Après un été qui a battu de très nombreux records de température, qui a vu se multiplier des canicules prolongées sur tous les continents, des incendies gigantesques, un été qui s’accommode d’une des plus grandes crises humanitaires avec un taux de mortalité toujours plus important parmi les migrants en Méditerranée, la réalité s’impose à nous. Nous visionnons aujourd’hui la bande-annonce du film de nos prochaines années si nous ne bougeons pas massivement et immédiatement. Maintenant que nous vivons l’avant-goût de ce qui nous attend, allons nous avoir un sursaut ? Aurons-nous ce sursaut indispensable pour préserver l’habitabilité de la planète pour les enfants nés aujourd’hui, ceux que nous emmenons tous les matins à la crèche et même à l’école et au collège tant la dégradation planétaire est rapide ?
Le mardi 28 août au matin, le ministre d’État, ministre de la Transition écologique et solidaire, M. Nicolas Hulot, a annoncé son départ du gouvernement. Pour expliquer son départ, il a affirmé qu’il nous reste dix ans pour empêcher la planète de devenir une étuve, il a souligné que la « politique des petits pas » ne pourra pas enrayer la catastrophe annoncée. Il a appelé à changer d’échelle, de paradigme sous peine d’échouer dramatiquement.
Ne pas se voiler la face
Ce message s’adresse à nous toutes et tous : citoyens, militants, élus locaux, décideurs économiques et politiques. Beaucoup d’entre nous font déjà des actions qui vont dans le bon sens. Trier les déchets, développer quelques pistes cyclables ou introduire un peu de bio dans ses cantines scolaires ou dans ses menus quotidiens. Mais si l’on refuse de se voiler la face, de se mentir sur la réalité de la situation, sa gravité et son urgence, force est de constater que cela n’est absolument pas suffisant. Depuis la COP21, au lieu de baisser, les émissions de gaz à effet de serre qui sont la cause principale des dérèglements climatiques, ont augmenté à l’échelle mondiale mais aussi en France ! C’est tout un système que l’on doit profondément transformer, et pas seulement quelques comportements.
Quel choix ferons nous ?
Nous sommes aujourd’hui devant un choix clair et sans appel. Dans les dix ans à venir, à compter d’aujourd’hui, ce que nous ferons ou ne ferons pas, ce que nous déciderons ou ne déciderons pas, individuellement et collectivement, produira un monde à +1,5°C ou un monde à +3°C ?, +4°C ?,… quand nos jeunes enfants seront tout simplement adultes.
A + 1,5°C, nous aurons malgré tout à gérer des conséquences du dérèglement climatique plus graves que celles que la planète connaît depuis ces dernières années. Mais la situation sera encore potentiellement contrôlable moyennant de sérieuses adaptations.
A partir de +3°C, un monde inconnu nous attend à l’échelle de l’histoire de l’Humain et nous avons de grandes chances de franchir des seuils de rupture, de basculement, aux conséquences immenses. Le coût du réchauffement sera à l’échelle planétaire, humainement tragique et financièrement incomparable au coût qu’aurait eu la mise en place dès maintenant de politiques de transitions écologiques et sociales dans les différents territoires et régions du monde. Nous aurons dès lors créé une situation parfois irréversible à l’échelle de certains territoires, qui ne pourra aller qu’en s’aggravant pour les générations qui nous succéderont, sachant que ses conséquences rendront à terme la vie impossible pour une grande partie de l’humanité dans de très nombreuses régions.
Responsables devant l’Histoire
Le 8 septembre, 150 000 personnes ont manifesté dans toute la France, et bien d’autres à travers le monde, pour appeler à tenter l’impossible pour éviter l’impensable. Ce premier sursaut doit être prolongé, permet l’espoir et nous invite à l’action.
Du 6 au 8 octobre, le GIEC (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat) sera réuni en session plénière en Corée du Sud pour approuver et rendre publiques les conclusions du « rapport 1,5°C » que lui a commandé la COP21. Ce rapport détaillera les impacts du réchauffement climatique sur nos vies, au seuil +1,5°C, mais il donnera aussi une indication argumentée s’il est encore possible ou peu probable de rester en dessous de ce seuil là, avec toutes les implications incontournables en termes de rythme et importance des changements à mettre en route dès maintenant.
Ce sera probablement un des derniers grands moments pour alerter et mobiliser l’opinion publique mondiale sur ce qui est en jeu, sur le défi à relever très rapidement pour ces quelques années à venir, où l’on peut encore dévier de trajectoire et limiter le changement climatique.
Le même week-end, en écho au rapport du GIEC, Bayonne sera le théâtre d’un rassemblement populaire exceptionnel, Alternatiba 2018, qui résonnera loin et fort, pour traduire cette alerte en mobilisation générale, en mise en route d’une véritable métamorphose écologique et sociale permettant de garder une planète habitable. Une métamorphose qui peut s’enclencher dans chacun de nos territoires, aujourd’hui, sans attendre que nos dirigeants nationaux et internationaux aient enfin compris ce que les mots responsable et Histoire avec un grand H, signifiaient.
Rendez-vous à Alternatiba, les samedi 6 et dimanche 7 octobre à Bayonne, pour fêter ensemble le temps du sursaut, pour lancer ensemble le temps de la mobilisation générale pour le climat, la biodiversité, la solidarité internationale et la justice sociale.
Les signataires :
Geneviève Azam, économiste
Pauline Boyer, Alternatiba
Michel Berhocoirigoin, ancien secrétaire général de la Confédération Paysanne et ex-président d’EHLG
Damien Carême, maire de Grande-Synthe
Jean-François Caron, Maire de Loos-en-Gohelle
Christophe Cassou, climatologue, directeur de recherche
Florent Compain, Président des Amis de la Terre-France
Cyril Dion, écrivain, réalisateur du film Demain
Michel Dubromel, Président France Nature Environnement (FNE)
Txetx Etcheverry, Bizi !, Alternatiba Bayonne
Susan George, Présidente d’honneur d’Attac
Bernadette Groison, Secrétaire Générale de la Fédération Syndicale Unitaire (FSU)
Nicolas Haeringer, Coordinateur de campagnes 350.org
Cédric Herrou, paysan, Vallée de la Roya
Christiane Hessel, marraine du premier Alternatiba
Jean Jouzel, climatologue
Jean-François Julliard, directeur général de Greenpeace
Pierre Larrouturou, ingénieur agronome, Porte-parole du Pacte Finance-Climat
Corinne Morel Darleux, militante écosocialiste
Jon Palais, Action Non-Violente COP21
Audrey Pulvar, présidente de la FNH (Fondation pour la Nature et l’Homme)
Philippe Quirion, Président du Réseau Action Climat
Thierry Salomon, énergéticien, Vice-Président de l’association négaWatt
Germain Sarhy, Village Emmaüs Lescar Pau
Marie Toussaint, Présidente de Notre affaire à tous