Bizi !

Articles du Vendredi : Sélection du 8 février 2013

7 arguments pour la ville à 30 km/h

Olivier Razemon
http://transports.blog.lemonde.fr/2013/02/08/7-arguments-pour-la-ville-a-30-kmh/

L’Atlantique nord absorbe de moins en moins de C02

Ifremer – 7 février 2013
http://reporterre.net/spip.php?article3818

Halte à la publicité sur Internet !

Khaled Gaiji, Charlotte Nenner et Antonin Moulart
www.reporterre.net/spip.php?article3782

[:]

7 arguments pour la ville à 30 km/h

Olivier Razemon
http://transports.blog.lemonde.fr/2013/02/08/7-arguments-pour-la-ville-a-30-kmh/

C’est la question du jour. Sur le site du Parisien, tous les matins, on peut voter « oui » ou « non » à une proposition illustrée par un article. On peut commenter son vote, aussi. Ce vendredi 8 février, le quotidien demande à ses lecteurs s’il faut étendre la limitation de vitesse à 30 km/h dans toute la ville. C’est ce vendredi qu’est lancée en France la campagne européenne pour le plafonnement de la vitesse.

A 10h15, le vote, sans surprise, affichait 73,6% de non et 26,4% de oui. Les déjà 107 commentaires relevés au pied de l’article faisaient dans le genre attendu : « Il ne manquait plus que ça ! », « Envisager de nouvelles lois plus restrictives alors qu’on n’est pas capable de faire respecter celles en vigueur », et puis l’inévitable « Commençons déjà par verbaliser tous les piétons et cyclistes qui ne respectent pas le code de la route », sans compter les tirades adressées aux « braves policiers qui auraient mieux à faire » ou aux « politiciens qui nous gouvernent » et ne se déplacent jamais sans chauffeur. On connaît ça par cœur, on se croirait tout bonnement… dans la circulation, entouré de râleurs. Après tout, il est moins dangereux de s’énerver seul devant son écran que seul à son volant.

7 arguments pour le oui. Et pourtant, le débat mérite mieux que ces invectives. Les arguments pour la limitation de la vitesse en ville sont multiples. En voici quelques uns, sommairement exposés :

1/ Une tonne d’acier se révèle moins dangereuse lorsqu’elle circule à 30 km/h qu’à 50 km/h.

2/ La pollution aux particules fines, qui empoisonne les villes (voir les conséquences ici), n’est pas liée au seul trafic automobile, mais celui-ci y contribue largement.

3/ La vitesse moyenne réelle ne dépasse de toute façon pas, en milieu urbain, les 18,9 km/h, comme je l’avais rappelé ici.

4/ Les piétons et les cyclistes se sentent plus à l’aise dans une ville apaisée. Les riverains se croiseront plus souvent. Des opportunités culturelles, amicales, économiques voire sexuelles naissent de ces rencontres impromptues.

5/ Les habitants, habitués à se déplacer de manière non motorisée, affichent une meilleure santé.

6/ Les commerces locaux en profitent amplement, comme le rappelle ici Bruno Blanckaert, président d’une association de commerçants parisiens. Contrairement à une idée tenace, les personnes qui se déplacent à pied ou à vélo font de meilleurs clients que les automobilistes. Ils achètent de moins gros volumes mais beaucoup plus souvent.

7/ La ville, moins bruyante et plus agréable, redevient attractive. L’étalement urbain, unanimement condamné, tend à se limiter.

Une opportunité économique. Ces arguments valent pour les grandes villes, dira-t-on. Non. Dans les grandes villes, le ralentissement se fera sans doute progressivement, parce que l’espace manque, que les transports sont performants et que la possession d’une voiture présente un intérêt moindre. Non, le raisonnement vaut surtout pour les villes moyennes et petites, celles qui, aujourd’hui, se désertifient, se dévalorisent, perdent des habitants, des commerces et de l’activité. La limitation de vitesse à 30 km/h est pour ces villes une opportunité économique.

On peut signer la pétition européenne ici : https://30kmh.eu/oct-web-public/?lang=fr

L’Atlantique nord absorbe de moins en moins de C02

Ifremer – 7 février 2013
http://reporterre.net/spip.php?article3818

Les océans constituent un tampon essentiel du changement climatique, en absorbant une part majeure du gaz carbonique émis par la société humaine. Mais, selon une nouvelle étude scientifique, l’absorption par l’Atlantique nord semble diminuer. Moins de CO2 dans l’océan signifie plus dans l’atmosphère.

 

L’océan est le principal réservoir qui modère l’accumulation du CO2 dans l’atmosphère, facteur principal du réchauffement climatique. La compréhension des mécanismes à l’origine du stockage du CO2 dans l’océan est donc essentielle pour mieux prévoir l’évolution du climat.

 

La revue Nature Geoscience publie cette semaine les résultats [1] des travaux menés par une équipe de chercheurs franco-espagnole (CNRS, Ifremer2 et Instituto de Investigaciones Marinas, CSIC3). Ceux-ci ont mis en évidence le lien entre le ralentissement du « tapis roulant » océanique, qui transporte en surface les eaux chaudes vers les hautes latitudes et en profondeur les eaux froides vers le sud, et la réduction de l’absorption du carbone anthropique dans l’Atlantique nord entre 1997 et 2006.

 

Le tapis roulant océanique : le maillon manquant

 

Aujourd’hui, environ un quart du CO2 émis par l’homme est absorbé par l’océan, et l’Atlantique Nord constitue un des principaux réservoirs de CO2 anthropique. Le puits océanique de carbone s’explique par l’augmentation de la teneur en CO2 dans l’atmosphère (due aux activités humaines) qui favorise ainsi la dissolution du CO2 dans l’eau. De plus, le tapis roulant océanique contribue à enfouir le CO2 anthropique en profondeur dans l’Atlantique Nord.

 

L’absorption du CO2 atmosphérique a diminué rapidement entre 1990 et 2006 dans la zone subpolaire de l’Atlantique nord. De nombreux travaux l’ont déjà montré : des modèles numériques et des observations ont ainsi mis en évidence l’influence des forçages atmosphériques sur cette diminution.

 

Cette réduction a aussi coïncidé avec un ralentissement du « tapis roulant » océanique, appelé circulation atlantique méridienne par les scientifiques. L’équipe franco-espagnole de chercheurs s’est intéressée à ce facteur, et, grâce à des observations en mer, a pu prouver que le ralentissement du tapis roulant océanique réduit la capacité naturelle de l’Atlantique subpolaire à piéger le CO2 atmosphérique dans l’océan.

 

Le ralentissement du tapis roulant océanique observé au début des années 2000 fait partie d’une variabilité dont les cycles durent de une à plusieurs dizaines d’années. Cet élément peut être considéré comme le « maillon manquant » dans la compréhension du ralentissement du stockage du CO2 atmosphérique. Il faudra à l’avenir le prendre davantage en compte dans les modèles de prévisions du changement climatique.

 

Des données issues de campagnes en mer

 

Ces travaux ont été menés dans le cadre des programmes internationaux OVIDE [4], CATARINA5 et CARBOCHANGE [6] qui ont permis la réalisation de campagnes transocéaniques répétées d’observation de l’océan. Celles-ci ont permis aux scientifiques de déterminer les changements de circulation et du transport du CO2, et ainsi d’évaluer le bilan de CO2 dans l’Atlantique nord à partir de son accumulation et de son transport par les courants.

 

Dans leur étude, les chercheurs ont décomposé l’Atlantique nord en deux régions principales : subtropicale et subpolaire. Ils ont cherché à comprendre où le CO2, et en particulier le surplus anthropique (d’origine humaine), est absorbé. Leurs principales conclusions pour la période 1997-2006 sont les suivantes :

 

L’absorption du CO2 anthropique a eu lieu presque exclusivement dans le gyre [7] subtropical, mais il est transporté vers le gyre subpolaire par la circulation méridienne.

Le ralentissement de la circulation méridienne est le principal responsable de la diminution du transport du CO2 anthropique du gyre subtropical vers le gyre subpolaire, ce qui contribue à limiter le stockage du CO2 anthropique dans les eaux profondes.

La circulation méridienne apporte de l’eau non saturée en CO2 en provenance de l’Atlantique Sud. Son ralentissement contribue à augmenter la teneur de CO2 en surface dans l’Atlantique Nord et donc à limiter le transfert du CO2 de l’atmosphère vers l’océan.

 

 

……………………………………..

Notes

[1] « Atlantic Ocean CO2 uptake reduced by weakening of the meridional overturning circulation » by Fiz F. Pérez, Herlé Mercier, Marcos Vázquez Rodríguez, Pascale Lherminier, Anton Vélo, Paula C. Pardo, Gabriel Rosón and Aida F. Ríos, Nature Geoscience, online 13 Jan., 2013.

[2] Laboratoire de physique des océans (Unité mixte de recherche Ifremer/ CNRS / IRD / UBO).

[3] CSIC : Consejo Superior de Investigaciones Cientificas, agence d’état espagnole.

[4] OVIDE : Observatoire de la Variabilité Interannuelle à Décennale en Atlantique Nord, projet coordonné par le LPO, en collaboration avec des laboratoires de Paris, Vigo et Moscou.

[5] CATARINA : Carbon Transport and Acidification Rates in the North Atlantic, projet coordonné par le CSIC, en collaboration avec l’Université de Vigo et le LPO.

[6] CARBOCHANGE : Changes in carbon uptake and emissions by oceans in a changing climate, programme européen regroupant 100 scientifiques de 15 pays.

[7] gyre : boucle fermée de courant autour d’un bassin océanique.


Halte à la publicité sur Internet !

Khaled Gaiji, Charlotte Nenner et Antonin Moulart
www.reporterre.net/spip.php?article3782

« La liberté d’intrusion de la publicité s’oppose clairement à la liberté de réception de l’internaute, le tout au nom d’une fausse gratuité »


En janvier 2013, le fournisseur d’accès internet Free avait bloqué par défaut la publicité pour ses clients pendant quelques jours, protégeant plus de 5 millions d’internautes de l’agression publicitaire. Cette mesure courageuse répondait à une préoccupation importante des Français ; la publicité est en effet considérée par la majorité d’entre eux comme envahissante (1). Free vient de réactiver l’option mais sans blocage par défaut, une timide avancée.

 

Liberté d’intrusion contre liberté de réception

 

Free, par cette action, a engagé bien malgré elle, un débat sur la pollution visuelle et mentale due à la publicité sur Internet. Des acteurs du web, très dépendants de la publicité, se sont offusqués de cette pratique au nom de la liberté d’expression et d’accès à une information gratuite.

 

On peut les comprendre : qui va mordre la main qui vous nourrit ? Car ces acteurs ne font que défendre les intérêts économiques du système publicitaire. Ils légitiment une liberté d’intrusion d’une publicité qui s’oppose clairement à la liberté de réception de l’internaute, le tout au nom d’une fausse gratuité.

 

Fausse gratuité

 

L’information véhiculée par ces sites internet dépendants de la publicité n’est jamais gratuite. La gratuité suppose une absence de contre-partie. Or, un annonceur achète l’audience d’un site internet – « temps de cerveau disponible » – pour essayer de capter son attention et espérer un clic sur sa bannière. Le site vend ses lecteurs à cet annonceur moyennant finance. C’est pourquoi on a coutume de dire que lorsque l’on ne paye pas le produit c’est que nous sommes le produit vendu.

Les services en lignes publicitaires ne se contentent plus de vendre le temps d’attention de leurs lecteurs mais également leurs contributions. Cette dimension productive des contributeurs est exploitée par l’industrie publicitaire que représente notamment Facebook, Google ou Twitter. Les tentatives d’appropriations des contributions par ces services en ligne sont régulières, on l’a vu récemment avec Instagram (2) qui a tenté de déposséder des millions de contributeurs de leurs photos.

Enfin, les annonceurs répercutent le prix de leurs campagnes publicitaires dans le prix des produits vantés. Chacun d’entre nous paye, dans ses achats, le prix de cette publicité, comme une taxe cachée. On le chiffre, toutes publicités confondues, à environ 480 € par personne et par an (2).

A cela, on peut ajouter d’autres coûts indirects tels que ceux de la consommation énergétique et d’exploitation de matières premières rares utilisées par les ordinateurs et serveurs.

Gaspillage et encombrement

 

Une des explications de Free pour justifier le blocage des publicités est à ce titre éclairante : la qualité de leur réseau aurait été touchée par le trafic de sites internet consommant trop de bande passante. Sur certains sites d’information en ligne financés par la publicité, la charge de celle-ci peut représenter entre 30 et 50 % de la page selon les estimations de « Surfez Couvert ».

Une part non négligeable en termes de consommation énergétique est donc clairement imputable à la publicité. Et les internautes ne sont pas dupes : 83% des sondés estiment que la publicité sur Internet dérange la navigation (3).

De plus, la croissance exponentielle de l’information rend sa compréhension et le tri entre l’accessoire et l’essentiel encore plus compliqué. La publicité par la captation de notre attention brouille nos sens et entraîne une véritable « infobésité ». La publicité n’est pas seulement gênante par son omniprésence, elle est aussi nocive pour les individus, comme pour la société : obésité, anorexie, sexisme, frustration, comportements violents, surconsommation, sur-endettement…

 

Un autre web est possible

 

Des modèles économiques qui se passent de publicité existent déjà et sont viables. Wikipédia est l’un des sites les plus consultés au monde et est financé par ses contributeurs. Ou encore, Médiapart et @rret sur images fonctionnent sur un modèle d’abonnement communautaire.

Les politiques doivent garantir aux Français, par la loi, la liberté de réception pour que les bloqueurs de publicités et de cookies publicitaires soient installés par défaut sur tous les navigateurs internet pour être contrôlé par l’internaute lui même.

Enfin, on peut aussi imaginer une redevance web qui permettrait de financer de manière inconditionnelle les sites internet sans publicité. Faute de mieux, nous encourageons tous les internautes, soucieux de se protéger de la pollution et l’intrusion publicitaire à suivre le guide du site internet Surfezcouvert.net.

 

Notes :

(1) Sondage TNS Sofres – Australie « Publicité et Société ».

(2) Service en ligne de partage d’image racheté par Facebook.

(3) 31,410 milliards d’euros de dépenses publicitaires (source IREP-France Pub) divisés par 65 millions d’habitants.

(4) Sondage Ifop juin 2011.


Khaled Gaiji et Charlotte Nenner sont co-présidents de Résistance à l’agression Publicitaire
Antonin Moulart est animateur de Surfez couverts