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Articles du Vendredi : Sélection du 25 janvier 2019


COP24, la suite: A quand en France des marches lycéennes pour le climat?
Fabrice Pouliquen
www.20minutes.fr/noel/2432467-20190121-cop24-suite-quand-france-marches-lyceennes-climat

Les lycéens belges, suisses et allemands ont marqué les esprits en fin de semaine dernière en séchant les cours pour marcher en masse pour le climat à l’appel de la jeune suédoise Greta Thunberg. En France, il n’y a rien de tel à ce jour…

  • Des milliers de lycéens belges, suisses et allemands – pour ne citer que les trois plus fortes mobilisations – ont défilé en fin semaine dernière pour pousser les adultes à agir contre le réchauffement climatique.
  • Des mouvements qui font écho à l’appel à la grève de l’école, chaque vendredi, lancé lors de la dernière COP24 par l’adolescente suédoise Greta Thunberg. En France, à part quelques rares exceptions, cet appel est restée lettre morte.
  • Mais les syndicats lycéens veulent se mettre en ordre de marche pour être fin prêt pour le 15 mars, grande journée de mobilisation lycéenne pour le climat. Toujours à l’appel de Greta Thunberg.

Près de 2.500 jeunes dans les seules rues de Bruxelles jeudi dernier. Vingt-cinq mille dans 52 villes allemandes un jour plus tard. Douze mille en Suisse en totalisant les rassemblements de Genève et de Lausanne. Et puis une kyrielle de rassemblements épars à Vienne, Edimbourg, Cardiff, Londres et Manchester, à Pasadena (Californie), à Vancouver, en Suède…

A chaque fois, les mêmes affiches aux slogans percutants pour secouer les adultes et les appeler à engager véritablement la bataille contre le réchauffement climatique. Pêle-mêle : « Ne loupez pas notre futur » vu à Vancouver, « Faites l’amour pas du CO2 » à Neuchâtel, « Si le climat était une banque, il serait sauvé depuis longtemps », en Suisse toujours, ou encore « Le système doit changer, pas le climat », à Bruxelles…

A chaque fois aussi, les cortèges de collégiens et lycéens défilent sur les heures de cours. « Si l’on va seulement le dimanche aux manifs, ça a moins d’impact. Et puis, à quoi ça sert d’aller à l’école si on n’a plus de futur », raconte Bruyère, jeune Bruxelloise, au journal La Libre Belgique.

Un écho mondial à l’appel de Greta Thunberg

Ce n’est pas la première fois, ces derniers mois, sur tout le globe, des jeunes sèchent l’école, le plus souvent le vendredi, pour entamer ces grèves de l’école pour le climat.

La paternité du mouvement est à attribuer à Greta Thunberg, cette Suédoise de 15 ans qui, depuis août, fait le pied de grue devant le parlement suédois chaque vendredi pour demander à son pays à accélérer sa transition écologique. Son histoire et son discours à la tribune avaient fait sensation lors de la COP24 à Katowice (Pologne) début décembre, médiatisation dont avait profité l’adolescente pour lancer un appel à la mobilisation auprès de la jeunesse.

« Avant même cet appel le dernier vendredi de la COP 24, Greta Thunberg avait déjà inspiré des grèves d’écoliers en Australie, là encore pour sauver le climat et s’opposer plus spécifiquement à un projet de grande mine de charbon porté par l’entreprise Adani dans le Queensland », rappelle Nicolas Haeringer, chargé de campagne à 350.org, une ONG spécialisée dans les mobilisations citoyennes.

Puis, des grèves des écoles pour le climat ont éclos sporadiquement en Europe et en Amérique du Nord, avant de monter en puissance jusqu’à atteindre les rassemblements de la semaine dernière, véritable premier écho mondial à l’initiative de la jeune Greta Thunberg. Et ça fait du bien, à écouter Nicolas Haeringer. « Il est difficile encore de savoir comment ce sursaut de la jeunesse peut aboutir à des transformations concrètes, estime-t-il. Mais en défilant dans les rues, en parlant de leur mobilisation à leurs parents, ces jeunes nous mettent déjà, nous les adultes, face à nos responsabilités. On le voit bien dans les slogans. Le débat n’est plus de savoir s’il faut croire ou non au changement climatique. Il est bien plus de se demander ce qu’on a fait à présent pour endiguer ce réchauffement et qu’est-ce qu’on doit faire maintenant. »

« Des derniers mois accaparés par les questions économiques et sociales »

Néanmoins, il y a des pays qui manquent encore à la carte des mobilisations. A commencer par la France. Il y a eu à ce jour quelques initiatives relativement isolées. Celle notamment d’Ysée Parmentier, jeune collégienne à Lafrançaise dans le Tarn-et-Garonne. Mais pas de grèves massives pour le climat.

« Ces derniers mois ont surtout été accaparés par les questions économiques et sociales, en lien avec le mouvement des gilets jaunes, justifie Nathan Le Potier, secrétaire général de l’Union nationale lycéenne (UNL-SD). « A cela s’ajoutent des crispations plus spécifiques aux lycéens autour de la réforme du baccalauréat, de la surcharge des classes et de l’accès à l’université », ajoute Romain Le Conte, permanent national à la FIDL, autre syndicat lycéen. Des élèves de 700 établissements étaient ainsi mobilisés le 11 décembre dernier, à l’occasion du « Mardi noir », journée de mobilisation lycéenne. Ces questions restent très prégnantes à l’agenda lycéen alors que Parcoursup, la plate-forme d’accès à l’enseignement supérieur pour les bacheliers, ouvre ce mardi.

L’appel du 15 mars dans la ligne de mire

Dans ce contexte, les grèves de l’école pour le climat sont quelque peu passées à la trappe pour l’instant. « Mais beaucoup de nos militants demandent qu’on s’engage sur ces questions, indique Romain Le Conte. Un référent sur cette thématique devrait être d’ailleurs nommé ce week-end à l’occasion de notre conseil national. » Surtout, Greta Thunberg a lancé un appel à une grève scolaire mondiale le vendredi 15 mars, mouvement qui s’annonce très suivi et que les syndicats lycéens français ne veulent pas louper cette fois-ci. « Nous avons déjà des réunions pour préparer cette journée, confie Nathan Le Potier, pour l’UNL. Les mouvements citoyens organisateurs des différentes marches pour le climat depuis septembre dernier s’en félicitent. Ils misent beaucoup sur cette journée du 15 mars et surtout celle lendemain, journée pour laquelle sont prévues des grandes marches pour le climat en France. Il n’y aura d’ailleurs pas de marches pour le climat à Paris ce dimanche 27 janvier, « mais une agora, place de la République, qui permettra entre autres de préparer la mobilisation des 15 et 16 mars », précise Elodie Nace, chargée de mobilisation à Alternatiba. Il y aura cinq débats, dont l’un justement axé sur les questions des mobilisations lycéennes et étudiantes. »

La jeunesse française pas moins concernée

Une faible réponse des élèves français à l’appel de Greta Thunberg ferait tache. Elodie Nace n’est pas inquiète. « La jeunesse française ne se sent pas moins concernée par le réchauffement climatique que les autres », estime-t-elle. Elle en veut pour preuve le manifeste pour un réveil écologique lancé début octobre par des étudiants de grandes écoles français. Ils disent ne plus se reconnaître dans le modèle de société consumériste promu aujourd’hui et pointe le manque de vision à long terme de nos sociétés. Ce texte a d’ores et déjà été signé par 29.000 étudiants, dont 26.000 Français.

Le niveau de la mer pourrait s’élever de plus de 3 m avec plus d’1,5°C de réchauffement
RAC
https://reseauactionclimat.org/niveau-mer-elever-plus-3-m-plus-1-degre-et-demi-rechauffement/

L’Antarctique a perdu 2700 milliards de tonnes de glace depuis 1992, avec une accélération depuis cinq ans, les glaciers alpins totalisent 25% de superficie en moins en douze ans et, chaque année, la période d’enneigement diminue et sa surface s’amincit… Quels dangers fait craindre cette tendance ? Gael Durand, chargé de recherche et directeur adjoint de l’Institut des Géosciences de l’Environnement (Grenoble), répond à ces questions :

Quelles sont les glaces qui fondent à cause du réchauffement climatique ?

Ce sont celles de l’ensemble de la cryosphère, qui désigne les parties de la surface de la Terre qui contiennent de l’eau sous forme solide, c’est à dire de la glace. Il y a donc la neige [1], qui varie de façon saisonnière ; les glaciers [2] [3], qui se forment en zone de montagne par tassement progressif de la neige accumulée ; également les calottes polaires, formées de la même façon, recouvrant l’ensemble du continent Antarctique [4] et le Groenland ; ensuite la banquise [5], ou glace de mer, créée par le gel de sa surface, réalisant une couche de glace d’un à deux mètres d’épaisseur dans l’océan Arctique ou autour de l’Antarctique ; et enfin, le pergélisol  (permafrost en anglais), qui désigne les sols gelés des hautes altitudes et latitudes.

Il est important de bien connaître les différents éléments de cette cryosphère car la fonte de ses différents types de glaces, suivant leur nature, ont des conséquences très différentes sur le système climatique.

Quelles sont les conséquences de ces fontes ?

La particularité de la glace est qu’elle est blanche. Elle réfléchit très bien l’énergie du soleil. On dit qu’elle a un albédo élevé. Par ailleurs, sa conductivité thermique est faible, ce qui en fait un excellent isolant.

Si la neige, la banquise et les calottes fondent, la mer ou le sol sous-jacents absorbent cette chaleur et le réchauffement initial s’en trouve amplifié. Sans compter que la fonte des calottes et des glaciers va contribuer à l’élévation du niveau de la mer. Quant au pergélisol, son dégel déstabilise les sols, et donc les structures construites sur eux, et libère les gaz à effet de serre qui y étaient emprisonnés et qui viennent s’ajouter aux émissions initiales, ce qui augmente également le réchauffement [6].C’est l’effet boule de neige : plus le climat se réchauffe, plus la glace fond, et plus sa fonte est grande plus de la chaleur supplémentaire est produite.

Quels sont les risques de ces fontes si le réchauffement dépasse 1,5° C ?

Aujourd’hui, par rapport à la période préindustrielle, la température planétaire a augmenté, en moyenne, de 1°C. En Arctique, elle s’est accrue jusqu’à 5°C [7] ! L’augmentation de la température provoquera une hausse de la fonte des glaces. Mais cette progression n’est pas linéaire. Il y a ce que l’on appelle des effets de seuils, des points de bascule. A + 1,5°C, on s’attend à nettement moins de neige, de banquise et de glaciers. Mais à + 2°C, on risque de perdre une partie importante des calottes glaciaires de façon irrémédiable [8] [9]. La fonte de l’ouest de l’Antarctique, celle qui est menacée aujourd’hui, provoquerait une élévation du niveau de la mer de 3 m [10] et celle du Groenland une de 6 ou 7 m [11] ! La perte de tous les glaciers terrestres ajouterait 40 cm à celle-ci mais surtout changerait drastiquement les régimes fluviaux : à la saison chaude, les rivières ne seraient plus alimentées par les glaciers et disparaîtraient, et, avec elles, une ressource en eau essentielle dans de nombreuses régions !

Si on franchit ce point de non-retour qui peut être déclenché à partir de 2°C de réchauffement, on change fondamentalement les conditions de vie de notre planète.

Il est donc essentiel de limiter urgemment le réchauffement climatique pour qu’il ne dépasse pas 1,5°C de plus qu’en 1850.

Corinne Morel Darleux : « Maintenant, il faut tout donner, tout tenter pour inverser le cours des choses »
Propos recueillis par Hervé Kempf et Lorène Lavocat
https://reporterre.net/Corinne-Morel-Darleux-Maintenant-il-faut-tout-donner-tout-tenter-pour-inverser

Comment inverser le cours d’un monde qui nous promet l’effondrement ? L’engagement dans un parti, les batailles électorales suffisent-ils ? Comment démultiplier la force de la société civile et des multiples îlots de résistance ? Corinne Morel Darleux propose des réponses, mue par un fort sentiment de l’urgence d’agir. Reporterre poursuit une grande série d’entretiens de fond avec celles et ceux qui renouvellent la pensée écologique aujourd’hui. Parcours, analyse, action : comment voient-elles et voient-ils le monde d’aujourd’hui ? Aujourd’hui, Corinne Morel Darleux, militante écosocialiste, autrice et chroniqueuse régulière pour Reporterre.

Reporterre — Comment en êtes-vous venue à l’écologie ?

Corinne Morel Darleux — Je suis arrivée à l’écologie par le biais social plutôt qu’environnemental. Parce que mon premier haut-le-cœur vis-à-vis de la société a été provoqué par le consumérisme débridé et les inégalités sociales. Je vivais encore à Paris, où je voyais de plus en plus de gens dormir dans la rue, souvent sous des vitrines illuminées remplies de gadgets bon marché électroniques produits à l’autre bout de la planète. Mais la prise de conscience et l’engagement sont venus relativement tard : j’ai commencé à faire de la politique à 35 ans.

Et que faisiez-vous avant de tomber dans la politique ?

J’ai fait une prépa HEC, une école de commerce, puis un doctorat. Une trajectoire « dans le moule », comme on dit. J’ai eu une première « anomalie de parcours » à l’issue de mon doctorat, quand j’ai monté une galerie d’art contemporain.

Puis, comme la galerie n’a pas fonctionné, je me suis retrouvée consultante en organisation et en stratégie auprès des grandes entreprises du CAC40, pendant plusieurs années. Je parcourais les tours de la Défense avec mon attaché-case, mon tailleur pantalon (rires)… Mais toujours avec ce côté un peu décalé. Au sein du cabinet, j’ai été la première à passer à un 4/5e pour libérer du temps afin de faire autre chose.

À force de décalage, et avec ce refus de la société de consommation et de l’injustice qui montait, j’en suis arrivée à un moment où il est devenu trop compliqué d’exercer ce métier. En 2005, j’ai fini par démissionner, et j’ai été embauchée à la mairie des Lilas, au service éducation et jeunesse.

Parallèlement, vous avez commencé à militer…

Je me suis rapprochée du mouvement Utopia, à la suite d’une conférence qu’ils donnaient sur le revenu universel. J’ai beaucoup participé à la rédaction du premier manifeste d’Utopia. Et comme il y avait besoin de monde pour porter la motion du mouvement au sein du Parti socialiste, en vue du Congrès de Reims de 2008, j’ai intégré ce parti pendant un an. Complètement à contre-courant, et de manière ultraminoritaire.

À ce moment, j’ai été approchée par Jean-Luc Mélenchon et des gens autour de lui qui préparait le lancement du Parti de gauche. Ils voulaient lancer un appel aux décroissants, aux gens de l’écologie radicale. Je naviguais dans ces réseaux, et je me suis embarquée dans cette aventure.

Deux mois auparavant, j’avais quitté Paris pour m’installer dans la Drôme, dans une optique de retrait de la société. Mais je me suis retrouvée happée par le tourbillon de la création d’un parti politique ! Je me suis notamment investie dans la construction du secteur écologie du parti.

Vous êtes venue à la politique par la question des injustices sociales, mais comment avez-vous basculé du côté de l’écologie ?

Le cœur d’Utopia était la remise en cause du dogme de la croissance, de la société de consommation et de la place du travail. En approfondissant ces questions, on se rend vite compte que cela va de pair avec un désastre écologique. Ma pensée politique sur la question de l’écologie s’est construite en mettant tout cela en relation. Il n’y a avait pas d’un côté l’environnement et de l’autre le social. Les racines du mal sont les mêmes : un système d’organisation capitaliste et une mondialisation débridée des échanges et des flux de marchandises. Il n’y a pas eu de basculement, mais un cheminement intellectuel, individuel et collectif, à travers les échanges au sein d’Utopia ou du Parti de gauche, qui m’ont aidée à formaliser une pensée construite, articulée. Puis, en déménageant dans la Drôme il y a dix ans, j’ai découvert ce qu’était un ciel qui change, des saisons avec des fruits et légumes différents, crever de chaud l’été et se blottir l’hiver au coin du feu. Je suis née et j’ai grandi à Paris. Quand je mettais les doigts dans la terre, j’allais me laver les mains dans les secondes qui suivaient. La forêt, la montagne étaient pour moi des milieux hostiles. La Drôme, ça a été un choc esthétique et sensoriel, une totale nouveauté, qui a donné une autre dimension à mon engagement : il ne passait plus seulement par ma tête, mais qui venait aussi convoquer les tripes et les poings.

Quelles ont été vos sources d’inspiration dans l’écologie ?

J’ai besoin de la fiction et qu’on me raconte une histoire avec des personnages. J’ai été très marquée par des films d’anticipation ou de dystopie comme Rollerball, Soleil vert ou plus récemment Les Fils de l’homme, Matrix ou Mad Max. Du côté de la littérature, Les Racines du ciel, de Romain Gary, a été un livre très important pour moi. En ce qui concerne la théorisation, cela passe plus par des discussions, par des rencontres ou par des formats courts, du type podcast. Je fonctionne en mode « éponge » : je vais absorber des idées à plein de sources différentes et ensuite restituer.

Comment définiriez-vous le problème écologique aujourd’hui ?

J’éprouve un sentiment d’urgence et de gravité : il n’est pas synonyme de désespoir, mais au contraire de l’idée que c’est maintenant qu’il faut tout donner, tout tenter ; il ne nous reste pas beaucoup de temps pour inverser le cours des choses. Et j’ai l’impression que les choses s’accélèrent énormément depuis quelques mois. Il y a sans doute un effet d’optique lié entre autres à la multiplication de scientifiques qui font le choix de sortir de la neutralité dans laquelle ils ont été cantonnés pendant très longtemps. J’ai lu sur Twitter le témoignage poignant d’un chercheur qui disait : « Je viens de faire la chose la plus terrifiante de ma carrière, je viens d’envoyer un message à tous mes collègues scientifiques pour leur dire qu’il fallait désormais qu’on s’engage. »

Au-delà de ce témoignage, il y a des faits qui se multiplient et des emballements qui s’enclenchent. Le changement climatique est de plus en plus visible, même en France. Ce qui semblait appartenir au domaine de la banquise et des ours blancs frappe aujourd’hui à notre porte, avec les effondrements les montagnes dans les Alpes, avec l’assèchement du lac d’Annecy, avec des communes ravitaillées en eau par des camions-citernes.

Il y a une prise de conscience qui touche le grand public de manière beaucoup plus forte qu’avant. Par contre, elle n’ébranle pas le pouvoir en place. Ce n’est pas au niveau des pouvoirs traditionnels et institutionnels que les choses vont pouvoir se faire. Il y a également d’autres facteurs de vulnérabilité du côté du numérique et des algorithmes, du côté de la finance mondialisée. Tout ceci est interconnecté et rend l’édifice très fragile. Il suffit qu’une maille craque pour que tout s’effondre. Mais le climat et la biodiversité ont malheureusement une grosse longueur d’avance en matière de probabilité d’un effondrement de nos sociétés. L’urgence coïncide avec une forme de prise de conscience. On arrive à un moment où on peut inventer et construire des formes d’actions politiques nouvelles avec des réseaux nouveaux avec des alliances nouvelles et avec, je l’espère, des résultats inédits.

Comment expliquer, si se produit la prise de conscience que vous évoquez, qu’il y ait Trump aux États-Unis, Bolsonaro au Brésil, Poutine en Russie et tant d’autres, qui nient ou négligent la question écologique ?

Les facteurs sont multiples et les contextes différents. Mais il est évident qu’on assiste à une vague de mouvements d’extrême droite. Le point commun à tous ces pays est une succession de trahisons des gouvernements, quelle que soit leur étiquette, qui a durablement et profondément entamé la confiance des populations envers leurs représentants. Il se produit une crise de la démocratie représentative. Avec de ce fait une prime à des candidats qui portent une parole forte et incarnent des personnalités virilistes, puissantes. Il me semble aussi que la galère, les situations difficiles socialement ou les perspectives effrayantes d’un point de vue climatique ne créent pas davantage de conscience politique, de solidarité, d’entraide, et de réflexes humanistes. Cela provoque du repli. Quand vos conditions d’existence sont un combat de tous les jours et que la première question que vous ayez à résoudre est de savoir quelle facture vous allez payer entre le loyer, la cantine ou les lunettes, cela ne laisse pas beaucoup de disponibilité d’esprit pour l’intérêt général, l’avenir de la planète.

Vous parlez à la fois d’une prise de conscience qui s’accélère, et d’une montée de l’extrême droite. N’est-ce pas contradictoire ?

Beaucoup de personnes ne font pas le lien entre le dérèglement climatique ou l’extinction de la biodiversité et le système capitaliste, l’organisation de la production, et la politique. Les médias dominants — ou dominés, c’est selon — traitent ces questions avec une espèce de confusion. Les reportages sur la taxation des carburants ne font pas le lien avec la disparition des services publics de proximité, ou des lignes de chemin de fer. On entend parler de réchauffement comme si c’était des épisodes météo, sans que ce soit relié avec l’organisation de la ville, de la vie.

Comme si cela restait une sorte de fatalité…

Oui, et comme s’il s’agissait d’événements isolés. Si cet effort pédagogique n’est pas relayé par les médias de grande écoute, la prise de conscience a du mal à se raccrocher à des questions politiques d’organisation de la cité, et à trouver un débouché institutionnel. Mais on discute uniquement de la manière dont cela peut s’exprimer par le vote, par les élections et par un débouché partisan, institutionnel. Or aujourd’hui, le débouché naturel de cette inquiétude, de cette prise de conscience, ne va pas du côté des partis ni des élections. Il se reflète du côté de cette société civile dont jusqu’ici on avait du mal à voir ce qu’elle recouvrait. Aujourd’hui, il y a des mouvements, des réseaux, des résistances locales, des initiatives collectives qui ne font pas partie du système représentatif, qui ne se présentent pas au suffrage universel, mais qui permettent de proposer un débouché, soit en matière de résistance, soit en matière de constructions d’alternatives, soit en matière de désobéissance civile. C’est plus à cette aune-là qu’il faut mesurer la prise de conscience et sa traduction en acte, que dans les résultats électoraux.

Pourtant jusqu’ici votre principal mode d’action pour faire avancer les idées sociales et écologistes a été par le système de l’élection, du parti…

Oui.

Vous n’y croyez plus ?

Je continue à croire à l’utilité des partis politiques et à l’importance d’avoir une forme de démocratie institutionnelle ; je continue à penser qu’un jour d’élection est peut-être le seul jour de l’année où la voix de chacun vaut la voix d’un autre. Par contre, ce qui a changé, c’est que je l’ai vécu de l’intérieur. Et je continue à l’expérimenter au quotidien comme élue d’opposition dans une région présidée par Laurent Wauquiez [Auvergne-Rhône-Alpes], avec tout ce que ça implique en matière de frustrations, d’impuissance, tout ce que ça génère d’assister à des prises de décision et à des politiques qui laminent des cortèges entiers d’associations, de petits festivals, de réseaux, et qui apportent une régression environnementale énorme.

 

 

L’impression d’être le témoin impuissant d’un désastre…

Oui, tout à fait, et ne pas pouvoir remplir son mandat. Parce que les gens qui nous ont élus, certes on les représente, on fait entendre une autre musique, on a réussi à faire annuler le budget de Laurent Wauquiez, on arrive à stopper des mesures devant les tribunaux, mais on n’est qu’un caillou dans la chaussure de Laurent Wauquiez, ça ne l’empêche pas d’avancer. Et en attendant, les dégâts sont faits sur le terrain.

De même que le fait d’avoir participé de manière très active pendant dix ans à la vie interne du Parti de gauche, et ensuite à la dynamique interne de la France insoumise, avec plus de retrait, montre aussi les limites de cette voie. Les processus électoraux, les phases de désignation interne des candidats, les discussions, les bisbilles internes, les négociations stratégiques autour des alliances, les campagnes, prennent une place et dévorent un temps et une énergie folle. Jusqu’ici, je faisais avec, dans l’idée qu’on avait besoin d’être à la fois dans les rues et dans les urnes, et qu’il y avait une stratégie de conquête du pouvoir à avoir parce que beaucoup de choses dépendent du niveau gouvernemental, des lois qui sont décidées au niveau du Parlement. Je continue à le penser, mais il y a une nouvelle donne : la question du temps qui nous reste pour effectuer des changements importants. Le temps nous étant compté, toute cette énergie dépensée à des stratégies électorales de conquête du pouvoir entre en contradiction, et presque en compétition, avec du temps consacré à l’action directe. Et quand je dis action directe, je pense au fait de planter des arbres, de remettre en culture des terres qui ne le sont pas aujourd’hui, mais également à des actions de blocage. Parce qu’on a tenté plein d’actions : pétitions, appels, tribunes, manifestations… Mais aujourd’hui, là aussi, on arrive aux limites de l’exercice. Je ne juge pas ceux qui continuent à militer dans des partis : cela reste respectable et nécessaire, ce sont des choix de modes d’action différents et complémentaires. Finalement cette culture du nombre — où on part du principe qu’il faut qu’il y ait le plus de gens possible et que le rapport de force va être proportionnel au nombre de gens qu’on va arriver à impliquer dans une action — et en même temps cette culture de la demande, où on passe notre temps à nous adresser au préfet, à Laurent Wauquiez, à Emmanuel Macron, à François de Rugy ou à que sais-je, ont atteint leur limite. Il faut changer de braquet et passer à d’autres formes d’action.

Quelles actions engager pour prévenir l’effondrement ou se préparer à y faire face ?

Les deux se rejoignent en partie. Il y a des actions qui permettent à la fois de retarder l’effondrement et de préparer une période post-effondrement. Par exemple, planter des arbres ou remettre des terres en culture. L’agroforesterie permet d’avoir un effet dès aujourd’hui sur le climat et la biodiversité, et en même temps de relocaliser la production alimentaire. En cas d’effondrement, la question de l’approvisionnement alimentaire sera rapidement cruciale, parce que les stocks ne sont pas si importants et que nombre de territoires sont dépendants de l’extérieur pour se nourrir. Ce genre d’action permet également de rétablir un peu de justice sociale, puisque ce sont les plus pauvres qui sont en première ligne, et que la question alimentaire fait partie des premières inégalités aujourd’hui.

L’effondrement ne touchera pas tout le monde de la même manière : pourrait-on voir l’avènement d’une société encore plus inégalitaire qu’aujourd’hui ?

C’est un vrai risque. Aujourd’hui, personne n’est capable de dire si l’effondrement aura lieu de manière certaine, et on n’est pas non plus capable de dire comment il aura lieu. Ce pourrait être un effondrement brutal tout comme un effondrement beaucoup plus insidieux, avec une lente et longue dégradation. Dans tous les cas, la question des inégalités sociales et de la lutte des classes seront d’actualité. Aujourd’hui, face aux premières catastrophes climatiques, une oligarchie est en train de se mettre à l’abri, prépare des modes de vie adaptés, fait des réserves, construit des bunkers, des îles artificielles… Il y a des stratégies d’évitement, d’adaptation, de protection de la part d’un certain nombre de personnes qui peuvent se le permettre parce qu’elles ont les moyens. À côté, les premiers touchés à l’échelle mondiale par les ouragans, les tempêtes, les inondations, les incendies, sont souvent ceux qui ont des habitats de fortune… Il y a déjà de fait une inégalité sociale, et au fur et à mesure que les ressources non renouvelables vont s’amenuiser, au fur et à mesure que la pénurie va s’installer, certains vont pouvoir s’accaparer ces ressources, et ce ne seront évidemment pas les plus miséreux, les précaires ou les minorités. On pourrait ainsi voir se perpétuer une société à deux vitesses où quelques-uns ont droit à un air pur, à un environnement végétal, à un accès à des produits frais, et où d’autres survivent dans la crasse et la misère avec des produits de synthèse. C’est un thème exploré par la science-fiction dans les années 1970 et qui devient un scénario possible.

Dans les actions que vous citez — quitter la politique représentative, planter des arbres et faire de l’agroforesterie — ne manque-t-il pas un aspect : que faire face aux oligarques qui continuent de construire des autoroutes, de promouvoir la croissance, de lancer des autos électriques… ?

J’ai parlé des blocages de chantier. Vinci, un exemple énorme en France, est capable d’influencer suffisamment les politiques pour imposer des projets d’infrastructures dont l’utilité sociale n’est pas démontrée, mais qui vont permettre aux entreprises de toucher des péages, des frais de parking et de construction… Il y a des actions à mener contre ces gens.

N’est-ce pas là le nouveau paradigme des luttes écologistes : Notre-Dame-des-Landes, Sivens, Roybon, GCO… Ces actions seraient-elles les plus efficaces ?

Absolument. Mais l’un n’empêche pas l’autre. Les opposants au GCO ont récemment mené deux actions différentes, portées par deux mouvements d’opposants, mais simultanées. Tandis que GCO Non merci regroupait 400 personnes pour planter des arbres et des arbustes le long du futur tracé du GCO, la Zad du Moulin bloquait un chantier de Vinci. En Angleterre, Extinction Rebellion a fait la même chose : ils ont commencé par bloquer des ponts à Londres et ont fini en plantant des arbres en plein centre-ville. On a besoin d’actions qui mêlent ces deux modes opératoires. Il faut mêler les résistances et les alternatives.

Au-delà, nous devons avoir une réflexion stratégique sur le fait de mener des actions « grand public » et des actions plus radicales. Les premières permettent d’avoir une sympathie du grand public — et pour l’avoir un peu testé, le fait de planter des arbres, il n’y a rien de plus populaire — et donc ensuite de mener des actions plus radicales. Elles auront d’autant plus de sens et de possibilité de faire bouger les choses qu’elles seront associées à d’autres actions, plus « faciles ».

Je m’inscris totalement dans ce qui a été fait à Notre-Dame-des-Landes ou à Bure, mais ça ne peut pas se généraliser du fait de leur contexte particulier. Les vecteurs de généralisation se trouvent du côté d’Alternatiba, d’Attac, de Bizi !, des organisations qui mènent des actions de désobéissance civile. Le blocage du sommet pétrolier à Pau début 2016, mais également les actions contre Apple, contre les banques, les fauchages de chaises, les peintures sur les vitrines. Et j’espère qu’on va arriver à un stade de maturité, de conscience du grand public, où on pourra aller plus loin, y compris en matière de redistribution directe.

Casser des magasins comme Apple ?

Plutôt que de dire que certaines banques ou grandes sociétés font de l’évasion fiscale et de les montrer du doigt, à quel moment va-t-on concrètement récupérer l’argent ? On n’est pas mûr aujourd’hui, mais c’est vers cela qu’il faut tendre. Revaloriser la figure du pirate, du Robin des bois, comme on a réhabilité les sorcières.

Nombre de Gilets jaunes sont aujourd’hui poursuivis. De même, Extinction Rebellion implique que les participants soient prêts à faire de la prison. Mais faire de la prison, ça affaiblit considérablement un mouvement, quand on voit ce qui se passe à Bure autour du contrôle judiciaire. Que faire face à cela ?

Dans les vidéos des arrestations d’Extinction Rebellion, les policiers anglais mettent la main sur la tête des militants pour qu’ils ne se cognent pas quand ils entrent dans le fourgon. On est loin des scènes qu’on vit en France. Donc, je ne transpose pas directement. Mais il y a des choses très intéressantes à regarder du côté de ce mouvement, comme le fait de former les gens, ou de faire des arrestations des actes politiques.

Cela inverse la donne : au lieu d’être une défaite, l’interpellation devient une revendication politique. C’est ce qu’ont fait plusieurs faucheurs de chaises, agissant à visage découvert et assumant le fait qu’il puisse y avoir des arrestations et un procès comme ça a été le cas de Jon Palais ou de Florent Compain. Le procès permet de porter un discours politique et de faire œuvre de pédagogie et de conscientisation.

Il faut que ça soit organisé, que les gens soient formés et qu’on ne les envoie pas au casse-pipe. Extinction Rebellion a été critiqué au motif que plein de personnes ne peuvent pas se permettre d’être arrêtées et d’aller en prison. Raison de plus pour que ceux qui peuvent se le permettre soient en première ligne. Cela ne veut pas dire prendre des risques inconsidérés. L’important est d’être efficace, pas de faire des martyrs.

On doit provoquer des débats dans la société, et ça passe par des actes qui clivent. Cela a été un des grands apports de la Zad : à un moment, dans toutes les chaumières de France, on parlait de Notre-Dame-des-Landes. Il y avait des contre, des pour, mais il y avait un vrai débat qui incluait tout le monde. Il faut qu’on trouve le moyen de provoquer un grand débat de société autour de l’urgence climatique, autour de l’extinction de la biodiversité, et ça passera par des actions qui clivent, mais qui ne sont envisageables qu’à partir du moment où on a construit un mouvement de sympathie et de construction d’alternative.

Le malheur des zadistes et desdits « malfaiteurs de Bure » est qu’ils ont été insuffisamment soutenus. Ils ont fonctionné en îlots de résistance, mais aujourd’hui, on a besoin que ces îlots fassent archipel. D’où la nécessité de créer des passerelles entre les réseaux qui se posent les mêmes questions dans les mêmes termes avec les mêmes envies d’action, mais qui ne se connaissent pas. Entre les gardiens de refuge, les guides de haute montagne, les forestiers de l’ONF et les mouvements organisés de militants, les partis, certaines maisons d’édition, certains médias. On a là un archipel en devenir, qui peut être très puissant s’il parvient à créer les passerelles et à mener une réflexion stratégique commune.

Outre des actions directes, comment vit-on au quotidien avec une conscience écologiste ?

On ne passe pas tout d’un coup de la prise de conscience qu’il y a un truc qui ne tourne pas rond à aller barbouiller les vitrines de la Société générale. Il y a besoin d’un parcours de radicalisation politique.

En revanche, la manière dont je consomme, dont j’achète, dont je vais mettre les mains dans la terre, relèvent plus d’un équilibre personnel que d’une revendication politique. Je n’ai pas l’impression de faire la révolution en participant à une association de jardins nourriciers. Par contre, ce sont des moments dont j’ai besoin et qui me donnent de la force pour repartir au combat politique. Quand je me balade en montagne, je me souviens de pourquoi je fais tout ça. On ne défend bien que ce qu’on a appris à aimer et qu’on a éprouvé par les sens.

Dans un autre entretien, vous avez dit qu’il faut compléter la dimension politique par une dimension spirituelle. Qu’entendez-vous par là ?

Je viens d’une culture politique où la spiritualité est un gros mot. L’héritage des Lumières, l’attachement à la laïcité font que tout ce qui ressemble de près ou de loin à des questions religieuses est tenu à distance de la sphère politique.

Mais il me semble de plus en plus qu’un changement politique et de la société nécessite qu’il y ait de vrais changements intérieurs des personnes qui sont appelées à mener cette insurrection, cette rébellion, cette révolution. Sans ces cheminements intérieurs, on fera peut-être la révolution, mais je suis de moins en moins sûr que le résultat soit meilleur que l’ancien. La majorité des responsables politiques, mais aussi des militants sont pris dans une spirale de l’instantanéité, du commentaire, de l’actualité, de courir d’une lutte à l’autre… Ils ne prennent plus le temps de se poser, de lire, de méditer, de contempler, de s’ouvrir à ces temps de réflexion qu’on n’est pas obligé de valoriser immédiatement par un tweet ou une publication Facebook. Des actes désintéressés qu’on fait pour soi. C’est en ce sens que je parle de spiritualité. On a besoin d’avoir des allers-retours entre le militantisme et la réflexion.

Je travaille depuis plusieurs mois sur la notion de dignité du présent. Parce qu’il est difficile de garder l’énergie et le courage de militer avec la perspective de l’effondrement. Puisqu’on va dans le mur, que la victoire est de plus en plus hors de portée, à quoi bon continuer à lutter ? Ma conviction est que les raisons des combats qu’on mène ne sont pas uniquement à chercher dans des victoires futures. Elles sont aussi à chercher dans cette dignité du présent qui permet d’être fier de qui on est, de la manière dont on occupe son temps. Il y a une vraie satisfaction à militer, à mener des combats parce qu’on les estime justes et pas justes parce qu’on peut les gagner. C’est un appui dans lequel je trouve de la ressource pour continuer à avancer et à me battre.

Munduko 26 pertsona aberatsenek 3.800 milioi txiroenek adina aberastasun dute
Iñigo Igartua
www.argia.eus/albistea/munduko-26-pertsona-aberatsenek-3800-milioi-txiroenek-adina-aberastasun-biltzen-dute

2018 urtean aberatsen eta txiroen arteko arrakala are eta gehiago handitu da, Oxfam Gobernuz Kanpoko Erakundeak kaleratutako azken txostenaren arabera.

Oxfamen datuen arabera munduko biztanleen erdia –3,8 mila milioi pertsona– baino aberatsagoak dira jada 26 pertsona dirutsuenak.  Aberastasunaren banaketak azken urteetan izan duen proportziorik gabeko joerak gora egin du: 2016an 62 pertsona aberatsenek zuten munduko biztanleen erdiak beste diru, 2017an 43 ziren eta gaur egun 26.

Txostenean adierazitako datu aipagarri batzuk nabarmendu ditugu:

Duela hamar urte krisi ekonomikoa hasi zenetik bikoiztu egin da munduan mila milioi eurotik gora duten aberatsen kopurua. 2017 eta 2018 urteetan zehar esaterako, bi egunetik behin pertsona berri batek mila milioi eurotik gora lortu ditu.

Amazoneko jabea eta munduko pertsona aberatsena den Jeff Bezosen aberastasunaren %1a soilik, Etiopia bezalako 105 milioi biztanleko herrialde batek osasunerako duen aurrekontuaren parekoa da.

Matthew Spencer Oxfameko kanpaina eta politika zuzendariak salatu duenez, “gure ekonomietan aberastasuna gero eta bidegabeago banatzen da pribilegiatu gutxi batzuen artean, milioika pertsonak apenas biziraun dezaketenean”.

Edonork “bizi aukera justuago” bat izateko, munduan nahiko aberastasun dagoela ere ohartarazi du.

Horretarako, gobernuek aberastasunetatik jasotzen dituzten zergak, “pertsona askoren bizitzak salbatuko lituzketen dohaineko eta kalitatezko zerbitzu publikoetan” inbertitu behar direla adierazi du Spencer-ek.