Bizi !

Articles du Vendredi : Sélection du 22 mai 2020


Climat : Stop à l’argent sale
Greenpeace
www.greenpeace.fr/stop-dividendes-climaticides/

Alors que la période actuelle est pleine d’incertitudes pour beaucoup d’entre nous, un monde est déterminé à poursuivre ses activités comme il en a l’habitude. Dans un contexte où tout peut et doit changer, les entreprises les plus polluantes se battent pour conserver leurs profits. Il est temps d’agir : il faut contraindre ces multinationales à respecter l’Accord de Paris.

Notre système économique est destructeur

Notre système économique nous conduit droit dans le mur : si nous ne changeons rien, le réchauffement climatique pourrait atteindre jusqu’à +7°C d’ici 2100. En France, l’inertie de nos responsables politiques et du monde économique est criminelle : notre empreinte carbone n’a pas diminué depuis 1995, malgré l’urgence et les promesses.

Polluer rapporte gros

La raison de cette inaction est simple, il y a trop d’argent en jeu derrière les activités polluantes. Un exemple: BNP Paribas investit sans relâche dans les énergies fossiles. Son empreinte carbone, la plus élevée du CAC 40, est aujourd’hui supérieure à celle de l’ensemble des activités conduites sur notre territoire. Ses actionnaires s’en frottent les mains puisqu’en 2019, BNP leur a versé 3,7 milliards d’euros.

S’enrichir grâce à des activités polluantes est inacceptable

Le nœud du problème est donc là : polluer rapporte gros. Certaines entreprises du CAC 40, Total et les grandes banques en tête, ont fait du dérèglement climatique le moteur de leur développement, sans qu’aucune limite ne leur ait été fixée et sans aucune sanction. Car le gouvernement n’a jusqu’à présent mis en place aucun mécanisme contraignant : les entreprises ne sont absolument pas tenues de respecter les objectifs fixés par l’Accord de Paris, traité international visant à contenir le changement climatique, lors de la COP21 par 195 États. C’est un véritable scandale ! En ces temps d’urgence climatique, c’est même criminel. 

Pour une interdiction des dividendes climaticides

Il faut agir : il est plus que temps d’appliquer l’Accord de Paris aux multinationales en leur fixant des objectifs annuels et contraignants de réduction d’émissions de gaz à effet de serre, sous peine d’une interdiction ferme de verser des dividendes à leurs actionnaires. C’est une manière efficace de détruire l’intérêt des marchés financiers pour les activités climaticides. En effet, grâce à cette interdiction, investir dans les activités polluantes ne sera tout simplement plus rentable.

Si les entreprises climaticides ne peuvent plus verser de dividendes, elles ne parviendront plus à attirer d’actionnaires. Privées d’investisseurs, ces entreprises dont le moteur est aujourd’hui la destruction du vivant n’auront alors pas d’autres choix que de s’engager réellement dans la transition écologique si indispensable à notre planète. Cette conversion constituera pour elles le seul moyen d’attirer à nouveau des investissements, et donc de continuer à exister.

Nous avons besoin de vous

Cette mesure est aussi radicale que nécessaire. Nous avons donc besoin de vous afin de la porter dès aujourd’hui dans le débat public. Pour la soutenir, c’est simple : signez le formulaire ci-dessous. Ceci nous permettra de mesurer l’adhésion qu’elle suscite, mais aussi de vous proposer d’agir à nos côtés pour la défendre.

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L’Europe choisit la voie de la résilience climatique
Valéry Laramée de Tannenberg
www.journaldelenvironnement.net/article/l-europe-choisit-la-voie-de-la-resilience-climatique,106249

La Commission publie deux trains de mesures pour assainir la production alimentaire et renforcer la lutte contre l’érosion de la biodiversité. Avec en toile de fond, la volonté de réduire la production de viande (émettrice de GES) et d’accroître le stockage de carbone par les forêts.

Joli symbole ! La Commission a profité la journée mondiale de l’abeille pour présenter ses ambitions – fortes – en matière de préservation de la biodiversité. Ce mercredi 20 mai, Frans Timmermans, vice-président exécutif chargé du pacte vert, Stella Kyriakides, commissaire à la santé et à la sécurité alimentaire et le commissaire à l’environnement, Virginijus Sinkevicius, ont dévoilé une stratégie de préservation de la nature et un train de mesures visant à améliorer le système alimentaire des Européens.

Liés au Pacte vert, ces deux plans visent à enrayer l’appauvrissement de la biodiversité terrestre, lacustre et marine et à renforcer la sécurité alimentaire tout en réduisant les impacts environnementaux et sanitaires imputables à la production agricole. Inédit !

Baptisé «de la Ferme à la fourchette», ce dernier programme détonne par son ambition. En 10 ans, il propose de réduire de moitié l’utilisation des pesticides (les plus dangereux) «et des risques qui leur sont associés», de diminuer «d’au moins 20% l’utilisation de fertilisants» (source d’émission de gaz à effet de serre), de diviser par deux les ventes d’antibiotiques utilisés en élevages et en aquaculture. Bruxelles, enfin, propose que le quart des terres agricoles soient exploitées selon les canons de l’agriculture biologique. Cinq fois plus qu’en 2013.

La chasse aux intrants

Sous la surveillance de Bruxelles, les Etats membres devront établir des plans de gestion intégrée des intrants azotés et renforcer les législations réprimant la pollution par les effluents agricoles (nitrates et phosphore). La Commission promet, de son côté, de durcir la directive encadrant l’usage des pesticides. Priorité sera aussi donnée aux substituts biologiques aux molécules de synthèse.

Pour inciter les agriculteurs à passer au «bio», la Commission préfère la carotte au bâton. Des «programmes écologiques» fourniront des financements aux exploitants agricoles ayant choisi l’agriculture bio, l’agroforesterie ou de stocker du carbone dans les sols. Autant de projets déjà présents dans la mouture de nouvelle politique agricole commune (2018). Plus novatrice est l’intention de la Commission von der Leyen de réformer les règles encadrant les marchés publics. Les entreprises et les collectivités qui souhaiteront notamment imposer le bio dans leur cahier des charges pourront le faire plus facilement qu’aujourd’hui.

Substituts à la viande et aux fruits de mer

Si la Commission n’incite pas directement à la baisse de production de viande et de produits animaux[1][1], elle envoie quelques signaux en ce sens. L’exécutif communautaire propose de mettre en place un étiquetage des produits évaluant le bien-être animal. De même, le programme Horizon Europe encouragera la recherche «visant à accroître la disponibilité et les sources de protéines de substitution telles que les protéines végétales, microbiennes, marines et dérivées d’insecte ainsi que les substituts de viande.» Les start-up américaines synthétisant des viandes artificielles se frottent les mains. La même philosophie prévaut pour les fruits de mer. Bruxelles entend durcir la législation sur la pêche, notamment pour réduire les prises accessoires: l’équivalent de 8% des tonnages débarqués dans le monde. D’un autre côté, la Commission veut «encourager une consommation plus diversifiée de produits de la mer.» Vous aimez les huîtres? Vous apprécierez les algues.

Qui dit animaux et végétaux dit biodiversité. Et en la matière les objectifs fixés ne sont pas moins ambitieux que pour la réforme de l’écosystème alimentaire. La stratégie européenne en faveur de la biodiversité se propose de contrer les 5 grandes causes de l’érosion du vivant: artificialisation des terres, surexploitation agricole, effet du changement climatique, pollutions diverses. Sans oublier la prolifération d’espèces envahissantes. En se basant sur les bilans d’application des directives Oiseaux et Habitats, la Commission exige que 30 % des surfaces terrestres et maritimes de l’Union européenne soient protégées d’ici à 2030. Soit 4% de mieux, qu’en 2020, pour les biotopes terrestre. Pour la mer, il faudra faire un gros effort: +19% en 10 ans. Dans lot, 10 % de ces surfaces protégées devront l’être «strictement».

La liberté retrouvée des rivières

Dans ces biotopes terrestres, Bruxelles inclut, évidemment, les espaces lacustres, les fleuves. L’an prochain, les Etats membres devront répertorier les obstacles à la libre circulation des rivières et à la restauration des plaines inondables. En 2030, les 27 devront avoir rendu à la vie sauvage 25.000 km de cours d’eau. Ce sujet risque de fâcher les agriculteurs: «les autorités des Etats membres devraient réexaminer les permis de captage d’eau et d’endiguement afin de rétablir les flux écologiques», indiquent les services de la Commission.

La France sera en première ligne. Bruxelles estime essentiel de «protéger strictement toutes les forêts primaires présentes dans l’UE.» Une autre façon d’évoquer les massifs de la Guyane française et de l’île de la Réunion. A terre comme en mer, «l’accent sera mis sur la protection et la restauration des écosystèmes terrestres et marins tropicaux et subtropicaux situés dans les régions ultrapériphériques de l’Union.»

Avec en tête de liste, Nouvelle-Calédonie, archipels polynésiens, Antilles françaises et les parties tricolores des Mascareignes. Plus question de tergiverser avec le développement des trames vertes et bleues. Dès 2021, la Commission prévoit de légiférer pour rendre contraignants ses objectifs de restauration de la nature. Seront particulièrement surveillés les «écosystèmes dégradés, en particulier ceux qui présentent le meilleur potentiel pour capter et stocker le carbone.»

Stockage du carbone

Omniprésent dans les deux stratégies, le stockage du carbone est l’un des piliers du Pacte vert, qui vise la neutralité carbone de l’Europe d’ici à 2050. Celle-ci n’est atteignable qu’en baissant considérablement nos émissions de gaz à effet de serre et en «captant» les rejets inévitables.

Avant la fin de l’année, Bruxelles tentera d’imposer, via l’initiative sur les pollinisateurs, que 10 % «au moins» de la surface agricole européenne «consiste en des particularités topographiques à haute diversité biologique.» Dit autrement, il faudra des bandes tampons, plus de jachères, des haies, des «arbres non productifs», des murs en pierre et des mares. Bien sûr, il s’agit là de fournir des biotopes à de nombreuses espèces, de réduire l’érosion de sols et de … «renforcer la séquestration du carbone.» A cette aune, la Commission lance, après bien des hésitations, son programme de reforestation. Comme le JDLE l’avait dévoilé en décembre dernier, il s’agit, en 10 ans, de planter 3 milliards d’arbres dans des friches urbaines et périurbaines. C’est 50 % de mieux que prévu initialement. Là encore, le rôle d’éponge à carbone d’arbres en pleine croissance est au cœur du programme.

Il en est de même en ville. Bruxelles appelle toutes les cités de l’UE comptant plus de 20.000 habitants à élaborer, dans l’année qui vient, des «plans ambitieux d’écologisation de l’espace urbain.» Partout, il faudra élever des parcs, des jardins, des haies, des toitures et des murs végétalisés, des fermes urbaines. Et des forêts ! Autant d’espaces verts urbains où l’usage des pesticides de synthèse sera totalement proscrit.

Biomasse et biodiversité

Consciente que l’utilisation croissante de la biomasse dans la production d’énergie «décarbonée» peut contrarier son ambition en faveur de la biodiversité, la Commission va évaluer, d’ici la fin de l’année, l’offre et la demande mondiale de biomasse, ainsi que sa durabilité. Ce bilan servira à la rédaction, l’an prochain, de nouveaux critères de durabilité en matière de valorisation énergétique de la biomasse forestière.

En attendant, la Commission annonce la fin de l’utilisation, d’ici à 2030, des biocarburants «qui présentent un risque élevé de changement d’utilisation des terres.» Evoquerait-on, sans les nommer, l’huile de palme et ses dérivés? Cette interdiction a déjà été édictée, lors de la dernière révision de la directive ENR, l’an dernier. A moins, bien sûr, que ces produits ne soient issus de petites exploitations ou de terres non exploitées. Le diable se cache toujours dans les détails.

[1][1] 70 % des émissions agricoles de gaz à effet de serre sont imputables à l’élevage.

Peu onéreux, non polluant, respectueux de la distanciation : le vélo, champion du déconfinement en ville
Patrick Piro (Politis)
www.bastamag.net/velo-petite-reine-deconfinement-covid19-deplacement-ville-geste-barriere-vente-velo-piste-cyclable-temporaire

Plusieurs villes ont lancé des aménagements de dizaines de kilomètres de pistes cyclables temporaires, délimitées à l’aide d’équipements légers, peu coûteux et rapides à installer. Des dérogations de procédures ont été autorisées pour accélérer la mise en place, alors que les ventes de vélos bondissent. Un article initialement publié par Politis.

Cet article a initialement été publié sur le site de Politis sous le titre « La bicyclette, petite reine des gestes barrières ». Pendant toute la durée de la crise du coronavirus, les rédactions de Basta ! et Politis se coordonnent pour couvrir les événements et proposer une information indépendante sur la pandémie.

Lundi 11 mai, premier jour du déconfinement. Avenue Gabriel-Péri à Montreuil (Seine-Saint-Denis), les automobilistes qui reprennent leurs trajets habituels ont eu droit à une surprise : le trafic ne se fait plus que sur deux voies. Les deux autres sont désormais réservées aux vélos. Il est prévu 8,1 kilomètres de pistes cyclables sur des axes importants, ajoutés au réseau déjà aménagé.

« Nous voulons faire évoluer la ville à la mesure des enjeux écologiques et désormais ceux que nous impose le coronavirus », explique le maire Patrice Bessac (PCF), sur le chantier de transformation démarré la semaine précédente. « Dès le début du confinement, nous avons réfléchi à des solutions vélo », précise Medy Sejai, directeur de l’espace public et de la mobilité de la ville. Le Comité vélo local, qui compte des associations et des usagers, est consulté. «  Ces aménagements étaient prévus pour début 2021, nous avons décidé d’en accélérer la réalisation. » Ils font partie du réseau « RER vélo », un programme de 600 km de pistes cyclables en Île-de-France porté par le collectif Vélo Île-de-France, et auquel Montreuil a adhéré. Coût pour la ville : « moins d’un million d’euros », indique Patrice Bessac. La Région contribue à hauteur de 60 % du budget du programme.

Réticence des usagers à se précipiter dans les transports en commun

Pendant le confinement, l’offre de transports en commun s’est considérablement amenuisée. Et le retour à la situation « d’avant » pourrait ne pas être d’actualité avant longtemps, notamment en région parisienne, très sensible en raison d’une forte promiscuité. En début de semaine, le service assuré par les bus, métros et trams y était évalué entre 15 % et 20 % de sa capacité nominale, en raison d’un redémarrage progressif des lignes et de la limitation du nombre de places afin de préserver une distance d’un mètre entre les personnes. Il est même envisagé, dans les stations les plus fréquentées, de filtrer les entrées pour réduire les effets de cohue.

À cela s’ajoute la réticence régulièrement exprimée de la part des usagers à emprunter les transports en commun, même avec masque obligatoire. Les autorités s’attendent donc à un recours important à la voiture, et donc au retour des embouteillages. Et si la reprise, lundi 11 mai, n’a pas été trop chaotique, il faut le mettre au compte de la persistance du télétravail et de la réticence des usagers à se précipiter dans les transports et sur les routes dès le premier jour du déconfinement.

Aménagements de dizaines de kilomètres de pistes cyclables

« Ces pistes cyclables sont une réponse à cette situation nouvelle, explique Médy Sejai. Elles vont contribuer à rééquilibrer l’affectation de la voirie, car les deux tiers des Montreuillois se déplacent en transports en commun, à vélo ou à pied. » Par leur largeur, jusqu’à quatre mètres, il s’agit de vraies voies, à double sens et compatibles avec le respect de la distanciation physique. En 2015, le vélo couvrait 3,5 % des déplacements de la population locale. « Notre ambition est de porter cette part à 10 % d’ici à 2022. »

La ville s’est lancée la première en Île-de-France, d’autres sont prêtes à l’y suivre. En France, Montpellier a été pionnière dans ce regain d’engouement pour la « petite reine ». Bordeaux, Grenoble, Lyon, Nantes, Nice, Paris, Rennes, Toulouse, etc. ont lancé des aménagements de dizaines de kilomètres de pistes cyclables. Souvent, il s’agit de l’accélération de programmes déjà engagés, quand d’autres villes basculent, comme Vincennes ou Antibes, jusqu’alors réticentes ou timorées. « On voit monter l’intérêt des pouvoirs publics pour la bicyclette depuis des mois, et c’était manifeste dans les programmes électoraux de la campagne des municipales. Avec la crise sanitaire, le vélo apparaît maintenant aux yeux d’un nombre grandissant de politiques comme une solution miracle pour les déplacements urbains », se réjouit Élodie Barnier-Trauchessec, au service transport et mobilité de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe).

Des atouts multiples pour les déplacements urbains

Car le profil « déconfinement-compatible » du vélo amplifie des atouts identifiés depuis longtemps mais bien peu valorisés en France. En ville, il est régulièrement plus performant que la voiture sur les petits trajets (moins de 3 km), plus rapide, pas handicapé par la quête d’un stationnement et cinq fois moins gourmand en espace de voirie par personne transportée. Peu onéreux, il est aussi d’un usage accessible au plus grand nombre. Réduction de la pollution atmosphérique et des émissions de CO2, distanciation physique, gain « santé » par l’activité physique, diminution du budget transport des familles, etc. « Le vélo, c’est notre geste barrière pour les déplacements ! », lance Olivier Schneider, président de la Fédération française des usagers de la bicyclette (FUB), qui regroupe 365 associations en France.

Les magasins de cycles le signalent : partout les ventes ont bondi lors du confinement (la circulation était paisible) et plus encore en prévision du déconfinement. C’est particulièrement net pour les vélos à assistance électrique, vedettes actuelles du marché (+12 % en 2019). « Depuis quelques jours, monte le sentiment qu’une petite révolution est en marche ! », rapporte Élodie Barnier-Trauchessec.

Un plan pro-vélo adopté en un temps éclair par le gouvernement dans la perspective du déconfinement

Car le gouvernement s’est réveillé à son tour. En particulier, « la ministre de l’Écologie, Élisabeth Borne, s’est montrée ouverte à l’opportunité de pousser le vélo à l’occasion du déconfinement », rapporte Pierre Serne, président du Club des villes et territoires cyclables (et conseiller régional Génération·s d’Île-de-France), qui a œuvré pour emporter sa conviction.

Mi-avril, un groupe de travail se met en place autour de Thierry du Crest, coordinateur interministériel vélo, avec des acteurs de la mobilité douce [1]. « Un travail formidable a été accompli en un laps de temps très court, jamais nous n’aurions cru cela possible », salue Patrick Guinard, coadministrateur de l’Union sport et cycles qui réunit les entreprises de la filière. Jeudi 30 avril, la ministre lançait un plan pro-vélo éclair doté de 20 millions d’euros. « Du jour au lendemain, nous avons vu affluer les propositions et demandes d’aide des collectivités », se félicite Pierre Serne, chargé de coordonner ce volet.

La priorité des priorités : développer les parcours cyclables. « La présence de pistes sécurisées est un facteur déterminant dans la décision de prendre son vélo », appuie Patrick Guinard. Le principe de l’aménagement temporaire de la voirie est retenu. Inspiré des pratiques de l’« urbanisme tactique » [2], il consiste à affecter une partie de la voirie aux vélos en la délimitant à l’aide d’équipements légers, peu coûteux et rapides à installer – marquage au sol, séparateurs, potelets flexibles, etc. La ville de Montreuil l’a adopté, « avec des aménagements de qualité supérieure, mais a priori non définitifs, explique Medy Sejai. L’idée consiste à expérimenter, puis à tirer des enseignements pour décider de pérenniser ou non la piste, de la reconfigurer, voire de la déplacer sur une autre voie. »

Une administration qui s’adapte pour accélérer la mise en place de parcours cyclables temporaires

La méthode a fait ses preuves à Berlin, Mexico ou Oakland (Californie), et surtout à Bogotá, pionnière de la méthode. La capitale de la Colombie s’est montrée capable de créer jusqu’à 117 kilomètres de ces « pistes Covid-19 » en quelques jours, et d’en modifier une cinquantaine de kilomètres en une nuit. Mi-mai, leur nombre s’était stabilisé à 80 kilomètres, qui s’ajoutent à un réseau cyclable existant de 550 kilomètres.

En France, les Bâtiments de France et les préfectures ont été invités à déroger à leurs procédures habituelles d’autorisation pour accélérer les mises en place. Le Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (Cerema) a édité un « guide express » des aménagements cyclables provisoires. Le potentiel d’expansion du vélo est considérable, souligne la Direction générale des entreprises (DGE), qui vient de publier une étude (lire encadré) : 65 % des déplacements du quotidien se font sur moins de 5 km. Or, sur ce créneau typique de ses usages, le vélo n’en capte encore que 3 % en moyenne en France – la voiture reste privilégiée à 65 % pour les trajets compris entre 1 et 2 km… Le déconfinement inaugurerait-il une ère du vélo dans les déplacements du quotidien ?

« C’est un véritable “système vélo” qu’il faut mettre en place »

Plus que des kilomètres de pistes, encore faut-il encourager la pratique. Le budget ministériel finance une opération « coup de pouce vélo » offrant aux propriétaires une remise de 50 euros pour réparer un vélo (il en existerait près de 10 millions inutilisés), ainsi que des séances de « remise en selle » pour reprendre confiance sur deux roues. Il est aussi prévu des aides à la création de stationnements temporaires. « C’est tout aussi décisif, car le vol est un problème répandu », convient Patrick Guinard. Le contexte pourrait accélérer l’harmonisation des systèmes de marquage des cycles, avec adoption d’une base de données unique d’ici à 2021.

« Si l’on veut rendre durable l’engouement qui se dessine, c’est un véritable “système vélo” qu’il faut mettre en place », insiste Olivier Schneider. Avec de la constance politique. À Montreuil, la ville avait annoncé l’achèvement de son opération éclair pour le jour du déconfinement. Aléas logistiques et excès d’optimisme : le 11 mai, seulement 15 % des 8,1 kilomètres de voies étaient en cours d’achèvement. « Ma position est claire, le vélo n’est pas optionnel, c’est un choix durable pour la ville », défendait cependant le maire, qui vise un total de 24 kilomètres équipés d’ici à la fin de son mandat, en 2026 [3].

Notes

[1] Club des villes et territoires cyclables, Fédération française des usagers de la bicyclette (FUB), Union sport et cycles, Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe).

[2] Approche qui privilégie l’adaptation de la ville aux besoins réels de la population, à l’aide d’outils simples et d’équipements adaptables de faible coût.

[3] Sa liste l’a emporté au premier tour le 15 mars dernier.

[4] Impact économique et potentiel de développement des usages du vélo en France (avril 2020).

Un avant-goût du choc climatique
Philippe Descamps & Thierry Lebel
www.monde-diplomatique.fr/2020/05/DESCAMPS/61750

L’abîme dans lequel un coronavirus a précipité de nombreux pays illustre le coût humain de la négligence face à un danger pourtant parfaitement identifié. Évoquer la fatalité ne peut dissimuler l’évidence : mieux vaut prévenir que guérir. Les atermoiements actuels dans la lutte contre le réchauffement climatique pourraient conduire à des phénomènes bien plus dramatiques.

En mars 2020, la crise sanitaire a relégué l’actualité climatique loin des titres. Pourtant, ce mois fera date comme le dixième de suite avec une température moyenne au-dessus des normales. « Une telle série de dix mois “chauds” consécutifs à l’échelle du pays est inédite », note Météo France, dont les données permettent de remonter jusqu’à 1900. L’hiver écoulé a battu tous les records avec des températures supérieures aux normales de 2 °C en décembre et janvier, puis de 3 °C en février. Pour se rassurer, on a préféré retenir l’amélioration spectaculaire de la transparence atmosphérique. Lueurs d’espoir : l’Himalaya redevenait visible à l’horizon des villes du nord de l’Inde, ou le mont Blanc depuis les plaines lyonnaises.

Nul doute que la mise à l’arrêt d’une bonne partie de la production entraînera cette année une baisse inégalée des émissions de gaz à effet de serre (GES). Mais peut-on vraiment croire qu’une décrue historique va s’amorcer ? En révélant la vulnérabilité de notre civilisation, les fragilités associées au modèle de croissance économique mondialisée, du fait de l’hyperspécialisation et des flux incessants de personnes, de marchandises et de capitaux, le Covid-19 provoquera-t-il un électrochoc salutaire ? La crise économique et financière de 2008 généra, elle aussi, une baisse sensible des émissions, mais elles sont rapidement reparties à la hausse ensuite, battant de nouveaux records…

Signe avant-coureur de possibles effondrements plus graves, le naufrage sanitaire actuel peut se voir à la fois comme un modèle réduit et une expérience en accéléré du chaos climatique qui vient. Avant de devenir une affaire de santé, la multiplication des virus pathogènes renvoie aussi à une question écologique : l’emprise des activités humaines sur la nature. L’exploitation sans fin de nouvelles terres bouleverse l’équilibre du monde sauvage, tandis que la concentration animale dans les élevages favorise les épidémies.

Le virus a touché en premier lieu les pays les plus développés, car sa vitesse de propagation est étroitement liée aux réseaux d’échanges maritimes et surtout aériens, dont le développement constitue également l’un des vecteurs croissants des émissions de GES. La logique du court terme de l’effacement des précautions montre, dans ces deux domaines, la capacité autodestructrice pour les humains de la primauté accordée au gain individuel, à l’avantage comparatif à la compétition. Si certaines populations ou régions s’avèrent plus vulnérables que d’autres, la pandémie affecte progressivement la planète entière, de même que le réchauffement ne se cantonne pas aux pays les plus émetteurs de dioxyde de carbone (CO2).

La coopération internationale devient alors capitale : freiner le virus ou les émissions de GES localement sera vain si le voisin ne fait pas de même.

Difficile de feindre l’ignorance devant l’accumulation des diagnostics. Grâce à la vivacité de la recherche en virologie ou en climatologie, la précision des informations disponibles ne cesse de s’affiner. Dans le cas du Covid-19, plusieurs spécialistes alertent depuis des années, notamment par la voix du professeur au Collège de France Philippe Sansonetti, qui présente l’émergence infectieuse comme un défi majeur    du XXIè siècle. Des alarmes tangibles n’ont pas manqué : virus grippaux tels que H5N1 en 1997 ou H1N1 en 2009, coronavirus tels que le syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS-CoV-1) en 2002, puis le syndrome respiratoire du Moyen-Orient (SRMO-CoV) en 2012. De même, le rapport Charney, remis au Sénat américain, il y a quarante ans, alertait déjà sur les conséquences climatiques potentielles de la hausse de la teneur de GES dans l’atmosphère. Les dispositifs multilatéraux pour  le partage des connaissances et l’action en commun existent depuis une trentaine d’années, avec le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC),puis la convention-cadre des Nations unies sur le changement climatique (CCNUCC).Enfin, les scientifiques ne ménagent pas leur peine pour informer les décideurs et les sociétés face à la menace d’un réchauffement qui s’accélère.

Les scénarios de crise sont également connus. Très rapidement après l’apparition du Covid-19, plusieurs chercheurs et autorités sanitaires ont prévenu  du danger d’une pandémie (3). L’ironie de la situation tient au fait qu’à la mi-avril 2020 les territoires les moins touchés sont les voisins immédiats de la Chine : Taiwan, six morts, Hongkong, quatre morts ; Macao et Vietnam, zéro (4). Echaudés par l’épisode du SRAS en 2003 et conscients du risque épidémique, ils ont mis en œuvre sur-le-champ les mesures nécessaires pour le réduire : contrôles sanitaires aux entrées,  dépistages en nombre, isolement des malades et quarantaine pour les potentiels  contaminés, port du masque généralisé, etc.

En Europe, les gouvernements ont continué à gérer ce qu’ils considéraient comme leurs priorités : réformes des retraites en France, Brexit de l’autre côté de la Manche, crise politique quasi perpétuelle en Italie… Puis, ils ont promis, pour les semaines à venir les actions ou les moyens qu’ils auraient dû mettre en œuvre des mois plus tôt ! Cette incurie les a conduits à prendre des mesures beaucoup plus draconiennes que celles qui auraient pu suffire en temps voulu, non sans conséquences majeures sur le plan économique, social ou celui des libertés publiques.

En repoussant toujours à demain le respect de leurs engagements pris en 2015 dans le cadre des accords de Paris sur le climat –  ou en reniant la signature de leur pays comme le président américain -, les mêmes Etats pensent gagner du temps. Ils en perdent !

Retards et rétroactions positives creusent notre dette environnementale

L’accélération soudaine qu’a connue la diffusion du virus en Europe avant le confinement devrait marquer les esprits. Les systèmes naturels n’évoluent que rarement de manière linéaire en réponse à des perturbations significatives.

Dans ce genre de situation, il faut savoir détecteur et prendre en compte les premiers signaux de déséquilibre avant d’être confronté  à des emballements incontrôlables pouvant conduire à des points de non-retour. Quand les soignants ou le personnel des établissements pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) laissés sans protection et sans dépistage deviennent eux-mêmes porteurs du virus, cela crée des foyers de contamination en milieux hautement sensibles, qui peuvent conduire à un effondrement des systèmes de santé, et impose un confinement généralisé. Semblablement, en matière climatique, les effets retards et les rétroactions  positives – effets retours qui amplifient la cause de départ – creusent notre dette environnementale, à la manière d’un emprunteur impécunieux dont les nouveaux emprunts pour rembourser une dette ancienne seraient contractés à un taux toujours plus élevé. La baisse du couvert neigeux et la fonte des glaciers se traduisent ainsi par la disparition de surfaces réfléchissant naturellement le rayonnement solaire, créant les conditions d’une accélération des hausses de température dans les régions concernées, d’où une fonte encore renforcée alimentant d’elle-même le réchauffement. De même, la fonte du pergélisol arctique qui couvre une superficie deux fois plus grande que celle de l’Europe – pourrait entraîner des émissions massives de méthanes, un puissant GES qui intensifierait le réchauffement  planétaire. Une part grandissante de la population sent l’urgence à agir, confectionne ses propres masques, organise le secours aux plus âgés. Mais à quoi bon faire du vélo, composter ses déchets ou réduire sa consommation d’énergie quand le recours aux énergies fossiles est encore largement subventionné, quand leur extraction nourrit l’appareil de production et les chiffres de la « croissance » ? Comment sortir du phénomène incitatif des cries amplifié par le discours politico-médiatique : négligence, émoi, effroi, puis oubli ? Car il existe deux différences fondamentales entre leCovid-19  et le dérèglement climatique. L’une tient aux possibilités de régulation de choc subi et l’autre à nos capacités à nous y adapter. L’autorégulation des épidémies par acquisition d’une immunité collective ne fait pas du Covid-19 une menace existentielle pour l’humanité qui a déjà  surmonté la peste, le choléra, la grippe espagnole, dans des conditions sanitaires autrement difficiles. Avec un taux de létalité probablement inférieur à1% – bien plus faible que d’autre infections- le virus ne menace pas la population de la planète de disparition. En outre, même s’ils en ont négligé les prémices, les gouvernements disposent de connaissances et d’outils appropriés pour atteindre le choc de cette autorégulation naturelle. Relativement circonscrite, la crise du Covid-19 peut être comparée dans sa dynamique aux incendies qui ont embrasé la forêt australienne en 2019, il y a un début et une fin, bien que celle-ci soit pour l’instant difficile à cerner et qu’un retour saisonnier de l’épidémie ne soit pas exclu. Les mesures prises pour s’y adapter sont relativement bien acceptés par la majorité de la population, tant qu’elles sont perçues comme temporaires. A l’inverse, l’inaction en matière climatique nous fera sortir des mécanismes de régulation systémiques, conduisant à des dégâts majeurs et irréversibles. On peut s’attendre à une succession  de chocs variés, de plus en plus forts et de plus en plus rapprochés : canicules, sécheresses, inondations, cyclones, maladies émergentes. La gestion de chacun de ces chocs s’apparentera à celle d’une crise sanitaire du type Covid-19 mais leur répétition nous fera entrer dans un univers où les répits deviendront insuffisants pour rebondir. De vastes régions abritant une grande partie de la population mondiale deviendront invivables ou n’existeront tout simplement plus, car elles seront envahies par la montées des eaux. C’est tout l’édifice de nos sociétés qui est menacé d’effondrement. L’accumulation des GES dans notre atmosphère est d’autant plus délétère  que le CO2 le plus répandu d’entre, ne disparaîtra que très lentement, 40% restant dans l’atmosphère après cent ans, et 20% après mille ans. Chaque journée perdue dans la réduction de notre dépendance aux énergies fossiles rend ainsi plus coûteuse l’action à mener le lendemain. Chaque décision rejetée comme « difficile » aujourd’hui conduira à prendre des décisions encore plus « difficiles » demain sans espoir de « guérison » et, sans autre choix que de s’adapter vaille que vaille à un environnement nouveau, dont nous aurons du mal à maîtriser le fonctionnement. Faut-il alors sombrer dans le désespoir en attendant l’apocalypse ? La criseduCovid-19 enseigne au contraire l’impérieuse utilité de l’action publique ; mais aussi la nécessaire rupture avec la marche précédente. Après une accélération technologique et financière prédatrice, ce temps suspendu devient un moment de prise de conscience collective, de mise en question de notre mode de vie et de ses systèmes de pensée. Le virus SRAS-Cov-2 et la molécule de CO2 sont des objets nanométriques, invisibles au commun des mortels. Pourtant leur existence et leur effet (pathogène dans un cas, créateur d’effet de serre dans l’autre) sont largement admis tant par les décideurs que par les citoyens. En dépit de l’incohérence des préconisations gouvernementales, l’essentiel de la population a rapidement compris les enjeux et la nécessité de certaines mesures de précaution. La science représente dans ces temps un précieux guide pour la décision, à condition de ne pas devenir une religion échappant aux nécessités de la démonstration et de la contradiction. Et la rationalité doit plus que jamais conduire à écarter les intérêts particuliers.

Ne pas confondre la récession et la décroissance de nos productions insoutenables

Tous les pays disposent de réserves stratégiques de pétrole, mais pas de masques de protection…La crise sanitaire remet au premier plan la priorité qui doit être accordée aux moyens d’existence : alimentation, santé, logement, environnement, culture. Elle rappelle aussi la capacité du plus grand nombre à comprendre ce qui se passe parfois plus vite que les décideurs. Les premiers masques faits maison sont ainsi apparus quand la porte-parole du gouvernement , Mme Sibeth Ndiaye, jugeait encore le port inutile…

En revanche, nous semblons mieux armés pour réagir à des menaces concrètes immédiates que pour bâtir des stratégies permettant de parer des risques plus lointains, aux effets encore peu perceptibles(5). D’où l’importance d’une organisation collective motivée par le seul intérêt général et d’une planification articulant les besoins.

Bien davantage encore que le Covid-19, le défi climatique conduit à remettre en cause notre système socio-économique. Comment rendre acceptable une évolution aussi radicale, un changement à la fois social et individuel ? Tout d’abord en ne confondant pas la récession actuelle – et délétère  – avec la décroissance bénéfique de nos productions insoutenables : moins de produits exotiques, de passoires énergétiques, de camions, de voitures, d’assurances ; plus de trains, de vélos, de paysans, d’infirmières, de chercheurs, de poètes, etc.  Les conséquences concrètes de cette dernière deviendront acceptables par le plus grand nombre qu’en plaçant la justice sociale au rang des priorités et en favorisant l’autonomie des collectifs à tous les niveaux.

Un test très concret et rapide de la capacité des gouvernements à renverser les dogmes d’hier résidera dans leur attitude vis-à-vis du traité sur la charte de l’énergie. Entré en vigueur en1998,en renégociation depuis 2017,cet accord crée entre cinquante-trois pays un marché international « libre » de l’énergie. Visant à rassurer les investisseurs privés, il octroie à ces derniers la possibilité de poursuivre, devant des tribunaux arbitraux aux pouvoirs exorbitants, tout Etat qui pourrait prendre des décisions contraires à la protection de leurs intérêts, en par  exemple, l’arrêt du nucléaire (Allemagne) un moratoire sur les forages en mer (Italie) ou la fermeture de centrales à charbon (Pays-Bas). Et ils ne s’n privent pas : à la fin mars, au moins 129 affaires de ce type ont fait l’objet d’un «  règlement des différends », un record en matière de traité de libre-échange, entrainant des condamnations pour les Etats d’un total de plus de 51 milliards de dollars (46 milliards d’euros).En décembre278 syndicats et associations ont demandé à l’Union européenne de sortir de ce traité, qu’ils jugent incompatible avec la mise en œuvre de l’accord de Paris sur le climat.

Au sortir de la crise sanitaire, les pays industrialisés auront moins besoin d’un plan de relance de l’économie d’hier que d’un plan de transformation vers une société dans laquelle chacun  puisse vivre dignement, sans mettre en péril les écosystèmes. L’ampleur du recours indispensable à l’argent public qui dépassera tout ce que l’on a pu connaître offre une occasion unique ; conditionner les soutiens et les investissements à leur compatibilité avec l’atténuation du changement climatique et l’adaptation à ce changement.

Philippe Descamps & Thierry Lebel – Hydroclimatologue, directeur de recherche à l’Institut de recherche pour le développement (IRD) et à l’Institut des géosciences de l’environnement (IGE, Grenoble), contributeur aux travaux du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC).

Mende erdi barru, beroa jasanezina izango da Lurreko biztanleen herenarentzat
Urko Apaolaza Avila
www.argia.eus/albistea/mende-erdi-barru-beroa-jasanezina-izango-da-lurreko-biztanleen-herenarentzat

Bioaniztasuna suntsitzearen eta klima aldaketaren ondorioz, Lurraren tenperatura 2 edo 3 gradu igoko da datozen hamarkadetan egungo hipotesien arabera. Halaxe errepikatu digute. Baina gorakada hori globala da eta kontuan hartzen du askoz hotzagoak diren ozeanoen ur azala. Itsas eremu hori planetako %70 da, baina gainerakoa, lurrazala alegia, askoz gehiago berotuko da, 6 gradu edo gehiago.

Ondorioz, AEBetako PNAS web atarian argitaraturiko nazioarteko ikerketa baten arabera, baliteke mende erdi barru Lurreko biztanleen herena bizi den eremuetan beroa jasanezina izatea bizirauteko. Horrek 3.500 milioi laguni eragingo dio.

A l’encotre aldizkariak azaldu duenez, hainbat herrialdetako ikerlariek hartu dute parte azterketan, eta ondorioetako bat da munduan tenperatura gradu bat igotzen den bakoitzeko, mila milioi lagun euren lurraldeetatik kanpora bultzatuko dituela beroak.

Historikoki gizakia 11 eta 25 gradu arteko batez besteko beroa izan duten eremuetan bizi izan da, gutxienez azken 6.000 urtetan; “gailur klimatiko” moduko bat da. Hala, 29 gradu zentigradutik gorako batez bestekoekin bizitzea « ez da bideragarria”, diote ikerlariok. Gaur egun Saharako basamortu zabaletan daukagu halako tenperatura, baina hemendik 50 urte barru Lurraren %19an gauza bera gerta liteke eta milaka milioi lagunentzat ezinezkoa litzateke hor laboreak landatzea eta bizitzea.

Ikuspegia ez da askoz hobea berotze globala mantsotzeko neurriak hartuko bagenitu ere, 1.500 milioi lagunek jarraituko lukete tenperatura jasanezinaren langa hori gainditzen duten lurretan bizitzen.

“Aire egokitua erosteko dirua duenak geratuko da, baina gehiengoarentzat migrazioa izango da aukera bakarra –dio A l’encontre-ko artikuluaren egileak–. Mugetan harresiak eraikitzen dituzten herrialdeek, zientoka milioi lagun kondenatuko dituzte heriotzara”.