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Bilan du mandat 2020-2026. Partie 4/7 Agir pour la maîtrise de l’énergie dans les bâtiments

A quelques mois des élections municipales et communautaires, nous détaillons pour vous le bilan écologique du mandat qui s’achève. Pendant six ans, Bizi! a suivi et accompagné 56 communes et l’agglomération pour qu’elles réalisent le Pacte de métamorphose écologique du Pays Basque contenant 7 thématiques : mobilités, maitrise de l’énergie dans les bâtiments, production d’énergie renouvelable, agriculture et alimentation, monnaie locale, déchets et économie circulaire, mise en place du Plan Climat. L’heure est au bilan : où en est-on ?

Cette semaine, à l’occasion de la journée contre la précarité énergétique, nous faisons le point sur la maitrise de l’énergie dans les bâtiments : quelles sont les tendances ? quels sont les grands enjeux ? comment se situe le Pays Basque à l’issue de ce mandat 2020-2026 ? que doit-on arrêter et quels sont les exemples à généraliser ?

Le texte suivant est issu du rapport Des petits pas, loin des promesses et de l’urgence – État de la métamorphose écologique au Pays Basque, à retrouver en intégralité sur le site pacte2026.bizimugi.eu. Vous y trouverez également les résultats détaillés commune par commune.

Les tendances et objectifs hexagonaux

Le bâtiment, qui regroupe le résidentiel (28%) et le tertiaire (16%), est le 1ᵉʳ secteur de consommation énergétique en France. Les bâtiments publics représentent 27 % du parc tertiaire hexagonal (pour moitié des bâtiments scolaires) et sont majoritairement construits avant 1975, donc généralement mal isolés. Ils correspondent à 76 % de la consommation d’énergie, énergie qui est le deuxième poste de dépense des collectivités.

Les émissions du secteur des bâtiments sont de 62 Mt CO2 éq en 2022, ce qui représente 16 % des émissions brutes de la France. Ces émissions ont entamé une décroissance à partir de la fin des années 2000. Les deux sous-secteurs sont le résidentiel, c’est-à-dire les logements (y compris du parc social), responsables de 63 % des émissions du secteur, et le tertiaire, regroupant bureaux, surfaces commerciales ou institutionnelles, détenus par des acteurs publics (notamment bâtiments de l’Etat et des collectivités locales) et privés, responsable d’environ 37 % des émissions (Citepa, Secten 2024).

Réduire plus rapidement les émissions directes du secteur des bâtiments suppose l’accélération de la dynamique de décarbonation des vecteurs de chauffage et une forte réduction de la consommation d’énergie, notamment par des rénovations performantes et de la sobriété, avec un enjeu de bouclage en électricité. La priorisation de la rénovation de l’existant sur le neuf permet par ailleurs de réduire l’artificialisation et les déchets liés à la construction, les activités du bâtiment générant environ 68 % de la masse totale des déchets en France en 2020.

Le projet de Stratégie Nationale Bas Carbone 3 prévoit une baisse de 44 % des émissions de GES liées aux bâtiments entre 2022 et 2030. Si, suite à la crise énergétique de 2022, d’importantes baisses de consommation et conséquemment d’émissions de GES ont eu lieu, la cible 2030 de l’actuel Plan Climat Pays Basque pour les bâtiments apparaît en fort décalage d’ambition avec la trajectoire prévue à l’échelon hexagonal.

Bilan de mandat : Quel plan pour les bâtiments au Pays Basque ?

Les engagements du Pacte 2020

Agir pour la maîtrise de l’énergie dans les bâtiments “Dès les premiers mois du mandat, délibérer pour un plan ambitieux de rénovation thermique du patrimoine bâti communal et communautaire, en visant un niveau basse consommation. Construire uniquement des bâtiments neufs passifs à énergie positive. Appliquer le triptyque négaWatt : sobriété, efficacité, énergie renouvelable. Lutter contre la précarité énergétique des logements et encourager la réduction des consommations énergétiques par la mise en place d’actions d’animation territoriale (Défi Énergie Positive). Assurer un suivi régulier des consommations des bâtiments.

En tant que 1er poste de consommation d’énergie, le bâtiment est un secteur clé dans lequel les collectivités ont un devoir d’exemplarité pour tracer la voie vers la souveraineté énergétique. Toutes les communes ayant transmis leurs données ont réduit leur consommation d’énergie entre 2019 et 2024, avec une baisse moyenne de 19 %, à l’exception de Saint-Martin-d’Arrossa (+12 %) et Boucau (+11 %). Saint-Étienne-de-Baïgorry a réalisé la plus forte baisse avec -47 %, suivie de Gamarthe (-43 %) et de Gabat (-37 %). Les actions sur l’éclairage public (extinction nocturne, remplacement des ampoules par des Leds) représentent une part significative de ces baisses de consommation.

Elles ont été réalisées par la quasi-totalité des communes ayant répondu et ont une forte part dans la baisse des consommations totales : 

  • remplacement des ampoules par des Leds
  • de nuit : extinction de l’éclairage, éclairage à la demande (dispositif “J’allume ma rue”) ou baisse de l’intensité, 
  • suppression de certains luminaires (avec concertation avec les habitant·es).

Cette dernière action a notamment été menée de façon exemplaire par Saint-Étienne-de-Baïgorry. La commune a lancé une action participative avec les citoyen·nes : une « Chasse au lampadaire inutile » avec objectif de supprimer 10 % du parc de lampadaires peu ou pas utiles. Après 24 réunions ayant mobilisé 125 personnes, sur 346 lampadaires : décision prise avec les habitant·es de supprimer ou éteindre 106 lampadaires en 2 tranches de travaux (1ère tranche de travaux avec TE64 faite début 2024), après une phase test pour certains lampadaires.

Certaines communes précisent que cette baisse des consommations d’énergie est un gain financier important pour le budget communal.

Selon le CEREMA, sur l’ensemble des villes de l’Hexagone, 35 % pratiquent l’extinction totale (30 % ont été mises en place au moment de la crise énergétique de fin 2022). Plus de 50 % des communes, entre 1 000 et 5 000 habitants, pratiquent également une extinction totale, contre 36 % entre 20 000 et 40 000 habitants, et 23 % de plus de 40 000 habitants.

D’après Enedis, la consommation électrique de l’éclairage public a diminué en moyenne de 41 % entre 2019 et 2024 à l’échelle hexagonale. Malgré cela, le ciel étoilé en est en voie de disparition et la pollution lumineuse est considérée comme la deuxième cause d’extinction des insectes après les pesticides ; cette pollution serait aussi un potentiel perturbateur endocrinien, tant ses effets sur les voies physiologiques sont importants.

Au Pays Basque Nord, l’extinction nocturne s’est généralisée : d’après les engagements pris par 129 communes lors de la semaine Klima 2024,  86% déclarent éteindre l’éclairage public entre 23h et 5h30, 5% déclarent être en cours, 2% le prévoir dans les 3 ans, aucune ne se dit pas concernée et seules 7% ne prévoient pas d’extinction nocturne ; le seul  bourg déclarant ne rien prévoir au sujet de l’extinction nocturne est Arcangues. 

Le reste des baisses de consommation est dû à des rénovations énergétiques – trop rarement globales – de bâtiments communaux (19 communes), à la mise en place de régulation (adaptation aux horaires d’utilisation, respect des 19°C de chauffage), au changement de chaudière et d’énergie (abandon du fioul par exemple), et à la sensibilisation des usagers.

Les communes sont accompagnées par la Communauté d’Agglomération Pays Basque via le programme ELENA qu’elle pilote et qui finance des audits énergétiques de bâtiments (cité par 12 communes). Mais aussi par Territoire d’Énergie 64 (cité par 13 communes) via des audits énergétiques de leurs bâtiments et de l’éclairage public, ou la mise à disposition d’un service de conseil en énergie partagé. Cet accompagnement joue un rôle décisif pour les déclenchements des actions.

La mise en place d’un suivi régulier des consommations pour l’éclairage et les différents bâtiments est nécessaire et réalisée par plus des 3/4 des communes (dont toutes les villes) : du simple relevé des compteurs ou contrôle des factures d’énergie à la mise en place d’outils performants (logiciels Deepki, Citron) en passant par un suivi via les fournisseurs d’énergie. Avec pour certains, un système d’alerte en cas de consommation anormale. De plus, pour certaines, une ou plusieurs personnes sont référentes des questions énergétiques sur la commune : un·e agent·e, un·e élu·e ou par conventionnement avec un.e conseiller.ère en énergie partagé (CEP). Saint-Jean-Pied-de-Port a constitué un binôme élu/citoyen pour le suivi trimestriel et annuel.

Seulement 7 communes ont engagé un plan pluriannuel d’investissement pour rénover leurs bâtiments : Anglet, Bayonne, Biarritz, Bidart, Hendaye, Urrugne et Saint-Étienne-de-Baïgorry. Il reste encore des actions significatives à mener, en particulier sur la rénovation thermique des bâtiments – 1ère augmentation d’investissements à programmer pour cette décennie.

De 2021 à 2023, 5369 logements ont été rénovés énergétiquement, soit 1790 logements / an, un rythme encore très loin de l’objectif du Plan Climat de 5900 appartements rénovés par an d’ici 2030. Il s’agit essentiellement de mono gestes, pourtant notoirement insuffisants. Seuls 8 % de ces rénovations ont fait l’objet d’un accompagnement, sans que l’on ne connaisse le niveau de rénovation réalisée.

Si l’agglomération a voté un règlement d’intervention “rénovation globale performante”, on est vraisemblablement très loin de la cible du Plan Climat de 5 900 logements rénovés par an, atteignant un niveau de performance élevé dit «BBC rénovation», du fait de l’importance des frais à engager. Les derniers retours en arrière et incertitudes autour de Ma Prim Rénov au niveau hexagonal risquent d’aggraver encore plus cette situation.

Les constructions neuves

13 constructions neuves ont été signalées par les communes dont :

–    1 seule passive (qui se chauffe essentiellement par les apports solaires et ceux des occupants) et à énergie positive (qui produit plus d’énergie qu’elle n’en consomme) : Ostavals, la maison du paysage et un restaurant, réalisée par la communauté d’agglomération Pays Basque à Ostabat.

–   4 avec un bilan énergétique amélioré de 20 à 30 % par rapport à l’ancienne réglementation thermique RT 2012, (niveau E3 de l’ancien label E+C-) : l’école du Prissé et l’AB campus à Bayonne, les écoles d’Arbonne et d’Ascain, soit entre 20 et 30 % de gain par rapport aux exigences réglementaires.

Pour les 8 autres, pas ou pas assez d’informations pour évaluer leur niveau de consommation. Pour 2025, peu de livraisons de bâtiments et aucun prévu en passif ou énergie positive.

Une lutte contre la précarité énergétique à développer et systématiser

Pour lutter contre la précarité énergétique, en complément de rénovation de logements communaux ou de rares créations de logements sociaux, certaines communes accompagnent les habitant·es en informant sur les aides, en recensant les habitats indignes ou vacants et les habitants en grande précarité, en participant financièrement aux travaux de rénovation énergétique ou encore en animant des dispositifs dédiés : OPAH-RU (Bayonne), PIG habitat (Biarritz, Bidart, Hendaye), OPAH (Hendaye), programme «Petites villes de demain».

Les rénovations de logements communaux, de plus ou moins grande ampleur, réalisées seules ou en partenariat avec SOLIHA ou l’office 64, sont trop rarement complètes (8 communes). A saluer, l’action d’Aïcirits–Camou–Suhast dans le Quartier ETXE GOXOAK, où 16 maisons individuelles datant de 1976, propriétés de la commune, ont été rénovées énergétiquement et sont passées de E à B pour l’énergie et de C à A pour les émissions de GES.

La construction ou transformation de logements existants en logements sociaux reste notoirement insuffisante sur le territoire. Bayonne est la seule commune relevant de la loi SRU à respecter le seuil de 25 % minimum de logements sociaux.

Encourager la réduction des consommations énergétiques par la mise en place d’actions d’animation territoriale.

Les communes agissent en relayant les informations dans leur bulletin et sur leur site : aides à la rénovation énergétique, cadastre solaire, relais des campagnes locales (CAPB), défis déclics … Elles organisent des réunions publiques (pour des achats groupés de panneaux photovoltaïques en autoconsommation : I-ener, association Izpindar, SCIC Ekindar, …) ou encore sensibilisent des agent·es communaux via des ateliers bas carbone à Bayonne, un challenge inter-services de la mairie « Coupe le jus et mets ton service en lumière ! » à Bidart, ou aux bonnes pratiques à Jatxou. A Hendaye deux challenges de réduction des consommations énergétiques ont impliqué les agent·es, les élu·es, les usager·es des bâtiments communaux et le grand public – avec ateliers, affichage, site Internet, évènements – aboutissant à la création d’une charte pour les évènements organisés par la ville ou des associations (avec objectifs de réduire les consommations d’énergie liées aux transports et au fonctionnement).

La moyenne des scores sur la globalité de la thématique est de 0,8 – en progression depuis 2021 (moyenne à 0,2). Les écarts sont importants entre communes : de 0 à 3,4. Seules 4 communes atteignent un score supérieur à 2 : Bayonne, Hendaye, Saint-Jean-Pied-de-Port et Saint-Étienne-de-Baïgorry (avec 3,4).

Les mesures du Pacte 2026 pour le climat et les habitant·es du Pays Basque

HABITER

  1. Créer de nouveaux logements accessibles pour tout le monde sans consommer de nouveaux espaces. 
  2. Construire et rénover des logements confortables et adaptés aux extrêmes climatiques. 
  3. Aménager un cadre de vie plus végétalisé et convivial.