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Articles du Vendredi : Sélection du 18 mai 2012

La Via Campesina appelle toutes les organisations paysannes du monde ainsi que ses alliées et alliés à organiser des actions au cours du mois de juin.

Via Campesina
http://viacampesina.org/fr/index.php?option=com_content&view=article&id=698:rio20-journee-internationale-de-luttes-les-peuples-du-monde-contre-la-marchandisation-de-la-nature&catid=46:changements-climatiques-et-agrocarburants&Itemid=71

Triste tropisme

Valéry Laramée de Tannenberg
www.journaldelenvironnement.net/article/triste-tropisme,29042 – 15.05.2012

L’environnement en mal de campagne

Bruno Genty, président de France Nature Environnement
Le Monde – 11.05.2012

La Via Campesina appelle toutes les organisations paysannes du monde ainsi que ses alliées et alliés à organiser des actions au cours du mois de juin.

Via Campesina
http://viacampesina.org/fr/index.php?option=com_content&view=article&id=698:rio20-journee-internationale-de-luttes-les-peuples-du-monde-contre-la-marchandisation-de-la-nature&catid=46:changements-climatiques-et-agrocarburants&Itemid=71

L’avancée du système capitaliste qui, pendant les deux dernières décennies, est arrivée à des dimensions inédites, conduit à des crises tout aussi inédites. Les crises financière, alimentaire, énergétique et environnementale sont les visages multiples de la crise structurelle du capitalisme, qui ne connaît pas de limites dans sa quête de profits. La crise structurelle actuelle, comme d’autres crises de cette sorte, touche les peuples du monde mais laisse indemnes les élites et les grandes sociétés.

Sur tous les continents, nous avons vu que, même pendant la crise, l’élan du capitalisme n’a pas diminué. Car nous constatons les accaparements illégaux des terres par des sociétés étrangères, l’avance de l’industrie extractive (minière et pétrolière), les cultures génétiquement modifiées de plus en plus présentes dans les champs, les agro-carburants, les pesticides vendues à une échelle gigantesque. En fin de compte, la crise du capitalisme ne veut pas dire que le système fait volte-face. Au contraire, c’est à ce moment précis, qu’il avance avec le plus d’intensité, parce que les entreprises profitent de la crise pour étendre leur domination aux territoires qui n’ont pas encore été conquis.

La Conférence Rio + 20 en est un exemple clair. Au lieu de rassembler les gouvernements du monde entier pour trouver de vraies solutions à la crise environnementale, cet événement servira à consolider les fausses solutions aussi bien que l’accaparement des territoires des paysannes et paysans, ainsi que des peuples premiers. A la Conférence de l’ONU, il n’y a que les intérêts des grandes sociétés qui trouveront leur place.

Afin de résister à ces intérêts et à les confronter, il est fondamental que les peuples du monde continuent à renforcer leurs organisations et leurs luttes, qu’ils élèvent leur voix et qu’ils démontrent que seulement la souveraineté populaire offre de réelles solutions.

Ainsi, en tant que Via Campesina , nous demandons à nos organisations membres et à nos alliées et alliés d’organiser et de coordonner des luttes pendant tout le mois de juin, principalement durant la Journée internationale de l’environnent, le 5 juin. De cette manière, nous démontrerons notre unité et notre force afin d’envoyer à l’avance, de partout dans le monde, un message radical aux représentants des gouvernements qui se réuniront à Rio + 20, du 20 au 22 juin, à Rio de Janeiro, Brésil.

Chaque lutte, chaque résistance, chaque territoire que nous récupérons doit être l’expression de cette unité mondiale devant l’offensive du système capitaliste contre la nature.

 

 

Parallèlement à la Conférence officielle, nous, les peuples du monde, serons réunis au Sommet des Peuples, dans un processus de construction collective et de mobilisation permanente. Au cours de la semaine du 18 au 22 juin, il y aura aussi une période de mobilisation mondiale, car notre tâche ne se situe pas seulement à Rio de Janeiro. En effet, nous devons poursuivre les luttes dans notre propre pays, particulièrement lors de la journée inaugurale de la Conférence officielle, le 20 juin. Cette période de luttes sur tous les continents devrait se répercuter à Rio de Janeiro et dans le monde entier.

Nous convoquons toutes les organisations paysannes et leurs alliée et alliés à organiser des mobilisations et des actions partout dans le monde : des marches dans les villes ou dans les campagnes; des conférences de presse; des actions pour demander la Réforme agraire et l’accès à la terre; des campagnes de communication; des programmes de radio; des mobilisations contre les entreprises responsables de la dégradation environnementale; des débats dans les écoles et les universités; des projections de films documentaires; et d’autres actions que vous organiserez collectivement chez vous.

Au moment où le capitalisme veut mondialiser davantage son système, dominer nos territoires et exploiter notre main d’oeuvre, nous devons internationaliser notre lutte. Nous allons nous organiser, préparer des actions, faire appel à nos bases et à nos alliés pour cette grande journée de lutte contre le capitalisme. La force de notre journée de luttes viendra de notre capacité de nous organiser et d’atteindre une visibilité nationale et internationale.

Nous vous demandons de nous informer de vos actions à l’adresse électronique suivante : lvcweb@viacampesina.org

Non aux fausses solutions du capitalisme vert

Pour l’agriculture paysanne!

Globalisons la lutte. Globalisons l’espoir.

Triste tropisme

Valéry Laramée de Tannenberg
www.journaldelenvironnement.net/article/triste-tropisme,29042 – 15.05.2012

Alors que débute la saison des sommets internationaux, le WWF rappelle que nos modèles de développement restent désespérément insoutenables. Une contrainte que devront prendre en compte les plans de relance qui ne manqueront pas de fleurir dans les mois qui viennent.

Les sommets internationaux sont des occasions rêvées d’interpeller les chefs d’Etats et de gouvernement. A cet égard, les activistes de tout poil vont pouvoir se déchaîner dans les semaines qui viennent, car les maîtres du monde se retrouveront à l’occasion des sommets de l’Otan (Chicago), du G8 (Camp David), du G20 (Los Cabos). Sans oublier le 4e sommet de la terre: Rio + 20.

Tout naturellement, le WWF profite de cette fantastique fenêtre de tir médiatique pour publier son désormais célèbre Planète Vivante. Publié tous les deux ans, ce rapport établit un état des lieux de la planète, toujours plus sombre à chacune de ses livraisons.

Et l’opus 2012 n’échappe pas à la règle. Rédigé en collaboration avec la société zoologique de Londres et le réseau Empreinte écologique globale, le document du WWF met, cette année, le doigt sur les conséquences de notre croissance démographique.

A commencer par les dégâts collatéraux provoqués par notre demande croissante de nourriture. Sur tous les continents, les investisseurs achètent des terres arables à tour de bras pour sécuriser leur accès aux ressources agricoles. «Depuis le milieu des années 2000, la superficie concernée par ces acquisitions foncières est équivalente à celle de l’Europe orientale», indique l’organisation écologiste.

Cette consommation effrénée d’espaces contribue évidemment au recul de la biodiversité. Pour poser leur diagnostic sur l’état de santé des écosystèmes de la planète, les auteurs de la 9e édition de Planète Vivante utilisent l’indice éponyme (IPV).

Cet IPV est calculé à partir de séries chronologiques de données sur plus de 9.000 populations représentant plus de 2.600 espèces de mammifères, d’oiseaux, de reptiles, d’amphibiens et de poissons du monde entier. Les changements au niveau des populations de chaque espèce sont agrégés et indiqués sous la forme d’un indice par rapport à 1970, ayant attribué à cette donnée de référence la valeur de 1. Il peut être perçu comme l’équivalent biologique de l’indice boursier qui suit l’évolution de la valeur d’un ensemble de titres et d’actions négociés en bourse.

Et le moins que l’on puisse dire, c’est que les valeurs vertes accusent une forte baisse. L’IPV global indique un déclin de 30% depuis 1970, les écosystèmes tropicaux étant les plus touchés avec une baisse de 60% en moins de 40 ans.

Une évolution dont les hommes pâtissent. Quelques semaines après le forum mondial de l’eau, les experts consultés par le WWF rappellent que 2,7 milliards d’être humains vivent dans des bassins fluviaux connaissant de graves pénuries d’eau pendant au moins un mois de l’année. Sans infléchissement de nos trajectoires de consommation, complètent-ils, l’objectif de stabiliser le réchauffement climatique à 2°C ne pourra, en aucun cas, être atteint. Avec de nombreux dommages à la clé: acidification des eaux marines, montée du niveau des mers, fonte des glaces telluriques, réduction de la biodiversité marine et terrestre, sécheresse en Amazonie, multiplication des rétroactions positives…

Rien de nouveau, diront les observateurs. Vrai. Et c’est peut-être l’aspect le plus inquiétant soulevé par ce document. Car, bien que ces conséquences de notre développement soient dénoncées depuis des années, rien ne semble pouvoir faire dévier notre trajectoire destructrice.

«Nous vivons comme si nous avions une autre planète à disposition. En un an, nous utilisons 50% de ressources de plus que ce que la Terre peut régénérer dans ce même laps de temps. A moins que nous changions drastiquement de cap, cela va continuer à augmenter et d’ici 2030, deux planètes ne suffiront même plus», résume Jim Leape, directeur général du WWF International.

Les pays les plus anciennement développés comptent parmi les plus grands prédateurs d’espaces et de ressources naturelles. Globalement, l’empreinte écologique mondiale atteint 2,7. Ce qui signifie que chaque terrien doit disposer de 2,7 hectares pour satisfaire ses besoins les plus essentiels. Les Africains ne disposent que de 1,45 ha, contre 2,45 pour les natifs du Moyen orient, 1,63 pour les habitants de l’Asie-Pacifique, 2,7 pour les Latino-américains, 4,72 pour les Européens de l’UE (4,05 pour les autres Européens) et 7,12 pour les Nord-américains.

Comme pour ses finances, le Français vit très au-dessus de ses revenus naturels: 4,91 ha par personne. Soit autant que le Grec, mais moins que le Danois (8,25) ou le Belge (7,1).

L’empreinte écologique des pays à hauts revenus est 5 fois supérieure à celle des pays à bas revenus. Sans réelle surprise, les 10 pays à la plus forte empreinte écologique par individu sont le Qatar, le Koweït, les émirats arabes unis, le Danemark, les Etats-Unis d’Amérique, la Belgique, l’Australie, le Canada, les Pays-Bas et l’Irlande.

Leur mauvais exemple inspire nombre de gouvernements. Les pays des BRIIC (le Brésil, la Russie, l’Inde, l’Indonésie, la Chine) et les pays à revenus intermédiaires ont accru leur empreinte écologique par habitant de 65% depuis 1961.

Dénonciateur, le rapport se veut aussi constructif. Le WWF fixe ainsi 16 actions prioritaires qui pourraient stopper la dégradation de notre environnement global, en préservant le capital naturel, réduisant le gaspillage et consommant moins.

Reste à savoir si elles figureront dans les plans de relance économique qui devraient fleurir un peu partout dans le monde, au cours des prochains mois.

L’environnement en mal de campagne

Bruno Genty, président de France Nature Environnement
Le Monde – 11.05.2012

Cette fois c’est fait ! Malgré nos efforts, l’environnement aura été le parent pauvre de cette campagne. Pas une seule fois il ne s’est imposé comme une phase de campagne, au même titre que l’économie, l’éducation, la sûreté intérieure, ou même le permis de conduire.

Les candidats n’ont pas brillé pendant ce débat d’entre-deux tours sur les thématiques environnementales, c’est le moins qu’on puisse dire. François Hollande a cité une fois l’environnement, Nicolas Sarkozy aucune. Le président-candidat s’est d’ailleurs contenté pour l’essentiel, pendant cette campagne, de considérer le Grenelle de l’environnement comme l’alpha et l’oméga de l’écologie, comme si tout était résolu d’un coup de baguette magique et que l’environnement « ça commençait à bien faire ». Du côté de l’aspirant-président, il semble qu’il reste encore à construire une culture environnementale plus étayée. Qu’il s’agisse de nucléaire et plus largement de stratégie énergétique, de TIC flottante (ex-TIPP) ou de Notre Dame des Landes, on sent qu’il va falloir encore convaincre, même si le terreau semble fertile.

On ne peut pas dire à proprement parler que l’environnement ait été absent, ne serait-ce que grâce à notre événement du 28 janvier, notre appel des 3000 pour un Contrat Environnemental, où des engagements clairs on été pris au moins par M. Hollande : agenda environnemental et feuille de route environnementale, pour tous les ministères, en tête de gondole. Il est regrettable que M. Sarkozy, pas encore candidat à cette date n’ait pas pu saisir cette occasion pour évoquer son programme environnemental. Pour le reste, tout au long de la campagne, nous n’avons eu droit qu’à un environnement dilué, évanescent. Quelques touches de vert espoir dans un océan de grise austérité.

L’écologie discrète, diffuse, sera-t-elle plus efficace que l’écologie massive ? L’écologie des petits pas doit-elle s’incarner partout à la fois ou doit-elle se cristalliser en un lieu de pouvoir fort? Concrètement, doit-on choisir entre : « chaque ministre doit être écolo-compatible » , « le premier ministre doit être écolo-compatible », « le premier ministre doit s’appuyer sur un ministère de l’écologie très fort et aux fonctions élargies » ou tout cela à la fois ?

Les programmes et la compilation des engagements de campagne de l’un et de l’autre des deux candidats sont plus riches que ce qui est apparu dans le débat d’entre-deux tours mais l’environnement y semble tellement dilué qu’il y perd tout son goût et sa saveur. A force d’être partout on fini parfois par être nulle part. L’environnement reste le parent pauvre de cette triste campagne sans horizons.

Si l’écologie et la défense de l’environnement doivent être une partie intégrante de la solution à la crise économique, écologique et sociale, alors ils doivent s’imposer partout et d’abord à Bercy. Rappelons quelques éléments de notre « kit écologique de sortie de crise », promu dans notre appel des 3000 : création de nouveaux emplois durables et non délocalisables dans l’éolien, le solaire, démantèlement des centrales nucléaires dans le monde, isolation et éco-conception des bâtiments, réduction drastique de nos besoins en énergie et prioritairement notre dépendance au pétrole qui s’épuise et nous ruine, allongement de la durée de vie des appareils, mutualisation des usages, réduction des subventions et exonérations fiscales accordées aux dépends de la biodiversité et de l’environnement.

Cette campagne électorale aura eu le mérite de faire la lumière partielle sur les exonérations scandaleuses accordées à certaines entreprises et secteurs économiques parmi les plus polluants de la planète. Consommation de pétrole par les transporteurs routiers qui reste le premier poste de production de pollution atmosphérique aux particules : exonéré ! Total : exonéré ! Transport aérien : exonéré !… Autant de milliards récupérables sans faire supporter cette économie budgétaire à la population déjà fragilisée et précarisée par la crise économique. Tant qu’à supprimer des niches fiscales, autant supprimer celles où se logent gracieusement les lobbys à nos dépends.

Dans l’écologie, seul le constat est douloureux. Le projet est lui extrêmement enviable, désirable et susceptible de susciter l’enthousiasme et l’élan nouveau. Un élan qui pourrait porter le changement indispensable de notre société qui ne peut plus se payer le luxe de vivre au dessus de ses moyens, à crédit, au bord de la faillite environnementale.

Pris à temps, l’avenir d’un monde décarboné et dénucléarisé, d’où les hydrocarbures sont presque absents, qui adviendra de gré ou de force, peut s’avérer un levier phénoménal pour mobiliser le pays dans un nouvel élan. Un New Deal écologique pour sortir des crises économiques et écologiques. Si nous restons inertes, accro à ces vieilles recettes qui nous ont jeté dans l’impasse, cet avenir s’apparentera plus à un mur, franchi par certains pays, mais sur lequel nous nous écraserons.

La nature se rappelle à notre mémoire, douloureusement pour celui qui n’a pas anticipé, généreusement pour la société qui aura su composer avec elle plutôt que de tenter vainement de la plier à sa volonté. Réveillons-nous, prenons-nous à rêver, l’utopie est le ferment de la réalité de demain.