LE MONDE | 08.02.10 |
Comment rebondir après Copenhague ? La question ne se pose pas seulement aux diplomates et aux gouvernements, mais aussi au mouvement social. Elle a été au coeur des discussions du collectif Urgence climatique, justice sociale, réuni à Paris samedi 6 février. [:]Plus de cent délégués y ont participé, représentant des partis (Verts, Parti de gauche, NPA), syndicats (FSU, Solidaires), associations (Attac, Amis de la Terre, Réseau action climat), et des collectifs locaux (Bordeaux, Rouen, Lille, Marseille, Saint-Nazaire…).
Créé avant Copenhague, Urgence climatique, justice sociale vise à articuler l’enjeu écologique et la question sociale. Il a rejoint pendant la conférence tenue dans la capitale danoise, en décembre 2009, les mouvements internationaux Climate Justice Action et Climate Justice Now, qui ont organisé des manifestations réussies pendant la durée de la conférence sur le thème : “Changez le système, pas le climat”. Mais après le succès militant de Copenhague, le retour à la maison a été décevant.
“Il y a un sentiment d’impuissance dans la population qui pense que l’ONU, c’est le bazar”, a résumé Chantal Delmas, du Val-d’Oise. “On subit le contrecoup de l’échec de Copenhague”, juge Sophie Zafari, de la FSU, tandis que la poussée des “climato-sceptiques” pèse aussi sur l’opinion.
Mais l’atmosphère n’était pas au pessimisme. Laurent Hutinet, des Amis de la Terre, a rappelé que “l’analyse écologique est née dans les années 1970 de la critique du système énergétique, indépendamment de la question du changement climatique. Même si le GIEC avait tout faux, cela ne changerait rien : l’explosion à venir des prix de l’énergie va rendre intenable le modèle de la maison et de la voiture individuelles.”
“L’universel, c’est le local”
Et, résumant un avis largement partagé, il a conclu : “Pour mobiliser nos concitoyens, il faut préciser les analyses, mais aussi les solutions : la relocalisation, qu’il faut mettre en oeuvre comme le paradigme universel. L’universel, c’est le local !” “Mais sans s’y enfermer !”, s’est exclamée Geneviève Azam, d’Attac, selon qui “il faut travailler la question de la transition vers une économie écologique et sociale, et présenter les alternatives crédibles”.
Proposer des alternatives, mais aussi lutter différemment : l’association Bizi de Bayonne a ainsi été présentée comme un modèle – ses représentants étaient absents en raison d’une manifestation conduite le même jour au Pays basque : “Ils sont partis de questions très concrètes sur le transport et le travail le dimanche, a expliqué un militant de Nanterre, et, surtout, ils mènent une lutte joyeuse, pleine d’humour, les gens prennent du plaisir à militer dans ce mouvement qui a un fonds théorique très important.”
L’assemblée a aussi réfléchi au suivi des négociations internationales, qui sera marqué par les rendez-vous de Bonn, en juin, et du Mexique, fin novembre, mais aussi de la “Conférence mondiale des peuples sur le changement climatique” organisée par la Bolivie en avril à Cochabamba. Au total, le collectif a manifesté sa bonne santé, mais sans perspectives encore très claires.
Hervé Kempf