et maltraités, l’eau polluée, les semences traditionnelles mises à mal, les paysans authentiques qui disparaissent, la concentration de l’alimentation qui procède plutôt par transport incessant au détriment de la production locale… Tout cela prépare certainement une pénurie alimentaire sans précédent.

 

Bonjour Mr Pierre Rabhi et Mr Cyril Dion. Moi aussi je tiens à vous remercier car vous donnez un peu d’espoir à travers chacune de vos interventions. De l’espoir pour tous qui est indispensable… Voilà donc mes questions que je vous pose à tous deux : Où puisez-vous la force qui vous permet de continuer à vous battre pour vos convictions? Que faire pour s’impliquer plus encore dans la défense de la vie? J’espère que vous voudrez et pourrez répondre à mes questions. (Wolfy71)

Pierre Rabhi: Nous vivons de la force de nos convictions, elles nous alimentent, ce qui est chevillé dans notre âme comme valeurs. On est presque complètement au service des valeurs qui nous donnent l’énergie pour continuer.

C’est une idée de cohérence: je ne peux pas être présent dans ce monde, constater des choses qui heurtent ma conscience et dire c’est comme ça. On essaye d’agir sans avoir l’illusion qu’on va changer le monde seul. Mais je crois à la valeur du ferment, quelque chose de minime mais qui détermine l’évolution. Comment continuer en construisant des exemples, en incarnant les utopies, ça ne tient pas forcément à la force que nous avons mais à quelque chose qui la transcende pour aller vers une énergie indescriptible. Parfois on me demande pourquoi je ne reste pas tranquille, les voisins vont au bistrot, jouent à la pétanque, boivent un verre de rouge, parfois je les envie mais nous on ‘n’arrête pas de s’agiter car quelque chose en nous nous aiguillonne profondément. Je n’aimerais pas que mes petits enfants me disent tu savais et tu n’as rien fait car l’héritage que nous leur laissons pourrait être très difficile. Ma conscience ne me permet pas de leur laisser un monde dégradé.

Cyril Dion: Si on voulait sauver le monde ce serait désespérant, moi ce qui me donne de l’énergie est de faire les choses qui me passionnent et me sentir parfois utile à quelques personnes qui nous le témoignent. Si chacun faisait ce pourquoi il a le plus de talent et qui le rend plus heureux, la société fonctionnerait mieux et ce ne serait pas un effort. Plutôt que de se battre contre un système injuste, il faut chercher ce qu’il y a de plus vivant et épanouissant en nous et ce n’est pas d’envoyer des missiles ou faire exploser des bombes… Quand on est heureux, c’est contagieux.

 

Quelles sont vos solutions concrètes, crédibles et réalisables pour réduire le déficit de l’Etat? (scheu)
Pierre Rabhi: Il faut sortir du malentendu: ce que nous appelons économie est du gaspillage et de la destruction. La croissance économique est aussi un malentendu: on ait de la croissance économique avec tout, y compris en liquidant la faune, en détruisant les forêts, en mettant les gens dehors… il faut déjà une grande définition de l’économie qui n’est pas celle d’aujourd’hui. A partir de là, il faudrait mettre l’humain au cœur de la logique au lieu de la finance. L’économie deviendrait le souci d’augmenter le bonheur et la satisfaction et non pas la frustration et l’exclusion.

Cyril Dion: Si on veut réduire le déficit de l’Etat il faut rendre la création monétaire à l’Etat et pas aux banques privées. Jusqu’en 1973, la Banque de France prêtait à l’Etat à des taux quasiment nuls. Depuis que nous avons donné le monopole de la création monétaire à des banques privées dont l’objectif est la rentabilité et le profit financier, la dette de la France a totalement explosé. il existe des simulations sur ce que serait la dette de l’Etat si nous étions restés dans le système d’avant 1973 et la différence est édifiante.

 

Comme je suis Drômoise, j’ai eu le plaisir d’entendre quelques-fois Pierre Rabhi lors de manifestations aux Amanins, et je lis et écoute souvent ses interventions sur les medias. J’admire sa vision positive et constructive.. Sur quoi se baser et comment maintenir le cap lorsqu’on évolue dans un environnement anxiogène avec une population qui a de plus en plus peur de son voisin, de perdre ce qu’elle possède, de ne pas pouvoir manger, se loger, se soigner, se former? Que dire à nos enfants et notre entourage durant cette période compliquée ? (Patfree)

Pierre Rabhi: J’avais préconisé un concept “L’oasis en tous lieux”. La société est très anxiogène car elle est désocialisée, il n’y a plus de solidarité entre les gens. Dans nos systèmes éclatés depuis les trente glorieuses, avoir son salaire, sa maison, a certes permis l’accès à chacun à des biens de base mais en 1968 l’un des slogans était le ras le bol de la société de consommation.

C’était le dégout de la grosse prospérité, or aujourd’hui on se trouve dans une situation dans laquelle il y a un retournement de la situation qui fait que de plus en plus de gens vivent dans l’anxiété et la solitude. La création d’oasis est de recréer des lieux de solidarité, d’échange, de mutualisation des moyens qui permet que les individus ne soient plus livrés seuls à leur destin. Voir “Oasis en tous lieux” sur internet.

 

Ma découverte de Pierre Rabhi est récente mais cela a été un véritable électrochoc dans ma vie. J’ai lu tous ses livres dont l’écriture poétique à la fois douce et puissante m’a transportée. Il y a vraiment pour moi un « avant » et un « après » Pierre Rabhi! Pour moi qui suis d’une famille de droite où mes parents exerçaient des professions libérales, qui travaillaient dur, étaient attentifs aux autres,  j’ai moi-même créé mon entreprise dans un souci d’éthique et de relations humaines, il me semble urgent de dépasser ce vieux clivage gauche/droite basé sur l’opposition systématique entre patrons et salariés. Il y a des patrons tyranniques tout comme il y a des employés peu scrupuleux. Qu’en pensez-vous? (ninnie75)

Pierre Rabhi: Je suis très heureux d’avoir été utile et je vous remercie de m’honorer de votre confiance. On revient toujours à la question fondamentale: il ne faut pas confondre les structures superficielles et la personne elle même. Ce monde a besoin de convivialité, de compassion, de valeurs fondamentales qui permettent l’amour dont le monde a besoin.

 

Bonjour à tous les deux. Monsieur Rabhi, en 2002, vous vous étiez engagé dans la campagne présidentielle, tout comme Nicolas Hulot en 2007. Pensez-vous que l’écologie politique est nécessaire, voire, souhaitable ? Vous sentez vous proche de ses représentants ? N’est ce pas à nous d’imaginer et de créer, afin d’imposer nos évidences, nos expériences aux élus ? Merci (Gregcatel)
Pierre Rabhi:
Il ne devrait même pas y avoir de parti écologique car nous sommes tous concernés. L’écologie, tout le monde est absolument concerné car ce sont les fondements de la vie et ça devait être quelque chose d’inclus dans la vie depuis l’éducation des enfants. Mais cette notion a été exclue du système car on est parti sur une logique de production-destruction, mais le patrimoine manquera aux générations futures. Je suis très reconnaissant à toutes les personnes préoccupées par l’écologie et les amis dans le monde de la politique, mais il faut qu’elles incluent des critères tels que la beauté et l’esprit. Intégrer cela dans notre vision écologique me parait indispensable, sinon on reste dans le factuel alors que l’humain est fait pour admirer, aimer, s’enchanter, c’est ce que l’écologie doit nous apporter et ne pas être seulement une bataille contre la pollution.

L’écologie doit reposer aussi sur cette nécessité d’admirer la vie et nous nourrir de ces biens abstraits. Je suis plus proche des consciences qui ont un souci de la vie que des partis.

 

C’est mon changement qui détermine le changement du monde » lit-on sur Colibris. Je suis d’accord avec cette maxime. La question que je vous pose c’est comment changer les mentalités? (koutoumi)

Cyril Dion: Gandhi disait “Donner l’exemple n’est pas la meilleure façon de convaincre, c’est la seule”. On ne peut pas forcer les gens à changer de mentalité, on peut simplement être un témoignage de quelqu’un qui se met en cohérence avec ses valeurs, qui agit, qui incarne des utopies, et la valeur de l’exemple est très forte pour donner envie à d’autres de s’engager dans des chemins similaires.

Pierre Rabhi: Nietzsche disait à certains chrétiens “Il faut que nous ayez l’air un peu plus sauvés pour qu’on croit à votre sauveur”. La valeur de l’exemple nous amène à être dans notre vérité, dans notre sincérité et dans le témoignage qui a une grande puissance. D’autant plus dans notre société où il y a pléthore de théories sur le monde qui va mal mais le problème n’est plus de faire le constat, mais d’agir. C’est pour ça que nous tenons à la dimension concrète de Colibris, l’encensement et la connexion des consciences, et le pendant concret dans différentes structures témoins, tangibles, destinées à dire “autre chose est possible”.

 

Que pensez-vous de l’action de Nicolas Sarkozy, sur le plan économique et nucléaire? Pensez-vous que l’on puisse en sortir, si oui, comment? (abigaelle)

Cyril Dion: Nicolas Sarkozy réfléchit comme un homme du 20e siècle. Je pense qu’on peut sortir progressivement du nucléaire, il y a un scénario élaboré par les ingénieurs de négaWatt qui propose un chemin de transition énergétique et qui a modélisé une sortie du nucléaire entre 2030 et 2035, à un moment où une bonne partie du parc nucléaire devra être renouvelé et où un grand nombre de salariés de cette industrie partiront à la retraite. C’est la fenêtre idéale pour utiliser les investissements qu’on aurait fait dans les centrales pour développer les énergies renouvelables. Le scénario est aussi basé sur les énormes économies d’énergie que nous pourrions faire, c’est à ce jour le gisement le plus important  d’énergie propre dans leur scénario.
Pierre Rabhi: Toutes ces questions ne peuvent être solutionnées sans parallèlement mettre en route un paradigme reposant sur la performance de la modération. Ce qu’on réalise avec les moyens les plus simples sont ceux qui traduisent l’intelligence et l’astuce, ce n’est pas la complexité qui me parait performant. On est dans l’inversion du mental.

 

Comment envisagez-vous de progresser sur la dynamique la relation Nord-Sud? (Peter et Nathalie)
Pierre Rabhi: Nous avons une expérience de plusieurs décennies sur la transmission de l’agro écologie aux pays du Sud. Nous avons fait la démonstration que cette approche agronomique et écologique est parfaitement appropriée aux populations les plus démunies et nous voulons élargir cette action, ce qui nous a amené à la création d’une Fondation Pierre Rabhi pour la sécurité, la salubrité et l’autonomie alimentaire des populations. Cette fondation est destinée à soutenir des programmes élargis au Maghreb, en Afrique noire, en Europe de l’Est et probablement ailleurs.

Cyril Dion: Ce qui est important aujourd’hui est de se relier les uns aux autres, de se rassembler. Une étude sociologique montre que 25% de la population aux USA, en Europe et au Japon étaient d’accord pour construire une société fondée sur des valeurs telles que l’écologie, l’équilibrage féminin-masculin, l’implication sociétale, la connaissance de soi, or ces personnes pensaient n’être que 5% de la population. L’enjeu est de prendre conscience de la force que nous représentons, et c’est pour cela que nous avons créé cette campagne Tous candidats et je vous incite à aller vous inscrire sur le site touscandidats2012. Merci beaucoup pour vos questions et pour nous avoir lu.

 

Klima aldaketa: Negutegi efektua eragiten duten gasen isurketak gora egin du urteotan, baina agintariek ezikusiarena egiten dute

Jose Angel Oria
www.gaur8.info/edukiak/20111217/310116/Klima-aldaketa-Negutegi-efektua-eragiten-duten-gasenisurketak-gora-egin-du-urteotan-baina-agintariek-ezikusiarena-egiten-dute-b POLITIKA / 2011.12.16

Kyotoko Protokoloa ordezkatuko duen ituna adosteko beste ahalegin bat antolatu du NBE Nazio Batuen Erakundeak Kopenhagen 2009an eta Mexikoko Cancunen handik urtebetera egindako gailurrek porrot egin ondoren, baina Hegoafrikako Durban hirian egin berri den goi-bilerak ere emaitza bera utzi du. Aberatsenen interesek irabazi dute.

 

Planetaren azken aukera omen zena alferrik galdu da, klima aldaketaren ondorioak jasaten hasiak diren herrialdeen kalterako, batez ere. Horien eskakizunei ez zaie jaramonik egin eta badirudi gainerako guztiak lasai egoteko moduan daudela, baina klima aldaketa gure planeta hondatzen ari da.

 

Kanadak Kyoto utzi du.

Gainera, une honetan egoera larriagotu egin da, Kanadak Kyotoko Protokoloa uztea erabaki baitu. Japoniako hirian sinatutako idatziak dioena ezin duela bete argudiatu du Ottawako Gobernuak. Aurreikusitako isunak ez ordaintzea da Kanadako agintarien helburua, hazkunde ekonomikoari eta horrek eragiten duen kutsadurari uko egiteko asmorik ez dute-eta. Peter Kent Kanadako Ingurumen ministroak egin zuen iragarpena Durbango goi-bilera igandean amaitu ondoren, Kanadara itzuli berritan.

«Zartako galanta munduko klimarentzat», irakurri izan dugu hedabide batzuetan. Mojib Latif klimatologoak Deutsche Welle telebista kate alemanari esan dionez, Kanadak hartutako erabakiak agerian uzten du gai honetan nazioarteko komunitateak porrot egin duela. «Azken urteotan klima babesteko ez dela ezer aurreratu egiaztatu baino ez du egin Kanadak», gaineratu du adituak. Bere kalkuluen arabera, 1990az geroztik, negutegi efektua eragiten duten gasen isurketa %40 hazi da munduan, murriztu beharrean. Horiek horrela, Latiferentzat, energia berriztagarrien erabilera da irtenbidea, eta horren haritik, Alemaniaren jokaerari ereduzkoa irizten dio.

 

14.000 milioi dolar.

Kanadak egin du Kyotoko Protokoloa uzteko urratsa, baina Errusiak eta Japoniak ere asmo bera azaldu zuten Durbanen. Kanadako hedabideek Hegoafrikako goi-bilera hasi aurretik iragarri zuten Stephen Harper lehen ministro kontserbadorearen Gobernuak ez zuela Kyoton jarraitu nahi, baina ez zuten uste erabakia hain bizkor plazaratuko zenik. Hortaz, zergatik aurreratu da Kanada? Adituen arabera, finantza arrazoiengatik. Izan ere, 2011 urtea amaitu baino lehen Kyotoko Protokoloa utziz gero, negutegi efektua eragiten duten gasak ez murriztu izanaren ondoriozko isunik ez du ordaindu beharko. 14.000 milioi dolareko isuna izango litzatekeela zehaztu du aste honetan Kent Kanadako Ingurumen ministroak, herrialdeko familia bakoitzeko 1.600 dolar, alegia.

Kent ministroak esan duenez, Kyotoko Protokoloa bete ahal izateko, hurrengo urtean Kanadako errepideetatik ibilgailu guztiak kendu beharko lirateke edo, bestela, eraikin guztietatiko berogailuak. Hitzartutakoa bete nahi ez duenaren aitzakiak dirudite.

 

Txina eta AEB ak.

Hori bai, arazoa ez da Kanadaren jarrera, Protokoloa ez dela eraginkorra baizik, beti ere Ottawako agintarien arabera. Kent ministroaren irakurketaren arabera, gas kutsakor gehien isurtzen duten bi herrialdeek, AEB ek eta Txinak, Kyoto onartu ez izanak dakar aipatutako Protokoloaren ez-eraginkortasuna.

 

Albertako petrolio hobiak.

Ekologistek berehala salatu dute kanadarren erabakia. Keith Stewart Greenpeaceko eledunak adierazi duenez, Kyotoko Protokoloa utzi ondoren, Kanadak Albertako petrolio hobiak arazorik gabe ustiatzeko aukera izango duela, eta horixe da, hain juxtu, egin dutena egiteko benetako arrazoia. Alderdi Kontserbadoreak botere handia du Albertan eta bertako petrolio hobiak, Saudi Arabiakoen ondoren, munduko handienak direla uste da. Negozioa egiteko aukera dagoen bakoitzean esaten den moduan, hobi horiek ustiatzea «ezinbestekoa» da Kanadako ekonomiaren etorkizunerako. Lemoiz ere «ezinbestekoa» zen moduan, gutxi gorabehera.

 

«Etsigarria».

Kyotoko protokoloaren azken urtea da 2012a, baina ahalegin horretan jarraitu beharra dugu gizakiok, aipatu dokumentua onartu zutenean sinatzaileek zituzten helburuak ez baitira bete. Durbanen ez da gauza handirik aurreratu ordea. Espero baino egun eta erdi beranduago adostutako hitzarmena ez da, antza denez, planetak behar duena. Greenpeacek eta beste erakunde batzuek «etsigarritzat» jo dute testua, batez ere «aberatsen interesak» defendatzen dituelako.

 

Beste Protokolo bat.

Azken orduan eta ordezkariak erdi lo zeudela erabakitakoaren arabera, 2015erako «protokolo bat, legezko tresna bat edo legezko indarra duen hitzartutako emaitza bat» egingo dute. Konpromiso hori 2020an sartuko da indarrean eta Estatu bakoitzak urtean isuri ahal izango dituen gas kutsakorren kopuruak zehaztuko ditu. Oraingoz Kyotoko Protokoloa indarrean mantenduko dute, baina ez dute zehaztu 2017 ala 2020ra arte izango den.

 

Eztabaida mugatua.

xinak, AEB ek eta Indiak, aurreko asteetan iragarri bezala, ukatu egin dute gas isurketak mugatzen dituen legezko protokoloa herrialde guztiei ezartzea, eta horrek erabat mugatu eta baldintzatu du Estatuen arteko eztabaida Durbanen.

 

2015ari begira.

Durbango porrotetik gauza baikorren bat atera nahian, Stephen Leahy IPS agentziako kazetariak nabarmendu duenez, «Gobernuek onartu dute beharrezkoa dela klimari buruzko itun unibertsal bat», 2015erako adostu eta herrialde guztiek errespetatu beharreko itun hori, alegia. «Eztabaida garratz eta sutsuetan bi aste egin ondoren, beste 29 orduz jarraitu zuten ezbaika. Azkenean, Durbango Plataforma deitzen den dokumentu tekniko sorta onartu zuten». Leahyren arabera, goraipatzekoa da NBE ko 193 herrialdeak lehen aldiz ados jarri direla klima aldaketaren inguruan guztien elkarlana ezinbestekoa dela onartzeko.

 

3,5 gradu beroagoa.

Adituen kalkuluen arabera, gauzak dauden moduan egonda eta Kopenhageko gailurrean Txinak, Brasilek, Hegoafrikak, Indiak eta beste herrialde batzuek hartutako murrizketa konpromisoak kontuan hartuta, planetako tenperaturak 3,5 gradu egingo du gora, bataz beste. Aditu batzuek diote kalkulu horiek ez direla zuzenak eta benetako tenperatura igoera laupabost gradukoa izango dela.

 

Zurikeria.

AEB ek, Kanadak eta Europar Batasunak beraien jarrera zuritzeko asmoz eginiko adierazpenek aurkakoa aditzera ematen badute ere, herrialde aberatsenek baino murrizketa handiagoak agindu dituzte Durbanen pobretuek, nahiz eta gaur egun industrializatuta dauden herrialde horiek diren gizakiok orain arte egin ditugun gas kutsakorren isurketen %75aren erantzule.

 

«Sabotajegileak».

Maite Nkoana-Mashabane Durbango goi-bileraren presidenteak berak behin baino gehiagotan eskatu zien gobernuei beraien interesak albo batera utzi eta planetaren eta herrien interesak babesteko. Baina herrialde aberats batzuek, AEB ak, Kanada eta Saudi Arabia barne, ez zuten horrelakorik entzun ere egin nahi, nahiz eta herrialde pobretuetako ordezkariak haserretu. «Tristeena da AEB ek zuzendutako sabotajegileek azkenean lortu dutela nahi zutena, klimaren inguruko hurrengo itun handia loteslea izatea, alegia, horixe agintzen duen klausula izango duelako», Kumi Naidoo Greenpeaceko buruak adierazi duenez. Bere iritziz, argi geratu da agintariek oso kontuan hartzen dituztela gehien kutsatzen duten konpainia handien hitzak, eta jaramonik ez dietela egiten beraien herriei.

 

Epeak beteta ere… oso gutxi.

Demagun Durbanen adostutako bidean urratsak egiten direla eta 2015ean Kyotoko Protokoloa ordezkatuko duen konpromisoa hartzen dela: konpromiso loteslea eta zorrotza. Gauzak horrela gertatuta ere, kontuan hartu behar da adostutakoa gobernuek onartu beharko dutela indarrean jarri baino lehen. Kyotoko Protokoloa, esaterako, 1997an adostu zen, baina 2005 arte ez zen indarrean jarri. Bill Hare Alemaniako Climate Analytics taldeko zuzendariak adierazi duenez, zenbat eta beranduago hartu gas kutsakorrak murrizteko neurriak, orduan eta garestiagoak eta gogorragoak izango dira neurri horiek, planetaren tenperatura bi gradu baino gehiago ez igotzeko helburuari eutsiz gero bederen.

Tenperatura eta kostua.

Zenbat murriztu behar dira negutegi efektua eragiten duten gasen isurketak? Zenbateko kostua izango dute murrizketa horiek? Bi aldagai horiek kontuan hartuta urteotan egin diren ikerketen arabera, tenperatura maila onargarrien barruan egon dadin, 2015 eta 2020 urteen artean iritsi beharko genuke isurketa kopururik handienera, eta hortik aurrera mundu osoan isurtzern diren gas kutsakorren kopuruak behera egiten hasi beharko luke. Isurketa gehieneko momentu hori beranduago iritsiko balitz, atzeratu egingo litzateke beherako bidea ere, eta horrek zer eragin dezakeen pentsatzeak berak ere beldurra eragiten du. Adituek diote hartu beharreko neurriak asko garestituko liratekeela eta oso egoera arriskutsuan bizi beharko genukeela. «Oso ondo zaindutako hitzaldi dotoreek eta diskurtso sendoenek ere ezin dituzte Fisikaren legeak aldatu. Atmosferak gauza bakarrari egiten dio kasu, isurketei», gogorarazi du Alden Meyer AEB etako Zientzialari Kezkatuen Batasuneko zuzendariak.

Zainketa intentsiboekin.

Herrialde aberatsenetako ordezkariek baino askoz ere argiago hitz egiten dute normalean herrialde pobretuetakoek. «Benetako erabakiak hurrengo goi-bilerarako utzi dira -esan zuen Pablo Solon Boliviako ordezkariak-. Protokoloak zainketa intentsiboetan jarraitzen du». Bankuak erreskatatzeko nahikoa diru badago, baina planeta salbatzeko, ez.