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Articles du Vendredi : Sélection du 5 janvier 2018

A +2°C, une planète bien asséchée

Romain Loury
www.journaldelenvironnement.net/article/a-2-c-une-planete-bien-assechee,89233

«Les Etats européens ont une responsabilité nationale face au réchauffement»

Stéphanie Senet
www.journaldelenvironnement.net/article/les-etats-europeens-ont-une-responsabilite-nationale-face-au-rechauffement,89119

Climat : n’attendons pas les États, agissons localement !

Alternatiba/ANV-COP21 et Réseau Action Climat
https://reporterre.net/Climat-n-attendons-pas-les-Etats-agissons-localement

Hubert Reeves : « Plus rien ne nous menace. Sauf nous ! »

Entretien avec Hubert Reeves, Propos recueillis par Hervé Kempf
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2050erako klima-aldaketaren Euskadiko estrategia
Klima 2050 BASQUE COUNTRY


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A +2°C, une planète bien asséchée

Romain Loury
www.journaldelenvironnement.net/article/a-2-c-une-planete-bien-assechee,89233

strong>Même en limitant le réchauffement à +2°C, près d’un tiers de la surface mondiale sera beaucoup plus aride qu’elle ne l’est actuellement, démontre une étude publiée lundi 1er janvier dans la revue Nature Climate Change. Première victime, le sud de l’Europe.

C’est l’objectif fixé par l’Accord de Paris, signé en décembre 2015 lors de la COP21: limiter la hausse de température à 2°C par rapport aux niveaux préindustriels, et si possible à 1,5°C. Or non seulement l’humanité est plutôt sur la piste d’au moins 3°C d’ici à 2100, mais une planète à 2°C sera déjà très périlleuse. En particulier pour le cycle de l’eau, fortement dépendant de la température.

Le réchauffement amplifié par la sécheresse

L’aridité constitue non seulement une menace pour l’agriculture mondiale, mais aussi pour la qualité de l’eau, les forêts et la biodiversité. Et, selon un mécanisme de rétroaction positive, elle pourrait diminuer les capacités qu’ont les sols de stocker le carbone, accroissant ainsi l’effet de serre.

Dans une étude de modélisation publiée dans Nature Climate Change, l’équipe de Song Feng, du département des géosciences à l’université de l’Arkansas (Fayetteville), s’est penchée sur le délai avant émergence de l’aridité (Time to Emergence for Aridity, ToEA), celui au-delà duquel une différence significative d’aridité (ratio précipitation/évapotranspiration) sera observée par rapport aux données historiques (période 1861-2005).

Un quart de la population mondiale

Résultat: en 2100, un scénario RCP4.5 (hausse moyenne de 1,8°C d’ici à 2100, mais de marge d’incertitude de 1,1°C à 2,6°C) entraînera une nette aridification de 42% de la surface mondiale, contre 49% dans un scénario RCP8.5 (hausse moyenne de 3,7°C).

Pas besoin d’attendre aussi longtemps pour que les effets se fassent sentir: dans un scénario RCP4.5, 32% des terres, hébergeant 24% de la population mondiale, auront atteint une aridité dépassant le bruit de fond avant que la température mondiale n’ait dépassé les +2°C.

Dans le cas d’un seuil de +2°C dépassé lors d’un scénario RCP8.5, ce taux sera légèrement inférieur (24% des terres, 18% de la population mondiale), le cycle de l’eau ne répondant pas de manière linéaire au réchauffement et à sa trajectoire.

L’Europe du sud plus vulnérable

Alors que les premiers signes de sécheresse y sont déjà visibles, l’Europe du sud, dont l’ensemble de la France métropolitaine, pourrait être la première région du monde dont l’aridité dépassera le bruit de fond. Et ce avant 2050, de même que pour cinq autres régions: l’Amérique du Sud, l’Amérique centrale, le sud et l’ouest de l’Afrique, les côtes australiennes et le sud de la Chine. Pour l’Amérique du Nord et le nord de l’Europe, le ToEA se situe en revanche après 2050.

En matière de sécheresse, le tournant se situe donc avant 2°C: selon les chercheurs, maintenir la planète sur un objectif de 1,5°C, également mentionné dans l’accord de Paris, permettrait d’éviter à 20% de la surface terrestre (10% de la population mondiale) de devenir plus aride, soit deux tiers de moins qu’avec une hausse de +2°C.

L’Institut national de la recherche agronomique (Inra) a publié fin décembre une carte française du stockage de carbone dans les sols, qui viendra enrichir celle, mondiale, mise en place par le Partenariat mondial sur les sols de l’Organisation mondiale des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO). Le carbone est plus abondant dans les régions forestières et fourragères (Bretagne, Est, Massif Central Normandie), en altitude ou dans les régions humides (ouest de la France, delta du Rhône). Les sols sont en revanche pauvres en carbone dans le Languedoc et le Roussillon, caractérisés par un climat chaud, des sols peu épais et une forte activité viticole.

«Les Etats européens ont une responsabilité nationale face au réchauffement»

Stéphanie Senet
www.journaldelenvironnement.net/article/les-etats-europeens-ont-une-responsabilite-nationale-face-au-rechauffement,89119

En juin 2015, l’ONG Urgenda faisait condamner le gouvernement néerlandais pour son inaction climatique. Cette décision a-t-elle fait bouger Amsterdam? Entretien avec Dennis van Berkel, avocat de l’association, deux ans et demi après ce verdict historique.

Quels ont été les effets de la décision de la Cour de La Haye ?

Ils ont été très importants aux Pays-Bas. Le verdict de juin 2015 a fait entrer la lutte contre le changement climatique dans l’agenda politique. Auparavant, la plupart des partis faisaient de leur mieux pour ignorer le problème. Six mois avant la condamnation d’Amsterdam, les leaders du parti au pouvoir (les libéraux du parti populaire pour la liberté et la démocratie ou VVD, ndlr) ne reconnaissaient toujours pas que l’homme était responsable du réchauffement. Ils ne le niaient pas forcément mais refusaient tout simplement de prendre position. Ensuite, le gouvernement a reconnu officiellement le verdict, et donc sa responsabilité propre dans la lutte contre le réchauffement. Même s’il a fait appel de cette décision. C’est un changement important pour notre pays. Il est admis que l’Union européenne n’est plus la seule à devoir légiférer et agir. Les Etats européens ont leur propre responsabilité et ils peuvent prendre des mesures plus ambitieuses que Bruxelles.

Les magistrats ont obligé le gouvernement à réduire de 25% ses émissions de gaz à effet de serre en 2020. N’est-ce pas un coup d’épée dans l’eau?

Oui et non. Pour arriver à ce chiffre, les juges ont analysé la littérature scientifique et se sont référés à l’engagement des pays de l’annexe 1 à la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques -engagement à réduire de 25 à 40% leurs émissions en 2020 pour limiter le réchauffement à 2°C par rapport à l’ère pré-industrielle. C’est la première fois au monde que des juges prenaient une telle décision. Ensuite, le gouvernement a publié un rapport expliquant, dans les grandes lignes, comment il pourrait réduire de 25% les émissions nationales en 2020, notamment en programmant la fermeture des centrales à charbon. Une fermeture que les parlementaires ont officiellement votée 6 mois après le verdict et qui a été actée, à l’horizon 2030, par le nouveau gouvernement du Premier ministre Mark Rutte en octobre dernier. Celui-ci est même allé plus loin en visant un nouvel objectif ambitieux de réduction des émissions de 49% en 2030. En parallèle, les émissions de GES ont seulement été réduites de 11% entre 1990 et 2016. Ce qui reste très insuffisant par rapport aux enjeux.

Hormis la fermeture des centrales à charbon, quelles mesures ont-elles été prises?

L’une des particularités du gouvernement néerlandais, c’est de miser avant tout sur les engagements volontaires des entreprises plutôt que de contraindre qui que ce soit par la loi. La nouvelle coalition gouvernementale formée après les élections générales de mars 2017 a toutefois introduit un prix-plancher du carbone pour la production d’électricité, fixé à 18 euros la tonne en 2018 et qui doit progresser jusqu’à 43 €/t en 2030.

Deux ans et demi après, comment analysez-vous votre victoire?

Nous avons gagné la première bataille mais devons encore gagner en appel. L’audience se tiendra le 28 mai 2018. Nous nous préparons activement. Cela dit, nous avons emporté une réelle victoire en juin 2015 car les politiques ont été mis au pied du mur. S’ils avaient agi plus tôt, nous n’en serions pas arrivés là mais les risques sont devenus tels qu’il était urgent de pointer la responsabilité de l’Etat. En plus, nous avons formé notre action en rassemblant 900 plaignants et nous sommes parvenus à mobiliser une grande partie de la population, des jeunes, des vieux, des paysans, des entrepreneurs, des inconnus, des célébrités… Nous pensons que le changement climatique concerne tout le monde, qu’il ne s’agit pas d’une question réservée au gouvernement ou aux parlementaires. C’est d’ailleurs le chemin qu’ont pris d’autres associations européennes, qui ont formé un recours similaire au nôtre, comme Klimaatzaak en Belgique ou Les aînées pour la protection du climat en Suisse.

Climat : n’attendons pas les États, agissons localement !

Alternatiba/ANV-COP21 et Réseau Action Climat
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De COP en One Planet Summit, les États semblent incapables de répondre à l’urgence climatique. En revanche, expliquent les auteurs de cette tribune, les territoires, les villes, les régions… se mobilisent. Les moyens d’agir existent à l’échelle locale. Alternatiba et le Réseau action climat ont mis en place des structures pour accompagner les citoyens qui voudraient s’en emparer en 2018.

Sécheresses record dans la Corne de l’Afrique, ouragans majeurs aux États-Unis et dans les Caraïbes, mais aussi incendies, tempêtes et érosion des côtes en France… L’année 2017 n’a pas manqué de nous rappeler que les dérèglements climatiques sont déjà à l’œuvre ! Face à cette urgence, les engagements pris par les États du monde entier à la COP21 sont dramatiquement insuffisants. La décision de Donald Trump de sortir les États-Unis de l’Accord de Paris a fragilisé la dynamique politique sur les changements climatiques, et la COP23 a révélé la grande difficulté des autres États à prendre le relais pour maintenir le réchauffement climatique en dessous de la barre des 2 °C et de tendre vers 1,5 °C. Le One Planet Summit qui s’est tenu le 12 décembre à Paris a été encore une occasion ratée par la France de prendre des engagements concrets amorçant la transition écologique. Mais une autre voie que celle des sommets internationaux et des négociations des États s’offre à nous : celle de nos territoires.

En 2005, alors que George W. Bush avait révoqué la signature du protocole de Kyoto par les États-Unis, plusieurs centaines de maires signaient l’United States Mayor’s Climate Protection Agreement (Accord des maires des États-Unis pour la protection du climat), dans lequel ils et elles s’engageaient à diminuer les émissions de gaz à effet de serre de leurs communes selon les exigences du protocole de Kyoto. Cet exemple de prise de responsabilités à l’échelle locale n’est pas un cas isolé. Dans des réseaux internationaux tels que Énergie Cités, ICLEI [Conseil international pour les initiatives écologiques locales] ou le C40, des villes à travers le monde coopèrent pour diminuer les émissions de gaz à effet de serre et pour limiter les risques liés au dérèglement climatique. Un nombre considérable de ces villes se trouvent dans des États qui ne montrent que peu d’ambition pour la protection du climat.

Les collectivités ont la responsabilité indirecte de 50 % des émissions de gaz à effet de serre

L’engagement des communes est d’autant plus intéressant qu’au-delà du symbole, elles ont un réel potentiel. En effet, selon le dernier rapport du Giec [Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat], 50 à 70 % des leviers d’action contre le dérèglement climatique se trouvent au niveau local. Sous peine d’être vides de sens, les engagements des États devront donc non seulement se matérialiser par des décisions politiques nationales fortes, mais surtout se concrétiser dans les territoires. En effet, les collectivités territoriales ont une responsabilité directe dans 15 % des émissions de gaz à effet de serre nationales, via leurs bâtiments par exemple. Et si l’on tient compte de leurs décisions en matière d’aménagement, de transports, de bâtiments, d’installation d’énergies renouvelables, etc., les collectivités ont une responsabilité indirecte sur jusqu’à 50 % de ces émissions. Les échelles locales, et plus précisément les collectivités territoriales, sont donc un terreau particulièrement fertile pour accélérer la transition écologique et sociale. À cela s’ajoute que, depuis peu, les collectivités territoriales françaises disposent aussi des outils nécessaires pour mener à bien la transition écologique.

La France a adopté en août 2015 la loi de Transition énergétique pour la croissance verte et le troisième volet de la réforme territoriale s’est également achevé à l’été 2015. Ces deux textes sont le résultat de débats parlementaires qui ont parfois tronqué l’ambition initiale, mais leur croisement fait apparaître de nombreuses possibilités d’action en faveur du climat dans les politiques publiques locales. Ainsi, ils enclenchent une généralisation progressive des plans climat-air-énergie territoriaux (PCAET). D’ici au 31 décembre 2018, toutes les intercommunalités de plus de 20.000 habitant·e·s — soit plus de la moitié de nos territoires — devront avoir réalisé une planification de leurs actions en faveur du climat. Concrètement, cela signifie repenser l’aménagement de nos villes et villages afin de sortir de la dépendance à la voiture et préserver nos sols, replacer les mobilités douces au cœur de nos déplacements, développer les énergies renouvelables, isoler nos logements, proposer une alimentation bio, locale et moins carnée dans nos cantines et restauration collective… autant de mesures qui pourraient générer 220.000 emplois nets en 2020 [1] !

Cependant, ces outils présentent des possibilités, pas des obligations. Leur efficacité pour accélérer la transition dépendra fortement de l’usage qui en sera fait. C’est le cas par exemple des « zones à circulation restreinte » : ce dispositif est l’une des cartes à jouer dans la main des élu·e·s, encore faut-il disposer d’une bonne dose de volonté politique pour l’utiliser. Reste donc aux acteurs des territoires, élu·e·s, technicien·ne·s mais aussi citoyen·ne·s à se les approprier.

 Ces sujets semblent complexes pour la plupart des personnes

Si l’on veut que les collectivités territoriales utilisent les nouveaux outils qu’elles ont à leur disposition, il est primordial que les habitant·e·s s’en emparent. À l’inverse des questions traitées lors des sommets internationaux, les domaines auxquels touchent les plans climat, par exemple, ont un lien direct avec la vie quotidienne : limiter la place de la voiture en ville pour respirer de nouveau, favoriser des filières agricoles bas carbone pour se nourrir sainement en préservant la planète, développer des énergies renouvelables et créer de l’emploi non délocalisable… Pour les citoyen·ne·s engagé·e·s, c’est l’occasion de passer de l’engagement individuel à des projets de territoire et ainsi, de faire changer d’échelle les alternatives. Concrètement, cela peut permettre de passer du choix de réduire sa consommation de viande à titre individuel ou de créer une Amap avec d’autres personnes à mettre en place l’approvisionnement en nourriture locale, bio et moins carnée pour les cantines d’une collectivité.

En effet, pour les plans climat, une consultation publique en amont de leur adoption est obligatoire. Avant cette consultation publique, il est aussi possible (et souhaitable !) que les citoyen·ne·s coconstruisent ces politiques publiques en s’impliquant dans les processus de concertation parfois proposés par les élu·e·s : c’est l’occasion de porter auprès des responsables des propositions d’alternatives à concrétiser au plus près des citoyen·ne·s.

Si les plans climat des intercommunalités changent concrètement notre quotidien, si leur construction est souvent proposée à la concertation, il n’en reste pas moins que ces sujets semblent complexes pour la plupart des personnes : technicité, acronymes, processus de concertation avec des horaires de réunions parfois inadaptés… En 2018, Alternatiba et le Réseau action climat proposent aux citoyen·ne·s de les accompagner dans cette implication : formation, outils ou encore mise en réseau entre personnes volontaires permettront à tout un chacun de s’intéresser de près aux actions de nos élu·e·s.

S’impliquer dans la transition écologique de nos territoires permet d’accélérer la création d’une société 100 % renouvelable et résiliente, mais aussi de redonner ses lettres de noblesse à la politique : celle qui construit un avenir climato-compatible et se joue au quotidien en incluant les citoyen·ne·s, et non pas celle qui peine à les mobiliser aux urnes.

Hubert Reeves : « Plus rien ne nous menace. Sauf nous ! »

Entretien avec Hubert Reeves, Propos recueillis par Hervé Kempf
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L’homme a développé une intelligence bien supérieure à celle nécessaire à sa survie, explique l’astrophysicien et écologiste Hubert Reeves. Mais, aujourd’hui, cette qualité menace directement notre avenir alors que l’issue de la bataille entre la force de « détérioration » et celle de « restauration » est incertaine.

Hubert Reeves est astrophysicien, communicateur scientifique et écologiste franco-canadien. Son dernier ouvrage, Le Banc du temps qui passe. Méditations cosmiques, est paru au éditions du Seuil.

Reporterre — Comment les choses ont-elles évolué depuis 1989, quand vous aviez discuté avec le premier Reporterre ? Dans le bon sens ou dans le mauvais ?

Hubert Reeves — Les deux. La détérioration de l’environnement se poursuit, la déforestation continue à très grande allure, la pollution s’aggrave. Mais, en parallèle, la prise de conscience, ce que l’on pourrait appeler le « réveil vert », se poursuit avec une égale intensité. On est dans une situation de conflit entre deux forces. Une force de détérioration, qui se poursuit à grande allure et une force de restauration, qui se développe peut-être plus vite. Mais elle avait du retard par rapport à l’autre, qui est beaucoup plus ancienne. Comment sera cette planète dans trente ans ? Personne ne le sait. Cela pourrait être bien pire. Ou bien mieux.

Quels sont les signes positifs ?

Par exemple, le développement des énergies renouvelables. Il y a trente ans, quand on en parlait, les gens disaient : « Vous rêvez ». Aujourd’hui, des pays comme le Danemark ou d’autres envisagent d’atteindre 20 % d’électricité produite par l’énergie renouvelable ; ce n’est pas rien. On s’aperçoit qu’on peut compter sur ces énergies, elles sont entrées dans le domaine des possibilités.

Quelles autres bonnes nouvelles distinguez-vous ?

Je vais beaucoup dans les lycées, dans les collèges. Il y a trente ans, quand je parlais d’écologie, j’avais quelques étudiants polis qui venaient pour éviter le cours de mathématiques. Aujourd’hui, je vois des gens vraiment emballés. C’est très vibrant. Et par ailleurs, en France, de plus en plus, les mairies font des efforts énormes. Beaucoup de mairies se sont jointes à notre mouvement « Oasis nature » pour refuser les pesticides. Je pense qu’on est comme dans une partie de football. Vous ne savez pas qui va gagner !

Mais qui fait l’arbitre ?

L’arbitre est ce qu’on verra.

C’est une bataille sauvage, quand même !

Parfaitement sauvage. C’est la réalité. Mais je compare la situation avec celle des années 1940, quand les nazis gagnaient sur tous les fronts et que la civilisation était menacée. Un homme — Churchill — disait : « Non, je refuse. » Il disait aussi : « Ce n’est pas le commencement de la fin, c’est la fin du commencement ! » Je pense qu’on en est là en ce moment, dans une situation critique. Et ce qui se décide aujourd’hui va influencer l’avenir pour des siècles.

« Ce qui se décide aujourd’hui va influencer l’avenir pour des siècles. »

Y a-t-il un Churchill aujourd’hui ?

Non. Mais je vois beaucoup de gens qui décident et qui sont décidés à aller au bout. Surtout chez beaucoup de jeunes.

Pourtant, si l’on observe la politique de Donald Trump aux États-Unis, ou la déforestation qui reprend au Brésil, ou encore la Russie, un régime despotique et quasiment climatosceptique, on a du mal à déceler un changement positif.

C’est sûr, Trump est un problème. Mais la COP21 a été un événement historique. Le moment où 195 pays se mettent d’accord pour dire il y a un problème : c’est un événement historique ! La dernière fois qu’on a vu cela, c’est pour la Déclaration des droits de l’homme. Comment va-t-on résoudre ce problème ? C’est une autre histoire. Mais le fait d’être tous d’accord pour le régler est fondamental.

Alors Trump, c’est quoi ? Un accident ?

En fait, Trump a aussi joué un rôle positif aux États-Unis, parce qu’il a relancé beaucoup d’États qui sont scandalisés d’avoir ce personnage à leur tête. La Californie est maintenant complètement tournée vers l’écologie, comme la Nouvelle-Angleterre. C’est impressionnant de voir tous les efforts qui se font.

Comment analysez-vous l’évolution de la Chine ?

La Chine est beaucoup plus verte que les États-Unis. Aujourd’hui, le plus grand producteur de matériel pour l’écologie, c’est la Chine. Elle me paraît devenir le pays qui va être en tête de l’écologie.

Vous nous avez décrit les combattants qui luttent du bon côté. Qui sont les adversaires ?

« Money, money. » C’est faire de l’argent rapidement, une vieille tendance humaine. Rien de nouveau. Ce qui est nouveau, c’est que l’avenir de l’humanité est mis en péril. Pourquoi ? Parce que nous sommes très nombreux, très puissants. Ce n’était pas le cas il y a un siècle. À partir de 1950, les activités humaines ont commencé à avoir un impact à l’échelle mondiale, et à menacer l’avenir de l’humanité.

« Faire de l’argent rapidement est une vieille tendance humaine. Rien de nouveau. Ce qui est nouveau, c’est que l’avenir de l’humanité est mis en péril. »

 

 

 

Qu’est-ce qui nous a fait partir dans cette direction durant les années 1950 ?

C’est surtout la multiplication des voitures et du confort. J’étais aux États-Unis en 1960 et je travaillais à la Nasa. On donnait des cours sur l’atmosphère. Il y avait un personnage qui s’appelait James Hansen. Cela vous dit quelque chose ?

Oui, bien sûr. Un climatologue qui a lancé l’alerte dès 1988.

On allait prendre le café avec lui. Et il disait : « Je m’inquiète de la rapidité avec laquelle le nombre de voitures s’accroît. » On lui répondait : « Vous rigolez, la Terre c’est grand. » Mais il avait raison. Tout d’un coup, la quantité de gaz carbonique émise s’est mise à croître à toute vitesse et est arrivée au niveau où elle commence à affecter l’équilibre global. On lui disait : « Vous exagérez, vous êtes un alarmiste. » C’est lui qui avait raison !

L’ennemi est « money, money » : c’est la cupidité ?

Cela revient toujours à cela ! Les profits rapides : abattre la forêt pour des profits rapides. Et se ficher de ce qui va se passer quand il n’y en aura plus ! Mais voici une histoire.

Cela commence il y a quelques millions d’années, une espèce animale reçoit de la « Nature » un « cadeau ». Mettez des guillemets, c’est un conte. Ce cadeau, c’est « l’intelligence ». Une intelligence fabuleusement plus grande que celle de toutes les espèces animales. Il n’y en a pas une qui nous arrive à la cheville. Cette intelligence va sauver les humains parce qu’ils sont très mal nantis pour se défendre. Ils n’ont pas de grandes dents, ils n’ont pas de griffes, pas de carapace, pas de venin comme les serpents. Sans cette intelligence, ils auraient été bouffés — c’est le cas de le dire — parce que la loi à cette période — et maintenant —, c’est manger et ne pas être mangé. Ils ont cette intelligence et là commence cette histoire, que j’appelle la séquence des armes. Ils commencent à faire des armes assez simples, des dards, des flèches, des frondes. C’est primitif, mais cela les sauve. Plus tard, ils découvrent la poudre à canon. Ils commencent à faire des bombes. Ils font une bombe atomique. Et puis Hiroshima. Que s’est-il passé ? Il s’est passé que cette intelligence qui les avait protégés, qui les avait sauvés, dévoile un autre aspect d’elle-même, qui est la possibilité qu’elle puisse conduire à les éliminer. Il y a aussi l’histoire de Stanislas Petrov. Vous connaissez son histoire ?

Je l’ai lue dans votre livre. Racontez-la-nous.

Il est présent au quartier général de l’Union soviétique. Un jour, il reçoit un message disant que les États-Unis ont lancé des salves nucléaires. Elles seront ici dans quinze minutes. Et c’est à lui d’agir.

D’envoyer une bombe, des missiles contre les États-Unis ?

De donner l’ordre de les envoyer. C’est à lui de décider. Alors, il décide de ne rien faire. Heureusement, parce que c’était une fausse alarme ! Il a été blâmé après coup pour désobéissance. Puis il a reçu des prix, des médailles, en tant que sauveur de l’Humanité. Mais il est important de réfléchir à ce qui s’est passé. À ce moment-là, nous étions tous à la merci du jugement d’une personne, qui aurait pu envoyer le message fatal et qui ne l’a pas fait. Il nous a sauvés de l’autodestruction. Pas des dangers de la nature, du froid ou des bêtes féroces, mais de nos propres inventions. Donc, il faut prendre conscience du fait que nous sommes extrêmement puissants ! Nous avons une intelligence redoutable. Nous sommes nombreux. Nous nous menaçons nous-mêmes. L’humanité peut-elle survivre à sa propre puissance et à sa cupidité ?

Quelle est votre réponse ?

Je n’en sais rien. Il est possible qu’on se détruise. Avec monsieur Kim Jong-un, en Corée, et monsieur Trump, on joue à des jeux fous. On ne sait pas. C’est comme si la « Nature » nous disait : « Je vous ai fait un beau cadeau et maintenant débrouillez-vous. Essayez de survivre à votre puissance et à votre cupidité ».

Qu’est-ce que la « Nature », pour vous ?

Je n’en fais pas un motif religieux. La « Nature », que j’écris entre guillemets, c’est ce qui fait que nous sommes ici présents. Ce qui fait que nous allons mourir. C’est ce que nous constatons. On voit qu’il y a des lois de la « Nature », qu’il y a des progressions de la complexité, qu’il y a de la mort, qu’il y a ci et çà. Cette espèce de réalité opaque dans laquelle nous baignons, je n’en fais pas une philosophie ni une religion.

Le grand danger, pour moi, est qu’on passe son temps à se faire des représentations de la « Nature » à notre échelle. De trois façons, notamment. Il y en a une, c’est un Dieu, un grand architecte. Avec plusieurs espèces de ce Dieu : chrétienne, juive, musulmane. Dieu est un personnage qui s’intéresse à vous et à moi. Un personnage que vous pouvez prier. Il y a quelqu’un au bout de la ligne quand vous priez.

L’autre version est la version orientale, le Tao. Il n’y a personne au bout de la ligne, ce n’est pas la peine de prier. C’est une espèce de principe super intelligent. La troisième version, plus occidentale, plus récente, c’est le hasard.

Il faut reconnaître que nous sommes une espèce animale parmi des millions d’autres. Nous avons une intelligence qui était faite pour nous amener à vivre dans ce monde. Comme tous les animaux, nous avons une intelligence, venue par l’évolution biologique, qui nous sert à survivre. Mais le plus étonnant est que nous en avons beaucoup plus que nécessaire à cela. C’est le grand mystère de l’intelligence ! Vous n’avez pas besoin de connaître la théorie de la relativité pour survivre. Comment dans l’évolution avons-nous développé une telle intelligence ?

« C’est comme si la “Nature” nous disait “je vous ai fait un beau cadeau et maintenant débrouillez-vous. Essayez de survivre à votre puissance et à votre cupidité”. »

En tant qu’individu, je n’ai pas besoin de la théorie de la relativité pour survivre. Mais, individu du début du XXIe siècle, vivant dans le monde avec des ordinateurs, des voitures, des avions… Je sais que ce monde dépend de la théorie de la relativité, donc en a besoin.

Placez-vous plus de mille ans ou deux mille ans dans le passé… Aviez-vous besoin de la théorie de la relativité ? Et pourtant, les gens existaient. Ils n’avaient pas besoin de la puissance intellectuelle que nous avons. Qu’est-ce qui nous a amenés à avoir une telle intelligence puisque nous n’en avons pas vitalement besoin pour survivre ?

Ce que je veux dire, c’est que pour survivre, nous avons besoin de savoir cultiver, de chasser, de manger… mais nous n’avons pas besoin de cette forme d’intelligence. Nous l’avons. Pour moi, c’est quelque chose de très mystérieux. Comment en sommes-nous arrivés à avoir une telle intelligence ? Le contexte est que notre intelligence, notre puissance nous menacent. Notre combat aujourd’hui est d’arriver à montrer que nous pouvons survivre à notre intelligence. Nous sommes déjà venus très près de disparaître. Ce qui s’est passé avec M. Petrov est très exactement cela.

Nous sommes installés, puissants. Plus rien ne nous menace. Sauf nous !

Aujourd’hui, on développe « l’intelligence artificielle ». Certains pensent que va venir un moment où la machine sera plus intelligente que l’homme.

Comme Ray Kurzweil.

Oui. Ils espèrent fusionner avec la machine. Et devenir une autre espèce. Que pensez-vous de ce courant qu’on appelle « transhumaniste » ?

Je vais retourner 400.000 ans dans le passé, quand les humains ont découvert le feu. Avec le feu, vous pouvez vous chauffer. Vous pouvez mettre le feu à la maison de votre voisin. Les hommes développent des techniques nouvelles continuellement. Cela commence par le feu puis jusqu’à… Ce qui importe est que ces techniques n’ont pas de morale en soi. Elles dépendent de ce qu’on en fait, du jugement des humains. On a découvert l’électricité. On a découvert la bombe atomique. Ce qui compte n’est pas le fait qu’on trouve des choses. C’est les décisions qu’on prend par rapport à l’idée de s’en servir. Le « transhumanisme » et toutes ces choses, ce peut être formidable ou nuisible. Formidable si l’on peut rendre la vue aux aveugles, améliorer le sort des infirmes ou des fous. Nuisible si c’est pour en faire des petits militaires ou des zombies. Tout le problème est : qui décide ce qu’on fait ?

Tant qu’il y aura une prise de courant que vous pourrez enlever, çà restera acceptable. Si on décide de faire des machines capables de décider par elles-mêmes, cela deviendra dangereux. Le risque, c’est : qui va décider ?

Êtes-vous optimiste ?

Souvent des jeunes couples m’interrogent : « Devant toutes ces menaces on se demande si on va faire des enfants. Qu’en pensez-vous ? » Je leur cite cette phrase de Cioran : « Il n’y a rien à attendre de la vie. » Et je leur demande : en considérant ce que vous avez vécu jusqu’ici, êtes-vous d’accord avec Cioran ? Si vous êtes d’accord avec lui, ne faites pas d’enfant. Si vous n’êtes pas d’accord avec lui, et que malgré les difficultés que vous avez pu vivre, tout cela valait la peine, eh bien, donnez-leur leur chance.

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Klima 2050 BASQUE COUNTRY


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Klima Aldaketaren aurkako Euskal Estrategia, Klima 2050, prozesu luze batean emaitza da. Izan ere, prozesua  2014an hasi zen, klima-aldaketaren alorreko hainbat adituk landutako  fokalizazio estrategikoko dokumentu batez; aditu horien artean, zentro teknologikoetako eta Euskal Herriko Unibertsitateko ikertzaileak zeuden, eta zenbait erakunderen lankidetza izan zuten, hala nola, Eusko Jaurlaritzako Sailena, udalena eta aldundiena, eta baita gizarte zibilarena ere, horretarako abiatutako parte-hartze foroen bitartez.

Estrategia egiteko prozesua

Klima 2050 estrategiaren ikuspegia

Euskadik ekonomia lehiakorra du, karbono maila gutxikoa eta klima-ondorioei egokitua, ezagutzan oinarritutako klima-aldaketako politika bat finkatu izanari esker, zeren politika horrek ahalbidetu baitu berrikuntza eta garapen teknologikoak eskaintzen dituzten aukerak aprobetxatzea. Hori posible izan da euskal gizartearen eragile guztien erantzunkidetasunari esker, eta, halaber, Administrazio Publikoaren ekintza eredugarriaren bultzadari esker.

2050erako ikuspegi horretara iristeko, Estrategiak ondoren aipatutako bost premisak identifikatu ditu klima-aldaketari buruzko politikan kontuan hartu beharreko funtsezko baldintza gisa:

  1. Klima aldaketa moteltzeko eta hari integratzeko ekintzak plangintza publikoan integratzea.
  2. Administrazioaren ekintza eredugarri eta koordinatua bultzatzea, karbono gutxiko gizarte egokitu batera zuzendutako eraldaketa lortzeko.
  3. Berrikuntza eta garapen teknologikoa sostengatzea, berotegi-efektuko gasen isurketa sektore guztietan murriztu ahal izateko, eta lurraldeak klima-aldaketaren aurrean duen urrakortasuna ere murrizteko.
  4. Euskal gizartearen eragile guztien erantzunkidetasuna aldeztea moteltze eta egokitze ekintzetan.
  5. Klima-aldaketari buruzko tokiko ezagutza egokitzea erabakiak hartzeko prozesuei.

Nazioarteko konpromisoekin bat etorriz, eta balizko hainbat aurreikuspen aztertu eta gero, hipotesi sozioekonomiko eta energetikoak oinarritzat hartuta, estrategiak helburu hauek definitu ditu:

  • 1. Helburua
    • Euskadiko BEG emisioak gutxienez % 40 murriztea 2030erako eta gutxienez % 80 murriztea 2050erako, 2005. urtearekin alderatuta.
    • 2050. urtean lortzea energia berriztagarrien % 40ko kontsumoa azken kontsumoarekiko.
  • 2. Helburua
    • Euskadik klima-aldaketaren aurrean erresilientzia izan dezan bermatzea.

2050erako klima-aldaketaren Euskadiko estrategia (PDF, 11 MB)