Articles du Vendredi : Sélection du 20 septembre

La France a-t-elle respecté ses objectifs climat-énergie en 2023 ?
RAC
https://reseauactionclimat.org/la-france-a-t-elle-respecte-ses-objectifs-climat-energie-en-2023

Alors que la France entière attend encore et toujours la dernière mouture de la stratégie climat-énergie du gouvernement, quels sont les progrès réalisés jusqu’à présent ? Depuis 2017, le Réseau Action Climat publie l’Observatoire Climat Énergie, un tableau de bord objectif et indépendant pour le suivi des objectifs nationaux.

En 2023, la France a réussi à respecter le budget carbone que fixait la dernière Stratégie nationale bas carbone (SNBC), avec un peu de marge. En particulier, le secteur des bâtiments continue de voir ses émissions baisser, sous l’effet croisé des prix de l’énergie qui sont restés élevés, mais également de la sobriété volontaire, de la montée en puissance de la rénovation performante des bâtiments et de l’électrification du chauffage.

De même, le secteur de l’industrie continue sa baisse d’émissions. Comme nous le soulignions dans notre rapport sur la décarbonation de l’industrie française, cette baisse repose encore en grande partie sur la baisse de la production, et elle ne pourra se poursuivre sereinement qu’en entamant une véritable transformation industrielle.

Dernier secteur très émetteur qui tient ses engagements, l’agriculture respecte son budget carbone à quelques tonnes près, marqué par la baisse du cheptel bovin (de manière plus ralentie que les années précédentes), mais également par la baisse notable de l’usage d’engrais azotés.

En revanche, le secteur des transports, qui n’a pas connu de grande réorientation, n’atteint pas ses objectifs. Ses émissions baissent toutefois, largement marqué par la hausse des prix des carburants, qui a incité les automobilistes à modifier leurs habitudes et réduire leurs déplacements. En revanche, si l’aviation domestique a connu une légère diminution de ses activités, notons que l’aviation internationale, non incluse dans les émissions territoriales, continue de voir ses émissions s’envoler, avec une hausse de 16% entre 2022 et 2023 !

Enfin, le secteur le plus éloigné de ses objectifs reste celui des forêts et des sols. La croissance des forêts et l’apport de matières organiques aux sols doit absorber le carbone que les autres secteurs continueront d’émettre. Cependant, les forêts ne sont pas en forme, heurtées par des sécheresses et des parasites renforcés par le réchauffement climatique. En fin d’année, et d’après des chiffres encore à consolider, les puits de carbone français n’ont absorbé que la moitié de l’objectif, trop élevé, issu de la SNBC. Un rappel qu’il faut repenser notre politique forestière pour privilégier la durabilité des forêts plutôt que leur rentabilité, mais aussi renforcer la baisse des émissions dans les autres secteurs.

Du côté de notre énergie, le tableau est contrasté. La réduction globale de notre consommation d’énergie a permis de tenir nos objectifs de baisse de la consommation d’énergie fossiles, hormis pour les produits pétroliers où la consommation dépasse légèrement l’objectif. En revanche, la France n’atteint que cette année l’objectif de part d’énergies renouvelables qu’elle s’était fixée pour 2020, avec 22,2% de l’énergie finale brute consommée. En réalité, c’est surtout la baisse, en grande partie contrainte, des consommations qui a permis l’atteinte de nos objectifs. La sortie des énergies fossiles ne pourra être réalisée suffisamment rapidement que si la France renforce sa production d’électricité au plus vite, c’est-à-dire en accélérant sérieusement sur l’énergie éolienne et le photovoltaïque.

Un tableau contrasté qui appelle à des changements structurels

En fin de compte, les chiffres de l’Observatoire Climat Energie font preuve d’une atteinte fragile des objectifs climatiques, et permettent d’identifier les faiblesses des politiques sectorielles qui doivent être comblées en priorité. Une nouvelle fois, le Réseau Action Climat appelle à prendre la mesure de l’urgence climatique et à agir rapidement, mais surtout de manière ambitieuse et non seulement cosmétique, ou par des mesurettes qui ne seraient que des pansements sur des plaies béantes.

Les mois prochains seront critiques pour la planification écologique. Non seulement des changements structurels sont nécessaires afin de pérenniser les avancées conjoncturelles après la sortie de la crise des prix de l’énergie, mais la France devra aussi se doter de nouveaux objectifs, rehaussés en accord avec les règles européennes, sur le climat et l’énergie.

La 3e SNBC et la 3e PPE (Programmation pluriannuelle de l’énergie), qui auraient dû être publiées avant juin 2023, et dont la mise en consultation publique est urgente, doivent donc nous permettre de passer une vitesse et d’activer les leviers réellement efficaces et suffisamment ambitieux pour atteindre la neutralité carbone le plus vite possible, tout en apportant des solutions concrètes et accessibles aux ménages pour sortir de la dépendance aux énergies fossiles.

Transition écologique : les collectivités locales devraient investir deux fois plus
Reporterre
https://reporterre.net/Transition-ecologique-les-collectivites-locales-devraient-investir-deux-fois-plus

Pour réussir la transition écologique, les collectivités territoriales vont devoir investir encore plus massivement : 11 milliards d’euros en plus chaque année jusqu’en 2030, soit plus du double de leurs investissements actuels. C’est la conclusion d’une étude de l’Institut de l’économie pour le climat (I4CE) et de La Banque postale publiée le 13 septembre.

« Ces besoins sont en majorité liés à la décarbonation du patrimoine et des équipements des collectivités locales, ainsi qu’au financement des infrastructures de transport », expliquent les auteurs. Et encore, il ne s’agit là que d’un minimum, avertissent-ils, car n’ont pas été inclus l’ensemble des secteurs de la planification écologique, ni les possibles dépenses de fonctionnement nécessaires à la mise en œuvre des politiques climatiques locales.

Mobilité électrique (véhicules et infrastructures de recharge), transports collectifs, rénovation énergétique des bâtiments publics… Entre 2017 et 2022, communes, intercommunalités, départements et régions ont augmenté leurs dépenses climat de 44 % pour atteindre 8,3 milliards d’euros. En 2023, ce montant a explosé à dix milliards d’euros, en raison notamment de l’inflation.

Signaux brouillés

L’institut de recherche interpelle l’État : le cadre offert par la loi de programmation des finances publiques 2023-2027 et le programme de stabilité (PSTAB) d’avril 2024 sont incompatibles avec les investissements nécessaires à la transition. Des coupes budgétaires pourraient « brouiller le signal envoyé aux acteurs locaux en faveur de la transition à travers la création du Fonds vert ». Il demande aux pouvoirs publics de stabiliser ce fonds vert.

Ce rapport tombe à pic alors que l’ancien Premier ministre prévoyait de raboter le fonds vert d’un milliard d’euros en 2025, dans les documents préparatoires au nouveau budget. Et que Bercy a récemment accusé les collectivités territoriales d’être responsables du dérapage des finances publiques en raison d’une augmentation de leurs dépenses « qui […] pourrait à elle seule dégrader les comptes 2024 de 16 milliards d’euros ».


«La France n’a plus les moyens» : le gouverneur de la Banque de France appelle à revenir sur les baisses d’impôts des plus favorisés
Libération
www.liberation.fr/economie/la-france-na-plus-les-moyens-le-gouverneur-de-la-banque-de-france-appelle-a-revenir-sur-les-baisses-dimpots-des-plus-favorises-20240918

François Villeroy de Galhau a estimé mardi 17 septembre dans une interview au «Parisien» que la baisse des dépenses de l’Etat devait s’accompagner d’une hausse temporaire de la fiscalité pour les plus fortunés. Michel Barnier réfléchit également à ce scénario mais fait face à des oppositions au sein de sa fragile coalition.

Le gouverneur de la Banque de France ne passe pas par quatre chemins. Lors d’une interview accordée mardi 17 septembre au Parisien, François Villeroy de Galhau a souhaité «lever le tabou sur les hausses d’impôts» afin de faire revenir le déficit public sous la barre symbolique des 3 % d’ici à 2029. Selon lui, il faut «trouver 100 milliards d’euros sur cinq, soit 20 milliards d’euros par an».

 

Un rééquilibrage des finances que le haut fonctionnaire de 65 ans chiffre sur BFMTV à environ «trois quarts de l’effort, au niveau de l’Etat mais aussi des dépenses locales et sociales» et le quart restant par des hausses d’impôts. Il précise que cela doit passer par une amélioration de «l’efficacité des dépenses de fonctionnement tout en préservant les dépenses qui préparent l’avenir. Il ne s’agit d’ailleurs pas de faire globalement reculer les dépenses […], ce n’est pas de l’austérité».

Pour lui, «la France n’a plus les moyens de ces baisses d’impôts non financées» qui ont été déployées depuis 2017. «Elles creusent encore plus les déficits, ce qui augmente l’inquiétude des Français, des acteurs économiques. Cela n’apporte pas du coup la stimulation attendue», analyse-t-il. Une situation budgétaire qui appelle à de «la justice fiscale» avec «un effort exceptionnel et raisonnable sur certaines grandes entreprises et certains gros contribuables» sans que l’on touche «aux classes moyennes ni [aux] PME». Villeroy de Galhau souhaite que le Parlement s’attaque à «certaines niches fiscales [qui] profitent plus aux grands groupes et aux ménages les plus favorisés» ainsi qu’à «certaines exonérations sur les carburants [qui] encouragent en fait la consommation d’énergie fossile».

Renaissance et Les Républicains en eaux troubles

Des déclarations qui interviennent alors que Michel Barnier, alarmé par une situation budgétaire «très grave», réfléchit aussi à augmenter les impôts. Une piste de travail qui bloque du côté du camp présidentiel. La macronie, qui fait de son combat contre la hausse de la fiscalité un dogme politique, même pour les plus fortunés, conditionne sa participation au gouvernement à une promesse de ne pas toucher aux impôts. Gérald Darmanin demande que le nouveau locataire de Matignon clarifie ses positions avant sa déclaration de politique générale. Gabriel Attal fait également monter la pression auprès de son prédécesseur et exige une «délégation restreinte» pour avoir une «visibilité claire» sur l’augmentation de l’imposition et sur les «grands équilibres gouvernementaux». «Ces deux points sont essentiels à la réussite de ce futur gouvernement et donc à notre participation», ajoute-t-il. La réunion qui devait avoir lieu ce mercredi matin a été reportée.

Du côté des Républicains, la situation est embarrassante. Après avoir fait campagne sur une baisse de la fiscalité, la droite se trouve maintenant à réfléchir à mettre à contribution les hauts revenus et les entreprises en bonne santé pour assainir les comptes publics. Certains élus LR, proche de Michel Barnier, envisagent l’hypothèse de rétablir l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF), rapporte le Parisien. Un casse-tête pour le nouveau Premier ministre, déchiré entre ses soutiens et les finances publiques.

Transition écologique : les deux visages de Michel Barnier
Matthieu Goar
www.lemonde.fr/planete/article/2024/09/20/transition-ecologique-les-deux-visages-de-michel-barnier_6325008_3244.html

 

Ministre de l’environnement dans les années 1990, l’actuel premier ministre a mis en place à cette époque certains des fondements de la politique verte de la France. Pionnier à droite sur les questions écologiques, il a ensuite quasiment cessé d’en parler.

Qui a pris les commandes de la planification écologique à Matignon ? Michel Barnier, l’ancien ministre de l’environnement, chef d’orchestre d’une loi majeure au mitan des années 1990 ? Michel Barnier, le candidat à la primaire de la droite qui dénonçait, en 2021, l’énergie éolienne ? Ou encore un autre Michel Barnier, nouveau premier ministre mis sous pression par « la situation (…) très grave » des finances publiques, soutenu par une minorité déjà agitée et surveillé par une extrême droite climatosceptique ?

Pour tenter de se rassurer, les acteurs de la cause environnementale se sont d’abord raccrochés au passé du chef du gouvernement et à ses trois mots sur « la dette écologique » lors de la passation des pouvoirs à Matignon, jeudi 5 septembre.

Depuis, ses silences sur ce défi et le bourbier politique n’ont fait qu’alimenter leurs doutes. « Nous jugerons sur pièces, car nous avons connu beaucoup de responsables politiques qui emploient des termes forts mais ne font rien ensuite, détaille Morgane Créach, directrice générale du Réseau Action Climat. Oui, il a été ministre de l’environnement, mais, depuis des années, il a des positions critiques sur la transition. Nous verrons bien s’il revient sur les coupes dans les crédits, son budget devra être vu comme un acte politique. »

Longtemps, Michel Barnier a été le représentant d’une espèce très rare à droite. « Ils se battaient tous pour l’intérieur, la défense ou Bercy. Lui, il a voulu aller à l’environnement. Ça définit bien le personnage, quand même », résume Antoine Vermorel-Marques, député (Les Républicains, LR) de la Loire, qui a fait sa connaissance en 2013 lorsque le commissaire européen avait chargé le jeune étudiant à Sciences Po de mettre de l’ordre dans ses archives. Selon ses proches qui le répètent à l’envi, ce tropisme « vert » du nouveau chef du gouvernement remonte à son enfance iséroise passée au pied des massifs alpins. Chargé de mission à 22 ans auprès de Robert Poujade, premier ministre de l’environnement en France entre 1971 et 1974, cette singularité va en tout cas marquer le début de sa longue carrière de professionnel de la politique.

« Propension à ne pas déranger »

Après avoir rédigé un rapport parlementaire en tant que député de Savoie, il en tire un livre Chacun pour tous. Le défi écologique (Stock, 1990). Nombre de passages ne seraient pas reniés, aujourd’hui encore, par les militants de l’écologie politique. Il y évoque « les limites qui existent dans la capacité de la Terre à nous soutenir » ; il s’y désole de la baisse de la biodiversité, « le dégât biologique le plus important de notre époque car il est totalement irréversible » ; il y critique les « démarches guidées avant tout par le profit économique ». « L’abondance énergétique découlant d’un parc nucléaire largement surdimensionné et la baisse relative du prix des matières premières » ont « entraîné la promotion effrénée du “tout électrique” », écrit-il. Michel Barnier, un décroissant camouflé au sein de la droite gaulliste ? « La croissance peut être harmonisée avec l’environnement », précise-t-il en prônant des mesures fortes de protection de la nature.

Ce travail lui ouvre les portes du gouvernement Balladur où il est nommé ministre de l’environnement en 1993 au milieu des bataillons d’ambitieux, balladuriens et chiraquiens. « Balladur l’aimait bien et il avait une grande propension à ne pas déranger, tout en sachant dialoguer et en étant opiniâtre », se souvient Brice Hortefeux, ancien ministre de l’intérieur et, à l’époque chef de cabinet de Nicolas Sarkozy au budget. Entouré de jeunes conseillers, Brigitte Kuster, future maire du 17e arrondissement de Paris, ou Nicolas Dupont-Aignan, futur candidat à la présidentielle, le ministre sent l’air du temps.

Au Sommet de la Terre de Rio, en 1992, les nations se sont mises d’accord sur un texte ambitieux. La loi Barnier de février 1995 grave certains de ses principes dans le droit français. Principe de précaution, de prévention, pollueur-payeur, participation des citoyens avec le lancement de la Commisison nationale du débat public, prévention des risques naturels majeurs avec, notamment, le lancement du fonds Barnier…

« C’est une loi très importante, analyse Arnaud Gossement, juriste spécialiste en droit de l’environnement. Jusque-là, les règles liées à l’environnement étaient éparpillées. Ce texte structure l’échafaudage juridique de l’écologie. C’est fondamental car toutes les lois devront s’y conformer. » En 2005, la Charte de l’environnement de Jacques Chirac s’inspirera des mots choisis par M. Barnier et sa directrice de cabinet, Michèle Pappalardo, qui occupera plus tard le même poste auprès de Nicolas Hulot.

Greta Thunberg « exploite les peurs »

C’est une entreprise menée à bas bruit, loin des affrontements fratricides de la droite. « A l’époque, nous avions travaillé sur d’autres sujets compliqués, le désensablement de la baie du Mont-Saint-Michel, le plan Loire grandeur nature, les premières réunions sur la réintroduction de l’ours dans les Pyrénées, se souvient Brigitte Kuster. A chaque fois, il arrivait à mettre tout le monde autour de la table, à faire se parler des gens différents. » Une méthode qu’il a poursuivie au ministère l’agriculture, entre 2007 et 2009, réussissant même à lancer le plan Ecophyto. « Il a su résister aux pressions, notamment celles de la FNSEA [Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles] », a estimé l’association Générations futures, le jour de sa nomination.

Mais, passé sa longue parenthèse européenne, entre 2009 et 2021, un autre Michel Barnier réapparaît en France. Candidat à la primaire du parti LR – pour la présidentielle de 2022 –, un scrutin qui se joue devant les sympathisants de droite, l’ancien ministre axe sa campagne sur un référendum contre l’immigration ou tonne contre l’excès de réglementation européenne. « Un comble pour celui qui a transcrit le droit environnemental européen dans le droit français », soupire Arnaud Gossement.

Et, malgré les demandes insistantes de certains de ses proches, il n’évoque quasiment plus l’écologie, sauf en termes très généraux ou très critiques. « Le changement climatique a bouleversé toutes nos habitudes », glisse-t-il dans une interview au Point où il se prononce pour une relance du nucléaire, pour le photovoltaïque, mais contre l’énergie éolienne qui « fait beaucoup de dégâts ». « L’écologie n’appartient pas aux écologistes ! », conclut-il. Un mantra du peuple de droite exaspéré par certaines figures de la transition écologique. « Monsieur Zemmour a une lecture “ethnicisante” de la société, il est un peu comme [la militante suédoise] Greta Thunberg ou Madame Rousseau [Sandrine Rousseau, députée (Les Ecologistes) de Paris], toujours en train d’exploiter les peurs et les angoisses des gens », lance M. Barnier, le 17 octobre 2021, sur Europe 1.

Revenu sur la scène politique française, l’ancien ministre de l’environnement s’est banalisé, comme s’il redoutait de brusquer sa famille politique. « Il y croit toujours et est sincère dans sa démarche. Mais il n’a jamais voulu singer la gauche, il croit qu’il peut y avoir un pragmatisme de droite sur ce sujet, une écologie qui est dans la transmission et dans la protection pour ne pas détruire ce qui ne peut pas être reconstruit », analyse Antoine Vermorel-Marques, qui a signé avec lui une tribune dans Le Monde, le 23 septembre 2023, dans laquelle les deux hommes mettaient en garde contre « l’emballement technocratique » et « le caractère punitif » du pacte vert européen.

Crédits du budget « vert » sabrés

Alors, quel Michel Barnier vient de s’installer à Matignon ? Celui des années 1990, qui a nettement amélioré le droit environnemental, ou l’ancien candidat, attentif à son image et persuadé que la majorité des Français est rétive aux mesures écologistes ?

« Lors de la passation des pouvoirs, mettre au même plan la dette écologique et la dette financière, deux fardeaux que nous allons léguer à nos enfants, montre que cet enjeu est toujours une préoccupation très forte chez lui », affirme son entourage.

Cependant, dans les jours qui ont suivi sa nomination, le premier ministre a pris plusieurs décisions inquiétantes pour les défenseurs de la cause climatique. Il s’est d’abord choisi comme directeur de cabinet Jérôme Fournel, l’ancien directeur du cabinet du ministre de l’économie, Bruno Le Maire, un homme qui n’a jamais hésité à sabrer les crédits du budget « vert ». Le nouveau chef du gouvernement a aussi coupé un des fils de la transition en ne retenant pas Antoine Pellion, le secrétaire général à la planification écologique, à son cabinet. Ce dernier a été remplacé par Vincent Le Biez, ancien adjoint du patron de la délégation interministérielle au nouveau nucléaire.

Même s’il avait la volonté d’agir fortement sur les questions écologiques, quelle sera la marge de manœuvre de Michel Barnier ? Le chef du gouvernement est pris en tenaille, d’un côté par la situation financière, et de l’autre par une alliance hétéroclite au sein de laquelle les macronistes ne veulent pas entendre parler d’augmentation des impôts, quand la droite et l’extrême droite refuseront toute contrainte écologique sur les ménages et les entreprises.

Difficile, dans ces conditions, de verdir le budget de façon encore plus nette qu’il y a un an ou de concocter une stratégie pluriannuelle de financement de la transition écologique ambitieuse, un document qui doit être présenté cet automne.

A moins qu’il ne trouve d’autres alliés sur ces dossiers… « Il ne s’est pas vraiment illustré ces dernières années sur ces questions. Que pense-t-il des néonicotinoïdes, du glyphosate, des grands projets comme l’A69, le Lyon-Turin ou les prochains Jeux olympiques d’hiver [de 2030, dans les Alpes françaises] ?, s’interroge Cyrielle Chatelain, présidente du groupe écologiste à l’Assemblée nationale. Le budget sera déterminant mais nous sommes très sceptiques. »

En 1990, dans son livre, M. Barnier disait croire à une politique environnementale transpartisane. « Il est possible de placer ce débat (…) au-dessus des clivages partisans et des querelles habituelles », écrivait-il. Qui aurait pu prédire qu’en 2024 la situation politique lui offrirait l’occasion de passer aux travaux pratiques ?

Etorkizunaren nostalgiaz gizarte harremanak birsortu
Nicolas GOÑI
www.enbata.info/articles/etorkizunaren-nostalgiaz-gizarte-harremanak-birsortu

Gure historian, bertze hainbat herriren historian bezala, aurkitzen dugu gizarte harremanen antolaketa horizontala, tokian tokikoa eta denen beharrei erantzuten laguntzeko modukoa. Bizimoduen industrializazioaren ondorioz, gizarte harreman horien praktika gehienak desagertu dira, baina zorionez horien memoria eta muina ez dira desagertu. Burujabetzak eraikitzeko lagun gaitzakete, baldin eta iraganaren nostalgia elikatu baino etorkizuneko nostalgiaz baliatzen bagare.

David Graeber antropologoaren azken aurreko liburuan (”Guziaren egunsentia”, David Wengrow arkeologoarekin batera idatzia eta 2020an argitaratua) gizarte goiztiarrak deskribatzen dituzte, eta gizarteen eboluzioaren narratiba nagusiena berraztertzen dute. Bereziki, gizateria milaka urtetan antolaketa zentralistarik eta zapalkuntza sistemikorik gabe bizi izan zela erakusten dute.

Gizarte egitura zaharrak

Gizarte harreman tradizionalak edo horien arrastoak ehunka adibideren bidez erakusten dituzte, horietarik batzuk Euskal Herrian kokatuak. Horren bidez deskubritu dut Marcia Ascher matematikariaren lan bat, titulu bereziki deigarria duena: “Berdintasunak zer erran nahi du? – Euskal ikuspegia” (jatorrizko bertsioan “What Does Equality Mean? – The Basque View”). Bitxiki, matematikaria izanik lan etnologikoa egin zuen, hain zuzen hainbat kulturatan kontzeptu matematikoak nola hezurmamitzen ziren gizarte harremanetan. Gurean, berdintasuna zer zen eta berdintasunak nola etxeen arteko harremanak egituratzen zituen aztertu zuen. Zehazki, lan horretan deskribatzen ditu Xiberoko Basabürüan auzo arteko hainbat ohitura, baina handik harago toki askotan ere zabalduak zirenak. Norbait hiltzen zenean, haur bat jaiotzen zenean, etxaldean maila aski handiko lan bat egin behar zenean, egoera guzi horietarako arauak bazeuden, ea nork zertan eta nola lagundu behar zuen zehazten zutenak. Lehen auzoa zen etxe batetik eskuinaldean bizi zena, bigarren auzoa ezkerraldean zena eta hirugarrena bigarrenaren ezkerraldean zena. Arauetan, lehen auzoari eskatzen zitzaiona ez zen bigarrenari eskatzen zitzaion berdina, heriotzaren inguruan adibidez Mikel Duvertek ikertu zuen bezala. Lehen auzoak betebehar gehiago zituen, eta berak bere lehen auzoari behar izanez gero berdin eskatuko zion. Antzeko antolakuntza bazen ogi benedikatuari zegokionez: etxe batekoek ogia lehen auzoari ematen zioten, eta ondoko astean lehen auzoak bere lehen auzoari, eta abar, hasierako etxera itzuli arte (ehun etxe egonez gero, ia bi urte irauten zuen). Antolakuntza horretan berdintasuna denen artean bazen, denak inguru baten parte ziren heinean eta inguru horretan denak laguntza eta betebehar berdinak zituztelako. Baina berdintasuna ez zen harreman indibidualetan neurtzen, (“nik ematen dizudanak zuk ematen didazunaren berdina izan behar du”), baizik eta komunitatearekiko harremanetan.

Berdintasun horrek bi baldintza zituen: ingurua eta aldizkatzea. Inguruan komunitate bat izatea, zirkulu bat osatzen zuena (hots hasierarik eta bukaerarik ez zuena), eta zirkulu horretan zehar laguntza hurrenez hurren ematea.

Baserriko lanari buruzko arauek, bereziki, plangintza zehatza behar zuten: nork bere etxean laguntza beharko zuten lanak prestatzean, inguruko bertzeen lanak kontuan hartu behar zituen. Horretan ere ez baitzitzaion gauza berdina eskatzen lehen auzoari, bigarrenari edo hirugarrenari. Pierre Clastres antropologoak erakutsi zuen bezala, hainbat herritan laguntza emate horietan elkarrekikotasuna ez zen inoiz bi kideren artean soilik, baizik eta kide bat eta bere inguruaren artean beti.

Hori ziurtatzeko, betebeharrak antolatuak ziren hain zuzen bakoitzak zehazki zenbat laguntza eman eta zenbat jaso zuen jakitea ezinezkoa izan zedin. Funtsean garrantzitsua ez baitzen hori, baizik eta inguruari lotua jarraitzea, zirkuluan laguntza pasarazten jarraitzea.

Eta gaur egun zer?

Antolakuntza horiek horizontalak ziren, tokian tokiko eta behetik eraikiak, denen beharrei erantzuteko: ez zegoen inor bertzeen gainetik, ez zegoen jauntxorik bertzeei zer egin behar zuten errateko (elizak pisu handia izanik ere, ez zituen sistema horiek eraldatu edo bereganatu). Horregatik David Graeber eta David Wengrowek antolaketa zentralistarik eta zapalkuntza sistemikorik gabeko antolakuntzetan sartzen dituzte adibide horiek, munduan eta historian zehar existitu diren bertze hainbat bezala.

Etxeen arteko oinarrizko antolakuntza horretatik, nahiko errexki irudikatzen da nola egitura horiek hurbileko gobernantza sistema zaharrak moldatu zituzten: biltzarrak, juntak edota foruak ere tokian tokiko, horizontalak eta behetik eraikiak ziren. Baina horrez gain, edo hori baino lehen, antolakuntza zahar horiek egunerokotik abiatzen ziren, horren bitartez inguruari lotua izatea eta zirkuluan laguntza pasaraztea biziaren erdian ziren, horretaz ohartu gabe ere. Praktika horiek biziaren hainbat arlotan zabaltzen ziren, gizarte harreman mota politiko bat sortuz (lehen erran bezala horizontala, tokian tokikoa eta behetik eraikia), baina inolako teoriarik gabe.

Halere, gaur egun ohitura horietarik asko desagertu dira, eremu urbanizatuetan lehenik, baita laborantza gehien industrializatu den eremuetan ere: Iñaki Caminok Amikuzeri buruz deskribatu duen bezala, bertako auzolaneko eta elkar laguntzako ohitura zaharrak bertako (h)eskuara erabiltzen zuen azken belaunaldiarekin batera desagertzen hasi ziren. Urruñan, ohitura horien azken adierazpen bat ikusi nuen ehorzketa batean, zeinean lehen auzoak zuen gurutzea eraman elizatik hilerrira. Geroztik ohartu nintzen lehen auzo hori aspaldiko lehen auzoa zela: bitartean bi baserrien artean etxe gehiago eraiki ziren, baina etxe berri haiek ez ziren laguntza zirkuluan txertatu, haietan ez zen laboraririk bizi, haietarik gehienetan udatik aparte ez zen inor bizi ere, are gutiago tokiko ohiturekin loturarik zuen inor. Lapurdiko kostan ere, bertako euskalkiaren hizlariekin batera desagertzen joan dira ohitura horiek. Zer sortu dugu horien ordezkatzeko? Zer gehiago sortzeko gai gara?

Denen mundua eskuetan berriz hartzea

Ohitura horiek desagertu dira neurri handi batean gizarteen industrializazioaren eraginez, eta jendeen mugikortasun handiagoaren eraginez. Nola biziarazi praktika horiek, ezin bazen – edo oraino ezin bada – herrian lan egin eta bizitzen jarraitu? Nola praktika horiek ezagutu kanpotik etorriz gero, tokikoek berek ahantzi badituzte, beren tokiko euskalkia ahantzi duten bezala? Nola zirkulu batean jarraitu, ikasketek eta gero lanak sei aldiz tokiz mugitzera eraman (edo behartu) bagaitu? Edo norbere auzoaldean bigarren egoitzak ez diren etxeetakoak ezagutzen ez baditugu ere? Joan den mendean garatzen hasi ziren bizimoduek antolakuntza zaharrak desegin dituzte baina antolakuntza berririk ez dute oraino ekarri. Horri bi motatako erantzunak ematen ahal zaizkio: iraganaren nostalgia, edo – Beñat Irasuegiri entzun diodan bezala – etorkizunaren nostalgia, oraindik sortzeke den etorkizun desiragarri eta bizigarri baten nostalgia.

Iraganaren nostalgia nolabait erantzun “errexena” da: galdutako zerbaiten deitoratzea, gaur egungo erranahi eza eta lehen erranahia ematen ziguna alderatzea, iragana zen bezala berreraikitzearen aldeko argudioak biltzeko, bertzerik irudikatu ezean, iraganeko alde desatseginagoak ere kolokan ezarri gabe.

Adibidez familia biologikoa transmisiorako oinarri bakarra zela, edota emazte eta gizonen eginkizun sozial oso ezberdinak bazirela (egoera gure lurraldean bertze batzuetan bezain gogorra ez bazen ere, delako matriarkatutik urrun zen) iraganeko alde onetatik edateak ez du erran nahi gure buruari hautatzeko eta erabakitzeko ahalmenik kentzen diogunik, hain zuzen hori dugu bilatzen behetik eraikitako antolakuntza horizontaletan. Etorkizunaren nostalgiak, aldiz, denen mundua eskuetan berriz hartzeko ahalmen eta gaitasun askoz gehiago pizten du. Hasteko, gure gizarte harremanak birsortzeko gaitasuna ematen digu, harreman zaharrak ziren bezala kopiatu baino, zaharrak sortu ziren enbor beretik berriak sortzeko.

Industriaurreko gizarteari loturiko praktika zahar horiek desagertu badira ere, praktika horien abiapuntuan zegoen grina oraino bizirik dago, eta suma dezakegu hainbat kooperatiba, elkarte edota ekimen kolektibotan, bakoitza bere eran gure bizi baldintzak eraikitzeko asmoa dutenak, eta zeinetan inguruari lotua jarraitzea eta zirkuluan laguntza pasarazten jarraitzea funtsezkoak diren, tokiko eta maila globaleko erronkei erantzunak uztartuz. Hori da beharbada ezberdintasun handiena: lehen ez bezala gaur egungo mundua, funtzionalki, ez da paisaiaren zerumugan gelditzen. Tokian tokiko baliabideetan oinarrituz burujabe izatea helburua bada ere, dagoeneko ezin dugu tokikoa sortu mundu mailakoa kontuan hartu gabe. Horregatik gure burujabetza konkretuak eraikitzean sortzen dugun kultura izan behar da solidarioa – gure artean izan ezik, munduaren bertzaldean bizi direnekin ere – eta jasangarria. Hori izan daiteke hain zuzen eskuin muturrari aurre egiteko gako garrantzitsuetarik bat, eta aipagai izanen dugu irailaren 13an ortziralarekin Mugerre-Elizaberrin.