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Articles du Vendredi : Sélection du 2 avril 2021


‘ La France se réchauffe plus vite que la planète ‘
Entretien de Moran Kerinec avec Christophe Cassou est directeur de recherche CNRS au Centre européen de recherche et de formation avancée en calcul scientifique (Cerfacs), et membre du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec)
https://reporterre.net/La-France-se-rechauffe-plus-vite-que-la-planete

Multiplication d’événements météorologiques extrêmes, meilleure quantification des conséquences des activités humaines sur le climat, avancement de la date de franchissement du seuil de 1,5 °C… Le climatologue Christophe Cassou revient pour Reporterre sur ce qu’a appris la science du climat durant les deux dernières années.

Reporterre — Qu’ont appris de nouveau les climatologues depuis deux ans ?

Christophe Cassou — Parlons d’abord de l’évolution du climat que nous avons observé ces deux dernières années. 2020 a été une année record en matière de température globale, à égalité avec 2016. D’habitude, ces records sont associés à un phénomène naturel que l’on appelle El Niño, situé dans le Pacifique tropical et qui a des influences planétaires. Ce phénomène vient se superposer au réchauffement global lié aux activités humaines et c’est ce qui s’est toujours passé ces cinquante, voire soixante, dernières années.

En 2020, il n’y a pas eu d’événement El Niño, et pourtant le record de température globale a été égalé. Ce record s’explique par le fait qu’aujourd’hui, l’influence des activités humaines sur le climat est en train d’atteindre le même ordre de grandeur que ses fluctuations naturelles. Dans notre jargon scientifique, nous appelons ce moment de dépassement « l’émergence ». Dit autrement, nous commençons à vivre des situations qui n’ont jamais été expérimentées par les générations qui nous ont précédés : nous entrons en territoire inconnu.

Au-delà de la température globale, y a-t-il eu des phénomènes particuliers sur les deux dernières années ?

Oui, les « événements composites ». Ce sont des événements qui s’expliquent par la combinaison de différents facteurs météorologiques. Ils aboutissent ensemble à des impacts démultipliés et à des emballements. Nous en avons vécu deux : le premier en Australie, avec la combinaison de vagues de chaleur récurrentes, d’une sécheresse chronique et de vents violents, qui a généré des feux énormes et conduit à des impacts irréversibles. Le second en Sibérie, avec également des feux gigantesques qui s’expliquent par un été très chaud faisant suite à un hiver très peu enneigé, une sécheresse des sols record et une banquise dans l’océan Arctique au plus bas, le tout favorisé par un réchauffement qui est beaucoup plus fort dans les régions polaires.

Ces catastrophes sont des marqueurs du réchauffement et on connaît les processus qui contribuent à ces emballements que l’on appelle des « boucles de rétroaction ». En l’occurrence, la sécheresse renforce la chaleur qui, à son tour, assèche encore davantage : c’est un cercle vicieux. En 2019 et 2020, c’était en Australie et en Sibérie, mais ces événements peuvent se produire n’importe où. La France n’est pas à l’abri.

Comment pourraient-ils se traduire sur le sol français ?

Avec le même processus qu’en Australie ou en Sibérie : la combinaison de vagues de chaleur, de sécheresse et de situations ventées qui font que les écosystèmes forestiers du pourtour méditerranéen ou du sud-ouest de la France deviennent propices à des incendies de très grande échelle et difficilement contrôlables. Les ressources en eau sont au plus bas dans ce cas avec, au-delà des risques naturels que sont les incendies, des conséquences massives sur l’agriculture ou sur l’énergie. En effet, une partie de notre énergie vient des centrales hydrauliques, et une grande partie de notre parc nucléaire nécessite l’eau des rivières pour être refroidi, alors que les niveaux des cours d’eau sont très bas. Ces événements composites mettent en grave danger l’ensemble des secteurs économiques, mais aussi l’organisation sociale…

 De tels événements étaient-ils attendus par les climatologues ?

Ces événements composites de grande ampleur nous ont surpris par leur émergence précoce. Nous les attendions plus tard pour des niveaux de réchauffement plus élevés. Ils démontrent que, même avec le niveau de réchauffement actuel, qui est de 1,1 °C, nous rencontrons déjà des événements à très fort impact.

Quels sont les autres secteurs où la science a progressé ?

Une dynamique de recherche a démarré depuis quelques années dans le but de mieux comprendre les événements extrêmes — vagues de chaleur, sécheresses, cyclones — et surtout mieux appréhender l’impact de l’activité humaine sur ces phénomènes. La difficulté avec les événements extrêmes, c’est qu’il y en a toujours eu et qu’ils sont rares par définition. Il est donc difficile de détecter directement l’influence des activités humaines. Et on ne peut raisonner qu’en termes de probabilités ou de modification de leur fréquence d’occurrence.

La probabilité que ces événements extrêmes se déclenchent devient particulièrement forte.

Ces recherches internationales se sont penchées, entre autres, sur les vagues de chaleur qui ont frappé l’Europe ces cinq dernières années. En 2019, le record de température a été battu en France, avec 46 °C dans le Gard. Les résultats de ces recherches démontrent que la probabilité d’avoir ce niveau de température en France a été augmenté au minimum par dix en raison des activités humaines, via l’émission de gaz à effet de serre. Les mêmes méthodes d’analyse qui combinent la physique, la statistique et les mathématiques ont été utilisées pour expliquer les précipitations intenses sur le sud de la France, par exemple celles qui ont frappé la vallée de la Roya à l’automne 2020.

Aujourd’hui, on peut dire avec certitude que la probabilité que ces événements extrêmes se déclenchent devient particulièrement forte, alors qu’elle était très faible, à des niveaux de température préindustriels, c’est-à-dire vers 1850. La science avance vite sur le lien entre événements extrêmes et activités humaines.

Météo France et l’Institut Pierre-Simon Laplace (IPSL) ont produit de nouvelles projections climatiques d’ici à 2100, que nous apprennent-elles ?

Ne considérer qu’un ou deux modèles n’a pas de sens. Il faut les replacer dans un contexte plus large pour évaluer l’ensemble des futurs climatiques possibles : il faut donc prendre en compte tous les modèles du monde et c’est le travail du Giec (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat) de faire une évaluation la plus exhaustive possible. Dans ce cadre multimodèles, on décèle une plus forte « sensibilité climatique » avec les modèles les plus récents. « Sensibilité » est une expression un peu barbare qui désigne la valeur du réchauffement si on double la concentration de CO2 dans l’atmosphère. Cette mise à jour des estimations de la sensibilité a deux conséquences.

Le seuil de 1,5 °C est quasiment acté.

D’abord, pour maintenir le réchauffement global à un niveau de température donnée, il faudra être plus ambitieux dans la réduction de nos émissions de gaz à effet de serre. Ensuite, la date de franchissement du seuil de 1,5 °C, qui est au cœur de l’Accord de Paris, arrivera certainement dix ans plus tôt que celle qui avait été évaluée dans les précédents rapports du Giec. Ce seuil devrait être franchi au début de la décennie 2030.

Pouvons-nous encore inverser la vapeur ?

Ce seuil de 1,5 °C est quasiment acté. Quelles que soient les mesures prises aujourd’hui, il sera franchi. Le défi est de limiter au plus le réchauffement global et le plus tôt possible, à savoir pour la décennie 2040-2050.

Les politiques actuelles sont-elles à la mesure d’une limitation du réchauffement global à 2 °C ?

Clairement, non. Si on voulait maintenir le réchauffement à 2 °C, il faudrait coller aux objectifs définis par la stratégie nationale bas carbone et inscrits dans la loi. Or, il existe un hiatus criant entre les actions et les objectifs. Les chiffres de réduction des émissions de gaz à effet de serre sont associés aux contraintes physiques du système climatique et ne sont pas d’ordre politique. Ces chiffres mis en regard des niveaux de réchauffement ne sont donc pas négociables. Les contraintes physiques du climat nous imposent la neutralité carbone aux horizons 2050-2060. Toute tonne de carbone supplémentaire contribuera à réchauffer le climat : il faut réduire vite et fort pour arriver à zéro.

Le niveau d’engagement actuel des États conduit à un réchauffement global de l’ordre de trois à quatre degrés d’ici 2060-2070. L’augmentation des vagues de chaleur et la hausse des précipitations extrêmes vont se poursuivre, d’autant que la France se réchauffe plus vite que la température globale. À titre illustratif, un réchauffement de trois à quatre degrés signifie que, statistiquement, un été sur deux en France se déroulera comme en 2003, dont on se rappelle les conséquences dévastatrices. Il faut que les décideurs assument les conséquences des politiques qui sont mises en place et évaluent très précisément les risques additionnels si le seuil de 2°C est franchi, et donc si les engagements ne sont pas respectés.

Où en est l’évolution des technologies susceptibles de réduire l’impact climatique ?

Aujourd’hui, aucune n’est acceptable au regard de l’urgence climatique. Tabler sur des techniques qui sont encore de l’ordre de prototypes, telles les technologies de séquestration de carbone, relève d’un pari très risqué. La technologie ne réglera pas la problématique climatique !

Il y a deux types de technologies : les méthodes artificielles, qui consistent à pomper le carbone de l’atmosphère et à le stocker sous différentes formes. Elles ne seront pas disponibles avant quelques décennies et des défis subsistent — passage à l’échelle, minimisation des risques de fuite, etc. Il y a aussi des techniques moins intrusives, qui consistent à utiliser les puits naturels de carbone comme les forêts ou la biomasse pour capter le carbone. Les dernières études montrent que plus le réchauffement global s’accroît, plus cette capacité naturelle à pomper et stocker le carbone s’affaiblit. Le stockage dans les forêts est aussi à risque, car le CO2 peut être relargué dans l’atmosphère lors d’incendies massifs, comme c’est arrivé en Californie et en Australie en 2019 et 2020. Compter sur les écosystèmes pour limiter la perturbation humaine, via les gaz à effet de serre, est donc un pari très incertain. Cela questionne aussi les initiatives de « compensation carbone » qui ne sont clairement pas des solutions.

L’action la plus sage, c’est de diminuer dès maintenant les émissions de gaz à effet de serre, pour en pomper le moins possible si — au mieux quand — nous disposerons des technologies. Il y a des études très intéressantes faites sur la sobriété, qui aujourd’hui semble incontournable. La sobriété impose une évolution de nos modes de vie, de notre rapport au monde et du faire société. Personnellement, je suis convaincu que sans sobriété nous n’y arriverons pas, considérant l’ampleur des contraintes de réduction sur les gaz à effet de serre qui sont nécessaires pour limiter le réchauffement.

Quels enseignements tirer de la crise du coronavirus pour le changement climatique, entretien avec le climatologue Jean Jouzel
Julien Leprovost
www.goodplanet.info/2021/03/22/quels-enseignements-tirer-de-la-crise-du-coronavirus-pour-le-changement-climatique-entretien-avec-le-climatologue-jean-jouzel

Un an après le début de la crise sanitaire de coronavirus, qui a progressivement éclipsé le reste, est-il possible de dresser un parallèle entre la pandémie et le changement climatique ? Que retenir de cette crise afin de lutter plus efficacement contre le plus grand défi auquel l’humanité confronté, celui du réchauffement climatique ? Le climatologue Jean Jouzel a pris le temps de nous livrer ses réflexions dans cet entretien.

Tout d’abord, est-il possible de tracer un parallèle entre la lutte contre la pandémie de coronavirus et la lutte contre le réchauffement climatique ?

Avant de faire un parallèle entre les deux crises, il faut comprendre les similitudes dans leurs causes. Même s’il n’existe pas de relations directes bien étayées entre la variation du climat et l’expansion de la pandémie (en dehors des variations saisonnières de cette dernière), il y a deux facteurs communs aux deux crises : la déforestation et la mondialisation.

La déforestation participe au réchauffement en émettant des gaz à effet de serre et en réduisant le stockage naturel du carbone, elle met en contact les êtres humains avec des espèces sauvages favorisant ainsi la transmission des zoonoses. Quant à elle, la mondialisation des échanges accélère la transmission du virus notamment avec le transport aérien de masse. La mondialisation joue un rôle dans le réchauffement climatique car elle s’appuie sur les règles de l’Organisation Mondiale du Commerce qui visent à maximiser les échanges sans tenir compte du réchauffement climatique.

Et la science dans tout ça ?

Le rôle des scientifiques n’est pas de faire des recommandations, mais de fournir un diagnostic. Il s’agit de la mission première du GIEC à laquelle je reste très attaché. La science doit dire les choses, mais il incombe bien aux dirigeants politiques de prendre les décisions. C’est peu ou prou ce qui se passe, en France, avec le conseil scientifique pour la pandémie de covid-19. Le Président de la République prend en compte ses avis, mais on constate également que le gouvernement tient compte d’autres contraintes économiques et sociétales pour arrêter certaines mesures.

 1 an après le confinement en France, qu’est-ce que la crise sanitaire nous a appris en matière de lutte contre le réchauffement climatique ?

La baisse de l’activité économique a entrainé une réduction des émissions de gaz à effet de serre de l’ordre de 6 à 7 % au niveau mondial et de 10 à 12 % en France. Pour parvenir à se mettre sur une trajectoire compatible avec l’objectif de limiter le réchauffement climatique à 1,5°C, il faudrait parvenir à réduire de 7 % par an les émissions de gaz à effet de serre au niveau planétaire. Il ne suffit donc pas de réduire l’activité économique pour se mettre sur cette trajectoire. Il faut avant tout changer le fonctionnement de nos sociétés et leur modèle de développement. Cela signifie concrètement repenser nos modes de production, transformer la manière dont nous produisons et consommons notre énergie, sans oublier d’aller vers plus de sobriété. C’est pour moi le principal enseignement de cette crise.

Dans les deux cas, les solutions existent et sont connues. Leur mise en place se montre plus compliquée et lente que prévu. Les frictions et les difficultés se multiplient, et ce malgré l’envie commune et consensuelle d’en finir avec le virus ou le réchauffement, comment l’expliquez-vous ?

Dans le cas de la pandémie, ce n’est pas surprenant, nous n’étions pas préparés. Il y a eu une impréparation dès le départ car le virus était vu comme un phénomène lointain cantonné à la Chine. Notre sentiment de supériorité nous conduisait à penser que nous serions épargnés grâce à un système de santé extraordinaire qui nous protégerait. Ça n’a pas été le cas. On peut toutefois se dire que la disponibilité des vaccins au bout d’une année se révèle un bon résultat. Nous sommes néanmoins à la limite de ce que nous sommes en mesure de produire sur la planète. Dès lors, le moindre petit grain de sable rend les projections difficiles à tenir.

N’avez-vous pas une impression d’un déjà-vu dans le sens où la crise sanitaire montre des scientifiques qui alertent sur une menace face à laquelle on semble réagir trop tard, n’est-ce pas un scénario similaire à ce qui se passe pour le climat ?

En fait, à mes yeux en termes d’échelle de temps, si la pandémie devait être comparée à un problème environnemental, ce serait la pollution plutôt que le réchauffement climatique. Car, la pollution, comme la pandémie, est un problème immédiat. Par exemple, les effets d’une contamination par usine chimique de l’environnement sont immédiats. La pandémie s’est répandue dans un délai très court : le virus est arrivé en France en trois mois. Or le problème du réchauffement climatique est celui de l’échelle de temps : il y a plusieurs décennies d’écart entre les causes du réchauffement et ses conséquences principales.

J’ai commencé à travailler dans le domaine du climat dans les années 1970. Dès le départ, j’étais convaincu des risques qu’on encourrait si on continuait à émettre des gaz à effet de serre. Dans les années 1980, le réchauffement climatique n’était pas vraiment là, pourtant le premier rapport publié en 1990 décrivait déjà la situation climatique qu’on vit actuellement. On n’a pas accordé assez de crédibilité aux scientifiques à cette époque-là. C’est pourtant à ce moment-là qu’il aurait fallu agir. Il y a bien sûr eu le protocole de Kyoto en 1997. Mais, en réalité, malgré des ambitions affichées dans le texte, les émissions de gaz à effet de serre ont continué d’augmenter. Elles ont doublé entre 1970 et aujourd’hui pour passer de 27 milliards de tonnes équivalents CO2 par an à plus de 55 milliards de tonnes. En dépit des efforts de la communauté scientifique, confrontée longtemps à un climatoscepticisme ambiant, nous avons parlé dans le vide car, les rejets de gaz à effet de serre ont constamment augmenté, hormis en 2008/2009 avec la crise et en 2020.

La difficulté majeure d’appréhension du changement climatique réside dans ce décalage temporel qui conduit à ce qu’il faille que ses effets soient perceptibles et commencent à se faire sentir pour que les décideurs et les gens prennent conscience du problème. Or, il aurait alors fallu agir dès le départ, soit quelques décennies plus tôt. Avec le virus, les effets étant immédiats, on a su réagir rapidement.

Comment faire pour que non seulement les dirigeants mais aussi la société entendent ce que la science a à dire, et dans toute sa complexité ? Sommes-nous condamnés à attendre qu’il soit trop tard pour agir ?

 Dans le domaine du climat et de la santé, la recherche a besoin d’être encouragée, soutenue, respectée et écoutée. En effet, je reproche un peu aux citoyens et aux décideurs d’écouter de loin le message de la science en disant : « vous nous embêtez là, on verra bien quand la catastrophe adviendra ». Pour la pandémie, la situation a été différente puisque le problème et ses répercussions étaient là quasiment de suite.

Les 30 dernières années ont démontré la solidité de la communauté scientifique du climat. Je continue de plaider pour qu’on accorde une crédibilité à la parole des scientifiques. De plus, la recherche a également besoin d’un soutien important. Il est nécessaire de maintenir des recherches qui peuvent paraitre inutiles pendant des décennies. J’ai l’impression que tant qu’il n’y a pas eu de problème, l’épidémiologie était oubliée et que cette dernière ne disposait pas de mécanismes d’alerte aussi développés que ceux existant pour le climat.

La communauté scientifique doit pouvoir alerter tant en son sein que vers le reste de la société. La mise en place du GIEC va dans ce sens. Je pense que l’épidémiologie ne dispose pas encore d’une base commune équivalente au GIEC pour le climat. Il faudrait avoir pour l’OMS une synthèse commune des risques encourus par la communauté internationale sur les questions de santé. On peut rétorquer que le GIEC ne suffit pas.  Pourtant, en 2018, ce dernier a dit que l’objectif 1 ,5°C requiert d’atteindre la neutralité carbone d’ici 2050. Et 3 ans après, l’objectif de neutralité carbone est inscrit dans les projections et les objectifs de plus de 80 pays. On trouve parmi eux, les États-Unis de Joe Biden, l’Union européenne et la Chine qui se fixe cet objectif pour 2060. C’est quand même fort de voir qu’en 2 ans cet objectif a été inscrit dans les textes. Mais il reste encore un écart énorme entre les textes et la réalité puisqu’il faut multiplier par 5 nos efforts d’ici 2030 afin de rester, à long terme, sous le seuil de 1,5°C de réchauffement planétaire.

La pandémie a mis en lumière la complexité des indicateurs à prendre en compte afin de prendre une décision. Est-ce la même chose pour le climat ?

Il suffit de regarder le plan de relance. Il se dit vert pour 30 milliards d’euros tandis que les 70 autres milliards contribueront clairement à des augmentations des émissions de gaz à effet de serre bien que l’État affirme le contraire. Le haut-conseil pour le climat l’a bien indiqué. L’ambition de ce plan est de sortir du bourbier des secteurs comme l’aérien ou l’automobile, or il faudrait changer notre mode de fonctionnement et se projeter dans l’avenir. On ne le fait jamais alors qu’on sait depuis 30 ans que ces secteurs posent des questions en termes de gaz à effet de serre. Ce qu’on fait dans la réalité est contraire au message des scientifiques qui appellent à plus de sobriété et à augmenter l’efficacité énergétique. Certes ce plan vise à sauver des pans entiers de l’industrie, mais il risque de contribuer à une augmentation de nos émissions de gaz à effet de serre.  

L’argent reste central. On sait bien que ne pas agir coûte plus cher que des politiques de prévention et d’anticipation. Pensez-vous que pour le climat la leçon aura été retenue ?

Pour le climat, c’est très clair depuis le rapport Stern de 2005 qui disait que l’inaction climatique coûtera plus cher que d’agir dès à présent pour lutter contre le réchauffement. Les derniers rapports du GIEC confirment que ne rien faire entraînera des coûts importants pour s’adapter et que cela sera tout bonnement impossible dans certaines régions. Mais, le long-terme reste sacrifié au profit du court-terme. Ce dernier n’est pas qu’électoraliste, les gens tiennent à garder leurs emplois.

Une vraie vision politique prend en considération le moyen et le long terme, elle envisage une transition écologique porteuse de développement et d’emplois. Le manque d’anticipation constitue la marque d’un manque d’esprit politique. De telles projections semblent difficiles, voire impossibles, dans le système politique dans lequel nous vivons. Ce qui fait que le système chinois, qui est autoritaire et laisse peu de place aux choix individuels, apparaît plus capable d’anticiper l’avenir car il y est possible de programmer sur des échéances longues.

En France, nous n’avons même plus de plan. L’anticipation est essentielle, pourtant elle nous manque. À chaque fois dans les textes et les discours, la lutte contre le dérèglement climatique est la priorité. Et, elle devrait l’être car le réchauffement exacerbe tous les autres problèmes, pas que ceux environnementaux.  Toutefois, la réalité est que, à chaque fois, il y a quelque chose de plus prioritaire comme les emplois, le bien-être des gens, la satisfaction de la consommation ou la possession d’une grosse voiture. Le climat se voit toujours relégué au rang de deuxième priorité.

Dans la pandémie, l’accent a été mis sur le vaccin, ne craignez-vous pas que pour le climat, on se repose trop sur les technologies au détriment des mesures comportementales ou de réduction de notre impact comme la sobriété ?

C’est ma crainte ultime, celle de de l’écologie dite réparatrice. Elle consiste à dire et à croire qu’on pourra toujours trouver les solutions une fois que le problème sera là. Penser qu’on pourra arrêter l’élévation du niveau de la mer, par exemple, est une erreur.

Bien sûr, la technologie et l’innovation ont un rôle à jouer. Mais, elles n’ont de sens que si elles sont évaluées en termes de cycle de vie et en fonction de leur non-contribution au réchauffement climatique. Il ne faut mettre en œuvre que les innovations qui vont dans le bon sens, celui de la transition écologique et de la réduction des émissions de gaz à effet de serre. L’innovation et la recherche ne doivent pas porter que sur la technologie. Il faut qu’elle soit aussi sociétale et culturelle.

Les gens aspirent à avoir des emplois et avoir une certaine qualité de vie. Ces demandes doivent guider la transition de nos sociétés tout en tenant compte de l’impératif climatique. Ce sera certainement des sociétés plus sobres avec plus de liens entre les individus, avec plus d’éducation, avec plus d’innovations sociétales et culturelles. Les paramètres de qualité de vie se montrent important pour obtenir l’adhésion des populations à la lutte contre le réchauffement et donc à son succès. Or, le dérèglement climatique accroît les inégalités et des sociétés plus inégalitaires peinent à lutter contre le réchauffement.

Comment s’assurer de l’acceptabilité sociale sur les mesures de lutte face aux changements climatiques sachant que les résultats ne seront pas visibles de sitôt ?

À l’image de ce qui a été entrepris dans la lutte contre la pandémie, on peut employer les grands moyens. En France, il faudrait mettre 20 milliards d’euros supplémentaires chaque année afin de lutter efficacement contre le réchauffement.

Cette somme correspond à ce que l’État met actuellement sur la table chaque semaine pour faire face à la crise sanitaire et économique. Il faut injecter de l’argent dans la transition. Je rappelle ce slogan du Pacte finance climat européen : on a bien su trouver 1000 milliards pour sauver les banques, on peut donc bien mettre 1000 milliards au niveau européen pour sauver le climat. La transition écologique est inéluctable. Les jeunes n’accepteront pas de vivre dans un monde à + 4 ou + 5 degrés. De plus, les pays s’engageant dans cette transition y gagneront économiquement. L’économie basée sur les énergies fossiles est un modèle du passé. Il faut accepter d’aller vers un modèle économique différent dans lequel le PIB arrêtera de croitre tout en ayant des emplois et une meilleure qualité de vie.

Au Pays basque, l’exil sans bruit des locataires
Chloé Rébillard
www.lemediatv.fr/articles/2021/au-pays-basque-lexil-sans-bruit-des-locataires-xKwcgJQNRZqKqItQdx1Jmwi

Avec la crise sanitaire, les prix de l’immobilier ont encore augmenté au Pays basque. Tandis que les plus belles villas s’arrachent à prix d’or, de nombreux travailleurs sont forcés de quitter leur lieu de vie.

« C’est rageant. On a du travail, mais on est obligés de partir pour avoir un toit sur la tête. Avec quatre enfants, c’est le plus important. Mais j’en ai pleuré ». L’année passée, Elodie et son conjoint ont dû quitter la maison d’Urrugne qu’ils louaient lorsque le propriétaire a souhaité la récupérer. Après avoir écumé les annonces, ils se sont résolus à déménager à 1h30 de leur lieu de vie, à côté de Mont-de-Marsan (Landes), et à démissionner de leurs emplois en CDI, lui de cuisinier chef de partie, elle d’auxiliaire de vie.

La crise du logement, latente au Pays basque depuis des années, connaît une phase particulièrement violente avec la crise du Covid. Les prix déjà très élevés du foncier et de l’immobilier se sont encore envolés, jusqu’à atteindre des sommets : à Biarritz, un appartement vue sur mer s’est vendu en décembre 2020 pour plus de 40 000 euros le mètre carré.

Et les conséquences de cette frénésie affectent tout le secteur du logement : les prix augmentent sur des zones toujours plus vastes, le marché privé devenant inaccessible pour les plus précaires mais aussi pour les classes moyennes locales, qui souhaiteraient se loger près du lieu où elles sont employées. Le marché des résidences secondaires, qui s’adresse à des personnes avec de hauts revenus issues des grandes métropoles, fait monter les prix sur l’ensemble du logement, excluant les populations qui y vivent à l’année et qui y travaillent. Des allées de volets, fermés dix mois par an, face à une population qui ne peut plus se loger.

Le mirage du logement neuf

Si elle continue de chercher à revenir au Pays basque, Elodie Marot n’a plus beaucoup d’illusions : « Il n’y a rien sur le marché. Sur la côte, les loyers sont inadmissibles : 1 500 euros par mois pour un T3 sans jardin… A l’intérieur du Pays basque, pour les quelques biens qui restent, il y a toujours de meilleurs dossiers que le nôtre. » Sur la cinquantaine de dossiers envoyés, le couple n’a décroché que deux visites sans résultat. De plus en plus de personnes se retrouvent dans cette situation et doivent s’éloigner de la côte basque, qui regroupe les principaux centres d’emploi locaux. « Les communes rétro-littorales (Saint-Pierre d’Irube, Ustaritz, Arcangues, Arbonne, Bassussarry, Ascain…) ont connu une poussée démographique importante liée à la recherche de logements et de terrains plus abordables » (1), relevait dès 2015 Benjamin Gayon, docteur en aménagement du territoire.

Le fossé se creuse encore, et tandis que certains peinent à déposer des dossiers, des biens à plus d’un million d’euros s’arrachent au prix fort, sans crédit, en une seule journée. Les maires se sont bien emparés de la surtaxe sur les résidences secondaires, inaugurée en 2015, qui permet d’augmenter jusqu’à 60 % la part communale de la taxe d’habitation sur les maisons de vacances. Mais plusieurs années après sa mise en place, l’effet dissuasif reste minime, note Peio Etcheverry-Ainchart, conseiller municipal d’opposition à Saint-Jean-de-Luz et membre de la coalition de gauche indépendantiste EH Bai : « Elle n’est pas assez dissuasive. On a vu à la marge quelques propriétaires revendre leurs biens car ils ne voulaient pas payer la surtaxe. Mais il faut taper plus fort ».

Comment résoudre le problème ? Les édiles locaux continuent de vouloir construire, espérant combler la pénurie de logements disponibles avec du neuf. Le nouveau Programme Local de l’Habitat (PLH) pour le Pays Basque Nord, actuellement en cours d’élaboration, prévoit 2 600 nouvelles constructions par an pour les six prochaines années. Mais la stratégie est critiquée. À Hendaye, Pascal fait partie d’un collectif de riverains qui s’oppose au projet immobilier dans leur quartier : « Combien de ces logements iront aux Hendayais, vu les prix ? On continue de construire alors que des quartiers entiers sont vides l’hiver », explique-t-il. D’après lui, la prairie aux chevaux que visent les constructeurs devrait rester un espace naturel, où les habitants pourraient profiter de jardins familiaux.

Pour Beñat Etchebest, agent immobilier pendant 18 ans et fondateur de l’association Etxalde, qui milite pour l’accès au logement en constituant « un patrimoine immobilier commun », les élus sont mal informés et des mythes tenaces empêchent de prendre clairement conscience de la situation :

« Le premier, c’est que face à la demande de logement, il faudrait construire des maisons. Cela peut paraître logique mais aujourd’hui, sur le territoire, nous disposons de 198 000 logements pour 300 000 habitants : c’est suffisant. Deuxième mythe : les maisons secondaires font vivre les populations locales. C’est peut-être vrai pour les artisans mais c’est faux pour le reste de l’économie : si une maison est fermée 11 mois de l’année, il n’y aura qu’un boulanger là où il pourrait y en avoir douze. À Biarritz, par exemple, on ferme des écoles. »  Peio Etcheverry-Ainchart abonde et parle d’un : « manque artificiel : les logements existent mais ils sont sous-utilisés ».« Une catégorie de population ne peut pas en exclure une autre sous prétexte qu’ils ont les moyens de laisser leur logement vide pendant l’année et de l’occuper seulement un mois pendant les vacances », tance l’élu local.

« Il faut sortir du paradigme de la propriété privée »

Une seule ville basque respecte les pourcentages de logements sociaux imposés par la loi SRU : Bayonne. Les autres font plus ou moins bien selon les communes, avec Biarritz en lanterne rouge. Mais le mode de calcul même du taux de logement social empêche de saisir l’ampleur du problème : ce taux n’est calculé que sur le nombre de résidences principales. Les résidences secondaires, totalement exclues du calcul, constituent un angle mort de la loi SRU. Ainsi, dans les villes où près de la moitié du parc de logement est secondaire, tels que Guéthary ou Saint-Jean-de-Luz, il faut diviser par deux le taux officiel pour approcher de la réalité. Et avec la pénurie actuelle, les délais d’attente avant l’accession aux logements sociaux se comptent en années. À Saint-Jean-de-Luz, Ambre essaie depuis 4 ans d’obtenir un T3. Cette mère séparée, actuellement logée dans un T2 dans le privé, accueille son fils de 13 ans en garde alternée une semaine sur deux, avec une seule chambre. « Je n’ai rien à reprocher à mon appartement, il est très bien. Il lui manque juste une chambre », confie-t-elle. Les revenus de cette travailleuse de la restauration, qui a pris une mission d’ouvrière depuis la crise du Covid, oscillent entre 1500 et 1800 euros mensuels, sans contrat stable. Impossible dans ces conditions de trouver un T3 dans le privé, trop cher. Mais la pénurie de logement social lui bloque aussi l’accès aux HLM : « Dans le dernier dossier que j’ai présenté, on m’a répondu que je gagnais trop d’argent. » Désabusée, elle hésite à continuer les démarches ou à se résigner à dormir dans le salon.  Outre les logements sociaux locatifs, il existe bien l’accession sociale à la propriété, qui permet à des personnes à faibles revenus d’acquérir auprès des offices HLM des logements à moindre coût. Mais celle-ci pose un problème de taille : quand les logements sont revendus, ils sortent du parc des logements sociaux et sont reversés sur le marché privé. Il n’est pas rare qu’un bien vendu en accession sociale devienne, une dizaine d’années plus tard, une résidence secondaire.  Pour éviter cette situation, le Comité Ouvrier du Logement (COL) a mis en place un bail réel solidaire début 2020. Le principe : dissocier le foncier (le terrain) de l’immobilier (les murs). Les acheteurs en accession sociale n’acquièrent que le bâti, le terrain reste la propriété de l’organisme et s’ils veulent revendre, ils sont obligés de le faire au sein du COL. Ainsi, le logement échappe à la spéculation immobilière. Des appartements ont déjà été vendus selon ce principe à Espelette, d’autres sont en cours d’aménagement.  Du côté d’Etxalde, l’association qui doit se transformer sous peu en coopérative, une autre solution est proposée. « Les prix augmentent quand les biens sont vendus », détaille Beñat Etchebest. Il propose donc d’éviter que les logements se retrouvent sur le marché. Pour cela, Etxalde se porte acquéreur de logements puis installe des personnes qui ne paient que l’usufruit, et le transmettent si elles le souhaitent à des héritiers : « Il faut créer une personne morale pour que le bien ne soit pas remis à la vente. » Déjà propriétaire d’un immeuble à Mauléon, dans les terres, Etxalde est en train d’acquérir un nouvel appartement à Anglet, sur la côte. Le fondateur en est convaincu :« Il faut sortir du paradigme de la propriété privée. On ne peut pas fabriquer une France de propriétaires ».  La Fondation Abbé Pierre alarme sur de véritables « bombes à retardement » : suite à la crise sanitaire, un nombre croissant de Français n’est pas parvenu à faire face aux dépenses de logement. Dans un territoire tendu, où rien ne semble pouvoir freiner la sensationnelle ascension des prix et où 25 % des locataires consacrent plus de 40 % de leur revenus au loyer, la situation pourrait devenir explosive. Elodie Marot et son conjoint, désormais sans emploi et loin de leur territoire, ne voient pas le bout du tunnel. Leur fils de quatre ans, lui, réclame tous les jours la mer auprès de laquelle il a grandi.

(1) Benjamin Gayon, « Le foncier au Pays basque, un territoire d’expérimentations ». Éditions Elkar, 2015.

Gure auto fabrika gelditu behar dugu, COVIDagatik eta Taiwanen lehortea daukatelako
Pello Zubiria Kamino
www.argia.eus/argia-astekaria/2727/gure-auto-fabrika-gelditu-behar-dugu-covidagatik-eta-taiwanen-lehortea-daukatelako

Urtarril amaieran Gasteizko Mercedes konpainiako zuzendaritza langileen ordezkariekin bildu zen ohartarazteko fabrikako ekoizpen-katea eten beharko zutela autoentzako hainbat pieza elektroniko eskuratu ezinik zebiltzalako –zehazki, txip elektronikoak–.  Bi hilabete beranduago, martxoaren 27an produkzioa eten behar izan du. Antzeko egoeran aurkitu dira mundu osoan Volkswagen, Ford, Nissan, Toyota, Honda eta gainerako gehienak.

Airbag-ak, haizetako-garbigailuak, motorraren kudeaketa elektronikoa, edozein kotxek gaur daraman barne-ordenagailua, aparkatzeko sentsoreak, leihoetako beira-jasogailua… denak daramatzate mikrotxipak, sarritan 100 baino gehiago. Sofistikatuak bezain merkeak, baina munduaren beste muturretik ekarri beharrekoak.

Erdieroale elektronikook, prefosta, teknologia berriz osatutako tramankulu guztien barrunbeetan ere badaude, gero eta gehiago, eta horien eskasiaren zantzuak azaldu ziren 2020an:  Applek bere azken iPhone berria epeka merkaturatu behar izan zuen, Xbox eta PlayStation kontsola berrien zain zeuden guztiak ezin ase… Tartean, Samsung eta Qualcomm bezalako txip hornitzaileek aurreratu zuten enkarguak osatu ezinik ari zirela. Urte amaierarako ‘txip idortea’ automoziora hedatua zen eta prentsa hasi zen aipatzen ‘txipen Armagedon’ baten arriskua.

BBCn teknologia gaien editorea den Leo Kelionek idatzi duenez, “gaur munduan oker dabiltzan beste gai askotan bezala COVID-19 pandemiak dauka honen erruaren parte bat”. Koronabirusagatiko itxialdiagatik asko handitu zen bai lanerako eta bai aisialdirako tramankulu elektronikoen salmenta, baina beste eskuarekin pandemiaren hasierak kotxe berrien salmentak hondoratu zituen eta autogintzako industriak beste osagai guztienekin batera txip elektronikoen eskariak ezabatu zituen.

Alabaina, 2020ko amaiera aldean autoen eskaria espero baino azkarrago berotu zen berriro eta industria berriro pieza eske hasi zenerako mikrotxipen ekoizle nagusien fabrikazio-kateak beste produktuetan zerabiltzaten buru-belarri: ordenagailu, telebista, ‘smartphone’… Eta hori gutxi balitz, 5G azpiegiturek hartu duten abiadurarekin hortik ere eskaria handitua zitzaien. Ororen buru, aditu batzuek uste dute gutxienez 2021eko uda pasa arte ez dela txipen eskasia gaindituko.

Eguneroko tresnerietan ohikoak bihurtu diren pieza elektroniko merkeon ekoizpenak inplikazio geopolitikoak ere baditu, asko orain jabetu direnez. Taiwan eta Hego Korea dira nagusi horietan: horiek ekoizten dituzte prozesatzaileen txipen %83 eta memoria-txipen %70. Petrolioarentzako LPEE Lurralde Petrolio Esportatzaileen Erakundea izan zena dira gaur Taiwan eta Hego Korea, txipen ekoizle monopolistak, guztien artean nagusi TSMC Taiwan Semiconductor Manufacturing Company.

AEBen eskuetan dago merkatuaren beste %22 eta Europarena da %8. Europak erraz egin dio uko erdieroaleen ekoizpenari, hain merkeak izanik oso etekin txikia eskaintzen diotelako fabrikatzaileari eta orain ikusi da horietan datzala industria europarraren ahulezia handietako bat, uneotan oso nabarmenki baldintzatzen duena autogintza baina baita digitalizazioan aitzindari izan nahi duen ekonomia osoa ere.

Bestalde, Taiwanek ekonomiaren osagai klabe horren ekoizpenean daukan nagusitasunak areagotu baizik ez du egiten Txinak uhartea estu kontrolatzeko daukan nahia. Taiwanek erdiz-erdi ukitzen du nazionalismo txinatarraren bihotza, baina gainera honen ekonomian ere garrantzia berezia dauka uharteak bere mikrotxipekin. Nazioarteko zenbait adituk Taiwanen aurreikusten dute AEBen eta Txinaren arteko hurrengo talka bortitza.

Beraz, COVID-19ak ekarritako astindu eta aldaketak, tartean ekonomiaren digitalizazioan eragin duen jauzia, aski lirateke mikrotxipen krisia esplikatzeko. Baina beste faktore bat ere suertatu da: Taiwanek azken urteotan bizi duen lehorte handia. Zer dauka ikusteko, ordea, ur faltak silizio idorrez egiten diren mikrotxipekin?

Nora joan dira tifoiak?

Kurt Cobb energia eta lehengaietan berezitutako kazetariak idatzi du Resource Insights blogean:  “Inork gutxik pentsa zezakeen gerta zitekeenik egun batean Taiwan bere industriarentzako ur faltan aurkitzea”. Taiwan uhartea Itsaso Barean Kantzer tropikoan dago eta urtean metroko 2.500 litro jasotzen ditu euritan, horietako asko orain arte urtean hirutan zihoazkion tifoiek ekarriak. Baina 2020an ez zaie tifoi bakar bat iritsi. Zientzialari batek azaldu duenez, Ozeano Barearen eta Asiako hego-ekialdearen artean kokatu diren presio altuek halako hesi bat osatu dute Taiwanen inguruan, tifoiak Japonia eta Hego Korearantz desbideratuz. Aurreikusten dute mende amaierarako batez beste orain arteko tifoien erdiak iritsiko zaizkiela.

Oraingo idorte honek gogor kolpatu ditu Taiwango nekazariak, asko soro eta baratzeak ureztatu ezinik dabiltza. Baina erdieroale elektronikoen industria ere behar adina ur barik dabil. China Water Risk erakunde txinatarrak dioenez, ur hornidura funtsezkoa du industria honek. Erdieroaleak siliziozko opil gisako olaten gainean eraikitzen dira, geruzatan, aldi oro ur ultra-puruz –UPW ingelesezko sigletan– garbituta. Iturriko ura baino milaka aldiz puruagoa izan behar duen UPW honetatik 1.000 litro edukitzeko 1.400-1.600 litro iturriko ur behar dira.

Zirkuituz osatutako Siliziozko 30 cm-ko olata tipiko bat egiteak eskatzen ditu 6-600 UPW ur. Beraz, hilabetean 40.000 olata ekoizten dituen fabrika batek egun bakarrean xahutu ditzake urte betean 60.000 biztanleko herri batek behar duen ur guztia.

Bide batez esanda, mikrotxipen industria ur-kontsumoan bezain intentsiboa da energi-kontsumoan. China Water Risken kalkuluetan, fabrika bakar batek irentsi ditzake 30-50 Megawatt argindar, hiri txiki bat asetzeko adina.

Egia da beharrak eraginda industria honek ere hobetu duela uraren kudeaketan, ur bera berrerabiliz eta abar. Baina Kurt Cobbek aipatu du Bloomberg agentziak –ekologistatik deus gutxi duenak– emandako datu hau: munduan erdieroaletan munduko bigarrena Taiwan Semiconductor Manufacturing Companyk egun bakar batean kontsumitzen dituela 156.000 tona ur, usina nagusia daukan eskualdeko ur guztiaren %10.

Taiwan gai izan da txipok konkurrentziarik gabeko kalitate eta preziotan ekoiztera iristeko eta mundu osoan teknologia berrietan eta elektronikan liderrak diren konpainiek taiwandarrei azpikontratatu dizkie. Orain, ordea, Mendebaldean automozioak darabiltzan buruhausteek erakutsi dute ‘just-in-time’ funtzionatzen ohitutako kate globalaren ahulezia.  Sistema badabil, bai…gelditzen den arte.

“Taiwaneko idorteak –dio Kurt Cobbek– erakusten du zer gerta daitekeen elkar hartzen dutenean hainbat arriskuk: klimaren aldaketa, hil ala biziko industria gune grafiko batean biltzea, azpi-kontratazioa, nazioarteko tirabirak eta hornidura-kateen ahultasuna”.