La FNSEA au secours du climat ?
Fnsea ez da klima eta elikadura burujabetzaren kaltetan diren agro erregailuen kontra. TOTAL-eri buruz eremaiten duen ekintzak beste motibaziorik badu…
Tout pourrait porter à penser que la Fnsea mène une bataille emblématique avec le blocage des sites de TOTAL : Elle défend les producteurs français d’huile de colza contre la multinationale TOTAL… Elle soutient le revenu des agriculteurs français face aux importations… Elle lutte pour l’indépendance énergétique de la France… Face à la déforestation qu’entraine la production d’huile de palme, elle se bat pour réduire les GES (Gaz à Effet de Serre)… La Fnsea serait-elle le chevalier blanc que l’on ignorait ? En fait ses intentions sont moins vertueuses que ne laisserait penser son discours…
Le sujet est la production d’agro carburants. Il y en a deux catégories :
- L’éthanol utilisé en substitution de l’essence et qui est produit à partir de céréales (blé, mais) et de betteraves. Ceci représente quelques 400 000 Ha en France !
- Et puis, il y a L’agro diesel ou le diester utilisé en substitution du gasoil et qui est produit à partir d’huile de colza, de tournesol ou de palme. En France, 70% des surfaces de colza (soit 1,3 Millions d’HA) sont détournées de leur finalité alimentaire vers la production du diester !
En 2009, l’Europe adopte une directive sur les énergies renouvelables et fixe l’objectif de couvrir avec les agro carburants 10% de la consommation totale d’énergie dans le secteur des transports. Cette décision est très durement combattue par plusieurs ONG et par la Confédération Paysanne, car les Ha qui alimenteront les moteurs ne seront plus là pour alimenter les humains dans un monde où près d’un milliard de personnes souffrent de famine… Mais la Fnsea comme son syndicat européen le COPA, soutiennent la démarche et demandent même d’aller beaucoup plus loin ! Elle a toujours soutenu les agro carburants (comme la production d’éthanol à Lacq) car cela donnait des débouchés assurés pour les gros producteurs de colza, de tournesol, de maïs et de betteraves.
A cause des réactions des citoyens et des multiples organisations de développement de part le monde, à cause de la dureté des réalités qui ont suivi cette décision (augmentation des prix des produits alimentaires, émeutes de la faim, déforestation pour rattraper les Ha perdus pour l’alimentation, etc.), l’Union Européenne à été amenée à revoir ses ambitions à la baisse et fixe en 2015 un nouveau plafond à 7%. Aujourd’hui, la Commission Européenne veut même réduire le recours aux agro carburants à 3,75% d’ici 2030.
La Fnsea est vent debout : « C’est un coup de poignard dans le dos ! On va se battre ! » dira Eric Lainé le Président des betteraviers de la centrale syndicale. « Cette mesure est inadmissible ! » pour le COPA. En fait, le syndicat est pour les agro carburants. Son problème actuel avec TOTAL est que celui-ci veut faire du diester à partir de l’huile de palme importée (300 000T) plutôt qu’à partir du colza français. Certes, importer de l’huile de palme pour la transformer en carburant est un scandale qui signifie la déforestation en Malaisie ou en Indonésie, avec des émissions énormes de carbone et un recul des productions vivrières. Mais l’utilisation de l’huile de colza, française ou autre, pour la même finalité a exactement les mêmes conséquences : Les 1 700 000 Ha utilisés en France pour produire l’éthanol et le diester ne sont plus là pour l’alimentation humaine ! Pour compenser ce détournement vers la production d’agro carburants, il faut augmenter, notamment par la déforestation, les surfaces de terres cultivées ailleurs. Ce phénomène porte le nom de « Changement d’Affectation des Sols » (CAS), et c’est cela qui est catastrophique pour le climat et pour la fonction alimentaire de l’agriculture.
Et si nous parlions de l’efficacité énergétique des agro carburants, celle-ci est nulle : De la culture au champ jusqu’à la fabrication industrielle, en passant par le transport, le processus demande quasiment autant d’énergie que l’énergie produite à la fin… Les seuls agro carburants qui ont une certaine efficacité énergétique sont les Huiles Végétales Pures, surtout le tournesol, car elles sont produites localement et simplement.
La Fnsea est dans une impasse sur cette question. Pour elle, la seule position tenable dans la durée serait de tourner le dos aux agro carburants, et de destiner à l’alimentation humaine, les huiles de colza et de tournesol de qualité que la France produit. Mais cela demanderait au syndicat de s’éloigner de l’idée d’une agriculture positionnée sur les marchés spéculatifs et sur les intérêts industriels….
Michel Berhocoirigoin (membre d’EHLG)
Le groupe AVRIL – Sofiprotéol
AVRIL est l’un des opérateurs les plus puissants de l’agro industrie française. 7 milliards de CA, 8 000 emplois. Son cœur de métier est la production d’huiles : 2,1 millions de tonnes de diester. C’est l’enfant chéri de la Fnsea. Son président, Xavier Belin, était en même temps président de la Fnsea. Et son président actuel, Arnaud Rousseau, est aussi responsable de la Fédération des producteurs d’oléagineux à la Fnsea. A noter que le groupe AVRIL importe 200 000 tonnes d’huile de palme chaque année, mais il ne craint pas de blocage de la part de ses amis …